ElenaJe le sens frémir sous mes doigts, chaque mouvement, chaque soupir, chaque baiser que je lui donne brise un peu plus la façade qu’il s’est construit. Dante… Il est si proche, et pourtant si lointain. Je sais qu'il a peur. Il a peur de ce que nous sommes en train de devenir, mais il est trop loin pour revenir en arrière. Et pourtant, je ressens cette hésitation. Cette froideur sous cette chaleur brûlante.J’éloigne légèrement mon visage du sien, mon souffle chaud effleurant ses lèvres. Il m’observe, comme si je venais de lui offrir un secret qu’il n’est pas certain de vouloir connaître. Il se redresse légèrement, les yeux brillants de désir, mais aussi de doute. Il essaie encore de garder un semblant de contrôle.— Tu sais ce que tu fais, n’est-ce pas ?Sa voix est rauque, chargée d'une tension palpable. Mais il n’est plus celui qui mène cette danse. Ce n’est plus lui qui décide.Je souris, un sourire plein de malice et de promesse.— Je ne sais pas… Mais je sais ce que tu ressen
ElenaLe silence nous engloutit, lourd et épais, comme une mer sans fond. Dante est là, allongé à mes côtés, la peau moite, les muscles encore tendus par ce que nous venons de vivre. Son souffle effleure ma nuque, irrégulier, presque tremblant. Mais il ne dit rien. Il ne me touche plus. Pas encore.Je pourrais croire qu’il dort, s’il n’y avait pas cette tension électrique dans l’air. Ce fil invisible entre nous, toujours tendu, toujours prêt à céder. Mes doigts effleurent le drap, cherchant un repère, un point d’ancrage. Mais il n’y a que lui. Lui et cette tempête qu’on ne sait plus arrêter.Chaque battement de son cœur semble résonner dans l’espace entre nous. J’ai l’impression de flotter, suspendue au-dessus d’un abîme dont je ne peux détacher le regard. Je me tourne doucement, et je vois ses yeux ouverts dans l’obscurité. Ils brillent d’un éclat trouble. Mélange de peur, de colère, de désir. Et quelque chose d’autre. Quelque chose de plus profond. Une faille.— Tu regrettes ?Ma vo
ElenaL’aube s’infiltre lentement à travers les persiennes, dorant la chambre de reflets pâles. Je n’ai pas dormi. Pas vraiment. Je suis restée là, immobile, à écouter sa respiration, à sentir son corps contre le mien, lourd, brûlant, vivant. Comme si le simple fait de le regarder dormir pouvait repousser l’inévitable.Je compte les battements de son cœur. Je mémorise chaque frémissement de sa peau. Parce que je sais qu’un jour, tout cela pourrait disparaître.Je voudrais arrêter le temps.Je voudrais que cette nuit soit une parenthèse. Une faille dans le tissu de nos vies. Un moment volé au chaos.Mais je sais que ce n’est pas le cas. Rien n’est simple, rien n’est figé. Nous sommes deux forces contraires qui s’attirent et se déchirent, deux âmes en équilibre au bord d’un gouffre.Ses paupières frémissent, et il s’éveille lentement. Il ne dit rien. Son regard cherche le mien dans la lumière grise du matin. Et il y a quelque chose de différent. Quelque chose de plus calme, plus résigné
DanteLes jours suivants sont un enchevêtrement d’instants volés, de silences lourds, de regards qui en disent plus que des mots. Elena reste avec moi. Elle reste, malgré les ténèbres que j’ai partagées avec elle, malgré les ombres de mon passé qu’elle a vues, touchées, ressenties. Elle est là, à mes côtés, et pourtant, je sens à chaque moment que quelque chose cloche. Une fragilité dans l’air. Une tension électrique, comme si la moindre fausse note pouvait faire tout basculer.Je la regarde, un matin, alors qu’elle prend son café près de la fenêtre. Le soleil de l’aube éclaire son visage, mais il n’arrive pas à percer l’obscurité qui semble l’envahir parfois. Elle est belle, trop belle, et cette beauté me torture. Parce qu’à chaque instant, j’ai peur de la perdre.Je m’approche d’elle, sans bruit. Elle me sent avant même que je ne sois tout à fait près, et son regard se tourne vers le mien, comme un appel, un murmure dans la brume du matin.— Dante, murmure-t-elle, les yeux luisants
DanteLe silence a changé. Il est lourd. Pressant. Je ne peux pas échapper à la sensation de quelque chose qui se prépare, quelque chose de sombre, d’inévitable. Elena et moi, nous sommes là, enlacés, mais dans l’air flotte une tension nouvelle. Ce n’est plus seulement la peur de l’inconnu, c’est un malaise qui grandit, un pressentiment sourd que nous ne maîtrisons pas. J’ai cru, pendant un instant, que nous pourrions nous cacher, nous retrouver dans un coin de monde, loin des menaces, loin des guerres. Mais je me rends compte qu’il n’y a pas d’échappatoire. Pas pour moi. Pas pour nous.— Dante, tu as l’air ailleurs, me dit Elena, sa voix douce, mais pleine de cette inquiétude qui fait écho dans mon propre cœur.Je la regarde, un frisson me parcourant l’échine. Elle a raison. Je suis ailleurs, loin dans un passé que je croyais enterré. Mais je sais, au fond, qu’il revient toujours. Que chaque erreur commise, chaque choix, chaque acte de violence… tout cela nous rattrape, tôt ou tard.
DanteLe vent a changé. Il souffle avec la violence d’une mer déchaînée, emportant tout sur son passage. Je me tiens là, dans le silence oppressant qui s'est installé après le départ de Cédric. Le bruit de son absence est presque aussi assourdissant que sa présence. Elena est près de moi, ses mains serrées, mais elle ne dit rien. Nous savons tous les deux que ce que nous venons de vivre n’est que le début. Le véritable combat ne fait que commencer. La menace plane, et elle est bien plus grande que ce que nous imaginions.Je pose mes mains sur le rebord de la fenêtre, mes yeux cherchant l’horizon, cherchant une réponse, une solution, quelque chose qui pourrait apaiser cette douleur qui me ronge de l’intérieur. Mais je sais, au fond, qu’il n’y a pas de réponse facile. Le passé est là, tapis dans l’ombre, prêt à frapper encore. Et cette fois, il n’y a pas de fuite possible.— Tu es silencieux, Dante, dit Elena, sa voix brisant l’immobilité. Tu n’arrêtes pas de regarder dehors. Tu cherche
DanteLe ciel est lourd de menaces. Le vent frappe contre les fenêtres avec une force sauvage, comme une prémonition. Je me redresse, ajustant la chemise sur mes épaules, chaque mouvement aussi calculé que la prochaine étape de notre combat. Elena est prête, silencieuse à mes côtés, ses yeux fixés sur moi, mais je sens la tension qui émane d’elle. C’est la première fois qu’elle entre dans ce monde. C’est la première fois qu’elle accepte de plonger avec moi dans l’inconnu.Elle ne dit rien, mais je sais qu’elle ressent la même chose que moi. Ce rendez-vous, ce face-à-face avec Viktor, est une issue sans retour. Une épreuve où tout peut basculer. Et si nous survivons, ce ne sera qu’une victoire éphémère. Parce que Viktor n’est pas un simple homme. Il est un spectre du passé, un danger insidieux qui a plus d’un tour dans son sac.Je tourne la clé du moteur de la voiture, et le ronronnement du moteur brise le silence. La route s’étend devant nous, sinueuse, semblable à l’inconnu qui nous
ElenaLa voiture roule silencieusement, le bruit du moteur faible dans la nuit. Je sens la tension palpiter entre Dante et moi, une énergie qui se mêle à l’air, lourde, presque palpable. Chaque seconde, chaque mouvement semble alourdir l’atmosphère. Les rues défilent, mais elles ne nous mènent nulle part de familier. Le bâtiment de Viktor est encore un mystère, un coin d'ombre que l'on ne connaît que trop bien. Et pourtant, l’idée d’y entrer m’oppresse.Viktor est une légende dans son genre, un homme dont l’emprise va bien au-delà des murs de ses propriétés. Un homme que même Dante, dans ses pires moments, a craint. Ce qu’il représente n’est pas seulement du pouvoir ; c’est une présence, une force intangible qui vous étreint, vous consume de l’intérieur. Et ce soir, je vais devoir le confronter.Dante reste silencieux, ses mains crispées sur le volant. Ses traits sont tendus, ses yeux glacés. Il ne me regarde pas, mais je sais qu’il est concentré, calculant chaque détail. Il est prêt.
ElenaLa route s’étire devant nous comme une promesse arrachée aux ténèbres. Les cailloux crissent sous nos semelles, la rosée accroche nos jambes, les feuilles tremblent mais ne tombent pas. Le monde retient son souffle. Et moi aussi.Il y a quelque chose dans l’air. Une vibration. Comme si la terre savait. Comme si elle s’apprêtait à boire le sang d’un nouveau sacrifice.Je marche. Le dos droit. Le regard fixé devant. Le cœur tambourinant dans ma poitrine. Pas de peur. C’est terminé, ça. Il ne reste que la tension brute, l’impatience d’un fauve.Je tourne la tête vers Dante. Il est là. Toujours. Son ombre épouse la mienne. Il ne m’a jamais quittée depuis ce matin-là. Et je crois que quelque part, depuis cette nuit où tout a brûlé, il n’est plus question de fuite. Seulement de combat.Je l’observe. Son visage est dur, presque figé. Mais ses yeux... Ses yeux disent autre chose. Ils parlent de tout ce qu’on ne s’est pas dit. Tout ce qu’on n’a pas eu le temps de se promettre.Je veux su
ElenaLa porte claque derrière nous, le bruit résonne dans l’air humide de la nuit. Le vieux relais gémit sous le vent qui hurle, mais à l’intérieur, il fait chaud. Pas à cause du feu qui crépite dans l’âtre. Pas seulement à cause de la chaleur de l’instant. Mais à cause de nous. De ce qui est inévitable entre nous. Cette tension, électrifiée, qui pulse entre nos corps depuis des heures. Des jours. Des années, peut-être. Depuis ce premier regard, celui où je l’ai vu sans armure, où lui m’a vue sans masque, sans faux-semblants. Depuis ce premier souffle partagé dans la folie de nos choix, de nos combats. Depuis que la guerre a fait de nous ce que nous sommes : deux âmes perdues mais liées par une promesse plus grande que la vie elle-même.DanteJe la déshabille sans hâte. Ses vêtements tombent sur le sol comme des ombres qui s’effacent. Chaque bouton défait est une victoire. Une victoire contre la peur, contre les cicatrices du passé, contre la violence du monde. Il n’y a plus de place
ElenaL’aube ne vient pas.Pas encore.Le ciel hésite.Comme nous.Suspendus entre chute et ascension.Entre les restes d’un empire et les cendres d’un rêve.Le silence pèse sur les toits, glisse entre les pierres froides, ronge le cœur.Même les oiseaux se taisent.Comme si le monde retenait son souffle.ElenaLe palais dort d’un sommeil empoisonné.Les tentures frissonnent au moindre courant d’air, comme si elles pleuraient des secrets.Les gardes, épuisés, marchent à l’aveugle.Leur fidélité n’est plus qu’une habitude, un réflexe.Ils ne savent plus qui ils protègent.Les couloirs résonnent des pas qui fuient, des voix qui murmurent.La peur a changé de camp.Elle s’est retournée contre ses maîtres.Et nous, nous marchons dans ce silence.Droits.Déterminés.Mais pas indemnes.Inès« Il faut partir avant que le soleil se lève. La lumière rend les traîtres visibles. »ElenaJe la regarde.Elle n’a jamais tremblé.Même maintenant, dans cet entre-deux fragile, elle tient droit.Comme
ElenaLa nuit tombe.Le domaine tout entier s'agite d’une nervosité moite.Ils sentent que quelque chose a changé.Sans savoir quoi.L'air est trop lourd. Chaque respiration est une lutte.Chaque pas résonne comme une annonce funèbre.ElenaGiovanni hurle sur ses conseillers.Il accuse. Il menace.Il cherche un coupable, un traître, un fantôme.Il ne comprend pas que c’est trop tard.Que le poison n’est plus dans le verre.Il est dans son sang.Il est dans ses os.Il est dans chaque regard qui ose enfin ne plus baisser les yeux.ElenaJe reste en retrait.Je regarde les murs vibrer sous ses cris.Je compte les secondes.Les respirations.Les battements de cœur.Le pouvoir meurt rarement d’un coup d’épée.Il meurt de mille coupures invisibles.Giovanni« Qui a osé ?! QUI ?! »ElenaNous tous, Père.Nous tous.Tu as semé la peur.Nous avons semé la fin.ElenaSilvano me glisse un billet.Un seul mot griffonné : Minuit.Un lieu : l’orangerie.Une promesse silencieuse.ElenaJe sais ce qu
ElenaLe lendemain, l'air sent déjà la cendre.Tout est plus lourd, plus lent.Même le vent semble hésiter à souffler.Je me lève. J'enfile une robe noire simple, sans bijoux. Pas de chaînes inutiles. Aujourd'hui, je suis l'ombre.ElenaInès m'attend dans le couloir.Ses yeux brillent. Pas d'excitation. Pas de peur.La certitude, froide et vive.Elle porte une veste légère, doublée de lames fines comme des éclats d'hiver.À sa ceinture : une seringue. Remplie de quelque chose de rapide. Silencieux.Inès« Prête ? »ElenaJe souris. Ce n'est pas une question.C'est un serment.ElenaNous descendons sans bruit.Chaque marche craque à peine sous nos pas.Le manoir est un cadavre en sursis.Giovanni croit que la fête qu'il a ordonnée pour ce soir va cimenter son pouvoir.Il ignore que ses fondations sont déjà rongées par nos dents.ElenaÀ la cave, Silvano nous attend.Il a changé. Plus maigre. Plus nerveux. Plus dangereux.Un animal blessé qui a cessé de croire en la rédemption.Il tend
ElenaLe matin se lève sur une lumière pâle. Un jour de plus. Un jour de moins.Je ne sais plus. Je ne compte plus que les secondes utiles.Celles où j’avance.Celles où je frappe sans qu’ils le voient.Le reste n’existe pas. C’est un décor flou, un murmure d’illusions.ElenaJe me lève avant Lorenzo. Comme toujours.Il dort, abandonné au mensonge d’une paix qu’il croit acquise.Je l’observe. Longtemps.Ses paupières qui tremblent. Sa bouche entrouverte. La main posée sur le drap, comme celle d’un enfant.Il est amoureux. De moi ou de l’idée qu’il se fait de moi.Ça n’a aucune importance.Il est un pion. Et je suis celle qui déplace les pièces.Mais parfois…Parfois, je le regarde trop longtemps.Et je me demande s’il verrait le couteau avant qu’il le sente.ElenaInès frappe. Trois coups brefs. Notre signal.Je l’ouvre. Elle entre.Aujourd’hui, elle ne tremble pas.Elle a attaché ses cheveux. Porté ses bottes les plus discrètes.Elle me tend une bague. Fine. En or. Une minuscule pier
ElenaJe n’ai pas dormi.Pas vraiment. Mon corps a obéi à l’apparence — allongé, immobile sous les draps de soie, dans ce lit immense qui n’est pas le mien. Mais à l’intérieur, tout est resté tendu. Mon esprit a marché. Furtif. Inlassable. Il a exploré les contours invisibles de cette cage dorée. Il a arpenté les couloirs du manoir, les interstices des portes closes, les regards qui s’évitent, les silences trop longs.Il a compté les pas.Les voix.Les caméras.Je suis une mariée.Mais surtout une arme.ElenaLorenzo respire lourdement à côté de moi. Une respiration paisible, profonde, d’homme qui croit être en sécurité. Il rêve. Peut-être de moi. Peut-être de pouvoir.Il est jeune. Trop. Pas assez pour cette guerre.Mais il pense l’avoir gagnée.Il se trompe.Je me lève. Pieds nus. Les planches du sol craquent à peine sous mon poids.J’attrape mon carnet, mon stylo. Complice de mes pensées. J’y note tout. L’angle des caméras, la durée exacte des rotations de surveillance, les zones d
ElenaLa couronne ne brille pas. Elle pèse. Chaque perle, chaque éclat d’or est une goutte de sang figée. Le sang des femmes avant moi. Le sang que je verserai. Le sang qu’on attend de moi.On l’a faite pour enfermer. Pas pour élever.On m’habille sans un mot. Sœur Agnese tire sur les lacets de ma robe, trop fort, comme pour m’arracher l’air. Je sens le tissu mordre mes côtes. Je ne dis rien. Elle le fait exprès. Pour me briser. Pour me faire plier.Mais je tiens. Plus droite. Plus raide.Violetta, la gouvernante, fixe mes cheveux. Ses doigts tremblent à peine. Elle murmure des prières en italien, des phrases anciennes apprises dans l’ombre des catacombes. Elle pense, peut-être, que le ciel m’entendra. Que le ciel a encore quelque chose à voir avec tout ça. Elle m’offre un rosaire en argent. Je ne tends pas la main.Je me tiens debout, les bras ballants, la nuque raide. Je suis une mariée. Une martyre. Une bombe.ElenaGiovanni n’est pas venu. Il ne vient jamais. Il délègue. Il survei
ElenaJe suis encore là. Debout. Silencieuse. Comme il le voulait. Comme il l’a toujours voulu. Le dos droit, les lèvres closes, le regard vidé de sa lumière. Il pense m’avoir pliée. Il pense que la guerre est terminée. Mais il ignore ce qu’il a créé en me brisant.Ce n’est pas une fille docile qu’il a façonnée. C’est une arme. Et j’apprends encore à l’aiguiser.Mon cœur bat, lourd, lent, douloureux. Chaque pulsation résonne comme un cri dans mon crâne. Dante. Je l'entends encore. Son rire. Sa voix au creux de mon cou. Sa main dans la mienne alors que nous courions à travers la nuit, persuadés que l'amour nous sauverait. Il croyait à la fuite. Moi, à l’embrasement. Giovanni pense que l'amour est une faiblesse. Il ne sait pas que c’est aussi une force. Une force obscure. Une force brûlante. Une force qui, lorsqu’elle n’a plus d’issue, devient incendie.Je me suis tue. Pas par soumission. Par stratégie. Parce que les mots mal employés sont des armes retournées contre soi. Parce que le s