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chapitre 6

last update Last Updated: 2025-06-14 14:20:05

— Ce soir, après la vente aux enchères du marché de nuit, je vais mieux t'expliquer, annonça Petit Cœur.

— Après le marché, je rentre chez moi, répliqua Elena.

— C'est une explication inter temporelle et inter spatiale.

Petit Cœur avait passé toute la soirée à taquiner Elena. Jamais elle ne lui avait esquissé le moindre sourire. Il s'étonnait de voir une femme avec autant de noirceur en elle.

Pendant qu'Elena se changeait pour la vente aux enchères, Petit Cœur passait en revue le programme de la soirée. Assis sur le lit, il lui expliquait le déroulé de la mission tandis qu'elle enfilait une robe de soirée bleue devant la penderie.

— Alors, mon amande douce, je t'explique un peu les choses.

— Attends un peu... Comment tu m’as appelée ? s’étonna Elena.

— Tu es bien ma femme, n'est-ce pas ?

— Si tu continues à te comporter comme ça, j’irai à cette soirée seule. Je peux très bien m’en sortir sans toi.

Au même moment, le téléphone d'Elena sonna. C'était sa mère.

— Je suppose que vous êtes déjà prêts pour la soirée. Comment trouves-tu ton coéquipier ? demanda Agathe.

— C'est une sorte de dessin animé qui se croit trop beau. Tu aurais pu me trouver un meilleur partenaire pour cette affaire.

— Tu as intérêt à t’entendre avec lui. C'est notre nouveau génie de l’informatique. Tu rentreras avec lui et vous vivrez dans cette maison.

Elena ne comprenait pas pourquoi cette nouvelle l’enchantait. Un léger sourire en coin des lèvres, elle se ressaisit rapidement pour ne pas se faire remarquer. Petit Cœur reprit son explication.

— Cette vente aux enchères est l’une des plus importantes dans ce secteur. Elle ne dure que trente minutes à cause des risques liés à la présence de la police. Nous devons contacter celui qui préside et lui montrer ce que nous avons à vendre. Il prélève un gain de dix pour cent sur le montant obtenu.

— Il va sortir de là millionnaire, alors.

— Il est payé sur place et en liquide. Ceux qui refusent de le payer sont immédiatement éliminés. C’est un homme sans pitié, surtout quand il s’agit de son argent.

Elena l’observait parler, captivée. Ses mots la perdaient, mais ses lèvres retiraient toute concentration des phrases qu’il prononçait. À chaque échange de regard, son cœur semblait bondir hors de sa poitrine. Tout à coup, un souvenir ressurgit—le dernier homme pour qui elle avait ressenti cette étrange sensation. Elle se ressaisit aussitôt et fila dans la salle de bain pour se maquiller.

À 23 heures, ils étaient prêts. Dans son costard bleu marine, il dégageait une prestance à la hauteur de l’élégance de sa compagne. Bras dessus, bras dessous, ils se présentèrent à l’entrée de la salle du marché de nuit.

— Monsieur et Madame Kemdjeu. Nous sommes attendus au marché, déclara Petit Cœur.

Ce Virgile fouilla dans la liste des invités et trouva leur nom. Il les laissa passer avant de refermer le registre. Ils n’avaient pas droit à l’erreur—une seule intrusion pouvait faire capoter toutes les ventes.

La Salle des Ombres, où se déroulait le marché de nuit, était nichée dans un recoin sombre des bas quartiers. Là où les secrets se vendaient au plus offrant. À minuit, lorsque la lune dominait le ciel, les voleurs, espions et criminels glissaient silencieusement dans ses entrailles. Les murs étaient tapissés de velours élimé, et les lustres en cristal projetaient des éclats de lumière sur des visages masqués. Le parquet grinçant résonnait sous les pas des participants, tandis que l’air, chargé de tension, rendait chaque murmure plus oppressant.

Des tables en bois brut étaient disposées en demi-cercle, chacune éclairée par une bougie vacillante. Les objets volés étaient exposés avec soin : bijoux étincelants, œuvres d’art dérobées, documents compromettants. Il sonnait minuit. Les enchères commençaient et les voix chuchotaient des offres obscures.

Au centre de la salle, Elena, la femme mystérieuse au regard perçant, tenait la couronne en or volée au président de la république. Devant elle, les lingots d’or s’alignaient parfaitement sur la table.

Ses cheveux d’ébène encadraient son visage impassible. À ses côtés se tenait Petit Cœur, le jeune prodige du cambriolage, dont les yeux brillaient d’avidité. Il savait qu’il sortirait de là plus riche que jamais. Les enchères montaient, les rivalités s’intensifiaient. Qui osait défier Elena et Petit Cœur ? Qui remporterait l’or du président ?

Les autres objets se vendaient rapidement, mais le clou de la soirée était réservé pour la fin. Le président attendait l’instant où l’or qu’on lui avait annoncé apparaîtrait enfin. Lorsqu’il posa les yeux sur la table d’Elena, un sourire gourmand étira ses lèvres. Il se sentait déjà milliardaire.

Elena ajusta son masque d’onyx, dissimulant son visage à la lueur des bougies. Elle tenait fermement la couronne, symbole du pouvoir présidentiel, tandis que son regard glissait sur les autres participants. Petit Cœur, à ses côtés, semblait nerveux, mais ses doigts agiles caressaient un lingot posé devant eux.

— Messieurs, mesdames, bienvenue à La Salle des Ombres, annonça le président des ventes. Hier, nous avons tous vu aux informations que le président s’est fait cambrioler pendant la réouverture de l’ancien musée des pierres précieuses. Voici aujourd’hui un objet rare et précieux : l’or du président.

Des murmures s’élevèrent de chaque coin de la pièce. L’incompréhension était totale. Chacun scrutait son portefeuille, hésitant.

— Qui ose faire la première offre ?

Un homme à la cape sombre leva la main, les yeux brillants d’avidité. Il convoitait la couronne. Il la voulait, coûte que coûte.

— Cinquante millions.

Un frisson parcourut la salle, suivi d’un grondement collectif. La barre venait d’être placée bien trop haut.

Elena esquissa un sourire et relâcha légèrement la fente de sa robe, exposant un autre type de richesse. Mais Petit Cœur, d’un geste brusque, lui administra une tape sur la cuisse. Elle referma aussitôt la fente et décroisa ses jambes.

— Mais tu es malade ? siffla Elena. Pourquoi tu as fait ça ?

— On est ici pour vendre l’or, pas tes cuisses. Tu exposes mes biens pourquoi ? Nous sommes mariés, je te signale. Je ne supporte pas l’infidélité.

Elle fulminait, mais se contenait. Pendant ce temps, les enchères se poursuivaient.

— Cinquante millions ? Intéressant. Quelqu’un propose mieux ? lança le président des ventes.

Une voix grave surgit des ténèbres.

— Un milliard.

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