Dalia s’inclina légèrement. Elle s’apprêtait à partir, mais hésita.— Si vous avez besoin de quoi que ce soit… même juste parler… je suis là.Léna sentit un nœud dans sa gorge. Ce n’était pas grand-chose. Une phrase. Un regard humain. Mais c’était plus que tout ce qu’on lui avait offert ici.Elle voulut répondre, mais un bruit de talons claqua soudainement dans le couloir.Un rythme rapide, assuré.Dalia blêmit légèrement.— Elle est en avance, murmura-t-elle.— Qui ?Mais Dalia s’inclina rapidement, les yeux fuyants.— Ne dites pas que je vous ai parlé. S’il vous plaît.Et elle disparut par la porte latérale juste au moment où une silhouette surgissait dans l’entrée du salon.Léna se figea.Une femme.Grande. Élancée. Blonde platine, coiffée avec précision. Robe blanche cintrée, bijoux discrets mais hors de prix. Une beauté glaciale, calculée au millimètre.Ses yeux, d’un vert perçant, s’attardèrent immédiatement sur Léna.Et ce regard-là… était celui d’une reine face à une servante
Le manoir était silencieux, comme toujours.Trop silencieux.Léna marchait lentement dans le couloir, les bras croisés, les épaules nues sous le pull trop grand qu’elle avait trouvé dans le dressing. Elle n’avait pas mangé ce matin. Elle n’avait pas faim. Ou peut-être ne le savait-elle plus.Elle s’arrêta devant une porte double. Son cœur battait fort.C’était son bureau.Depuis qu’elle avait été amenée ici, elle n’avait jamais osé frapper à cette porte. C’était l’espace d’Ilyès. Le cœur de son pouvoir. Son antre. Elle savait que s’y présenter sans y être invitée était risqué. Mais aujourd’hui, elle avait besoin de parler.Juste de demander.Elle prit une inspiration, puis frappa doucement. Aucun son.Elle attendit quelques secondes, puis poussa la porte lentement. Elle était entrebâillée. Il n’avait pas verrouillé.Il était là.Ilyès, assis derrière son bureau en acajou, penché sur des dossiers. Costume sombre, montres chères, cheveux tirés en arrière. Immuable. Inébranlable.
Ses doigts atteignirent la base de la robe. Il la regardait sans cligner des yeux. Prêt à aller trop loin.Et c’est là que ça arriva. Un sanglot. Faible. Étouffé.Puis un autre. Et encore un.Le corps de Léna se figea. Elle pleurait. En silence. Mais les larmes roulaient sur ses joues, incontrôlables, pures.Pas de hurlement. Pas de théâtre. Juste… la tristesse. L’angoisse. Le désespoir.Elle murmura, d’une voix brisée :— Je ne voulais pas de ça. Pas de cette vie. Pas de cette souffrance. J’ai juste essayé de survivre. J’ai juste voulu protéger ce qui me restait.Ilyès ne bougeait plus. Sa main était suspendue à quelques centimètres de son corps.Et pour la première fois… il hésita.— Tais-toi, murmura-t-il. Ne me fais pas ça.Mais elle ne pouvait plus se taire.— Je n’ai plus personne, Ilyès. Ma mère est morte. Mon père m’a vendue. Et toi… toi tu veux m’éteindre. Pourquoi ? Pour une gifle ?Sa voix tremblait.— Est-ce que ça vaut vraiment la peine ?Il recula.Un pas. Puis
Il y avait, dans cette nuit-là, quelque chose d’irréel.De suspendu.Une fête trop brillante, trop riche, trop décadente pour être honnête.C’était un gala de charité dans un hôtel de luxe, une soirée où les riches étalaient leur générosité comme des bijoux. Léna n’y avait pas sa place. Et pourtant, elle était là, serveuse de dernière minute, coiffée à la va-vite, vêtue d’un uniforme noir qui tranchait avec les robes scintillantes et les talons hauts.Elle avait 20 ans. Léna Delcourt, blonde aux yeux bleus, était une fille de rien, une beauté tranquille aux joues pâles, aux gestes précis, avec ce mélange rare de douceur et de feu qui attirait sans qu’elle ne le cherche.Ce soir-là, elle servait les coupes de champagne avec discipline, les yeux baissés, tentant d’éviter les mains trop audacieuses. Et c’est là qu’elle le vit pour la première fois.Il n’avait pas besoin de parler. Il n’avait même pas encore bougé. Mais tout dans sa présence hurlait le contrôle, le pouvoir, le danger
La pièce sentait la sueur, l’alcool renversé et la peur.Léna était restée debout, droite, le cœur au bord des lèvres. Son père, lui, était à genoux. Il suppliait. Encore. Comme un enfant pris en faute.— Je vous en prie, Ilyès… Elle n’a rien à voir avec ça. Prenez la voiture. Prenez la maison, mais pas elle…Face à lui, l’homme en costume noir demeurait impassible. Son regard sombre glissa brièvement sur le vieil homme en larmes, avant de se poser lentement sur la silhouette féminine qui tremblait au fond de la pièce.Léna sentit son ventre se nouer.Il la fixait.Un silence étouffant s’abattit dans la salle.— Vous… articula-t-elle enfin, la gorge sèche.Son cœur manqua un battement. Cet homme, elle le connaissait. Son regard, elle ne l’avait jamais oublié.Et ce visage…— Tu te souviens de moi, murmura-t-il avec un sourire glacial.Léna recula d’un pas, choquée. Bien sûr qu’elle se souvenait de lui. Deux ans plus tôt. Une soirée, une provocation, un baiser imposé qu’elle