Chapitre 3

PDV de Kaia

C’est mon double, identique à moi. Sa peau n’est pas aussi olivâtre que la mienne, elle est plus pâle pour avoir été privée de la lumière du soleil, pour être restée dans ce lit d’hôpital... mais il n’y a aucun doute qu’elle est mon double.

Mon esprit n’arrive pas à assimiler ce que mes yeux voient.

Comment était-ce même possible ?

Je marche jusqu’au pied du lit, prenant son dossier médical pour voir ce qui lui est arrivé.

Théodore ne parle jamais d’elle. Apparemment, il ne laisse personne s’approcher assez pour lui rendre visite.

En lisant le rapport, il indique qu’elle a ingéré de l’aconit.

De l’aconit ? Qu’est-ce qui aurait pu la pousser à faire ça ? L’aconit n’est pas quelque chose qu’on boit par accident. C’est une substance contrôlée, c’est incroyablement difficile à obtenir.

C’est censé être atrocement douloureux à consommer, une douleur insupportable.

Je n’ose pas rester ici plus longtemps. Je repose mécaniquement le dossier médical et sors de sa chambre, quitte tout le service hospitalier.

Je ne sais même pas comment je suis rentrée chez moi. Je dois être passée en mode robot, mon esprit prend le relais pendant que mon corps reste dans un état de choc. J’ai l’impression que mes jambes tremblent tout le temps, tenant à peine jusqu’à ce que je sois seule dans ma propre maison.

Une fois que je ferme la porte d’entrée, mon esprit et mon corps se reconnectent enfin, et je dois m’appuyer contre le mur pour me soutenir.

Mes jambes cèdent finalement alors que je glisse lentement contre le mur jusqu’au sol.

Mes jambes se replient contre ma poitrine en appelant mes bras à les enlacer, et je le fais.

Je m’apporte le seul soutien que j’aurai.

Je reste assise par terre en essayant de calmer ma respiration.

Pourquoi Alora et moi nous ressemblions-nous autant ? Elle était maigre d’être sous assistance respiratoire, son visage était creusé mais personne ne peut nier nos similitudes.

Plus que des similitudes, elle est mon image dans le miroir.

Attends... il m’a approchée à l’université, il s’est présenté à moi spécialement. Est-ce pour ça ? Parce que je lui ressemble ?

A-t-il même ressenti le bourdonnement de notre lien, l’attraction gravitationnelle... ou est-il venu vers moi uniquement parce que je ressemblais à sa bien-aimée dans le coma ?

J’étais un substitut d’Alora...

Je n’ai pas bougé de toute la nuit, mon dos est devenu endolori d’être restée toute la nuit dans la même position, contre le mur dur.

Que faisais-je vraiment ici ? Cette question m’a tourmentée toute la nuit.

C’est alors que je l’ai entendu. Ce doit être l’aube parce qu’il est dehors en route pour l’entraînement.

La colère s’empare de moi, mon loup utilise mon état de deuil... parce que j’étais en deuil, en deuil d’un lien de compagnon qui ne sera jamais. Pour avoir été trompée trop longtemps.

« Je l’ai vue ! » Je lui lance en ouvrant ma porte d’entrée. Il se tourne vers moi avant de faire signe à son Bêta, Léo, de continuer sans lui.

« Vu qui ? » Il s’approche de ma maison mais n’entre pas. Je ne pense pas que je veuille qu’il entre maintenant de toute façon.

« Alora. »

Ses yeux qui ne sont pas particulièrement intéressés par cette conversation, se tournent immédiatement vers les miens.

« Tu l’as vue ? » Il fait un pas de plus vers moi, son bras est maintenant levé et appuyé contre le haut de mon porche.

« Est-ce la seule raison pour laquelle tu m’as parlé ce jour-là à l’université, parce que je lui ressemble ? »

« Oui ! » Il répond trop vite, trop froidement.

« Le lien de compagnon ne signifie rien pour toi ? » Je commence à trembler, ma propre voix sonne plus aiguë que prévu.

« Comment as-tu pu... » Je murmure.

« Eh bien maintenant tu sais, il n’y a rien à cacher. » Il commence à reculer, sans même essayer de se battre pour moi une fois.

Pas même une excuse... ce qui fait déborder ma colère.

« T《es un putain de connard, je te déteste ! Ne t’approche plus jamais de moi ou de ma maison ! » je lui crie en claquant la porte, incapable de le regarder plus longtemps.

........

Deux mois plus tard

Je n’ai pas vu Théodore une seule fois ces deux dernières semaines.

Pas une seule fois.

La rumeur a dit qu’il était resté au chevet d’Alora jour et nuit. Freya m’a aussi informée que les signes de son réveil devenaient de plus en plus évidents.

Je me suis sentie de plus en plus mal dans ma peau et avec Théodore constamment à l’hôpital, cela m’a donné l’occasion d’acheter secrètement un test de grossesse.

Je n’ai pas encore eu la chance de le regarder, je suis restée là pendant 20 minutes incapable de le prendre du lavabo. Et si je le suis ?

Qu’est-ce que cela signifierait pour ce triangle amoureux malsain dans lequel je me trouve ?

« Allez, Kaia, on peut le voir ensemble. Regarde-le juste. » Ma louve m’encourage à trouver la force de vérifier le résultat.

Avec sa compagnie et son soutien, je trouve le courage de regarder les résultats.

« Deux lignes... » Je halète, ma main libre se plaque sur ma bouche.

« Deux lignes... c’est bien non ? Ça veut dire négatif ? » La voix de ma louve résonne dans ma tête.

« Non, deux lignes c’est... » Je vérifie encore la boîte pour être certaine.

« Positif. Qu’est-ce que je vais faire ? »

Le test de grossesse positif est resté à côté de moi toute la nuit sur ma table de chevet. Je ne pouvais pas en détacher mes yeux. J’ai dû vérifier le résultat de nombreuses fois dans la nuit pour m’assurer que je l’avais bien lu.

En me tirant du lit, je savais que je devais lui le dire. Même si je le déteste en ce moment, cet enfant est toujours l’héritier de la meute.

Il sera soit à la maison Alpha soit à l’hôpital, et je préfère lui dire sans qu’elle soit dans la même pièce. Donc, je me dirige vers la maison Alpha en premier pour vérifier.

Alors que j’atteins le jardin, lui et le Bêta Léo sortent ensemble de la porte d’entrée.

Je ne sais pas ce qui me pousse à le faire, mais je me cache derrière l’un des grands arbres pour ne pas être vue.

« Pourquoi ne pas attendre qu’Alora se réveille pour avoir un enfant ? »

« Nous avons besoin d’un héritier maintenant, pour renforcer l’avenir de cette meute. »

« Et si Kaia te donne un enfant, et qu’Alora se réveille ? »

« Simple, l’enfant est à moi. »

« Et Kaia ? »

« Si Alora se réveille, l’aconit a ravagé ses reins à un stade irréparable. Kaia sera la donneuse d’organes. Elle n’aura pas le choix ! Les médecins connaissent déjà la situation. »

J’arrête d’écouter, le sang battant dans mes oreilles bloque tout autre bruit.

Donneuse d’organes ? Pour elle ?