All Chapters of IMPOSTURE: Chapter 11 - Chapter 20

IsisIl dort.Le souffle profond, régulier, comme une mer calme. La bouche entrouverte laisse échapper un souffle chaud qui caresse ma peau, son bras s’enroule autour de moi, main lourde et possessive, posée sur mon ventre nu. Comme s’il pouvait me retenir ici, dans cette réalité qu’il croit, qu’il imagine la nôtre. Moi, je reste immobile, fragile sentinelle dans cette chambre trop grande pour deux vérités. Je fixe le plafond, dévorant le silence qui s’étire entre nous. Les draps froissés portent la trace de nos corps mêlés, de son désir vorace, de ma mascarade silencieuse.Mon cœur cogne doucement contre mes côtes, irrégulier. Mais ce n’est pas l’émotion qui le fait battre. C’est la mémoire. Sourde, insistante, elle se glisse entre les battements, s’insinue dans les silences, griffe doucement le creux de ma poitrine. Elle est là, toujours là, tapie dans l’ombre. Elle attend son heure. Elle chuchote, basse et perçante, que ce n’est pas ma vie. Que ce n’est pas mon amour. Que ce n’est

ÉléaJe ne voulais plus me voir.Plus voir cette peau. Ces traits. Cette carte d’identité figée dans la chair.Je voulais devenir quelqu’un d’autre. Ou peut-être… personne.Il y avait trop de moi dans ce corps. Trop d’histoire. Trop de blessures que je n’avais pas choisies.Mon reflet était devenu une menace. Une prison. Un rappel constant de ce que j’avais subi, de ce qu’on m’avait imposé.Je ne voulais plus être celle qu’on reconnaît pour de mauvaises raisons. Celle qu’on pointe du doigt en silence, celle dont on murmure le nom avec des fragments d’histoire et de honte collés dessus.La salle était blanche. Glaciale.Le genre de lumière qui ne pardonne rien.Pas un endroit pour les illusions. Pas de zones d’ombre où se cacher.Je portais une blouse fine, et dessous, rien d’autre que la peur.La vraie. Celle qui fait trembler de l’intérieur, même quand le corps reste droit.Celle qui ne crie pas, mais qui consume.Élisa était restée derrière la vitre.Elle m’avait juste pris la main

SélèneJe souris.Élisa connaît les règles du jeu.C’est elle qui m’a appris que la vengeance n’est pas un feu. C’est un poison lent. Qui se distille. Qui attend.Un jour, je viendrai frapper à sa porte.Peut-être sans parler.Peut-être avec un sourire.Et dans ses yeux, je lirai la panique.Elle comprendra que je suis revenue.Je j'étais Éléa et maintenant SélènePas l’ombre. Pas l’imposture. Pas le souvenir.Je suis celle qui revient sans visage pour réclamer ce qu’on lui a volé.Et cette fois…Je ne partirai plus.La ville s’étendait devant moi, vaste et indifférente, comme un océan où il fallait apprendre à nager sans se noyer. Barcelone reprenait ses couleurs au fil des rues, ses bruits, ses odeurs mêlées d’air salé et de cafés brûlants. Pourtant, rien de tout cela ne m’appartenait plus. Je n’étais qu’une passante, une inconnue qui portait un nom étranger, une histoire inventée.Sélène Vallois.Ce nom s’était déjà glissé dans mes papiers, dans mes documents. Mais il fallait maint

ÉléaLe domaine semblait encore baigné dans le silence feutré de la soirée quand je rejoignis mon mari dans son bureau. Les vastes baies vitrées offraient une vue imprenable sur les jardins illuminés par des lanternes délicates, mais l’atmosphère était lourde, chargée d’une tension que rien ne pouvait alléger. Le crépitement discret de la cheminée ne parvenait pas à réchauffer l’air, glacé par des non-dits pesants.Je sentais au fond de moi que la présence de Sélène bouleversait déjà l’ordre établi, même si personne n’osait encore le dire à voix haute. Cette femme, silencieuse et insaisissable, était devenue un élément trop important dans l’équilibre fragile de Milo, mais aussi du domaine tout entier.Je me glissai près de mon mari, hésitante, le cœur battant d’un mélange d’espoir et d’appréhension. Hugo, assis à son bureau, levait à peine les yeux, concentré sur des dossiers éparpillés, mais je savais qu’il ressentait ce poids invisible, cette fissure qui s’élargissait depuis l’arriv

HugoJe ne dors plus vraiment. Je somnole. Je m’effondre parfois de fatigue, mais je ne dors pas. Mes nuits sont des labyrinthes sans issue, des couloirs sombres où chaque souvenir attend au détour d’un rêve pour me poignarder dans le dos. Depuis des semaines, peut-être des mois, je vis dans ce flou anesthésiant. Une routine bien huilée, des gestes répétés, des conversations calibrées. Il ne faut pas gratter la surface. Il ne faut pas regarder en dessous.Et pourtant.Chaque matin, lorsque je passe dans ce salon où Milo joue, je ressens cette déchirure discrète, cette vibration sourde, incontrôlable. Elle est là. Toujours. Sélène. Son prénom claque doucement dans ma tête, comme une note suspendue. Trop familière pour n’être qu’un nom parmi d’autres. Trop douce pour ne pas déranger.Je la croise, brièvement. Et chaque fois, c’est la même chose. Une tension. Une impression étrange. Elle baisse les yeux, comme si elle portait un poids immense sur les épaules. Mais ce n’est pas de la soum