Je la laisse dormir. Sa main garde la chaleur de ma place, comme si mes os y avaient laissé un souvenir. La marque bat, discrète, contre ma peau. J’écarte la toile, la nuit me prend aux chevilles, une fraîcheur de glaise et d’eau remuée. Deux veilleurs m’aperçoivent, inclinent la tête. Je n’explique rien. Le camp respire bas, comme un corps fatigué qui ne veut pas réveiller sa douleur.La rivière appelle sans nommer. J’emprunte le sentier qui s’affaisse entre les saules, j’évite les pierres qui roulent, je retiens mon souffle pour écouter celui du courant. Les jarres, au loin, renvoient un croissant blafard. Un chien lève une oreille puis renonce. Dans ma cuisse, la flèche d’hier n’est plus qu’un fil de fièvre, bêtement fidèle. Je descends jusqu’à la langue de roche, et l’eau s’offre avec son odeur de métal, de feuilles, de pluie ancienne.Je m’accroupis. Mes doigts s’ouvrent, se referment. Je n’ai pas de phrase prête, juste ce poids qui s’est tassé sous le sternum, tait ses griffes l
Dernière mise à jour : 2025-09-05 Read More