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Chapitre 2 — Sa cousine 2

작가: Déesse
last update 최신 업데이트: 2025-07-31 02:12:30

Éric

J’ai du mal à respirer. Pas parce que je suis nerveux enfin, pas seulement. C’est cette foutue maison. Depuis quelque temps, elle semble me juger. Chaque mur, chaque meuble, chaque silence devient une accusation muette. Même les objets du quotidien le tapis que Clara adore, le vase en céramique qu’on a rapporté de Sienne, les rideaux qu’elle a choisis avec soin me renvoient à ce que j’ai trahi.

Et ce soir, j’ai ajouté un poison de plus dans l’air.

Jade.

Quand elle est descendue de la voiture, sous la pluie, avec ce sourire qu’elle sait si bien doser… j’ai senti ma gorge se serrer. Elle est à la fois mon erreur et ma tentation. Ma perte, peut-être. Mais trop tard. Elle est là. Et maintenant, je dois composer. Trouver l’équilibre instable entre l’audace et la prudence, entre ce que je montre et ce que je cache.

Clara.

Son regard quand elle nous a vus… je le reconnais. Ce n’est pas de la colère. Pas encore. C’est cette intuition aiguë, cette sorte de sixième sens qu’ont les femmes quand quelque chose change. Elle ne sait pas. Pas précisément. Mais elle sent. Et ce “sentir” là est mille fois plus dangereux qu’un soupçon direct.

Les femmes sentent toujours. Elles lisent ce qu’on ne dit pas. Elles pistent le silence comme d'autres flairent le sang. Et Clara… Clara est redoutable quand elle doute.

Je me répète que je ne suis pas un menteur. Que ce n’est pas moi, tout ça. Mais je mens. Et je mens bien. Trop bien. C’est devenu un art, un rythme, une mécanique huilée. Un regard droit, un ton calme, une dose de tendresse fabriquée.

— Jade est… ma cousine.

C’est sorti d’un seul souffle, presque sans effort. J’ai même réussi à y mettre une pointe de gêne, comme si j’avais honte de lui imposer cette présence.

Cousine. Du côté de ma mère. C’est flou, lointain, parfait.

Et pourtant, dans la seconde qui suit, j’ai vu les mâchoires de Clara se serrer. Son regard m’a traversé comme une lame. Elle ne m’a pas interrompu. Elle n’a pas posé de questions. Mais elle m’a regardé… vraiment regardé. Et c’est là que j’ai su : elle est en train de recoller les morceaux d’un puzzle que je croyais invisible.

Je monte les escaliers avec Jade. Son sac dans la main. Ma “cousine”, mon erreur.

Elle monte lentement, sans se presser. Elle glisse ses doigts fins sur la rambarde, regarde autour d’elle comme une inspectrice. Elle ne se sent pas invitée ici. Elle agit comme si elle revenait chez elle.

— C’est charmant ici, murmure-t-elle, un sourire aux lèvres.

Charmant. Dans sa bouche, ça sonne comme une insulte polie. Elle trouve l’endroit trop carré, trop ordonné. Trop Clara. Elle n’a jamais aimé ça. Elle préfère le désordre, le mouvement, l’instinct.

— Tu dormiras ici, dis-je en déposant le sac dans la chambre d’amis.

Elle s’avance, fait le tour de la pièce comme une critique d’hôtel. Son regard frôle les murs blancs, la literie repassée, le cadre photo posé sur la commode (une photo de nous deux, Clara et moi, à Lisbonne… ironie mordante).

— On dirait un catalogue de déco scandinave, souffle-t-elle.

Elle me regarde par-dessus son épaule. C’est là que je sens son parfum. Cette odeur douce, profonde, presque animale, qui me rend idiot. Mon ventre se contracte malgré moi.

— C’est Clara. Elle aime quand tout est à sa place.

Elle s’approche. Lentement. Trop. Et je sais ce qu’elle fait. Elle joue. Comme toujours. Elle aime pousser les limites, frôler les bords.

— Et toi, Éric ? chuchote-t-elle. Tu aimes ça ? Quand tout est à sa place ?

Je pourrais lui répondre. Faire de l’humour. Dire que j’aime l’ordre, que ça me rassure. Mais je ne dis rien. Parce que la vérité, c’est que je ne sais plus ce que j’aime. Ce que je veux.

Je la regarde.

Et dans son regard, je vois cette chose familière et dangereuse : le pouvoir. Celui qu’elle a sur moi. Celui que je lui laisse.

Nous ne nous touchons pas. Pas ici. Pas encore. Ce serait trop tôt. Trop évident. Mais elle frôle ma main, doucement. Et ce contact furtif vaut mille caresses. Parce qu’il est interdit. Et qu’on le sait.

— Reste sage, soufflé-je, la gorge nouée.

Elle rit. Doucement. Un rire presque tendre. Et ce rire me suit quand elle referme la porte derrière elle.

Je redescends.

Clara est dans le salon. Droite comme une statue. Sa tasse de thé entre les mains, mais elle ne boit pas. Elle est figée. Je la connais. Elle pense. Elle analyse.

Je m’assois à côté d’elle. Pose une main sur sa jambe, comme toujours. Geste appris, répété, sans chaleur.

— Elle restera quelques jours. Le temps qu’elle se stabilise. Elle n’a plus vraiment de repères.

Elle ne me répond pas. Elle regarde Jade, qui s’est installée dans le fauteuil. Parfaitement à l’aise. Trop à l’aise. Elle croise les jambes, observe la pièce, respire l’atmosphère. Elle s’approprie les lieux par sa seule présence.

Je me sens pris au piège entre deux mondes. Celui que j’ai construit avec Clara. Stable. Prévisible. Et celui que j’ai déclenché avec Jade. Instinctif. Sauvage. Incontrôlable.

— Cannelle. J’adore.

Cette phrase me transperce.

Je tourne lentement la tête. Clara aussi.

Son regard se pose sur moi. Glacial. Inquisiteur.

Elle a compris.

Le thé à la cannelle, c’est le sien. Son rituel du matin. Personne d’autre ne le boit ici. Je ne l’ai jamais proposé à Jade. Et pourtant… elle le reconnaît. Elle le nomme.

Je tousse. Une esquive.

— Je vais chercher une autre bûche pour la cheminée.

Je fuis. Littéralement. Mon cœur cogne dans ma poitrine. Je vais dans le garage, m’appuie contre le mur.

Putain.

C’est en train de m’échapper. Trop vite. Jade joue trop fort. Clara est trop lucide. Et moi… je ne suis pas à la hauteur de ce que j’ai enclenché.

Plus tard, Clara monte se coucher. Sans un mot.

Je reste dans la cuisine. Longtemps. À fixer le carrelage. À écouter le tic-tac de l’horloge. À me demander depuis combien de temps je mens. Et pourquoi je n’ai pas arrêté. Peut-être parce que, malgré tout, j’aime encore Clara. Ou peut-être parce que j’ai peur d’elle. Peur de ce qu’elle ferait si elle savait.

Et Jade… c’est une échappée. Un abîme , une faim.

Je monte. Lentement. Comme un condamné.

Clara est allongée sur le côté. Dos tourné. Elle respire doucement, ou fait semblant. Je me glisse dans le lit. Sa chaleur me parvient à peine. Je tends la main. Je la pose sur sa hanche. Elle ne bouge pas.

Mon cœur se serre.

Jade est à quelques mètres. À l’étage.

Et moi, je suis ici. Près d’une femme qui m’aime encore, sans savoir que je suis en train de tout détruire.

Je suis piégé dans un labyrinthe que j’ai moi-même dessiné.

Et ce que je ressens ce soir n’est ni triomphe, ni plaisir. C’est un vertige.

Un vertige terrifiant.

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  • BAISE-MOI ENCORE    CHAPITRE 20 — Sa Cousine 20

    ÉricC’est Clara qui l’a dit, hier soir.En rangeant les coussins du canapé.En relevant les rideaux.En regardant à peine Jade, plantée dans l’embrasure du couloir, un livre à la main.— Demain matin, on prendra le petit déjeuner tous ensemble.Sa voix était douce. D’une douceur chirurgicale.Et moi, j’ai senti le sol se dérober.Parce qu’il n’y avait aucune colère dans cette phrase.Aucune jalousie.Seulement une intention. Tranchante , parfaitement glacée.Ce matin, Jade est déjà levée.Elle est dans la cuisine, pieds nus, tee-shirt large, les cheveux relevés en un chignon lâche. Comme si elle était chez elle. Comme si tout lui appartenait. Même la lumière.Elle m’a croisé dans le couloir. M’a souri.— Bien dormi ? m’a-t-elle soufflé à l’oreille, avant de déposer un baiser invisible au coin de mes lèvres.Je n’ai pas répondu. Parce que ma femme était dans la salle de bain. Parce que ma fille chantait dans sa chambre. Parce que mon corps, encore, portait l’empreinte de Jade et qu’un

  • BAISE-MOI ENCORE    CHAPITRE 19 — Sa Cousine 19

    ClaraJe me réveille avant lui.C’est rare. Presque étrange. En général, c’est Éric qui se lève le premier. Discret. Organisé. Il aime ce moment à lui, avant le tumulte. Il va dans la cuisine, prépare le café, lit les journaux en ligne ou jette un œil aux mails du cabinet. Mais ce matin, son bras est encore sur moi. Son souffle régulier. Son torse monte et descend doucement, comme s’il cherchait à convaincre le monde qu’il dort paisiblement.Mais je le sens.Ce n’est pas un sommeil normal.Il y a quelque chose dans la tension de sa mâchoire, dans l’arc de ses sourcils, dans l’immobilité de ses bras. Un calme qui n’est pas du repos, mais de la fuite. Un silence qui ne repose pas, mais qui étouffe.Et moi, je ne bouge pas.Je reste là. Figée.Je l’observe, comme on observe une pièce fermée à double tour. Il y a en lui une porte qui ne veut plus s’ouvrir. Une distance nouvelle. Quelque chose qui n’était pas là, hier encore. Ou alors… que je refusais de voir.Je tends la main.Je effleure

  • BAISE-MOI ENCORE    CHAPITRE 18 — Sa cousine 18

    ÉricJe ne dors pas.Je laisse mon corps peser contre elle. Je respire lentement. Je laisse croire que je me suis abandonné au sommeil. Mais en vérité… c’est tout l’inverse.Je suis en feu.Il y a sa main dans mes cheveux. Son souffle contre mon front. Son odeur. Son silence.Tout est trop réel.Trop vivant.Trop…..Son corps contre le mien est une énigme insoluble. Une évidence impensable. Sa chaleur me consume à petit feu. Et pourtant, je reste. Je ne pars pas. Je n’arrive pas à décrocher.Je devrais.Je devrais me lever. Regagner ma chambre. Me glisser dans le lit conjugal. Étirer le mensonge. Préserver l’illusion. Faire comme si rien n’avait eu lieu. Mais je reste là. Prisonnier de cette chambre, de cette femme, de cette nuit.Je sens son cœur battre contre mon bras. Régulier. Calme. Trop calme.Et moi, je tremble.Ses doigts quittent mes cheveux. Descendent lentement sur ma nuque. Puis mon dos. Légers. Précis. Profonds. Je ferme les yeux. Je retiens ma respiration. Je sais ce qui

  • BAISE-MOI ENCORE    CHAPITRE 17 — Sa Cousine 17

    JadeCe soir, je ne joue pas.Ce soir, je n’ai pas envie d’humilier, de provoquer, de tordre.Je n’ai pas envie de faire plier Éric, ni de tester ses limites, ni de l’étouffer avec mon silence.Ce soir, j’ai juste envie… de le regarder.D’être là. Dans cette pièce, avec lui. Rien d’autre. Rien de plus dangereux que cette vérité-là.Parfois, je me surprends moi-même.Je m’étais juré de ne jamais céder à ça. Cette tendresse rampante. Cette chaleur dangereuse. Ce poison lent qui prend racine dans les gestes les plus simples. C’est plus insidieux que la haine. Plus profond que le désir. C’est… une faille. Et je tombe dedans, les yeux ouverts.Et peut-être que ce n’est pas lui, le piège.Peut-être que c’est moi.Peut-être que c’est ici que je me perds, que je flanche, que je me trahis.Il est là.Et dans sa façon de me regarder ce soir, il n’y a plus de peur. Juste… une fatigue douce. Un abandon pur. Un besoin presque enfantin.Et ça me désarme.Et lui, ce soir, ne joue pas non plus.Il es

  • BAISE-MOI ENCORE    CHAPITRE 16 — Sa Cousine 16

    JadeJe me réveille avant l’aube.Pas parce que j’ai mal dormi. Pas parce que j’ai fait un cauchemar.Non. Je me réveille simplement parce que j’en ai décidé ainsi.Il n’y a pas d’alarme. Pas de bruit. Rien.Juste ce moment suspendu, où la maison est encore engourdie.Et moi, parfaitement réveillée.Lucide.Le lit est confortable. Un peu trop. Les draps sentent la lessive familiale, douce, tiède, presque maternelle. Ce genre d’odeur qui rassure, qui berce, qui fait croire à une vie normale.Mais rien n’est normal ici. Pas depuis que je suis entrée.Il y a un cadre avec des fleurs séchées au mur. Un tapis à motifs. Une lampe en forme de boule. Tout est si propre. Si bien rangé. Si… fade.Je me lève. J’enfile une robe légère, fluide, qui ne crie pas mais qui caresse.J’attache mes cheveux d’un geste nonchalant, laisse deux mèches tomber volontairement devant mes tempes.Je pose un peu de parfum derrière les oreilles. Celui qu’Éric connaît par cœur. Celui qui s’accroche aux draps même qu

  • BAISE-MOI ENCORE    CHAPITRE 15 — L’invitée

    ÉricJe n’ai pas dormi.Pas une seconde.Le salon est un champ de ruines. Le tapis froissé. Ma chemise, déchirée. Mon corps, marqué. Ma bouche, encore chaude de la sienne. Et pourtant, elle est partie comme un mirage.Je suis resté là, figé, nu, pendant une éternité. Comme si mon corps refusait de revenir à la réalité. Comme si l’air lui-même avait changé de consistance après son départ.Clara s’est levée à 7h comme toujours. Elle m’a trouvé dans la salle de bain, l’air fatigué, le regard fuyant. Un mal de crâne bidon comme excuse. Elle m’a embrassé sur la tempe. Elle a souri. Elle m’a demandé si je voulais du café. J’ai dit oui.Mensonge sur mensonge.Et moi, au milieu, un pantin de chair qui ne sait plus à qui il appartient. Ou plutôt, si. Je sais très bien. Mais je continue à faire semblant.À midi, je suis dans mon bureau. Les rideaux à moitié tirés. Les volets entrouverts. Lumière froide. Ombres longues. Je fixe le mur, incapable de me concentrer sur quoi que ce soit.Je la veux.

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