CHAPITRE 3

Le point de vue de Ryan

Cinq minutes se sont déjà écoulées.

Les retards sont une des choses que je déteste le plus. Ça m’agace au plus haut point.

Si je reste cinq minutes de plus et qu’elle n’est pas là, je m’en vais. Le temps que je passe ici me permettrait de faire beaucoup de travail au bureau.

Jetant un dernier coup d’œil à la porte du restaurant où j’attends depuis presque dix minutes, je soupire lourdement en pensant à l’énorme quantité de changements qui m’arriveraient dans les prochains mois.

Au début, je l’ai mal pris.

J’apprends à connaître les fiançailles et le fait que je dois me marier bientôt pour hériter de l’entreprise de construction de mon grand-père.

Ce vieil homme savait que je ne me marierais jamais et il l’a fait exprès. Mon père ne m’a pas prévenu pendant tout ce temps, et c’est pourquoi je suis furieux.

Personne ne m’a forcé à venir ici. J’ai juste pensé que ce serait une bonne idée de venir voir avec qui je vais me marier dans les prochains mois.

Même si je n’aime pas l’idée d’être fiancé alors que je suis assez homme pour trouver une femme de mon choix, j’ai besoin d’elle.

C’est le choix de mon grand-père. Maman l’apprécie visiblement, vu la façon dont elle s’extasiait sur sa gentillesse.

Se marier avec elle ne devrait pas être un problème. Nous serions mariés, nous n’avons pas besoin d’être amoureux l’un de l’autre.

Mes parents n’y ont pas pensé avant de nous fiancer, alors se marier sans amour ne devrait pas poser de problème.

Plus je me retrouve assis seul dans cet endroit vide, plus je suis bouleversé et moins je suis intéressé à m’en sortir avec cette merde.

Si c’est juste un stratagème pour me marier, tant pis. Je ne peux pas trouver quelqu’un tout seul ?

Je ne veux pas d’une enfant gâtée qui ne sera pas à l’heure chaque fois que nous aurons besoin de sortir ou d’assister à un événement.

De toute évidence, cette fille à qui je suis fiancé est gâtée et n’a pas conscience du temps.

Je déteste déjà cette attitude.

Quelle est exactement l’essence de ces fiançailles, alors qu’on peut me dire quand me marier pour que j’hérite de l’entreprise ?

J’ai juste besoin de trouver une fille parmi les nombreuses sur ma table avec qui me marier.

Honnêtement, c’est des conneries !

Avec un accès de colère, je me lève brusquement et prends mon téléphone, me retournant pour partir, lorsque la porte vitrée est ouverte par le garde et qu’une femme entre.

Ridicule n’est pas le mot qui convient pour décrire son apparence.

Ce n’est certainement pas la personne à laquelle je m’attendais.

Ma mère la décrivait comme une belle femme sophistiquée, c’est pourquoi j’en ai conclu qu’elle était une enfant gâtée.

C’est un putain de survêtement ? Je fronce les sourcils, perplexe, tout en la fixant du regard.

Qui porte un survêtement assorti à un rendez-vous avec un homme avec qui elle sera bientôt mariée ?

Tout chez elle est absurde.

Elle n’est pas belle, probablement parce qu’elle porte les mauvais accessoires et un mauvais maquillage.

Est-ce que je vais épouser un clown ? C’est quoi ce bordel ?

Si je n’étais pas déjà de mauvaise humeur, cela suffirait à m’y mettre.

— Hé, fait-elle timidement en me faisant signe de la main quand elle s’approche, me tirant de ma rêverie et augmentant ma colère.

Probablement à cause de ma colère, je n’arrive pas à formuler un mot. Mon expression le disait.

Elle l’ignore, et je réalise que c’est planifié. L’expression de mon visage ne devrait pas être négligée par quelqu’un comme elle.

Elle devrait venir ici pour m’impressionner, pas pour autre chose — et ce n’est pas ce qu’elle fait.

Apparemment, je ne suis pas le seul à être contrarié par ces fiançailles. Elle l’est aussi, et la seule façon pour elle de nous contrarier — ses parents et moi — est de faire le clown en s’habillant ainsi lors de notre premier rendez-vous.

Quand je retrouve enfin ma voix après avoir cligné des yeux et levé les yeux vers elle pour m’assurer que c’est bien elle que j’étais venu rencontrer, je grogne bruyamment :

— Qu’est-ce que c’est que ce bordel ?

Son sourire timide disparaît et se transforme en un air renfrogné. Elle n’a plus l’air timide, mais confiante dans ce qu’elle fait et dans ce qu’elle porte.

— De quoi parles-tu ? demande-t-elle innocemment, mais son regard dit le contraire.

Elle n’est pas innocente. Elle sait de quoi je parle.

Au lieu de lui aboyer dessus et de laisser sortir ma colère refoulée, je me laisse tomber sur le siège, faisant un effort pour contrôler mes nerfs et garder mon sang-froid.

J’ai besoin d’elle.

Maman l’aime bien. Papa n’irait jamais à l’encontre du souhait de Grand-père, même si le vieil homme est mort depuis longtemps.

Ils veulent tous que je me marie. Je ne peux absolument rien leur dire pour changer cela.

Ces fiançailles sont vraiment importantes pour eux.

À Grand-père. Si ce n’était pas le cas, papa n’en parlerait jamais. Il m’aurait suggéré de trouver une fille moi-même.

À quoi bon se mettre en colère contre cette fille idiote et courir vers mon père ?

Rien.

Ça ne va pas, je secoue la tête à nouveau.

Je n’arrive pas à contrôler ma colère.

J’ai envie de crier à tue-tête. D’abord, pour être arrivée en retard et ne pas avoir valu la peine, mais aussi pour être venue dans une tenue aussi ridicule.

N’a-t-elle aucune honte ?

Avant que je puisse trouver une réponse à la question, elle s’assied sur le siège en face de moi avec un autre sourire sur le visage.

C’est un faux.

— Salut, je suis Valerie Adams, dit-elle en tendant sa main droite pour une poignée de main, après avoir laissé tomber son petit sac à main sur la table qui nous sépare.

Mon regard ne quitte pas son visage.

Elle a l’air drôle, et je suis sûr que j’aurais ri aux éclats si c’était ma sœur qui avait fait ça — ou si ce n’était pas la fille avec qui je viens d’apprendre que je me marierais.

Elle le fait exprès, et cette connaissance est bouleversante.

Sans lui prendre la main, je me penche en arrière, les bras croisés, et elle laisse tomber sa main avec un air déçu sur le visage.

C’est aussi un faux.