Chapitre 5

Rachel s'est redressée avec difficulté et est sortie de la salle de bain en boitant. Elle voulait récupérer son téléphone, comment pourrait-elle en acheter un nouveau sans le moindre sou ?

Le sang de sa blessure au front lui collait aux paupières, et elle a failli trébucher... quand soudain, des mains fermes l'ont soutenue par les épaules.

En se retournant, elle a découvert Maxime, son visage déformé par une expression de consternation douloureuse. Le vieil homme était venu à l'hôpital pour son examen médical de routine.

« Rachel... Comment as-tu pu te blesser à ce point ? » a-t-il demandé.

La jeune femme n'avait pas prévu cette rencontre fortuite. Honteuse, elle a baissé les yeux.

Cette réaction n'a fait qu'accroître la rage de Maxime. En un éclair, il a compris l'origine de ces blessures : « Ce fils de pute t'a fait ça ?! Ce... ce monstre ! »

Lui qui croyait sincèrement avoir arrangé un mariage heureux... En réalité, il avait jeté cette innocente dans la fournaise de l'enfer.

Sans un mot de plus, Maxime l'a guidée vers l'infirmerie. Il n'a quitté les lieux qu'après avoir personnellement supervisé le pansement de sa blessure. Avant de partir, il a déclaré : « Je te le promets, Rachel, je vais régler cette situation une fois pour toutes. »

Rachel a hoché vaguement la tête. Elle serrait contre sa poitrine son téléphone à l'écran brisé, le regard perdu dans le vide.

« Ah ! Enfin te voilà ! J'ai dû parcourir tout l'hôpital pour te trouver. »

Rachel a sursauté en reconnaissant cette voix. Bette se tenait derrière elle, apparue comme par magie. Elle a contemplé Rachel trempée, blessée et pitoyable avec un sourire de satisfaction mal dissimulé :

« Tu as bien vu comme Lamar me traite avec dévotion ? Si tu as ne serait-ce qu'une once de dignité, tu devrais le quitter. Attendre qu'il te jette comme un vulgaire chiffon sale serait... humiliant, tu ne crois pas ? »

Rachel a pincé les lèvres jusqu'à les blanchir.

Ironie cruelle du sort : elle avait bel et bien décidé de partir. Mais entendre ces mots dans la bouche de Bette lui a donné soudain une envie féroce de résister.

Elle a rangé son téléphone dans sa poche et a tourné les talons, refusant d'engager cette conversation.

« Quelle attitude ! » s'est exclamée Bette, soudainement irritée, « Tu oses me tourner le dos ? Enfin... discuter avec une muette est décidément stérile. Écoute-moi bien, je sais que des gens de ton espèce ont du mal à trouver un emploi. Ne dis pas que je suis sans cœur, prends cet argent et disparais de la vie de Lamar. Pour de bon. »

D'un geste autoritaire, elle a enfoncé le chèque dans la paume de Rachel. La somme inscrite, cent mille euros, pouvait sembler modeste, mais représentait une fortune pour Rachel.

« Tu fais la difficile ? » a ricané Bette en voyant son hésitation, « Ne joue pas l'innocente, tu as bien su profiter de Lamar ces derniers mois ! Prends ça et disparais avant qu'on ne change d'avis. »

Rachel a ouvert la bouche en vain, ses mains esquissant des gestes désespérés.

Comment expliquer qu'elle n'avait jamais rien demandé à Lamar ? Que le simple fait qu'il paie les traitements de sa sœur la comblait déjà de gratitude ? Elle se serait contentée de miettes, de peur de l'indisposer.

Son premier réflexe était de refuser. Puis la réalité l'a rattrapée : sans Lamar, plus de revenus. Et avec ce bébé à venir... Les dépenses s'annonçaient astronomiques. Si Bette voulait absolument la payer pour qu'elle parte, pourquoi ne pas saisir cette bouée de sauvetage ?

« Ne convoite pas ce qui ne t'appartient pas. » La leçon maternelle a résonné douloureusement. Pourtant, les doigts tremblants, Rachel a accepté le chèque.

« Je te rembourserai », a-t-elle promis intérieurement à Bette, « Chaque centime. »

Avec une précaution extrême, elle a plié le rectangle de papier et l'a glissée au fond de sa poche.

Bette devait rester hospitalisée encore quelques jours. Lamar ne la quitterait certainement pas. Ce laps de temps serait parfait pour encaisser le chèque en toute discrétion.

Mais d'abord, il lui fallait rentrer se changer. Trempée comme elle l'était, un rhume serait vite arrivé. Elle, peu importait. Mais pas question de risquer la santé du petit être qu'elle portait.

La demeure de Lamar était vaste, une chambre principale majestueuse flanquée de plusieurs suites d'amis. Bien qu'épouse légitime, Rachel n'avait droit qu'à l'une de ces chambres secondaires. Lamar ne la convoquait dans le lit conjugal qu'à des fins charnelles, pour la renvoyer aussitôt après usage.

Rachel a ôté ses vêtements trempés. Machinalement, sa paume s'est posée sur son ventre encore plat. Sous cette fine membrane de chair battait un miracle, une vie naissante qu'elle portait en secret.

Un soupir lui a échappé. Si l'idée de cette maternité la remplissait d'une joie, elle était hantée par un doute lancinant : serait-elle seulement capable d'être une bonne mère ?

Alors qu'elle saisissait des vêtements secs, la porte de la chambre s'est ouverte brusquement. Lamar se tenait sur le seuil. Son regard s'est fait plus intense en découvrant Rachel dans sa nudité.

La jeune femme, avec sa silhouette gracile et sa peau de porcelaine, ressemblait à une biche effarouchée lorsqu'elle s'est précipitée sur les draps pour se couvrir. Ce spectacle a fait sourdre une sécheresse dans la gorge de Lamar.

Pourtant, son masque de froideur est resté parfait. D'une voix neutre, il a déclaré : « Les brûlures de Bette sont sérieuses. Tu en portes la responsabilité. Plutôt que de te confier ses soins, tu prépareras désormais ses repas ici. Je me chargerai personnellement de les lui porter à l'hôpital. C'est clair ? »

Rachel a acquiescé d'un hochement précipité, enfouissant son visage empourpré dans l'édredon qu'elle avait enroulé autour d'elle comme une armure.

Lamar a laissé son regard errer sur les fragments de peau exposée avant d'ajuster sa cravate d'un geste distrait. C'était alors qu'il a aperçu le coin du chèque dépassant du tas de vêtements mouillés.

Son expression s'est figée lorsqu'il l'a déplié : « Tu as osé quémander de l'argent à Bette ? »