La tour Reyford respirait bas, comme si quelqu’un avait posé une main ferme sur sa poitrine pour l’obliger au silence. Les étages supérieurs clignotaient encore de quelques veilleuses, rougeoyantes comme des braises sous la cendre, et l’air du couloir avait cette odeur de poussière froide, de carton et d’encre qui n’appartient qu’aux bâtiments vides. Au loin, la ville pulsait, intervalle régulier de sirènes étouffées et de feux tricolores. Ici, tout se resserrait : la lumière, les bruits, les voix. Le moindre froissement devenait important.Mila, seule dans la salle des archives, posa un dossier sur la table centrale. Ses doigts, encore tièdes de la marche rapide, s’ouvrirent et se refermèrent une fois. Il y avait, dans son poignet, une tension fine qu’elle commençait à reconnaître : la prévision du moment à venir. Elle inspira lentement ; l’odeur sèche du papier lui remonta au nez, familière, presque rassurante. Elle regarda sa montre. Trop tôt pour appeler. Trop tard pour renoncer.
Last Updated : 2025-09-23 Read more