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Chapitre 7

Author: Ophélie Miller
Irène trouvait cela étrange. D'habitude, Fabrice lui envoyait à peine des messages. Pourquoi l'avait-il appelée autant de fois ces derniers jours ?

Lorsqu'elle est rentrée chez elle, perplexe, la domestique l'a accueillie avec un sourire réjoui : « Vous voilà enfin de retour, Madame ! M. Bortel était fou d'inquiétude en votre absence. Aucun de nos plats ne trouvait grâce à ses yeux. »

Irène a compris aussitôt. Fabrice n'avait simplement pas supporté son absence aux fourneaux. Mais il finirait par s'y faire, bientôt, plus personne ne se creuserait la tête pour concocter des mets à son goût.

Elle a enfilé ses chaussons et s'est dirigée vers le salon. Fabrice était affalé sur le canapé, l'air sombre, une aura de mélancolie l'enveloppant.

Au bruit de ses pas, il a levé lentement les yeux. Son regard épuisé s'est illuminé soudain à sa vue. Il s'est dressé d'un bond, la voix teintée de colère : « Où étais-tu passée ? J'ai appelé des dizaines de fois ! »

Irène s'est assise calmement avant de répondre : « J'étais hospitalisée. Je sors tout juste aujourd'hui. »

Fabrice en est resté bouche bée. Ces derniers jours, trop occupé à s'occuper de Blanche, il avait complètement oublié l'accident d'Irène. Il avait cru Lionel, pensant qu'elle simulait par jalousie... Et il imaginait des blessures superficielles... Pas une hospitalisation.

La culpabilité a envahi son regard.

« Tu... tu n'es pas fâchée ? Je ne savais pas que c'était sérieux. Mais la condition de Blanche... Sans intervention rapide, sa vie était en danger. Je n'avais pas le choix. »

Une ironie amère a traversé Irène. Elle, couverte d'éraflures et saignant abondamment, il l'avait ignorée. Tandis qu'un simple malaise de Blanche devenait une urgence vitale ?

Puis elle a haussé mentalement les épaules. Cet homme ne l'avait jamais aimée. Son choix était logique. De toute façon, leur contrat touchait à sa fin.

Irène a répondu par un simple « Hmm » et s'apprêtait à partir lorsque Fabrice l'a retenue.

Son regard s'est posé sur les feuilles manuscrites qu'elle tenait : « Depuis quand t'intéresses-tu à l'écriture ? »

Un froid a traversé le regard d'Irène. Chaque année, pour leur anniversaire de mariage, elle lui offrait un poème. Mais il les entassait négligemment dans le débarras sans jamais les lire. Bien sûr qu'il ignorait sa passion pour l'écriture.

« Juste des notes sans importance », a-t-elle répondu d'un ton neutre.

Fabrice n'a pas insisté : « Je n'ai presque rien mangé ces jours-ci... Je rêve de tes filets de poisson panés. »

Irène a désigné le réfrigérateur : « Plus d'ingrédients. »

Décontenancé, il s'est repris vite : « Alors je t'accompagne faire les courses ! »

À cet instant, Blanche est descendue l'escalier, une valise à la main. Lionel l'a suivie de près, agrippant sa main d'un air suppliant : « Tata Blanche, reste ! Papa et moi serons trop tristes sans toi ! »

« T'inquiète pas, mon chou, on se reverra ce soir à la réception ! »

Lionel a tiré alors frénétiquement la manche de Fabrice : « Papa, bouge-toi ! Va raccompagner tata Blanche ! »

Fabrice a hésité, jetant un regard vers Irène : « Mais je... »

Irène l'a coupé net : « Occupe-toi de Blanche. Elle a besoin de toi. »

Une vague de panique a submergé Fabrice. Il a entraîné Irène à l'écart et, avec une douceur inédite, lui a proposé : « Irène... Cet hiver, partons à Hokkaidō avec Lionel. Tu as toujours dit vouloir y aller. En famille. »

Derrière lui, Lionel et Blanche riaient ensemble, formant un tableau d'harmonie maternelle bien plus crédible qu'avec Irène.

« On verra », a-t-elle murmuré.

À quoi bon faire des projets ? Dans quelques jours, elle aurait quitté cet endroit pour toujours.

« Papa, DÉPÊCHE-TOI ! » a hurlé Lionel en tapant du pied.

Bien que mal à l'aise, Fabrice a fini par monter dans la voiture.

Restée seule, Irène a contemplé la date sur le calendrier. Un sourire s'est dessiné sur ses lèvres.

Après ce soir... Elle serait enfin libre.
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