LOGINChapitre 7 — L’ombre du passé
Nikolai
Je m’élance à travers le labyrinthe d’entrepôts déserts, le cœur battant à tout rompre. Le cri de Joran résonne encore dans mes oreilles, brûlant comme un écho obsédant. Chaque pas me rapproche de lui, mais aussi d’un danger invisible qui se resserre autour de nous. Le poids de la clé USB dans ma poche me rappelle que ce n’est plus une simple affaire. C’est une guerre totale, une lutte pour la survie.
Je contourne un container rouillé, haletant. La lumière des néons vacille au-dessus, projetant des ombres menaçantes qui dansent comme des spectres. Je cherche Joran du regard, mais ce ne sont que des silhouettes mouvantes, des formes indistinctes. Où est-il ? Pourquoi ce silence soudain ?
— Joran ! criai-je encore, ma voix brisée par l’angoisse.
Une ombre bouge à ma droite. Instinctivement, je me baisse, sors mon arme. Mais c’est Aelis, son regard dur, encore plus grave.
— Il est là-bas, dans le vieux hangar. Mais ce n’est pas sûr. Ils l’ont sûrement repéré, dit-elle, la voix basse, mais tendue.
Je serre les dents. Le vieux hangar. L’endroit parfait pour un piège. Je connais cet endroit, ses recoins, ses failles. Mais il est aussi notre seule chance.
— On doit y aller ensemble. Pas de folie, ni d’improvisation. Si ce réseau a des yeux partout, ils savent que nous sommes là, et ils attendent notre moindre erreur.
Je hoche la tête, la tension me brûlant les tempes. Nous avançons prudemment, chaque pas mesuré, chaque souffle contrôlé. Le temps semble suspendu, pesant comme une chape de plomb.
Alors que nous approchons du hangar, un bruit métallique retentit derrière nous. Je me retourne brusquement, arme levée. Une silhouette s’élance, rapide, trop rapide. Le coup part, la détonation éclate, mais la silhouette se jette à terre. Ce n’est pas un ennemi.
— Calla ! souffle Aelis, soulagée.
Calla, toujours fidèle, toujours prête. Elle rejoint notre côté, son visage marqué par la fatigue et la détermination.
— J’ai fait ce que j’ai pu pour préparer une extraction rapide. Mais la situation est pire que prévu. Ils ont des renforts, et ils n’hésiteront pas à tout détruire pour récupérer cette clé.
Le froid me saisit. Tout ce que nous avons construit, tout ce que nous croyions maîtriser, menace de s’effondrer en un instant.
— On doit agir vite. Trouver Joran, récupérer les preuves, et sortir d’ici. Vivants.
Nous pénétrons dans le hangar, le silence oppressant. Les murs suintent l’humidité et la peur. Des caisses renversées, des traces de lutte récente. Quelque chose a eu lieu ici.
Soudain, un bruit sourd derrière une porte métallique. J’avance, les sens en alerte. J’ouvre brusquement la porte.
Joran est là, blessé, appuyé contre le mur, le souffle court, mais vivant. Son regard croise le mien, une lueur de soulagement mêlée à la douleur.
— Nikolai... murmure-t-il, la voix rauque.
Je m’agenouille à ses côtés, l’aide à se relever malgré ses protestations.
— On n’a pas de temps. Ils vont revenir, et cette fois, ils ne feront pas de quartier.
Un grondement sourd s’élève au loin. Des bruits de pas lourds, des voix. Le réseau ne va pas tarder.
Je jette un coup d’œil à la clé USB, puis à Aelis et Calla.
— On sort d’ici. Ensemble.
Mais alors que nous faisons demi-tour, une silhouette se découpe dans l’ombre. Aelis. Son allure change, un sourire glacé remplace la dureté habituelle de son regard.
— Vous êtes bien courageux de vous aventurer aussi loin, Nikolai. Joran. — dit-elle, la voix posée, presque douce, mais terriblement menaçante.
Je la fixe, incapable de comprendre l’ombre qui semble l’habiter soudain.
— Aelis... dis-je lentement, cherchant un signe de la femme que je connais.
Mais son sourire s’élargit, un éclat cruel dans les yeux.
— Croyez-moi, vous n’avez aucune idée du prix à payer pour cette trahison.
Un silence pesant s’installe, comme si l’air autour de nous s’était figé. La guerre est loin d’être terminée. Elle ne fait que commencer.
Je serre les poings, prêt à défendre ce qui reste de notre fragile espoir.
— Aelis, dis-je d’une voix glaciale, vous ne nous arrêterez pas. Pas cette fois.
Elle incline la tête, mystérieuse et menaçante.
— Oh, Nikolai... c’est ce que nous verrons.
Elle sort un petit appareil de sa poche, un signal lumineux rouge clignotant. Un instant plus tard, des silhouettes apparaissent à l’entrée du hangar. Les renforts. Nous sommes encerclés.
— Vous avez été naïfs, mes chers amis. Ce jeu est fini.
Joran chancelle, affaibli. Je le soutiens tandis que Calla s’avance vers Aelis, les muscles tendus.
— C’est toi qui as trahi, Aelis ? demande Calla, la voix pleine d’incrédulité.
Aelis esquisse un sourire froid.
— J’ai toujours joué ma propre carte. Et aujourd’hui, elle me mène ici, à la victoire.
Un grondement sourd envahit la pièce alors que les renforts s’approchent. Je sais que nous n’avons plus qu’une seule chance : la fuite ou la confrontation.
Je regarde Aelis, puis Joran, puis Calla.
— Préparez-vous. On ne va pas se rendre sans se battre.
Elle rit, un son glacial qui résonne dans l’air chargé de tension.
— Très bien, Nikolai. Montrez-moi ce que vous valez.
Alors que les premiers tirs éclatent, je sens une rage nouvelle monter en moi. La trahison d’Aelis brûle comme un poison, mais elle réveille aussi une détermination que rien ne pourra étouffer.
Ce soir, dans l’ombre du passé, la guerre éclate une fois de plus. Mais je jure que je survivrai. Parce que pour la vérité, pour Joran, pour ce que nous avons construit, je ne peux pas perdre.
Et même si le monde entier se retourne contre moi, je me relèverai. Toujours.
Chapitre 111 — Flamme et Cendres AelisMétropole basse : Appartement abandonné, 05h30Ils ont franchi le seuil dans un silence lourd, dense, presque palpable. Le genre de silence qui ne laisse aucune place au doute, qui enveloppe tout, comme un voile chargé de fatigue, de peur et d’espoir mêlés.L’appartement délabré sentait le vieux bois moisi, l’humidité stagnante et la poussière qui s’accroche aux meubles cassés. Mais c’était un sanctuaire provisoire, un refuge fragile, un îlot de calme dans cette tempête de chaos qui déchirait la ville.Aelis dépose lentement le sac, ses doigts tremblants à cause de l’adrénaline et de la tension qui ne la quittent jamais vraiment. Elle sent chaque muscle crier sa fatigue, son corps pesant comme une enclume. Mais ce n’est pas seulement l’épuisement qui la tenaille c’est cette tension sourde, brûlante, ce feu intérieur qui ne s’éteint pas, cette promesse muette qu’elle partage avec Nikolai, plus forte que tous les dangers.Il referme la porte derri
Chapitre 110 — Fractures et FureurAelisMétropole basse : Ruelles étroites, 04h45Le cœur tambourinait dans sa poitrine, chaque battement résonnait comme un coup sourd contre ses côtes, une pulsation sauvage qui refusait de ralentir. L’odeur âcre du feu flottait encore dans l’air humide, mêlée à celle plus crue de la sueur, du sang et du bitume mouillé. Cette nuit n’avait pas fini de marquer leurs corps, de graver ses brûlures invisibles sous leur peau.Le poids des preuves, lourd et froid, appuyait sur son épaule, un fardeau tangible et nécessaire. Elle sentait le cuir de son sac contre sa peau, le bruit sourd des disques durs qui semblaient battre comme un cœur perdu dans le silence. Ces fragments de vérité étaient leur seule arme, la clef pour faire éclater la façade pourrie de cette ville corrompue.À ses côtés, Nikolai avançait sans un mot, ses traits tirés, ses yeux noirs luisants sous la lueur blafarde des lampadaires. Son regard était une tempête contenue, une mer agitée qui
Chapitre 109 — L’Écorce BriséeNikolaiMétropole basse ; Zone portuaire, 04h10Le vent fouette son visage, emportant avec lui la pluie froide qui s’infiltre sous son col. Il respire l’odeur âcre du feu qui dévore encore le dépôt, mélange de plastique brûlé, de bois carbonisé, et d’huile rance. Le goût métallique du sang, amer et familier, lui colle à la langue. Ses muscles sont tendus, chaque fibre vibrante comme un arc prêt à se briser.Le sac lourd sur son épaule écrase un peu plus le poids des secrets qu’il transporte. Ces disques durs, témoins muets des abominations du Syndicat, pourraient faire vaciller le trône de plusieurs rois obscurs.Il observe Aelis devant lui, ses pas précis, le regard froid qui se perd dans la nuit comme s’il était la dernière lueur d’espoir dans cette métropole en décomposition. Chaque mouvement d’elle est un pacte silencieux, un serment d’allégeance à la survie.Mais à l’intérieur de lui, une tempête gronde, prête à tout engloutir.– Ce n’est que le dé
Chapitre 108 — Braises et CicatricesAelisMétropole basse — Zone portuaire, 03h42La pluie tombe en oblique, portée par un vent qui charrie le sel, le gasoil et la rouille des coques échouées. L’air est épais, comme saturé de quelque chose de plus ancien que la ville elle-même.Aelis marche vite. Pas de talons ce soir, juste des bottes usées qui ne trahissent pas son pas.Dans la poche de son manteau, ses doigts froissent un bout de papier. L’encre a bavé sous l’humidité, mais l’adresse reste lisible. Trois mots griffonnés par un indic’ qu’elle ne connaît pas, et qui pourraient aussi bien la mener vers une vérité qu’à un piège.Ses pensées vont et viennent, rythmées par le bruit sec de ses pas sur l’asphalte.Elle sait ce qui l’attend au bout de ce chemin.Elle sait aussi que Nikolai est déjà là.Une silhouette se détache, nette, dans le halo jaune d’un lampadaire fissuré.C’est lui.Ses cheveux noirs collent à ses tempes, et les gouttes ruissellent sur les lignes d’encre qui serpent
Chapitre 107 — L’homme qui efface les lignesSelyna : Quartier des Portes Basses, Secteur DeltaOn lui avait dit qu’il était mort.Mort il y a huit ans, dans un effondrement d’archives souterraines.Mort, et pourtant aucun corps n’avait été retrouvé.Mort, comme on range un dossier gênant dans une armoire sans clé, en scellant la porte derrière.Mais Selyna sait lire les absences.Et les absences parlent, quand on les écoute assez longtemps.Ce qu’elle a trouvé dans les registres nocturnes n’était pas une preuve, pas encore.Juste un nom mal effacé, réinscrit d’une autre main, dans la marge d’un carnet de transfert."Aaran Voss Transfert annulé, motif confidentiel."Alors elle est venue ici.Ici, dans ce bout de ville qui ne regarde jamais vers le haut.Où les façades s’écaillent comme de vieilles cicatrices.Où la lumière ne descend pas, elle stagne jaunâtre, grasse, prête à coller aux doigts.Les ruelles s’ouvrent et se referment comme des bouches, suintantes, méfiantes.Les pas rés
Chapitre 106 — Ligne de fractureIvann , Archives d’ombre, secteur NordIl ne dort plus.Pas depuis la visite.Trois jours plus tôt, quelqu’un a fait glisser sous sa porte une lettre sans nom, sans date. Juste une phrase, à l’encre bleue : "Tu n’as pas changé. C’est ton silence qui s’est épaissi."Il a reconnu l’écriture.Pas tout de suite. Mais assez vite.Vaëra.Une ancienne conseillère tactique, officiellement tombée en disgrâce. Officieusement ? Elle avait "choisi le froid", comme on disait dans les sphères militaires c’est-à-dire l’exil, le gel volontaire, la mise à l’écart jusqu’à disparition.Elle était plus fine que lui.Plus directe. Plus effrayante, aussi.Et il l’avait trahie. Pas par méchanceté.Par lassitude.Et elle lui avait dit, juste avant de disparaître : "Quand Aelis tombera, vous vous disputerez ses cendres comme des chiens devant une pierre précieuse."Il l’avait ignorée.Mais aujourd’hui, il ne peut plus.Pas avec ce qu’il voit se dessiner.Il a suivi les trace