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Chapitre 2

Author: N.O Darling
Cela fait des heures que je fixe l'horloge accrochée au mur de cette petite pièce où ils m'enferment.

Mon gobelet en papier est vide depuis un bon moment, j'ai gratté les bords jusqu'à les déformer.

Les murs, je les ai explorés du regard, cent fois. Chaque fissure, chaque relief.

Ma tête tourne en boucle.

Je n'arrête pas de rejouer cette foutue scène avec Jenna. Encore. Et encore.

Puis, enfin, un bruit.

La porte s'ouvre.

C'est le même policier de tout à l'heure - celui qui était dans ma chambre.

Il s'installe en face de moi, de l'autre côté de la table.

« Désolé pour l'attente, Mademoiselle Banks. » dit-il en posant un dossier en papier devant lui.

Il l'ouvre et commence à le feuilleter lentement, comme si rien ne pressait.

Le silence devient vite insupportable. L'air semble s'épaissir autour de moi. Je me tortille sur ma chaise, le dos raide, les mains moites. Juste au moment où je m'apprête à parler pour briser cette attente oppressante, la porte s'ouvre à nouveau.

Un homme entre.

Grand. Élégant. Costume visiblement hors de prix. Mallette à la main. Tout en lui respire l'assurance, le contrôle, la froideur.

Son regard glisse vers moi. Froid. Scrutateur.

Il est beau. Pas d'une beauté douce ou accueillante. Non. Une beauté tranchante, presque dérangeante, qui impose le silence autour de lui.

« C'est elle ? » demande-t-il d'un ton sec, presque dédaigneux, hochant légèrement le menton vers moi.

« Oui, Monsieur. » répond l'agent avec un léger signe de tête, avant de lui indiquer la chaise voisine.

Il s'assied sans me regarder. Du moins, pas tout de suite. Il ouvre le dossier qu'on lui tend, le feuillette à son tour avec un calme inquiétant.

Je ne peux m'empêcher de l'observer. Impossible de deviner son âge. Il a cette apparence ambiguë : l'élégance froide d'un trentenaire qui en impose, mêlée à une jeunesse toujours présente dans ses traits.

C'est cette impression qu'il est hors d'atteinte, qu'il appartient à un autre monde. Celui du pouvoir. Du jugement.

Il pourrait avoir entre vingt et quarante ans.

Ou plus ?

Comme s'il avait senti mon regard, ses yeux quittent les feuilles et viennent se planter dans les miens.

Tout mon corps se tend. Mon instinct hurle de détourner les yeux, de briser ce contact visuel oppressant.

Mais je refuse. Je serre les dents.

Je ne vais pas baisser les yeux devant un prétentieux en costume trois-pièces.

Son regard se durcit, devient plus intense, et soudain, une étincelle. Un sourire à peine perceptible. Je crois apercevoir un sourire.

Puis, sans prévenir, il frappe la table d'un geste sec.

L'impact me fait sursauter. Mon cœur rate un battement.

« Vous cherchez à me provoquer, Mademoiselle Banks ? » lâche-t-il d'une voix plus grave que celle qu'il utilisait avec l'agent.

« Vous provoquer ? » Je laisse échapper un petit rire sarcastique en haussant un sourcil, tentant de cacher le fait qu'il m'a réellement fait peur.

« Je vous conseille d'apprendre à obéir, et vite, parce que là où vous allez, les gens seront bien moins tolérants que moi. » déclare-t-il en refermant le dossier avant de le ranger dans sa mallette.

Puis, il se tourne vers l'agent et hoche la tête.

Je les observe échanger une poignée de main et une vague de panique m'envahit.

Mais qu'est-ce qu'ils vont faire ?

« Je prends la suite. » annonce le costard.

« Non… » je parviens à murmurer d'une voix rauque.

« S'il vous plaît, c'était un accident… Je n'ai jamais voulu lui faire de mal… Je… je ne peux pas aller en prison ! Je n'ai pas droit à un avocat ? À un appel ? » Je me tourne vers l'agent, cherchant son opinion.

Il m'ignore et sort.

Je reste seule avec cet homme.

L'air devient plus lourd.

« S'il vous plaît, Monsieur, c'était un accident… » Je sens mes yeux me brûler.

Il m'observe, amusé.

« Ah… On est tout de suite moins arrogante, n'est-ce pas ? » raille-t-il.

Il soupire, visiblement exaspéré, et se dirige vers la porte.

« Allons-y, Mademoiselle Banks. J'ai autre chose à faire que de gérer une gamine en larmes. »

Je reste clouée à ma chaise.

Ce n'est pas réel. Il ne peut pas me forcer.

Il se retourne lentement.

« Vous avez exactement deux secondes pour me suivre. Sinon, je vous laisse ici et la police vous enverra droit en prison. »

« Attendez, quoi ? » Je cligne des yeux.

Il désigne la porte grande ouverte, debout dans l'embrasure.

Mon corps réagit avant mon cerveau. Je me lève d'un bond et me précipite vers lui.

Un sourire à peine perceptible flotte sur ses lèvres.

« Voilà une bonne décision. » murmure-t-il, à peine audible.

Il s'élance dans le couloir à grandes enjambées, et je peine à suivre.

« Mais on va où ? » chuchote-je en jetant des regards inquiets autour de nous.

Les policiers que nous croisons ne nous accordent même pas un regard.

Il ne me répond pas. L'imbécile arrogant m'ignore complètement.

Ce n'est que lorsque nous atteignons l'ascenseur qu'il daigne enfin poser ses yeux sur moi.

Il appuie sur le bouton et se tourne vers moi en attendant que les portes s'ouvrent.

« Dites-moi, Mademoiselle Banks, vous avez souvent des crises d'angoisse ? »

« Pardon ? » Je cligne des yeux, prise de court par cette question sortie de nulle part.

« Votre dossier indique que vous vous êtes évanouie sur place, probablement à cause d'une attaque de panique. Et vu votre tête, vous n'êtes pas loin d'en refaire une. Alors je vous demande, mademoiselle, est-ce que je vais devoir vous tenir la main pendant tout le trajet ? »

Sa moquerie fait exploser ma colère.

« Oh, excusez-moi, Monsieur Parfait, mais j'ai eu une journée de merde, alors pardonnez-moi de ne pas être au top de ma forme ! » Je lâche entre mes dents, les bras croisés, bien droite, histoire de montrer que je ne me laisserai pas faire.

Un éclat amusé traverse son regard. Il incline légèrement la tête, comme s'il notait un point en ma faveur.

Le ding de l'ascenseur interrompt ce duel silencieux. Il avance sans un mot, et, à contrecœur, je le suis.

Lorsque les portes se referment derrière nous, un frisson me parcourt. Une sensation étrange. Comme si, en même temps qu'elles, mon ancienne vie venait de se clore.

« Collins. » lâche-t-il brusquement, me tirant de mes pensées.

Je fronce les sourcils en le regardant, cherchant à comprendre.

Il tourne lentement la tête vers moi, ses yeux s'accrochant aux miens.

Et soudain, il s'approche.

« C'est Monsieur Collins. » murmure-t-il, sa voix à peine un souffle.

Beaucoup trop près.

Si près que lorsque je prends une inspiration, mon torse frôle le sien.

Mon dos effleure la paroi de l'ascenseur. Je n'ai plus nulle part où fuir.

L'air devient lourd, chargé d'une tension inexplicable, mes yeux s'accrochent aux siens.

Son bras avec sa mallette se lève. D'un geste fluide, sa main glisse dans mon dos, et avant que je ne puisse réagir, il m'attire brusquement contre lui.

Un petit cri m'échappe sous l'effet de la surprise.

Merde… Ce type est beaucoup trop sexy.

D'un mouvement lent, il effleure ma joue de l'autre main libre, du bout des doigts, une caresse presque tendre, et un sourire secret flottant sur ses lèvres.

Puis, soudain, sa main se referme sur mon menton, avec une fermeté qui me fait frémir.

« Dors. »

Sa voix résonne, un ordre absolu, et au moment où il prononce ce mot, ses yeux brillent d'un éclat bleuté.

La dernière pensée qui me traverse la tête, avant que tout s'éteigne, c'est que je lui écraserai les bijoux de famille dès que j'en aurai l'occasion.
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