Chapitre 33 La réunion s'était terminée sur une note de victoire froide et absolue pour Kenneth. Les derniers directeurs avaient quitté la pièce avec une hâte feutrée, évitant son regard comme s'ils craignaient de se consumer. Le silence qui régnait maintenant dans la salle de conférence était bizarre, presque tangible, chargé du pouvoir qu'il venait d'affirmer avec une brutalité calculée.Il regagna son bureau, l'esprit déjà en train de planifier les prochaines étapes. Les actionnaires influencés par Félix étaient sur la défensive, certains même commençaient à envoyer des messages discrets de loyauté. Assis dans le fauteuil en cuir de son père, il parcourait des rapports, signant des documents d'un geste vif...Toc, toc. Kenneth leva à peine la tête. « Entrez. »La porte s'ouvrit, et la silhouette qui se découpa dans l'encadrement le fit geler, son stylo suspendu au-dessus du document.Maya Hortense Mayala !Vêtue non pas de ses tenues de deuil habituelles, mais d'un tailleur sévè
Chapitre 32Le lendemain matin, une douce lumière inondait la chambre, chassant les ombres de la veille. Kenneth, déjà impeccable dans un costume qui soulignait ses épaules et son air sérieux, regardait Eniko avec une tendresse qu’il ne cherchait plus à cacher. Elle bouclait son sac, vêtue de sa tenue de stage – une blouse blanche sobre et un pantalon tailleur –, mais il devinait la petite appréhension derrière son geste appliqué.Il s’approcha sans bruit et l’enlaça par derrière, ses mains se posant naturellement sur son ventre encore plat. Il se pencha et déposa un baiser doux, presque chuchotant, juste en dessous de son oreille, puis un autre, plus intentionnel, sur le léger renflement que seule sa connaissance intime du corps d’Eniko pouvait deviner.« Fais attention à toi, aujourd’hui, » murmura-t-il, la voix encore un peu rauque de sommeil, mais empreinte d’une sollicitude nouvelle. « Surtout, attention à notre petit trésor caché. N’hésite pas à t’asseoir, à boire de l’eau. »En
Chapitre 31Le salon était lourd du silence laissé par le départ de Maître Koné, un silence aussitôt déchiré par la fureur de Félix. Il arpentait la pièce comme un fauve en cage, son costume noir lui donnant des airs de corbeau funèbre et rageur.« C’est impossible ! INCOMPRÉHENSIBLE ! » tonna-t-il, frappant du poing le manteau de la cheminée, faisant tinter un vase en cristal. « Augustin… ce vieux fou ! Léguer quinze pour cent à cette… cette parvenue ! Et tout le reste à ce morveux ! »Ses yeux se tournèrent, brûlants de haine, vers Maya Hortense, restée assise, effondrée sur le canapé, le visage caché dans ses mains.« Et toi ! » cracha-t-il en se plantant devant elle. « Comment as-tu pu être aussi conne ? Son épouse ! Tu as partagé son lit pendant trente ans ! Tu n’as rien vu ? Rien soupçonné ? Il a rédigé un testament derrière ton dos, il t’a déshéritée, et tu n’as RIEN SU ? »Maya leva vers lui un visage ravagé par les larmes, non pas de colère, mais de chagrin et de confusion.
Chapitre 30 Cela fait une semaine, une semaine que le patriarche Augustin Mayala avait tiré sa révérence, emportant avec lui une part de l’âme de la famille et de l’empire. Six jours que Kenneth portait en lui un secret lourd et joyeux, une lumière dans les ténèbres : il allait être père. Personne d’autre ne le savait. Cette nouvelle était leur sanctuaire, leur forteresse intime contre le deuil et les complots.Ce matin-là, le ciel de Cotonou était d’un bleu implacable, ironiquement serein pour des funérailles. La cérémonie, intime, avait été chargée d’une émotion sobre et profonde. La famille, ou ce qu’il en restait, était là, drapée de noir et de silence. Kenneth, droit et pâle, serrait la main d’Eniko comme une ancre. Maya, la veuve, sanglotait doucement, soutenue par une cousine. Félix, lui, arborait une gravité de circonstance, mais ses yeux balayaient l’assistance avec une avidité mal dissimulée.Quand le dernier hommage fut rendu et que la terre eut recouvert le cercueil, un s
Chapitre 29 « Père, » murmura-t-il une fois de plus, pour lui-même, comme pour s’en convaincre.Puis, un élan irrépressible le saisit. Il se tourna vers Eniko, prit son visage entre ses mains – des gestes d’une douceur – et l’embrassa. Ce ne fut pas un baiser de passion dévorante comme celui du bureau, mais quelque chose de plus profond, de plus tendre, un sceau posé sur l’incroyable nouvelle, une promesse murmurée contre ses lèvres.Le Dr, témoin de cette scène intime, toussota discrètement pour ramener un peu de professionnalisme dans la pièce. « Je comprends votre émotion, » dit-il, un sourire bienveillant aux lèvres. « Mais désormais, la priorité absolue, c’est le calme et le bien-être de madame. Le stress est à proscrire. Elle doit être tranquille. »Kenneth se redressa aussitôt, son expression passant de l’émerveillement à une détermination de chef de guerre planifiant une campagne cruciale. « Qu’est-ce que je dois faire ? » demanda-t-il, le regard acéré. « Des vitamines ? Un r
Chapitres 28 Le chaos qui suivit l'évanouissement d'Eniko mit fin à toute prétention de réunion. Koffi fut le premier à réagir, apportant un verre d'eau tandis que Kenneth, pâle comme la mort, s'agenouillait à côté de sa femme, lui tapotant les joues.« Eniko ? Eniko, réponds-moi ! »Elle revint à elle en toussotant, le regard vitreux, perdue. Les voix confuses et les visages inquiets lui parvenaient comme à travers un brouillard.« Je... ça va, » murmura-t-elle en tentant de se redresser, une main sur son front. « J'ai été un peu étourdie ces derniers jours... Ce n'est rien. »Félix, resté debout, lâcha avec un cynisme qui glaça le sang : « Si ce n'est rien, alors nous pouvons reprendre la réunion. Nous n'avons pas de temps à perdre. »Mais l'humeur de la salle avait tourné. M. Diallo, se leva, le visage fermé. « s'en est assez, Félix. Convoquer cette assemblée le lendemain de la mort d'Augustin était une erreur. Manquer de respect à sa belle-fille en est une autre. » Il se tourna