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Chapitre 3

Author: Gérard Poincaré
La réaction de Jérémie était violente. D'une poussée brutale, il m'a projetée au sol : « Nancy, tu cherches la mort ! »

L'arrière de mon crâne a heurté violemment les marches de l'escalier. La douleur fulgurante a fait danser des points noirs devant mes yeux. Les invectives de Jérémie me parvenaient comme à travers du coton : « Nancy, tu ne peux donc t'empêcher de faire du mal aux autres ? ! Ta simple présence dans cette maison corrompt l'atmosphère. Tu me dégoûtes ! »

Rassemblant mes forces, je l'ai interrompu : « Je vais déménager. Sois tranquille. »

« Tu ferais mieux de tenir parole », a-t-il grondé, ma promesse le laissant bouche bée.

Son regard m'a transpercé un instant avant qu'il ne tourne les talons, Suzanne serrée contre lui.

Ma main explorait l'arrière de mon crâne moite de sang quand un souvenir incongru m'a traversé l'esprit :

À quinze ans, nos relations étaient bien différentes. Sachant nos fiançailles précoces, je m'accrochais à lui comme une ombre. Un jour où il s'était faufilé dans un cybercafé, je l'avais suivi. Une dispute avait éclaté avec un autre joueur. En tentant de les séparer, je m'étais coupé le doigt.

Jérémie s'était alors transformé en bête sauvage, rossant un homme bien plus massif que lui jusqu'à ce qu'il implore pitié.

Lui qui s'était inquiété pour une simple égratignure à mon doigt...

Me voilà aujourd'hui, blessée à la tête par ce même homme, pour une autre femme.

Mais peu importe. Après avoir exposé mes intentions à ses parents, nos fiançailles seront rompues.

Je me suis tournée vers une domestique, esquissant péniblement un sourire : « Pourriez-vous m'emmener à l'hôpital ? Je vous paierai. »

Cette jeune fille a fait un pas en avant, mais une main âgée l'a rattrapée par le bras.

Leurs chuchotements me sont parvenus malgré tout :

« Folle ! Tu ignores à quel point le jeune maître la déteste ? Si tu l'aides, tu perdras ton emploi ! »

Terrifiée, la jeune fille m'a jeté un dernier regard apeuré avant de disparaître.

J'ai secoué la tête avec amertume, rampant vers mon téléphone à l'écran brisé.

Mathieu, le père de Jérémie, et Brigitte, sa mère, vivaient la plupart du temps à l'étranger. Ils ne passaient que trois ou quatre jours par mois dans cette villa. Jérémie en était donc l'unique maître absolu.

Il ne s'était pas privé de répéter que je n'étais pas une Millet, et donc indigne d'être servie. Aussi, aucun domestique n'osait m'approcher.

Pire encore : à chacun de mes retours, ils ne me laissaient même pas les restes de repas, préférant jeter la nourriture à la poubelle sous mes yeux.

Mais j'avais appris à vivre avec cette exclusion.

Je me suis traînée jusqu'à l'hôpital où l'on m'a diagnostiqué une commotion cérémoniale, nécessitant deux jours d'observation.

À ma sortie, je suis retournée à la villa pour rassembler mes affaires. Les domestiques m'ont regardée faire, impassibles, sans offrir leur aide.

L'après-midi même, mes cartons déménagés, je me suis installée dans un logement locatif, un refuge temporaire. Mon plan ? Obtenir mon diplôme universitaire, décrocher un emploi, puis rompre définitivement ces fiançailles maudites et quitter ce lieu.

Trois jours après avoir quitté la demeure de Jérémie, mon téléphone a sonné. Sa voix était pâteuse d'alcool : « Où es-tu ? Je suis dans le salon A12. Viens. »

Interrompue dans la rédaction de mon CV, j'ai répondu avec agacement : « Qu'est-ce que tu veux ? »

Un silence soudain à l'autre bout du fil, comme si toute l'agitation autour de lui s'était figée.

« Allô ? » Aucune réponse. Ma main s'est dirigée alors vers le bouton de raccrochage.

Soudain, sa voix a émergé : « Nancy, où es-tu passée ? »

Mes doigts continuant de danser sur le clavier, j'ai répondu distraitement : « Tu as dit que ma présence te souillait l'air. Alors j'ai déménagé. Ne t'inquiète pas, je ne reviendrai plus. »

Un souffle rauque, puis un rire glacé : « Depuis quand es-tu si obéissante ? C'est bien toi qui me collais aux basques ? Si tu m'obéis à ce point, alors quitte cette ville ! Disparais de ma vue ! »

« Je ne sais pas à quoi tu joues, Nancy. Mais si tu continues de t'en prendre à Suzanne, tu le regretteras ! »

Ma souris coincée, toute mon attention était rivée à l'écran. Il m'a fallu un moment pour digérer ses paroles.

Sa voix moqueuse a repris : « Alors ? Plus rien à dire ? Tes pitreries commencent à lasser. Présente tes excuses à Suzanne, et je t'autoriserai peut-être à revenir. »

J'ai pris une inspiration avant de répondre posément : « D'accord, Jérémie. Je vais partir. »

Sans attendre de réaction, j'ai coupé la communication.La réaction de Jérémie était violente. D'une poussée brutale, il m'a projetée au sol : « Nancy, tu cherches la mort ! »

L'arrière de mon crâne a heurté violemment les marches de l'escalier. La douleur fulgurante a fait danser des points noirs devant mes yeux. Les invectives de Jérémie me parvenaient comme à travers du coton : « Nancy, tu ne peux donc t'empêcher de faire du mal aux autres ? ! Ta simple présence dans cette maison corrompt l'atmosphère. Tu me dégoûtes ! »

Rassemblant mes forces, je l'ai interrompu : « Je vais déménager. Sois tranquille. »

« Tu ferais mieux de tenir parole », a-t-il grondé, ma promesse le laissant bouche bée.

Son regard m'a transpercé un instant avant qu'il ne tourne les talons, Suzanne serrée contre lui.

Ma main explorait l'arrière de mon crâne moite de sang quand un souvenir incongru m'a traversé l'esprit :

À quinze ans, nos relations étaient bien différentes. Sachant nos fiançailles précoces, je m'accrochais à lui comme une ombre. Un jour où il s'était faufilé dans un cybercafé, je l'avais suivi. Une dispute avait éclaté avec un autre joueur. En tentant de les séparer, je m'étais coupé le doigt.

Jérémie s'était alors transformé en bête sauvage, rossant un homme bien plus massif que lui jusqu'à ce qu'il implore pitié.

Lui qui s'était inquiété pour une simple égratignure à mon doigt...

Me voilà aujourd'hui, blessée à la tête par ce même homme, pour une autre femme.

Mais peu importe. Après avoir exposé mes intentions à ses parents, nos fiançailles seront rompues.

Je me suis tournée vers une domestique, esquissant péniblement un sourire : « Pourriez-vous m'emmener à l'hôpital ? Je vous paierai. »

Cette jeune fille a fait un pas en avant, mais une main âgée l'a rattrapée par le bras.

Leurs chuchotements me sont parvenus malgré tout :

« Folle ! Tu ignores à quel point le jeune maître la déteste ? Si tu l'aides, tu perdras ton emploi ! »

Terrifiée, la jeune fille m'a jeté un dernier regard apeuré avant de disparaître.

J'ai secoué la tête avec amertume, rampant vers mon téléphone à l'écran brisé.

Mathieu, le père de Jérémie, et Brigitte, sa mère, vivaient la plupart du temps à l'étranger. Ils ne passaient que trois ou quatre jours par mois dans cette villa. Jérémie en était donc l'unique maître absolu.

Il ne s'était pas privé de répéter que je n'étais pas une Millet, et donc indigne d'être servie. Aussi, aucun domestique n'osait m'approcher.

Pire encore : à chacun de mes retours, ils ne me laissaient même pas les restes de repas, préférant jeter la nourriture à la poubelle sous mes yeux.

Mais j'avais appris à vivre avec cette exclusion.

Je me suis traînée jusqu'à l'hôpital où l'on m'a diagnostiqué une commotion cérémoniale, nécessitant deux jours d'observation.

À ma sortie, je suis retournée à la villa pour rassembler mes affaires. Les domestiques m'ont regardée faire, impassibles, sans offrir leur aide.

L'après-midi même, mes cartons déménagés, je me suis installée dans un logement locatif, un refuge temporaire. Mon plan ? Obtenir mon diplôme universitaire, décrocher un emploi, puis rompre définitivement ces fiançailles maudites et quitter ce lieu.

Trois jours après avoir quitté la demeure de Jérémie, mon téléphone a sonné. Sa voix était pâteuse d'alcool : « Où es-tu ? Je suis dans le salon A12. Viens. »

Interrompue dans la rédaction de mon CV, j'ai répondu avec agacement : « Qu'est-ce que tu veux ? »

Un silence soudain à l'autre bout du fil, comme si toute l'agitation autour de lui s'était figée.

« Allô ? » Aucune réponse. Ma main s'est dirigée alors vers le bouton de raccrochage.

Soudain, sa voix a émergé : « Nancy, où es-tu passée ? »

Mes doigts continuant de danser sur le clavier, j'ai répondu distraitement : « Tu as dit que ma présence te souillait l'air. Alors j'ai déménagé. Ne t'inquiète pas, je ne reviendrai plus. »

Un souffle rauque, puis un rire glacé : « Depuis quand es-tu si obéissante ? C'est bien toi qui me collais aux basques ? Si tu m'obéis à ce point, alors quitte cette ville ! Disparais de ma vue ! »

« Je ne sais pas à quoi tu joues, Nancy. Mais si tu continues de t'en prendre à Suzanne, tu le regretteras ! »

Ma souris coincée, toute mon attention était rivée à l'écran. Il m'a fallu un moment pour digérer ses paroles.

Sa voix moqueuse a repris : « Alors ? Plus rien à dire ? Tes pitreries commencent à lasser. Présente tes excuses à Suzanne, et je t'autoriserai peut-être à revenir. »

J'ai pris une inspiration avant de répondre posément : « D'accord, Jérémie. Je vais partir. »

Sans attendre de réaction, j'ai coupé la communication.
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