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Chapitre 4. Aurore

Author: Zuzu
last update Last Updated: 2025-06-12 21:14:18

J’ai pénétré dans le hall de l’hôpital, un peu perdue, le cœur encore battant de tout ce que je venais de vivre. Une infirmière s’est approchée de moi :

— Il a été conduit aux urgences. 

Je n’ai même pas eu le temps de répondre. Je me suis mise à marcher vite, presque à courir. Mes pas résonnaient dans les couloirs trop blancs, trop froids. Le bouquet de fleurs dans mes mains pendait lamentablement. Les pétales étaient froissés, certains déjà fanés. Je n'avais pas pris soin de lui, emportée par l'urgence… Mais tant pis, je le donnerai quand même à grand-mère. Elle comprendra. Elle comprend toujours.

Un médecin m’attendait à l’entrée du service d’urgences.

— C’est vous qui l’avez amené ? me demanda-t-il calmement.

— Oui. J’étais là, sur le trottoir, quand il a eu l’accident. La voiture a pris la fuite. Alors j’ai cherché de l’aide, et une dame m’a aidée à l’emmener ici. 

— Est-ce que vous le connaissez ? 

Je baissai les yeux.

— Non… Je ne connais même pas son nom. 

Le médecin hocha la tête, compréhensif.

— Tant qu’il ne s’est pas encore réveillé, vous devrez rester ici, m’avait dit le médecin. Même si vous ne le connaissez pas, c’est vous qui l’avez amené. Alors, nous aurons sans doute quelques questions à vous poser. 

Je trouvai ça un peu injuste. J’étais juste une passante. Mais j’ai hoché la tête, résignée.

— D’accord, ai-je murmuré.

Je suis allée m’asseoir dans le couloir, sur un banc dur et froid. J’avais laissé le bouquet de fleurs sur mes genoux, comme on garde un secret fragile. Mes doigts le serraient sans vraiment le vouloir, pendant que mon regard se perdait sur le carrelage. Le silence de l’hôpital me pesait. Les murs semblaient respirer lentement, comme un géant endormi. J’étais fatiguée. Vidée.

Le temps a passé. Je ne sais pas combien exactement, mais une trentaine de minutes plus tard, une infirmière est sortie du bloc.

— Le patient va bien, dit-elle d’une voix douce.

— Il est entre de bonnes mains. Il va se réveiller bientôt. Le médecin a juste recousu quelques blessures superficielles sur le visage. Ce n’est pas grave. 

J’ai senti mes épaules se relâcher, et un long soupir a échappé à mes lèvres.

— Est-ce que je peux partir ? lui ai-je demandé.

— Je reviendrai demain matin pour prendre de ses nouvelles. 

— Bien sûr. Il reste ici sous surveillance. Et honnêtement, nous n’avons pas besoin que vous restiez. Vous pouvez partir, madame. 

Je l’ai remerciée d’un simple signe de tête.

Sans dire un mot de plus, je me suis levée, attrapant mon sac et mes fleurs. Je n’avais plus d’énergie pour réfléchir. Je marchais à petits pas dans le long couloir qui menait vers l’unité où était soignée ma grand-mère. Mon cœur battait encore un peu trop vite.

Elle était hospitalisée ici depuis quatre mois. Le AVC. Les médecins avaient insisté : elle ne pouvait pas retourner chez elle. Là-bas, impossible de suivre toutes instructions, personne ne veillait sur elle comme il le fallait. Pardon, mamie, ai-je soufflé intérieurement. Je sais que je suis en retard.

Je poussai enfin la porte de sa chambre, le bouquet froissé contre ma poitrine.

Je me suis dirigée vers le service de ma grand-mère et j’ai doucement ouvert la porte. La chambre était paisible, baignée dans la lumière tamisée du couloir. Elle dormait profondément, son visage tourné vers la fenêtre. Mais, comme si elle avait senti ma présence, elle a ouvert les yeux. Lentement. Avec cette douceur qui la caractérisait.

— Ma petite... a-t-elle murmuré en se redressant tant bien que mal.

Elle n’était plus aussi forte qu’avant, mais je voyais un petit mieux dans son regard. Dans ses gestes aussi. Elle restait paralysée d’un côté, la jambe gauche toujours immobile, le bras gauche à peine réactif. Les médecins avaient utilisé un terme compliqué pour désigner son état... Je ne m’en souvenais pas, mais ce n’était pas si important. Ce qui comptait, c’était qu’il y avait un progrès. Même infime.

Je me suis précipitée vers elle et je l’ai serrée fort contre moi.

— Grand-mère... je suis là. 

— Ah, Aurora, ma petite étoile... Ne penses-tu pas que tu arrives un peu tard ? 

Je souris, un peu coupable.

— Désolée, grand-mère. J’ai eu... un accident. 

Son visage s’est crispé.

— Un accident ? Est-ce que ça va ? Tu n’es pas blessée ? 

— Non, non, ce n’est pas moi. Je vais tout te raconter. Mais d’abord... 

J’ai sorti le bouquet de fleurs un peu défraîchi et je l’ai posé doucement sur la table de chevet.

— Je suis venue m’excuser. J’ai été absente deux jours. Je suis désolée. 

Elle a pris ma main dans la sienne, doucement, de celle qui fonctionnait encore bien.

— Ne t’en fais pas, ma chérie. Je sais que tu fais tout ce que tu peux. Tu travailles dur. Je ne t’en veux pas. 

— Merci, grand-mère. 

Elle m’a souri, ce sourire chaleureux qui faisait tout oublier.

— Maintenant, parle-moi de cet accident. 

Je me suis assise sur le bord du lit, baissant un peu la voix, comme si je racontais un secret.

— Je venais juste de fermer la boutique, comme d’habitude. Je traversais la route pour prendre un taxi. Et là... juste devant moi, une voiture... un choc... un homme a été renversé. C’était si brutal. J’ai cru que mon cœur allait s’arrêter. 

Ses yeux s’emplirent d’inquiétude.

— Mon Dieu... 

— Je ne pouvais pas rester là, faire semblant de ne rien avoir vu. C’était trop cruel. Il n’y avait presque plus personne autour. J’ai demandé de l’aide à une dame qui passait, et elle a accepté de nous conduire jusqu’ici.

Elle hocha la tête lentement, visiblement émue.

— C’est très bien ce que tu as fait, ma chérie. Tu es un ange. Je suis sûre que Dieu le voit, et qu’Il te le rendra un jour. 

— Amen, grand-mère. 

Un silence doux s’installa. J’ôtai mes chaussures, posai mon sac près du lit, et tirai une chaise pour m’asseoir à ses côtés.

— Il se fait tard. Je ne vais pas rentrer. Je vais passer la nuit ici avec toi. 

Elle acquiesça avec un sourire.

— Tu as mangé ? me demanda-t-elle.

— Non. Et toi ? 

— Oui, oui. Les infirmiers prennent bien soin de moi. 

— Ah... je suis soulagée. soupirai-je.

— Moi, je n’ai pas faim. Je veux juste rester là, un moment, près de toi. 

Et dans cette nuit tranquille, dans cette chambre où le tic-tac de l’horloge était la seule voix, j’ai pris la main de ma grand-mère et je l’ai gardée dans la mienne, comme on retient un fil de lumière.

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