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Chapitre 2 – L’Étreinte du Crépuscule

Author: Déesse
last update Last Updated: 2025-03-11 15:39:23

Léna

Le vent nocturne mord ma peau, glisse entre les fibres de mon manteau comme des doigts fantomatiques. Je cours, mes pas résonnant sur les pavés humides, la respiration saccadée. Pas à cause de l’effort. Non.

À cause de lui.

Alexios.

Je maudis son nom en silence, le roule dans mon esprit comme un poison que je voudrais recracher. Mais il est déjà là, infiltré dans mes pensées, imprégné sous ma peau.

Je m’arrête enfin, le dos contre un mur froid, une main plaquée sur ma poitrine. Mon cœur tambourine, encore secoué par ce qui vient de se passer.

Je le revois.

Ses yeux sombres, insondables. Son sourire, à peine esquissé, chargé d’une promesse dangereuse. La façon dont il s’est approché, trop près, beaucoup trop près, et cette sensation…

Je secoue la tête violemment, furieuse contre moi-même. Je n’ai pas fui. Je me suis retirée stratégiquement. C’est différent.

Je me répète ces mots comme un mantra, mais au fond, je sais.

J’ai perdu ce duel.

Pas à la lame, pas au combat.

Mais à son regard.

— Merde.

Je frappe le mur du poing, les jointures douloureuses sous l’impact. Je n’aurais pas dû vaciller. Je n’aurais pas dû le laisser me troubler. C’est un monstre. Un tueur.

Et moi, je suis là pour l’éliminer.

Ma mission n’a pas changé. Il doit mourir.

Alors pourquoi mon corps trahit-il ma volonté ? Pourquoi ai-je encore sur les lèvres la brûlure de sa voix ?

Je ferme les yeux, inspire profondément. Il faut que je me reprenne.

Le QG n’est pas loin. Je dois retrouver les autres, faire mon rapport.

Je reprends ma course, traversant la ville endormie jusqu’à une façade discrète, sans enseigne. Je toque trois fois, code convenu, et la porte s’entrouvre aussitôt.

— Léna ?

La voix de Sienna. Un mélange de soulagement et d’anxiété.

Je franchis le seuil. À l’intérieur, l’atmosphère est tendue. Deux autres silhouettes se tournent vers moi.

Isolde, assise sur le canapé, les bras croisés. Son regard perçant me scrute, cherchant la moindre faille.

Et Cassandre, adossée contre le mur, le visage voilé d’une inquiétude qu’elle tente de masquer.

Elles savent.

Elles voient que quelque chose a changé.

— Alors ? demande Isolde, sa voix tranchante. Tu l’as trouvé ?

Je hoche la tête, retire mon manteau, le jette sur une chaise.

— Oui.

— Et ?

Le silence s’étire. Cassandre se redresse légèrement, capte mon hésitation.

— Il t’a blessée ?

— Non.

Je serre les poings, sentant la pression monter en moi. Je devrais leur dire. Je devrais leur avouer que je n’ai pas pu attaquer. Que j’ai flanché.

Mais je n’y arrive pas.

— C’était… étrange, finis-je par murmurer.

Isolde plisse les yeux.

— Étrange comment ?

Je me détourne, attrape un verre d’eau pour me donner une contenance. Je le porte à mes lèvres, mais le goût me semble fade, inutile.

— Il savait que je viendrais.

— Il t’attendait ? s’étonne Sienna.

J’acquiesce lentement.

— Et il n’a pas essayé de te tuer ?

Un frisson me parcourt. Non. Il ne m’a pas attaquée. Il aurait pu, pourtant. Il aurait pu me briser en un battement de cils.

Mais il ne l’a pas fait.

À la place, il m’a enfermée dans son regard, m’a volé mon souffle.

— Non.

Cassandre échange un regard inquiet avec Sienna. Isolde, elle, reste impassible. Mais je la connais. Elle analyse, décortique, cherche la faille dans mes mots.

— Tu es troublée, assène-t-elle.

Je me raidis.

— Non.

— Si.

Elle se lève, s’approche de moi avec cette lenteur calculée qui me rappelle qu’elle a toujours été la plus lucide d’entre nous.

— Il a fait quelque chose, pas vrai ?

Mon cœur se serre.

Il n’a rien fait.

C’est justement ça, le problème.

C’est moi qui ai faibli.

— Ce n’est rien, dis-je sèchement.

Mensonge.

Mais Isolde n’insiste pas. Pas maintenant. Elle sait que je reviendrai d’ici peu, incapable de garder ça pour moi.

Elle se contente d’un simple :

— Repose-toi. Demain, on décide de la suite.

Je hoche la t

ête et quitte la pièce.

Mais cette nuit, le sommeil ne viendra pas.

Parce que dans l’obscurité, une paire d’yeux me hante encore.

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