Le caveau

Lana n’avait pas dormi de la nuit.

Elle avait relu la lettre au moins dix fois, chaque mot résonnant comme une énigme. Elle avait gardé la rose noire dans un verre d’eau sur la table du salon, incapable de se résoudre à la jeter. une question qui lui rongeait l’esprit : “Que peut contenir cette boîte ? Qui l’avait laissée là ? Et surtout, pourquoi maintenant ? ”

À l’aube, la brume couvrait encore Tamatave comme un linceul. Elle prit une douche froide, enfila un jean, une veste sombre, et attacha ses cheveux en un chignon serré. Il était temps d’aller au cimetière.

Elle savait exactement où se trouvait le caveau familial. Liva y allait chaque année pour "se souvenir", disait-il. Elle l’y accompagnait parfois, petite, croyant naïvement que c’était un rituel normal. Aujourd’hui, elle comprenait qu’il allait vérifier quelque chose. Veiller sur un secret.

Le chemin était boueux, la route menant au cimetière presque impraticable. Le goudron, jadis lisse, avait été dévoré par le temps et les pluies. Par endroits, on roulait presque sur de la terre battue.

Elle gara la voiture à l’entrée. L’air était lourd, saturé d’humidité. Les cyprès noirs semblaient veiller sur les morts comme des sentinelles silencieuses.

Le caveau des Raymond se dressait un peu à l’écart, derrière une rangée de pierres tombales plus anciennes. Une structure en pierre grise, sobre, surmontée d’un crucifix en fer forgé. L’inscription était simple : Famille Raymond. En dessous, le nom de Liva avait été fraîchement gravé.

Lana poussa la grille rouillée. L’odeur de pierre froide et de terre humide l’enveloppa aussitôt.

Elle s’agenouilla, repéra la dalle à droite du cercueil, comme indiqué dans la lettre. Son cœur battait à tout rompre.

Une pierre rectangulaire, un peu plus sombre que les autres. Elle passa ses doigts sur les bords. Elle bougeait.

Lana força un peu. La dalle céda avec un léger craquement. Dessous, une cavité. Une boîte noire, en bois verni, posée là, comme un cœur dissimulé dans une cage de pierre.

Elle la sortit avec précaution.

Le cadenas était intact. Mais la clé était scotchée en dessous. Liva avait tout prévu.

Elle l’ouvrit.

À l’intérieur : des photos en noir et blanc, une clef rouillée, et un enregistrement audio sur une petite cassette. Sur le dessus, une note manuscrite : À écouter seule. Et pas deux fois. Un vieu carnet relié de cuir avec inscrit dessus: « Journal de Rabe. Si tu trouves ceci, c’est que la vérité refuse de rester enterrée. »

Avant même qu’elle ne puisse regarder plus en détail, une ombre passa derrière elle. Elle se retourna vivement. Personne.

Mais une sensation glaciale s’insinua en elle. Une présence.

Elle referma la boîte, la serra contre sa poitrine et se leva d’un bond. Elle n’était pas venue seule.

Un SMS anonyme arriva : « Tu as ouvert la boîte. Tu t’engages. Prépare-toi à perdre plus que des souvenirs. »

Elle n’était plus une orpheline.

Elle était une cible.