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Chapitre 6 — L’eau froide des vérités

Author: Déesse
last update Huling Na-update: 2025-08-04 05:03:54

Gracias

Je crois que j’ai dormi, oui , mais pas vraiment , pas comme on dort quand on est apaisée ou qu’on récupère.

J’ai dormi parce que mon corps n’en pouvait plus, tout simplement.

Comme un animal blessé qui s’éteint à petits feux dans un coin.

Allongée sur le canapé dur, couverte d’un vieux plaid qui sent l’humidité, les jambes recroquevillées, j’ai sombré, la bouche sèche, les larmes coagulées au bord des yeux.

Pas de rêve , pas de répit. Seulement cette présence constante dans mes tempes : le bruit de leur plaisir.

Dans ma chambre , leurs gémissements et le lit qui grince. Les halètements et les insultes sexuelles qui claquent comme des coups de fouet.

“Plus fort.”

“Tu vois, elle, elle ne sait même pas faire ça.”

“Ma vraie femme, c’est toi.”

Je ne me bouche pas les oreilles.

Je les écoute , jusqu’au bout , jusqu’à la nausée , jusqu’à m’abrutir.

Je ne pleure plus , ce serait trop indigne.

J’ai juste envie de disparaître.

Je me suis demandé, allongée là, si j’avais une part de responsabilité. Si j’étais responsable d’avoir laissé la douleur s’installer sans jamais la déranger. Si j’avais, quelque part, autorisé les autres à me piétiner en silence .

Peut-être , peut-être que j’ai été trop docile , trop gentille , trop transparente .

Mais pas ce matin.

Le matin ne m’a pas réveillée doucement . Il m’a éventrée.

J’ai à peine le temps de redresser la tête que la porte claque. Une silhouette se précipite vers moi. 

La mère de mon mari qui arrive avec ses talons et son parfum entêtant, elle est en colère sans que je sache pourquoi .

— Tu es encore là, sale mendiante ?

Je veux répondre, mais ma gorge est sèche. Je ne suis pas prête. Mon corps est encore en morceaux.

— Tu n'as rien compris, hein ?

Et seau entier l’eau glacée m’arrive en plein visage . 

Mon cœur loupe un battement. Je m’étouffe. Je suffoque. Je m’agrippe au canapé pour ne pas tomber. Mes cheveux collent à ma peau, mon pyjama devient un linceul froid. La pièce pue le savon bon marché, l’humiliation et la vengeance.

Elle me regarde de haut.

— Ça fait trois ans que je rêve de ce moment. Trois ans que je supporte ton visage triste, ton manque de classe, ta cuisine fade, ton ventre vide. Ah pardon, maintenant il est plein ?

Elle rit cruellement.

— Tu crois qu’un enfant changera quelque chose ? Même ton bébé ne mérite pas d’avoir une loque comme mère.

Je serre les poings. Je veux hurler. Mais je n’ai même plus ça.

— Ramasse tes chiffons et casse-toi. T’es finie. Tu es OUT. Même ton mari ne veut plus de toi. Il me l’a dit hier soir pendant qu’il baisait TA SŒUR. Et tu sais quoi ? Elle, au moins, elle ne crie pas comme un cadavre.

Elle me jette le seau vide aux pieds. L’eau s’écoule lentement sous le canapé.

Je suis trempée et tremblante de colère .

Je me lève un peu trop vite. J’ai la tête qui tourne. Je m’accroche au mur pour ne pas tomber.

Je monte à l’étage comme une voleuse. Je prends mon sac. Quelques vêtements. Une culotte propre et mon téléphone , rien d’autre. J’oublie mes bijoux, mes livres, mes souvenirs.

J’oublie ma vie.

Je croise le miroir du couloir.

Je m’y arrête , me regarde et je ne me reconnais pas.

Cheveux en bataille , les yeux rouges avec des cernes profondes.

Je ressemble à une étrangère.

Une étrangère qu’on a salie, qu’on a défigurée à coups d’indifférence et de trahison.

Je passe devant notre chambre , la porte est entrouverte.

J'y jette un œil , ma sœur dort, nue, sur mon mari.

Lui a encore son alliance. Elle a encore mon parfum sur la peau.

Ils dorment. Ils rient presque dans leur sommeil . Ils sont si paisibles.

Et moi, je suis le fantôme.

Je descends. Je claque pas la porte. Je ne mérite même pas ce fracas.

Dehors, la pluie me fouette. Un crachin moqueur, continu, comme si le ciel aussi voulait m’humilier une dernière fois.

Je ne sais pas où aller . 

Je marche sans savoir où. Les pieds nus, les habits mouillés.

J’ai froid, j’ai faim, j’ai peur.

Et soudain… je m’arrête.

Je sors le papier de ma poche : La carte.

Son initiale et son numéro.

L’homme du bar.

L’inconnu aux yeux calmes.

Celui à qui j’ai tout raconté.

Celui qui m’a écoutée.

Celui qui, dans ma nuit la plus noire, a allumé une chandelle.

Je fixe la carte. Je tremble , mon pouce hésite.

Puis j’ouvre mon téléphone.

Je tape le numéro.

Mon doigt reste suspendu une seconde.

Et j’appuie sur Appeler.

Une sonnerie , deux , trois.

— Oui ?

Sa voix est posée , claire , une respiration d’hiver.

Je ravale ma salive.

Je ferme les yeux.

Et je parle.

— C’est Gracias.

Silence , puis, plus doucement :

— Je t’écoute.

Je serre le téléphone contre mon oreille comme on serre une main.

Je respire , une fois , deux fois : 

— J’accepte.

Silence.

— Le marché , je...ta proposition. Ce que tu veux. Je le fais.

Il ne répond pas tout de suite. Il ne me demande rien. Il ne rit pas. Il ne pose pas de conditions.

Puis, simplement :

— Donne-moi ton adresse. Je viens te chercher.

Et pour la première fois depuis longtemps, je sens quelque chose remonter dans ma gorge , ce ne sont pas des larmes , un souffle.

Peut-être un commencement.

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