Marco
Je ne sais pas trop à quoi m’attendre. Après avoir accepté l'offre de l’agence, je me retrouve maintenant devant un bâtiment imposant, en plein cœur du quartier le plus chic de la ville. L’architecture moderne et glacée m’intimide, comme si le luxe m’écrasait de son poids. Mon cœur bat plus fort à chaque pas, mais je n’ai pas d’autre choix que d’avancer. Les rues pleines de gens en costume, les voitures de luxe garées sur le trottoir… tout cela semble tellement loin de ma vie actuelle. J’ai l’impression de me glisser dans un monde qui ne m’est pas destiné, un monde que je n’ai jamais vraiment connu, mais qui m’appelle d’une manière étrange.
En entrant dans le hall de l'agence, l’atmosphère me frappe immédiatement : c'est un calme glacé . Tout ici respire la perfection, l’ordre, et une froide efficacité. La réceptionniste, une jeune femme aux cheveux impeccablement coiffés et au regard neutre, me regarde sans un mot. Elle m’indique d’un geste de la main une porte en verre, sans même se lever de son siège. Je prends une grande inspiration et traverse le couloir jusqu’à la salle où je suis censé rencontrer Claudia, la patronne.
Je frappe doucement à la porte et entre après une réponse brève. La pièce est plus grande que ce à quoi je m’attendais, décorée dans un style à la fois moderne et épuré, avec des touches subtiles de luxe. Elle est là, assise à un bureau en bois sombre, regardant un écran d’ordinateur. Dès que je passe la porte, elle lève les yeux, et je la vois pour la première fois : Emily. Elle a une présence magnétique. Une femme grande, vêtue d’un tailleur impeccable, avec des cheveux noirs parfaitement lissés et un regard intense. Ses yeux scrutent mes moindres mouvements avec une précision déconcertante. Elle ne sourit pas immédiatement, mais son regard reste calme, presque comme si elle m’étudiait déjà.
— Marco, n’est-ce pas ? dit-elle d’une voix douce mais ferme. Tu viens de loin, je suppose. Je te présente Claudia, ma collègue. Elle va s’occuper de toi.
Elle finit de parler et nous laisse seuls.
Je fais un signe de tête, gêné, et me tourne vers Claudia, essayant de maintenir un semblant de calme. Je suis nerveux. Je sais qu’elle a plus de pouvoir en un regard que moi dans toute ma vie, mais j’essaie de ne pas le montrer.
— Prends un siège, ajoute-t-elle en me désignant une chaise en face de son bureau.
Je m’assois, essayant de dissimuler la panique qui monte en moi. C’est le moment de voir si j’ai fait le bon choix, si ce travail peut vraiment être la solution à mes problèmes.
Claudia ne perd pas de temps. Elle me tend un dossier soigneusement agencé, le genre de dossier qu’on remet à un employé pour lui expliquer les règles et les attentes, mais aussi pour poser les bases d’une certaine autorité.
— Voici le contrat, dit-elle simplement. Tout est bien expliqué. Les missions, les conditions, les responsabilités. Tu as vu un peu de quoi il s’agissait avant de venir, mais c’est ici que tu verras la réalité de ce métier.
Elle ouvre le dossier et commence à énumérer les points principaux. Elle parle d’abord des règles de discrétion absolue. Aucune fuite d’informations, aucune interférence dans la vie privée des clients. Je hoche la tête, essayant de digérer les mots qu’elle prononce. Ensuite, elle aborde les attentes en matière de comportement : il ne s’agit pas seulement d’accompagner des gens à des événements, mais de leur offrir une présence émotionnelle, une écoute, une complicité dans des situations privées ou intimes. Ce n’est pas seulement du sexe, c’est du service, de l’attention, du charme. Les clients viennent chercher plus que du plaisir physique, ils cherchent une évasion de leurs vies monotones, des gens comme moi pour les faire se sentir spéciaux. Elle insiste sur le fait que les rapports sont strictement professionnels, mais il y a une fine ligne entre ce qui est "professionnel" et ce qui devient "personnel". Je ressens un frisson d’inconfort en entendant ces mots.
— Tu ne dois jamais oublier, dit-elle, ses yeux plantés dans les miens, que ce travail exige une certaine forme de soumission. Pas de soumission physique, bien sûr, mais émotionnelle. Tu vas donner de toi-même, plus que tu ne l’imagines. Et tu seras payé pour cela.
Je frissonne à l’idée de ce que cela peut signifier. L’argent est un attrait évident, mais je commence à comprendre que le prix de cette vie peut être bien plus élevé que ce que j’imaginais.
Claudia me parle ensuite des détails pratiques. Les missions sont programmées par l’agence, mais je peux refuser certaines demandes, tant que cela ne devient pas une habitude. Les clients, en majorité des hommes d’affaires ou des personnalités influentes, ne viennent pas seulement pour passer un bon moment, mais aussi pour discuter de sujets plus personnels, parfois très intimes. Elle me détaille les différents types de clients, les divers niveaux d’engagement requis, et les occasions pour lesquelles je serai appelé à travailler. Le travail peut être gratifiant, mais il n’est jamais sans conséquence. Elle me donne aussi des informations pratiques sur le calendrier, les tarifs, les méthodes de paiement.
À chaque mot qu’elle prononce, je ressens un mélange de fascination et d’appréhension. Cette vie de luxe et d’opulence qui semblait si lointaine devient peu à peu une réalité qui se dessine devant mes yeux. Je peux déjà imaginer les soirées élégantes, les hommes puissants qui me sollicitent, les lieux de rêve où je serai invité. Mais en même temps, je sais que cela implique des sacrifices, que je devrai me plier à un rôle, à des attentes bien au-delà de ce que je connais.
Quand elle finit de détailler le contrat, elle me regarde à nouveau, cette fois plus intensément, comme si elle attendait une réaction de ma part.
— Alors ? demande-t-elle, presque sans émotion. Tu es prêt à commencer ?
Je prends une profonde inspiration. Le doute me traverse un instant, mais je suis là, devant elle, dans ce monde que je ne comprends pas encore complètement, mais que je sais, d’une manière ou d’une autre, que je dois accepter. Je jette un coup d’œil au contrat posé sur la table et, sans vraiment réfléchir, je signe.
— Parfait, dit Claudia avec un léger sourire. Bienvenue dans le monde de l’agence.
Je me lève et lui tends la main. Elle la serre fermement, et je sens une dernière vague de nervosité m’envahir. Mais c’est fait. Je viens de franchir une porte dont je ne connais pas encore toutes les conséquences. Une chose est sûre : ma vie vient de prendre un tournant décisif.
MarcoJe reste immobile devant le grand miroir de la chambre, comme si je cherchais à me convaincre moi-même. Le reflet me renvoie l’image d’un homme qui n’est plus vraiment moi. Le costume sombre épouse ma carrure, mes cheveux soigneusement coiffés brillent sous la lumière tamisée, et mes traits paraissent plus durs qu’avant, comme si ce métier avait déjà creusé des lignes invisibles sur mon visage.Je me force à sourire à mon reflet, mais ce sourire n’a rien de naturel. C’est un masque. Une promesse silencieuse : je suis l’homme que tu attends.La poignée de la porte tourne. Mon cœur accélère. Je redresse les épaules, le souffle suspendu.Elle entre.Et aussitôt, la pièce change de dimension.Ses longs cheveux noirs glissent sur ses épaules comme une rivière nocturne. Sa robe rouge, ajustée à la perfection, semble faite pour embraser le regard. Ses talons claquent doucement sur le sol, chaque pas résonne comme une provocation. Elle ne baisse pas les yeux. Elle me jauge.— Marco ?Sa
MarcoLes jours suivants, je me laisse happer par le rythme effréné de ce nouveau travail, comme si je n’avais plus vraiment le choix. Chaque mission m’engloutit un peu plus, chaque rencontre m’entraîne dans cette existence parallèle où les règles sont simples, presque brutales : l’argent contre ma présence, le corps contre la chaleur d’un regard ou d’un sourire. Et plus le temps passe, plus je deviens habile, plus je m’installe dans ce rôle. C’est comme si mon corps avait appris par cœur la chorégraphie de ce métier. Je souris au bon moment, je pose ma main avec la juste douceur, je retiens mes silences comme des promesses. J’apprends à être ce que les autres attendent de moi.Et je deviens bon. Trop bon.Chaque contrat m’offre une somme qui aurait pu bouleverser ma vie d’autrefois, mais qui maintenant ne me paraît plus qu’une suite de chiffres sans saveur. L’argent s’accumule, abstrait, irréel, et pourtant je continue à le poursuivre comme un drogué court après sa dose.Pendant ce t
MARCOLes jours qui suivent ne sont qu’un tumulte. Je vis dans un tourbillon de contradictions. D’un côté, Claire. Ses yeux qui fouillent les miens, ses silences lourds, ses questions auxquelles je ne sais plus répondre. Elle m’attend, elle m’espionne presque, espérant que je lui donne une bribe de vérité. Et de l’autre… ce monde parallèle. Une vie où l’argent coule à flots, où les désirs des autres deviennent ma réalité, où chaque mission me rapproche d’un luxe que je n’aurais jamais cru possible.Mais à quel prix ?Chaque geste quotidien devient une torture. Le matin, je croise Claire dans la cuisine. Ses doigts serrent une tasse de café, son regard se détourne de moi comme si j’étais déjà absent. Je veux lui parler, mais les mots s’étouffent dans ma gorge. Alors je fuis. Je prétexte un rendez-vous, une urgence. Et elle reste là, seule, dans la lumière pâle du jour qui se lève.Ce matin-là, je finis une nouvelle fois par m’échapper. Je me retrouve dans ma voiture, garé à un feu roug
MARCOQuand je rentre chez moi ce soir-là, une lourde sensation de vide m’envahit. La porte de l’appartement est toujours la même, la poignée froide sous ma main, le parquet légèrement grinçant dans l’entrée. Le hall a l’odeur familière du café du matin, un mélange de lessive et de chaleur domestique. Tout semble… normal. Trop normal. Comme une scène de théâtre parfaitement en place.Mais moi, je sais que c’est faux. Rien n’est normal. Rien.Ce que je viens de vivre, cette transformation, ce masque que j’ai porté… ça m’écrase. Chaque détail de ma vie d’avant me paraît fade, insignifiant, presque grotesque. Le canapé, les cadres aux murs, les jouets de ma fille encore éparpillés près du salon… ce sont des vestiges d’une existence qui ne m’appartient plus vraiment.Je n’ai même pas franchi le seuil du couloir que sa voix fend l’air. Claire.— Alors, comment s’est passée ta journée ?Elle m’appelle depuis la cuisine. Sa voix est claire, familière. Une voix qui m’a longtemps rassuré. Mais
MARCOJe me réveille tôt, les mains moites, le cœur battant trop vite. Pas une minute de sommeil. Mes pensées ont tourné en rond toute la nuit, oppressantes, insupportables. Le café que je prépare ne fait rien pour calmer l’angoisse qui me colle à la gorge. Mes doigts tremblent autour de la tasse.Le téléphone vibre. Je sursaute. Un message de Claudia. Trois phrases sèches, tranchantes. Ce soir. Première cliente. Hôtel Orion. Sois prêt.Je relis. Et soudain tout se complique. J’ai la bouche sèche, un goût métallique sur la langue.Je passe la journée enfermé dans un brouillard. Je me change trois fois, incapable de me décider. Finalement, chemise noire, pantalon sobre, parfum discret. J’ai l’impression de me costumer pour un rôle qui me dépasse. Pas d’hésitation, pas de peur. Voilà ce qu’elle attend de moi. Mais à l’intérieur, je suis une plaie ouverte.Quand j’arrive à l’hôtel, mes jambes sont lourdes comme du plomb. Le hall est vaste, saturé de marbre et de lumière. Trop propre, tro
MarcoJe ne sais pas trop à quoi m’attendre. Après avoir accepté l'offre de l’agence, je me retrouve maintenant devant un bâtiment imposant, en plein cœur du quartier le plus chic de la ville. L’architecture moderne et glacée m’intimide, comme si le luxe m’écrasait de son poids. Mon cœur bat plus fort à chaque pas, mais je n’ai pas d’autre choix que d’avancer. Les rues pleines de gens en costume, les voitures de luxe garées sur le trottoir… tout cela semble tellement loin de ma vie actuelle. J’ai l’impression de me glisser dans un monde qui ne m’est pas destiné, un monde que je n’ai jamais vraiment connu, mais qui m’appelle d’une manière étrange.En entrant dans le hall de l'agence, l’atmosphère me frappe immédiatement : c'est un calme glacé . Tout ici respire la perfection, l’ordre, et une froide efficacité. La réceptionniste, une jeune femme aux cheveux impeccablement coiffés et au regard neutre, me regarde sans un mot. Elle m’indique d’un geste de la main une porte en verre, sans m