Chapitre 2
L’idée avait germé dans un coin de sa tête comme une mauvaise herbe. Insensée, irréfléchie, et pourtant impossible à ignorer. Après une nuit à fixer le plafond, Lana s’était levée avec une seule certitude : elle ne pouvait pas rester là, dans cet appartement qui empestait la trahison. Ses affaires tenaient dans un sac. Pas besoin de plus.
Elle avait pris un taxi, donné l’adresse sans réfléchir, comme si son subconscient tirait les ficelles. La tour d’acier et de verre se dressait devant elle, froide et intimidante. Une main agrippant la lanière de son sac, l’autre tremblante à ses côtés, elle avait inspiré profondément avant de franchir les portes.
— Vous avez un rendez-vous ? avait demandé la réceptionniste, une femme impeccable dont le regard la jaugeait avec suspicion.
Lana avait menti. Bien sûr qu’elle avait menti. Personne ne débarquait ici sans un rendez-vous. Mais ses mots étaient sortis avec une fluidité qu’elle ne se connaissait pas.
— Alexander Storm m’attend.
Elle avait balancé ça comme une évidence, sans hésiter, et contre toute logique, ça avait fonctionné. La réceptionniste avait fait un appel rapide, murmuré quelque chose dans son micro, puis indiqué un ascenseur. Lana avait avancé comme une automate, ses jambes tremblantes sous l’adrénaline.
Le trajet jusqu’au sommet semblait interminable, chaque étage grignotant un peu plus sa détermination. Qu’est-ce qu’elle allait lui dire ? Qu’elle s’était vendue à l’idée absurde d’une vengeance sans même savoir comment ? Mais à peine la porte de l’ascenseur s’était-elle ouverte qu’un homme imposant en costume sombre l’attendait. Pas Alexander. Un assistant, probablement.
— Suivez-moi.
Elle avait obéi sans un mot, son cœur battant si fort qu’elle craignait qu’il n’éclate. Ils avaient traversé un couloir silencieux, chaque pas résonnant comme une gifle. Puis, une porte. Grande, lourde. Et derrière, lui.
Alexander Storm n’avait pas levé les yeux immédiatement. Il était assis à un bureau, ses doigts tapotant distraitement un écran, une pile de documents devant lui. Mais quand il avait relevé la tête, ce fut comme un choc électrique. Ses yeux étaient froids, calculateurs, et pourtant… il y avait quelque chose de captivant, une intensité qui semblait fouiller chaque recoin de son âme.
— Vous êtes ?
Elle avait dû lutter pour ne pas baisser les yeux.
— Lana.
Pas de titre, pas de justification. Juste son prénom, comme si cela suffisait.
— Et pourquoi êtes-vous ici, Lana ?
Sa voix était calme, posée, mais il y avait une nuance sous-jacente, un avertissement. Il n’aimait pas perdre son temps.
— Pour vous faire une proposition.
Son sourire avait été bref, presque imperceptible, mais il avait éveillé une curiosité palpable.
— Une proposition, dites-vous. Voilà qui est intriguant. Allez-y, je vous écoute.
Elle avait inspiré profondément, les mots s’assemblant à toute vitesse dans son esprit.
— Mon fiancé travaille pour vous. James. Vous le connaissez ?
Un haussement d’épaules. Bien sûr qu’il le connaissait.
— Il m’a trompée. Avec ma meilleure amie. Et maintenant, je suis là, devant vous, parce que…
Elle s’était arrêtée. Comment formuler ça sans paraître complètement folle ?
— Je veux me venger.
Ses sourcils s’étaient légèrement froncés, mais il n’avait pas interrompu.
— Je veux qu’il perde tout. Son travail. Sa fierté. Sa vie parfaite qu’il croyait inatteignable. Et vous êtes la personne qui peut le faire.
Il s’était penché en arrière, croisant les bras, son regard fixé sur elle avec une intensité qui la rendait presque inconfortable.
— Et en échange, que m’offrez-vous ?
C’était la question qu’elle redoutait. Elle n’avait rien à offrir. Rien, sauf…
— Moi.
Un silence lourd était tombé entre eux. Ses propres mots résonnaient dans sa tête, absurdes et pourtant définitifs.
— Vous ?
Son ton était neutre, mais il y avait une lueur d’amusement dans ses yeux.
— Oui. Moi. Je… Je me vends à vous.
Elle avait presque chuchoté ces derniers mots, mais ils avaient frappé l’air comme une détonation.
Il n’avait pas ri. Pas de moquerie, pas de scepticisme. Seulement un long regard qui semblait évaluer chaque centimètre d’elle, chaque nuance de ce qu’elle venait de dire.
— Vous vous rendez compte de ce que vous proposez ?
Elle avait hoché la tête, même si, au fond, elle n’en était pas si sûre.
— Très bien, Lana. Si c’est ce que vous voulez… Alors vous serez à moi.
Il s’était levé, et elle avait compris pourquoi on parlait de lui comme d’un titan. Sa présence était écrasante, son regard impitoyable.
— Mais sachez une chose, Lana. Dans mon monde, les décisions impulsives ont des conséquences. Et une fois que vous entrez, il n’y a pas de retour en arrière.
Elle avait avalé difficilement, mais elle n’avait pas flanché.
— J’en suis consciente.
Un sourire, froid, calculateur, avait effleuré ses lèvres.
— Alors bienvenue, Lana. Vous venez de signer un pacte avec le diable.
Et à cet instant précis, elle avait su que rien ne serait jamais plus pareil.
Chapitre 50Les années avaient passé, et avec elles, le tumulte de leur vie s’était dissipé. Pourtant, en dépit de tout ce qu’ils avaient traversé, tout ce qu’ils avaient construit et perdu, il restait une certitude absolue : leur amour était toujours là, plus fort que jamais. Lana et Alexander avaient su s’élever au-delà des épreuves. Chaque étape de leur parcours, chaque défi, chaque victoire semblait les avoir forgés, et aujourd’hui, en se retournant sur leur chemin, il leur semblait que tout avait été parfaitement orchestré, comme une mélodie finement ciselée.« Tu te souviens quand tout a commencé ? » demanda Lana un soir, alors qu’ils s’étaient installés dans le jardin, loin des regards et des obligations.Alexander tourna son regard vers elle. Il n’eut pas besoin de répondre. Il savait. Ils avaient partagé tant de moments, tous aussi intenses que différents, mais chaque regard échangé avait toujours porté la même promesse, cette certitude qu’ils étaient faits l’un pour l’autre.
Chapitre 49Loin de l’effervescence qui avait toujours caractérisé leur vie, un moment de calme s’était imposé entre eux, lentement, presque imperceptiblement. La décision avait été prise dans la discrétion, sans fanfare. Une idée à peine chuchotée, mais suffisamment forte pour marquer un tournant dans leur existence. Ils avaient laissé derrière eux les montagnes de papiers, les réunions interminables, les négociations qui n’en finissaient plus. La machine de guerre qu’ils avaient bâtie s’était arrêtée, et avec elle, le tumulte du monde des affaires. Laissons cela aux autres, se dirent-ils. La paix. La vraie. Ce n’était pas la retraite, mais un choix. Celui de se concentrer sur ce qui comptait vraiment.Ils s’étaient souvent dit qu’ils le feraient, qu’un jour, tout cela finirait par s’arrêter. Mais ce n’est qu’à cet instant précis, quand ils s’étaient retrouvés dans le silence de leur foyer, que la décision devenait irrévocable. Ils avaient le pouvoir de changer les choses, et c’était
Chapitre 48Les premiers signes étaient subtils. Un regard particulier, une phrase bien placée. Mais peu à peu, les comportements de leur enfant devenaient impossibles à ignorer. À peine dix ans et déjà, il imposait une certaine gravité dans ses actions. C’était comme si, dès sa naissance, le destin l’avait façonné pour cette vie qu’il n’avait pas choisie, mais qu’il semblait accepter d’un naturel tranquille. Il ne suivait pas simplement les règles ; il les redéfinissait, les influençait, même. C’était là, dans ses petites décisions, ses façons de réfléchir et d’agir. Alexander n’avait pas voulu l’admettre tout de suite. Il avait observé, attentif mais aussi protecteur, sans se laisser emporter par l’orgueil d’une prophétie familiale qu’il n’avait pas voulu imposer. Mais à chaque étape, il voyait les traits d’un futur leader. L’héritage semblait déjà en lui, comme une marque indélébile.Ce n’était pas l’ambition qu’il observait, mais une manière de penser. La capacité à juger les gens
Chapitre 47Les heures s’étiraient, longues et pesantes, comme si le monde entier retenait son souffle. Alexander ne voulait pas se laisser envahir par l’inquiétude, pourtant il sentait cette lourdeur dans l’air, ce sentiment que tout pouvait basculer d’un instant à l’autre. Il avait toujours su qu’un jour, quelqu’un reviendrait pour tout détruire. Mais il ne s’attendait pas à ce que ce soit maintenant. Pas après tout ce qu’ils avaient traversé. Pas après tout ce qu’ils avaient bâti ensemble.Lana, elle, était calme, d’une tranquillité presque dérangeante. Elle n’était plus la femme vulnérable qu’il avait rencontrée il y a des années, perdue dans la tourmente de ses propres démons. Non, elle était devenue sa complice, son égale, une force inébranlable qu’il pouvait toujours compter pour garder l’équilibre. Mais même elle, face à cette nouvelle menace, sentait un frisson d’incertitude s’infiltrer dans ses pensées.C’était un ancien rival, un homme qu’Alexander avait toujours considéré
Chapitre 46L’idée germa lentement dans l’esprit d’Alexander, d’abord comme une pensée fugitve, une esquisse discrète, mais elle s’imposa peu à peu, de manière inéluctable. Il la regarda, assise là, dans le calme qui semblait maintenant régner sur leur vie, et quelque chose en lui se brisa, se réorganisa. Elle avait traversé l’enfer à ses côtés, son amour pour elle n’avait cessé de grandir, d’évoluer. Mais il y avait cette conviction qui brûlait en lui : il fallait marquer cet instant, renouveler ce qui les avait unis au-delà des mots, au-delà des promesses qu’ils s’étaient faites tant d’années auparavant. Un renouvellement, une nouvelle déclaration, un acte symbolique, mais qui en disait long sur ce qu’ils étaient devenus, sur ce qu’ils avaient construit.Il n’avait pas besoin de l’avis e »qui que ce soit. Pas même du sien. Mais il savait que, même sans parole, elle sentirait la gravité de ce geste. Alexander était un homme d’actions, un homme d’ambition, mais aussi d’émotions brutes
Chapitre 45La salle était calme, trop calme. Lana fixait l’écran de son ordinateur, les yeux concentrés sur les documents qu’elle venait de recevoir. Une alerte. Un dossier qu’elle n’avait pas demandé, mais qui, d’une manière étrange, semblait lui arriver à point nommé. Elle n’avait pas encore vu les détails, mais elle avait reconnu ce nom, une signature qui ne laissait jamais de doute : David Trower, leur allié de longue date. Une ombre se glissa dans son esprit, une sensation qu’elle connaissait bien : quelque chose n’allait pas.Le téléphone vibra sur le bureau, et elle hésita un instant avant de décrocher. La voix d’Alexander se fit entendre, d’un ton plus grave qu’à l’ordinaire.« Tu as vu les derniers chiffres ? »Lana ne répondit pas immédiatement, ses pensées s’enroulant autour de ce nom, de ce dossier qui semblait dévoiler quelque chose de plus qu’un simple écart financier. « Non, pas encore », répondit-elle finalement, ses doigts toujours suspendus au-dessus du clavier. « M
Chapitre 44Un bruit, presque imperceptible, filtra à travers le téléphone. Une sonnerie, un message. Rien d’extraordinaire en apparence, mais il y avait ce frisson d’anxiété qui s’immisça dans le cœur d’Alexander. Il se leva brusquement, comme si une alarme silencieuse venait de se déclencher. Il savait, il le sentait, que ce n’était pas un simple message. Ce n’était jamais rien de simple quand il s’agissait de leur vie. Ses yeux parcoururent le texte rapidement, et une lourde chaleur monta en lui.« Vous êtes surveillés. »Rien d’autre. Juste ces mots, glissés dans la banalité d’une journée comme une menace bien cachée.Lana était dans le salon, son regard plongé dans un dossier. Elle ne l’avait pas vu entrer dans la pièce, mais la tension dans l’air la fit lever les yeux. Elle savait. Elle connaissait cette posture d’Alexander, cet instant où tout devient plus grave, plus lourd. Elle posa son dossier et se leva.« Quelque chose ne va pas ? » demanda-t-elle, sa voix douce mais inqui
Chapitre 43L’appel vint sans préavis. Un message succinct, presque dénué de toute émotion, mais dont l’impact fut immédiat.« Je veux parler. Il est temps. – V. »Les trois lettres étaient un rappel du passé, du chaos qu’il avait semé dans leur vie à l’époque où il était leur ennemi. Victor Marsden. Un nom que Lana n’avait jamais voulu revoir. Un homme qui avait toujours cherché à les écraser, à les soumettre à ses propres règles. Et pourtant, voilà qu’il se présentait, prêt à tendre la main, comme si de rien n’était.Lana laissa le téléphone sur la table, les yeux fixés sur l’écran pendant plusieurs secondes. Elle n’avait pas besoin de regarder à nouveau le message pour savoir ce que cela signifiait. Elle le connaissait trop bien. Ce n’était pas un hasard. Ce n’était pas une erreur. Il était là, à la porte de leur vie, et cette fois, il demandait une rencontre. Pas pour jouer aux ennemis, pas pour échanger des menaces ou des coups bas. Non, il était venu pour une réconciliation. Enf
Chapitre 42Lana ne s’était jamais imaginée en train de participer à ce genre de projet. Le mot « caritatif » résonnait différemment dans son esprit maintenant, plus lourd, plus significatif. C’était loin des sphères de pouvoir et de privilèges dans lesquelles elle évoluait autrefois. Mais ce qu’elle percevait aujourd’hui, à travers les yeux d’Alexander, ce n’était pas une simple idée abstraite. C’était une vision. Une vision qu’il lui avait partagée dès le début, mais qu’elle ne comprenait pleinement que maintenant.Ils s’étaient assis ensemble, plongés dans la réflexion. Pas de discussions frénétiques sur les chiffres, sur les acquisitions, mais sur quelque chose de plus grand. Alexander, avec sa voix toujours aussi posée, lui expliquait son désir de rendre l’empire qu’ils avaient construit plus humain. Il ne s’agissait plus de domination ou de conquête. Il voulait que ce qu’ils avaient créé serve à quelque chose de plus, quelque chose qui transcende tout ce qu’il avait connu jusqu’