Ivy
Je voudrais protester. Hurler. Fuir. Mais ma peau est trop chaude, mon souffle trop court. Ils sont trop proches.
Kael
Je glisse derrière elle, mon torse frôlant son dos. Je sens chaque frisson qui traverse son corps. Elle lutte. Je le vois à la façon dont ses épaules se crispent, dont ses doigts se serrent contre le tissu de sa robe.
Mais elle ne nous repousse pas.
— Tu veux lutter, Ivy ?
Ma voix est un murmure contre sa nuque. Son souffle s’accélère.
— Alors lutte.
Mais comment lutter contre soi-même ?
Lyam
Elle est magnifique, prise au piège entre nous, son corps frémissant sous l’onde qui la traverse.
Je le vois. Je le sens.
Elle ne comprend pas encore. Mais son âme nous appelle.
— Regarde-moi.
Je prends son menton entre mes doigts. Elle frissonne.
Ses yeux rencontrent les miens. Un orage y gronde.
Elle est en train de céder.
Ivy
Mes jambes tremblent. Je n’arrive plus à penser clairement.
— Qu’est-ce… qu’est-ce que vous m’avez fait ? murmuré-je.
Soren
Je m’avance enfin.
Je ne parle presque jamais. Mais quand je le fais, mes mots transpercent.
— Ce n’est pas nous.
Je tends la main. Mes doigts frôlent sa clavicule. Un frisson violent la traverse.
— C’est toi.
Je la vois se figer, son regard s’agrandir d’incompréhension. Elle refuse d’accepter ce qui se passe en elle.
Mais c’est trop tard.
Ivy
Non. Ce n’est pas possible.
Je ne les connais pas. Je ne devrais rien ressentir.
Mais pourtant…
Un battement de cœur.
Une vague brûlante déferle en moi, incontrôlable.
Kael
Son odeur est enivrante. Sa peau réagit à chacun de nos mouvements.
Elle est en train de se consumer.
— Tu crois pouvoir nous résister ? chuchoté-je à son oreille.
Ma main descend lentement sur son bras, puis sur sa taille. Elle halète, se mord la lèvre.
Un sourire naît sur mes lèvres.
Elle ne peut pas nous échapper.
Ivy
La chaleur devient insupportable. Mon corps est en feu.
Ils sont partout autour de moi. Lyam, dominant. Kael, joueur. Soren, implacable.
Ils ne me laissent aucun répit.
Ma poitrine se soulève au rythme effréné de ma respiration. Leur odeur me submerge : bois, cendre, danger.
J’essaie de lutter. De penser. De comprendre.
— Stop… soufflé-je faiblement.
Un silence.
Puis Lyam effleure mon cou de ses lèvres.
— Dis-le vraiment.
Je n’y arrive pas.
Parce que je ne le veux pas.
Soren
Ses pupilles sont dilatées. Ses doigts tremblent contre sa robe. Elle lutte encore.
Mais son corps parle pour elle.
— Arrête de nier, murmuré-je.
Je pose une main sur sa hanche, exerçant une légère pression. Elle frissonne violemment.
Kael
Je me penche vers elle, mes lèvres effleurant l’ourlet de son oreille.
— Tu es en feu, Ivy.
Ma main glisse lentement sur sa taille. Ses muscles tressaillent sous ma caresse.
Elle ne respire plus.
Elle est suspendue au bord du précipice.
Ivy
Je veux hurler.
Je veux fuir.
Mais leurs souffles chauds m’enveloppent. Leurs présences me consument.
Lyam murmure à mon oreille, sa voix un poison insidieux :
— Tu es à nous.
Un grondement roule dans la poitrine de Kael. Soren m’observe, son regard un gouffre sans fond.
Je ferme les yeux.
Mon cœur explose.
Et dans l’obscurité de la nuit, sous la lune impitoyable, je réalise que je leur appartiens déjà.
Ivy
La nuit est un piège.
Un labyrinthe de souffles brûlants et de présences trop proches.
Je vacille, prise au piège entre leurs corps. Mes jambes tremblent sous une fièvre que je ne comprends pas. Mon cœur cogne contre ma poitrine, déchaîné. Chaque battement résonne dans mes oreilles comme une promesse interdite.
— Ivy.
La voix de Lyam est un ordre doux, un appel irrésistible.
Je secoue la tête, tentant d’échapper à l’envoûtement.
— Je ne veux pas…
Kael rit derrière moi, un son rauque et amusé. Ses doigts glissent sur ma nuque, effleurent la peau brûlante sous mes cheveux.
— Mens encore.
Je frémis.
— Ce que tu ressens… c’est en toi, souffle Soren.
Sa main se lève lentement, frôle mon bras, déclenche un frisson incontrôlable.
Je recule brusquement. Ma respiration est erratique, mon corps refuse de m’obéir.
Je dois fuir.
Je dois les fuir.
Lyam
Elle tremble, incertaine.
Mais elle ne part pas.
— Dis-moi que tu ne le sens pas, murmuré-je.
Elle serre les poings. Un éclat de défi passe dans ses prunelles.
— Ce n’est pas réel.
Je souris.
Elle se ment à elle-même.
Je lève une main et effleure sa joue du bout des doigts. Son souffle se brise.
— Alors pourquoi ton cœur bat-il si fort ?
Ivy
Je repousse sa main avec plus de force que je ne le voulais.
— Parce que vous êtes trois à m’encercler comme des prédateurs.
Kael éclate de rire, un rire grave, dangereux.
— Exactement.
Je frémis, furieuse contre lui, contre eux, contre moi-même.
— Ce n’est pas un jeu.
Soren avance d’un pas. L’ombre de la lune creuse les angles durs de son visage.
— Non.
Sa voix est un murmure de glace.
— C’est bien plus que ça.
Il ne me touche pas. Mais son regard me transperce.
— Et tu le sais déjà.
Ma gorge se serre.
Je ne peux pas l’entendre dire ça.
Je me détourne.
— Je pars.
Lyam pose une main sur mon poignet. Une pression infime.
— Pars.
Je m’arrête net.
C’est un piège.
Un piège si bien construit que je me prends moi-même dedans.
— Tu peux fuir si tu veux, continue-t-il.
Sa voix est plus douce.
— Mais ça ne changera rien.
Ivy
Je tire sur mon poignet, mais il ne me retient pas.
Ce simple détail me trouble plus que tout le reste.
S’ils étaient vraiment des prédateurs, s’ils voulaient m’enchaîner à eux, pourquoi me laissent-ils partir ?
Pourquoi me laissent-ils le choix ?
Je jette un dernier regard à Soren. Il me scrute, impassible, mais je vois la tension sous-jacente dans sa posture.
Kael, lui, sourit toujours. Provocateur.
Et Lyam…
Lyam me regarde comme si j’étais déjà sienne.
Un frisson glacé me traverse.
Je tourne les talons et m’éloigne d’un pas rapide.
Mais quelque chose me dit que je viens de perdre un combat bien plus grand que moi.
YviL’aube se fait plus brillante encore. Il n’y a plus de doutes. Le vent, léger comme une caresse, souffle dans les arbres. Chaque feuille, chaque brin d’herbe, chaque souffle d’air semble en harmonie. La terre, la mer, et le ciel semblent accueillir le nouveau jour avec une ferveur silencieuse. Solen est là. Il a pris place dans ce monde, et avec lui, le poids de l’espoir.Je serre son petit corps contre moi, son souffle chaud contre mon torse. Il est si petit, si fragile. Et pourtant… il porte tout. Il est la réponse à tout ce que nous avons vécu, à toutes les épreuves qui ont façonné nos vies. La lutte, les sacrifices, les trahisons, les espoirs déchus. Tout cela a conduit à ce moment. À lui.Aleksandr se tient près de moi. Il ne dit rien. Son regard est rempli de fierté, mais aussi d’une tristesse discrète, comme si le fait que Solen existe n’effaçait pas les luttes de son passé. Je vois l’homme qu’il est, cet homme qui a traversé tant de ténèbres pour arriver à cet instant. Il
YviLa nuit recule comme une marée lente. Le ciel s'effrange, déchiré par une lumière nouvelle, une lueur pâle qui n’appartient ni au jour ni à l’au-delà. Tout semble suspendu. Même le vent s’est tu.Mon ventre se tend, mais ce n’est pas seulement la naissance d’un enfant. C’est celle d’une ère. D’un équilibre. Je le sens dans mes os, dans mon sang. Il arrive.Je pousse un cri, non de douleur, mais d’appel. Et le monde me répond.Aleksandr m’enlace, ses mains sur mes épaules, sa voix dans mon oreille, faible mais ancrée.— Je suis là. Jusqu’au bout. Jusqu’à lui.Ses bras me soutiennent. Mais c’est son âme que je sens. Entière. Offerte. Reliée.Autour, ils se placent en cercle. Nos piliers. Nos gardiens. Ceux par qui ce miracle est possible.KaelLe ciel palpite. Une aurore sans soleil rampe entre les nuages. Et au centre de cette clarté : elle. Elle qui enfante ce que même les dieux redoutaient.Je sens l’énergie vibrer sous mes paumes. La terre parle, à travers mes os, mes veines. Et
Soren— Il faut toucher le Cœur.— Tu plaisantes ? souffle Lys. Tu veux traverser ça ?— Pas le choix.Je m’élance.Entre les Ombres, les lames, les cris.J’ai vécu trop longtemps pour fuir maintenant.IskraJe suis à ses côtés.L’épée en avant.Je suis née pour cette bataille.Pas pour survivre.Mais pour brûler jusqu’à la dernière étincelle.LysJe chante.Encore.Plus fort.Le monde saigne autour de nous.Mais mon chant le maintient debout.Comme un souffle.Comme un cœur qui refuse de mourir.Le GardienJe regarde Yvi.Elle tremble.Enfin.Elle a compris.— Le prix n’est pas une vie.C’est un nom.Elle fronce les sourcils.— Le tien.Elle vacille.Puis relève le menton.— Alors qu’il brûle aussi.YviJ’avance.Je laisse mes souvenirs derrière.Je marche sur la faille.Sur ce fil tendu entre le Néant et le Tout.Et au bout, je le vois.Le Souffle Originel.Ni créateur, ni destructeur.Un battement.Un instant.Un commencement.Je tends la main.AleksandrJe sens l’impact.Comme une
YviJe tombe.Mais ce n’est pas une chute.C’est un retour.Le vide m’accueille comme un ventre ancien.Je traverse les strates de l’existence, les mondes qu’on ne nomme plus, les souvenirs éteints.Ma chair est brûlure.Ma mémoire est feu.Mon nom est un cri.Autour de moi, tout se replie.Le monde se défait dans l’ordre inverse de sa naissance.Les océans se retirent, les montagnes s’effondrent à l’envers.Le premier souffle du monde se répète.Et moi, au centre.Je deviens l’origine.Puis, je m’arrête.Suspendue dans l’œil du cyclone.Une silhouette m’attend.Grande. Nue. Inhumaine.Couverte de chaînes.Et derrière ses yeux — l’oubli.Le Gardien— Tu n’aurais pas dû revenir, Yvi.— Je ne suis jamais vraiment partie.Je tends la main.Un feu noir y palpite.Pas de la magie.Quelque chose d’autre.Quelque chose que même lui ne comprend pas.Il me regarde.— Tu as goûté à ce qui précède les dieux.— Je suis ce goût.Il recule. Juste un peu.Assez pour que je sente sa peur.Elle me don
AleksandrLe ciel saigne.L’aube ne se lève pas.Elle fuit.Je marche dans les ruines d’un monde qui ne m’obéit plus.Chaque pas soulève la cendre d’une guerre que nous n’avons pas choisie.Mais que nous avons terminée.Ou cru terminer.Car rien ne dort jamais tout à fait ici.Et je sens… quelque chose.Un frisson dans mes os.Un murmure ancien.Le souffle d’Yvi, peut-être.Ou l’ombre de ce qui vient.— Elle est encore là, murmure Lys derrière moi.Je me retourne. Elle est nue dans la lumière. Nue de peur, de doute, de mensonge.Ses tatouages brillent comme des cicatrices ouvertes.Elle ne pleure pas. Elle ne pleure plus.— Tu la sens aussi ? je demande.Elle hoche la tête.— Elle est le feu sous la terre. Et il commence à remonter.LysJe vois à travers elle.À travers ce qu’elle a laissé.Le monde se tord sous mes pieds.Et chaque pas devient un choix.Il ne reste rien de l’ancienne balance.Le Gardien est parti, mais la fracture s’étire encore, comme une plaie qui refuse de cicatri
AleksandrElle disparaît.Pas dans la mort.Pas dans le silence.Elle devient autre chose.Une lumière étrange irradie du centre de la faille, douce et brûlante à la fois.Elle ne dévore pas.Elle révèle.Je tombe à genoux.J’essaie de me souvenir de son visage tel qu’il était avant tout ça.Avant la magie, les pactes, les dieux brisés.Avant la guerre.Mais tout s’efface.Il ne me reste qu’une sensation.Sa chaleur dans ma paume.Le poids de sa tête contre ma poitrine, une nuit, il y a des siècles.Et cette phrase :« Je t’ai choisi, même quand je n’aurais pas dû. »Je hurle, mais rien ne sort.Le cri reste enfermé dans ma gorge.Le monde se referme sans elle.LysJe me redresse.La terre est fendue sous mes pieds, mais je reste debout.Le vent porte encore les cendres de ce qui fut, mais j’avance.Elle n’est plus là.Mais quelque chose est resté.Je le sens en moi.Un écho. Une étincelle.Je tends les bras.Et la lumière me répond.Ma peau s’illumine, marbrée de lignes dorées qui ne