Se connecterZarekL’aube ne s’est pas encore levée que le vent déjà fouette les murs du palais, chargé d’électricité et de cendre. Je ne dors pas. Sarah non plus. Elle se tient debout près de la fenêtre, nue sous la lueur grise, ses cheveux glissant sur sa peau comme des filaments d’or vivant.Je sens son trouble, sa fièvre, son impatience.— C’est aujourd’hui, murmuré-je.Elle hoche la tête, sans détourner le regard du ciel.— Je le sens. L’air brûle. Le monde attend.Un battement sourd traverse la terre, un rythme ancien qui semble sortir du sol lui-même. C’est le signal.La sorcière nous attend au centre du cercle d’ancrage, dans la cour intérieure où la rosée fume déjà sous la chaleur du sort. Autour de nous, les pierres gravées scintillent d’une lueur pâle, et des runes noires serpentent sur le sol, s’animant comme des veines.— Asseyez-vous, dit-elle. Face à face. Le rituel ne supporte pas la peur.Je m’agenouille devant Sarah. Son souffle se mêle au mien. Le froid de l’aube s’efface sous l
ZarekLe silence retombe après le départ de la sorcière, mais ce n’est pas un silence ordinaire, c’est une respiration qui pulse entre nous, une énergie vivante qui semble sortir des murs, des draps, de sa peau. Sarah ferme les yeux, et j’entends, sans qu’elle parle, le frémissement de sa pensée, comme un écho dans ma poitrine.Je ne comprends pas. Je sens seulement.Sa peur, sa chaleur, son feu.Je tends la main, hésite, la frôle. Sa peau est tiède, presque brûlante, comme si elle contenait un soleil trop grand pour un corps humain. Une lumière ténue filtre par la fenêtre, éclaire son profil, et j’ai la sensation que chaque souffle qu’elle prend déplace quelque chose dans le monde.— Sarah, murmuré-je, tu m’entends ?Pas de réponse. Mais son souffle change. Et dans mon crâne, un mot, pas parlé, pas pensé, me traverse : oui.Je recule d’un geste brusque, le cœur serré.— Sorcière !Elle revient comme si elle n’était jamais partie. Son manteau glisse sur le sol, sa présence fait vibrer
Sarah Zarek reste à mes côtés, le plateau de fruits posé entre nous, mais son regard ne se fixe pas sur moi, il cherche, il scrute l’air, comme s’il pouvait voir à travers le voile invisible qui me relie au monde des forces anciennes. Ses doigts glissent nerveusement sur le bois du lit, et je devine son trouble, sa peur, mêlée à l’admiration.— Sorcière… commence-t-il, sa voix brisée par l’incompréhension, je… je ne comprends pas ce qui lui arrive, explique-moi… dis-moi ce que je dois faire .La sorcière revient silencieusement, ses pas feutrés, son manteau flottant derrière elle comme une ombre vivante. Elle s’incline légèrement, puis s’assoit à une distance mesurée, ses yeux perçants fixant Sarah, et dans ce regard je lis le poids de connaissances anciennes, le murmure d’un savoir qui dépasse les siècles .— Ce qui arrive à votre épouse… dit-elle d’une voix grave, qui résonne dans la pièce comme un écho de tambours lointains, est l’éveil d’un pouvoir qu’elle portait en elle bien av
SARAHJe vacille dans ses bras, et je sens Zarek hésiter, comme si chacun de ses gestes pesait plus qu’un royaume entier, il me soutient avec une précaution inhabituelle, ses mains fermes mais tremblantes glissent le long de mon dos, me guidant jusqu’à la chambre aux lourds rideaux de velours pourpre, et chaque pas résonne dans mes tempes comme un écho de l’orage intérieur qui ne m’a pas quittée depuis la salle du trône, je sens encore le souffle de la foule, leurs prières, leurs cris, cette adoration confuse qui pulse dans mes veines comme un feu ancien que rien ne peut éteindre .Il referme la porte derrière nous, et soudain la pièce me paraît minuscule, intime, comme un refuge fragile face à l’immensité de ce que je viens de libérer, et Zarek recule légèrement, ses yeux cherchant les miens, cherchant une explication qu’il ne trouvera jamais, mais dans cette tension flottante, je perçois son désir de me protéger malgré sa peur .— Repose-toi, murmure-t-il, et sa voix, bien que basse
SARAHJe sens leurs genoux heurter la pierre avant même de les voir s’incliner, ce bruit mat résonne comme un tonnerre souterrain, un battement qui pulse avec mon propre cœur, et quand je rouvre les yeux, le monde n’a plus la même texture, les couleurs semblent saturées, chaque ombre palpite comme si elle respirait, et la lumière se plie autour de moi, docile et rétive à la foisSur son trône, Zarek chancelle, sa main crispée sur l’accoudoir tremble, sa bouche articule des mots qui s’étranglent avant de se former, et je lis dans ses yeux non plus la certitude du souverain, mais une peur nue, primitive, celle d’un homme qui pressent que son règne tout entier vient d’être effacé par une force plus grande que lui— Sorcellerie… souffle-t-il, sa voix brisée se perdant dans le tumulteJe pourrais répondre, mais les mots m’échappent, car je ne parle plus seulement avec ma bouche, mon corps tout entier résonne d’un langage muet que la foule comprend malgré elle, un langage de vibrations, d’o
ZAREKLe silence qui a recouvert le royaume après son apparition ne dure pas, il se fissure comme une vitre trop tendue, et c’est alors qu’un autre phénomène surgit, inexplicable, irréel, une vibration sourde qui se propage dans les pierres de la citadelle, dans les colonnes, dans les veines mêmes de la terre. Les drapeaux claquent sans vent, les flammes des torches se penchent toutes dans une direction unique, comme si l’air lui-même obéissait à un ordre invisible.Sarah avance encore, et chaque pas semble déclencher un écho, une onde qui traverse la foule. Certains se mettent à pleurer sans raison, d’autres sentent leurs genoux céder d’eux-mêmes, incapables de se tenir debout face à cette intensité qui n’a rien d’humain. Je le vois, je le sens dans ma chair : son pouvoir se manifeste, incontrôlable, sauvage, mais contenu par une volonté qui lui appartient à elle seule.Dans la foule, une femme s’évanouit en chuchotant des prières, un vieil homme tombe à genoux et murmure qu’il voit







