Petite courageuse

Alina s’éloignait, le cœur palpitant, quand un souffle puissant balaya soudain la forêt autour d’elle. Elle leva les yeux, s’attendant à revoir le dragon, mais ce qui se dressait désormais devant elle dépassait de loin ce qu’elle avait imaginé.

Devant elle, dans la clarté tamisée de la lune, Elias avait pris forme humaine. Il avait l’allure d’un prince d’autrefois, à la fois noble et sauvage. Ses traits étaient marqués par une force impérieuse et une fierté froide, adoucie par des yeux dorés, tout en lui rappelant qu’il possédait un pouvoir millénaire. Ses épaules larges et musclées se découpaient sous la lumière de la lune, évoquant un guerrier invaincu. Son port était droit, imposant, et chaque mouvement trahissait l’aisance d’un prédateur en pleine maîtrise de son environnement. Il se tenait là, dans une tenue sombre, simple mais élégante, qui révélait une silhouette d’athlète, le corps sculpté par des siècles de combats.

Un sourire discret, presque imperceptible, se dessina sur le visage d’Alina. Elle haussa un sourcil, croisant les bras comme si elle l’évaluait en silence.

Elias, sans prononcer un mot, perçut l’éclat taquin dans son regard. Elle était la première, depuis des siècles, à oser afficher un tel amusement devant lui, lui qui était respecté et redouté même dans sa forme humaine. Peu habitué à ce genre de réaction, il la fixa, cherchant à décoder ce que cette jeune sorcière voyait en lui.

« Pas mal, » finit-elle par dire avec un sourire en coin. « Mais je vous imaginais… plus imposant. »

Elias retint un rire, son orgueil piqué. Lui, un dragon millénaire, douté par une simple sorcière ? Pourtant, il ne put s’empêcher de sourire en retour. « Je pourrais te montrer à quel point je peux être imposant, petite sorcière. »

Alina ne se démonta pas. Elle s’approcha de lui, le menton levé, son regard défiant. « Avec tout le respect que je vous dois, Elias, le pouvoir n’impressionne que ceux qui n’en possèdent pas. »

Cette réponse éveilla un nouvel éclat d’intérêt dans les yeux d’Elias. Son sourire s’adoucit, mais son regard demeura intense. « Alors, que cherches-tu, si ce n’est pas le pouvoir ? »

Alina répondit en se détournant légèrement, évitant son regard perçant. « Peut-être simplement à rappeler à ceux qui se croient invincibles qu’ils ont aussi des faiblesses. » Elle se tourna vers lui, un sourire mutin aux lèvres. « Vous, par exemple, êtes-vous certain de n’avoir aucune faille ? »

Elias émit un rire léger, chaud et moqueur. « Je te mets au défi de les trouver, Alina. Mais attention… jouer avec un dragon peut être un jeu dangereux. »

Alina inclina la tête, ses yeux pétillant de malice. « Peut-être que j’aime le danger, » murmura-t-elle, un sourire amusé aux lèvres. Elle sentait que quelque chose de plus puissant qu’elle ne l’avait imaginé naissait dans cet échange, une force mystérieuse qui la poussait à braver le pouvoir d’Elias, à défier ce dragon millénaire sans faillir.

Elias, étonné par cette audace, la fixa intensément. La majorité des êtres – qu'ils soient sorciers, humains ou créatures de la nuit – baissaient le regard en sa présence, paralysés par la force émanant de son être. Pourtant, cette petite sorcière semblait imperméable à son influence. Cela l’intriguait autant que cela le déstabilisait.

Avec un léger sourire, il s’avança d’un pas, réduisant l’espace entre eux jusqu’à sentir la chaleur de son souffle. « Le danger est une chose, mais saisir le dragon à la gorge en est une autre, Alina. Es-tu prête à supporter l’ombre qui m’entoure ? »

La sorcière soutint son regard, sentant la puissance dans ses mots comme une vague qui voulait l’engloutir, mais elle resta ancrée, les pieds fermement plantés au sol. Elle n’avait jamais été impressionnée par les hommes et encore moins par les créatures à l’ego démesuré. Pourtant, quelque chose chez Elias l’attirait autant qu’il la mettait en garde.

Elle leva une main et, du bout des doigts, effleura la manche de son manteau sombre, comme pour tester la réalité de cet homme-dragon devant elle. « L’ombre et moi, nous nous connaissons bien, Elias. Et les dragons, aussi redoutables soient-ils, ne sont que des créatures de plus dans la nuit. »

Elias ne broncha pas, mais une lueur amusée passa dans son regard. « Crois-tu vraiment pouvoir m’apprivoiser comme tu le ferais d’un simple animal ? » Il baissa les yeux vers sa main, puis releva la tête, le visage empli d’un mélange d’amusement et de défi.

Alina se retira lentement, son sourire espiègle demeurant. « Non, » répondit-elle en chuchotant. « Je ne cherche pas à t’apprivoiser, Elias. » Elle fit une pause, ses yeux brillants d’une lueur de défi. « Je cherche simplement à te rappeler que tout pouvoir a ses limites. »

À ces mots, elle pivota sur ses talons, prête à s’éloigner, mais la main d’Elias s’empara doucement de son poignet, l’empêchant de faire un pas de plus. Sa poigne était ferme, pourtant elle n’avait rien d’agressif.

« Et que feras-tu si tu découvres que je n’en ai pas ? » murmura-t-il, son souffle caressant sa peau, sa voix à la fois douce et menaçante. Alina sentit un frisson lui parcourir l’échine, mais elle ne laissa rien paraître. Elle redressa légèrement le menton et se dégagea de son emprise.

« Alors, tu m’auras prouvé le contraire, » répondit-elle, ses yeux reflétant le même défi.

Ils restèrent ainsi, face à face, dans un silence chargé d’une tension inédite. Dans cet échange de regards, une promesse implicite naquit – celle d’une lutte sans merci entre deux âmes indomptables. Elias, le guerrier invincible, et Alina, la petite sorcière audacieuse, allaient s’affronter dans un duel où aucun des deux ne semblait prêt à reculer.

Après un instant, Elias esquissa un sourire en coin, baissant légèrement les yeux, comme pour évaluer cette créature intrigante qui se tenait devant lui. « Je pense que tu vas rendre les choses intéressantes, » dit-il finalement, avec une touche d’amusement.

Alina haussa les épaules, faussement désinvolte. « Et moi qui pensais qu’un millénaire de vie t’aurait apporté un peu de… de recul, » lança-t-elle, moqueuse.

Un rire grave s’échappa des lèvres d’Elias. « Les dragons millénaires ne s’ennuient jamais, Alina. Chaque siècle offre son lot de surprises… mais je dois avouer que tu en es une des plus déconcertantes. »

La sorcière lui jeta un regard de biais, taquine. « Il est temps que quelqu’un mette un peu de vie dans tes éternels jeux d’ombres, non ? »

À ces mots, elle se retourna à nouveau, prenant enfin la direction opposée, le sourire aux lèvres, comme si elle venait de gagner une petite victoire. Elias la regarda s’éloigner, son cœur étrange de dragon battant un peu plus vite que d’habitude. Il se surprit à la suivre du regard jusqu’à ce qu’elle disparaisse entre les arbres, son rire

discret se mêlant au bruissement des feuilles.