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Chasse à la louve

last update Last Updated: 2025-07-24 17:25:26

Chapitre 7 : Chasse à la louve

LE POINT DE VUE DE SANTINO RICCI 

Le cuir noir de mon fauteuil grince sous mon poids alors que je me redresse brusquement. La salle est plongée dans une lumière tamisée, seules les lueurs bleutées des écrans de surveillance découpent les visages crispés des techniciens réunis devant moi. Ils ont peur. Et ils ont bien raison.

— Alors ? demandai-je d’une voix froide, glaçante. Où est-elle ?

Un silence pesant, lourd comme du plomb, me répondit. Puis un homme au crâne dégarnie, lunettes épaisses sur le nez, se racle la gorge.

— Monsieur Ricci... Nous avons pu suivre mademoiselle Alaya depuis le quartier Est, juste après son évasion. Elle a été repérée par une caméra municipale à 17h16... elle marchait rapidement, pieds nus, et portait encore sa robe blanche. Elle a tourné dans une ruelle puis...

Il s’arrêta. Mes doigts pianotent nerveusement sur l’accoudoir. Je sens la colère bouillonner dans mes veines.

— Continuez, ordonnai-je d’un ton sec.

— ... Puis elle a disparu du champ des caméras. La zone est partiellement couverte. On pense qu’elle est entrée dans un immeuble abandonné du quartier des faubourgs... mais elle n’en est pas ressortie. Ou du moins pas par la sortie qu’on surveillait.

Je me lève lentement. Le silence se fait plus oppressant encore.

— Vous pensez ? Vous êtes payés pour penser maintenant ? Ma voix explose. Je vous paie des fortunes pour que vous me donniez des résultats, pas des suppositions vagues !

Je frappe la table du plat de la main. Tout le monde sursaute.

— Cette fille... Elle est à moi. Elle ne devrait jamais avoir quitté cette chambre. Vous réalisez ce que ça implique ?

Un autre technicien, plus jeune, se lève précipitamment, espérant calmer ma colère.

— Monsieur Ricci, nous avons synchronisé les systèmes de reconnaissance faciale de la police avec les caméras de la ville entière. Le logiciel est programmé pour détecter le visage d’Alaya dès qu’il apparaît, dans n’importe quel lieu public. Dès qu’elle entre dans une gare, une station de bus, une pharmacie, même un supermarché... nous la repérerons.

Je me détourne légèrement, fixe l’immense carte de la ville projetée sur l’écran. Chaque secteur, chaque artère, chaque point de sortie est surveillé. Elle ne peut pas s’échapper. Pas de cette ville. Pas de mon emprise.

— Bien..., dis-je, d’une voix redevenue plus calme mais toujours vibrante de tension. Utilisez toutes les ressources nécessaires. Si vous devez pirater les satellites privés, faites-le. Appelez les hommes à Vérone, Florence et Milan. Faites circuler sa photo. Et mettez une prime sur sa tête.

Je me retourne, les regardant un à un.

— Elle ne va pas loin. Je veux qu’on me prévienne dès qu’elle respire hors de l’ombre. Et si un seul d’entre vous me fait perdre encore une minute… je vous jure que vous ne respirerez plus.

Ils acquiescent tous rapidement, blêmes.

Je sors de la salle de surveillance, la mâchoire crispée, les poings serrés. La pensée d’Alaya me hante. Ce regard de défi. Ce corps frêle mais indomptable. Et maintenant, elle est là-dehors, à se croire libre. Elle s’imagine qu’elle peut m’échapper.

Elle se trompe.

Je suis Santino Ricci.

Et ce que je désire, je l’obtiens. Toujours.

LE POINT DE VUE D'ALAYA 

J’avais les mains moites en franchissant la porte vitrée de la bijouterie. L’intérieur brillait comme un palais de verre et d’or. Le genre d’endroit que je regardais de loin, d’habitude. Le genre d’endroit où je n’avais jamais mis les pieds autrement qu’en rêve.

Mes yeux parcouraient la pièce, fascinés. Des vitrines illuminées, des colliers étincelants, des bagues enfermées sous verre comme des trésors de reine… Et surtout, des caméras. Des dizaines. Installées dans chaque angle. Mon cœur se serra. je n’avais pas le choix. C’était ça, ou errer encore sans rien manger, sans savoir où aller, sans un sou pour prendre un bus. Et puis, ces boucles d’oreilles…

Je les retirai doucement, comme si elles pouvaient se briser. Je les avais portées lors du mariage, et malgré tout ce que j’avais traversé, elles étaient restées là, accrochées à moi, intactes. Les voleurs de la ruelle n’y avaient pas prêté attention. Eux, ils n’avaient vu que le sac. Eux, ils ne savaient pas que j’avais encore une dernière carte à jouer.

Je m’avançai jusqu’au comptoir. Une femme bien apprêtée me jeta un regard poli, quoique un peu suspicieux.

— Bonjour, mademoiselle, dit-elle d’un ton professionnel. Je peux vous aider ?

Je déposai les boucles d’oreilles sur le comptoir, essayant de ne pas paraître nerveuse.

— Je… j’aimerais les vendre.

Elle les prit avec précaution, comme si elle savait qu’elle tenait quelque chose de précieux. Ses yeux s’élargirent légèrement en les observant sous une petite loupe.

— Ces pièces sont sublimes… Vous les avez depuis longtemps ?

Je haussai les épaules.

— C’était un… cadeau de famille.

Mensonge. Mais je ne pouvais pas dire que c’était un souvenir de mon propre mariage forcé avec le diable.

Elle hocha la tête, puis tapota sur son clavier, lançant une recherche. Pendant ce temps, je laissai mon regard se perdre à nouveau dans la boutique. Chaque coin de ce lieu respirait le luxe et la réussite. Je me demandais à quoi ressemblerait ma vie si j’étais propriétaire d’un endroit pareil. Peut-être que les gens me respecteraient. Peut-être que je pourrais enfin respirer sans avoir peur. Peut-être que je serais libre.

— Mademoiselle ? me dit la caissière, me ramenant brutalement sur terre.

Je clignai des yeux, confuse.

— Oui ?

— Le prix de rachat que nous pouvons vous proposer est de 4 500 euros.

Je n’osais pas parler. Mon cœur battait fort. C’était beaucoup plus que ce que la vieille dame m’avait donné. Bien plus. Je n’avais même pas prévu de négocier. À quoi bon ? Je hochai juste la tête.

— D’accord, répondis-je, la voix tremblante.

La femme me lança un regard intrigué, sans commenter. Elle s’éloigna pour préparer le paiement. Moi, je restai là, debout, dans cette bijouterie pleine de lumière et d’opulence, serrant les poings pour ne pas pleurer. J’avais l’impression d’avoir gagné une bataille. Pas la guerre, non. Mais une bataille.

Je soufflai longuement. Peut-être que tout espoir n’était pas encore perdu.

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