All Chapters of LA FAVORITE DU ROI : Chapter 61 - Chapter 70

Selia Le parfum de miel et de jasmin, cette offrande renversée, flotte encore dans l'air de ma chambre comme le fantôme d’un sentiment mort. Il ne me reste plus de larmes, plus de colère froide. Il ne reste qu’un vide cristallin, une froideur nouvelle, dure et tranchante comme un éclat de verre.Lys avait raison. La vengeance est un poison. Mais il existe d'autres armes.Je me souviens alors de lui. Le conseiller. Le jeune loup à la beauté ambitieuse et au regard trop vif pour n'être que servile. Lorian. Son nom me revient, porté par le murmure des couloirs. On dit qu’il est brillant, qu’il monte rapidement, et que le Roi, justement, commence à le trouver un peu trop assuré. Un peu trop regardé.Un sourire, le premier qui ne soit pas une grimace depuis que Lys a parlé, effleure mes lèvres. Il n’est pas joyeux, mais stratégique. Calculé.Je ne cherche pas l’amour. Je cherche une pièce sur l’échiquier. Une pièce qui pourrait faire échec au roi.Je sonne Lys. Quand elle entre, son regar

SELIALa vapeur flotte encore dans l’air, douce comme un mensonge, quand je sens les doigts des servantes glisser sur ma nuque, ointures chaudes et mains expertes qui domptent les frisottis de la chevelure. Le parfum du bain , rose et myrrhe , se mêle à celui des onguents. Je ferme les yeux, non par faiblesse, mais pour mieux écouter les pas au dehors, ces pas que j’apprends désormais à lire comme on lit un parchemin : précipités, heurtés, pleins d’armes et d’impatience.— Ma dame, souffle Mirelle, en relevant une mèche rebelle. Laissez-moi finir ce chignon, cela mettra votre visage en valeur.Le toucher de ces femmes est routinier, presque cérémonial ; elles aiment la douceur de ma peau, s’en prévalent comme d’un trésor dont elles ont la garde. Je sens leurs regards, curieux mais loyaux. Loyaux , un mot que le palais avilit souvent à la première brise d’intérêt royal.Un coup, puis un autre, résonne contre la porte. Plus qu’un simple bruit : une déclaration. Le cœur me rate un battem

SELIALa porte de la Chambre des Tempêtes se referme dans un grondement sourd qui semble faire vibrer les pierres elles-mêmes. Je reste immobile, les paumes moites, le goût de sa colère et de son baiser encore brûlant sur mes lèvres. Le silence qui retombe est lourd, épais comme de la cendre. Ce n’est pas un silence de défaite, mais de concentration pure. L’échange qui vient de se produire n’était qu’une escarmouche, la véritable bataille se prépare maintenant. Je sens le plan se former dans mon esprit, froid et précis. Il veut une statue ? Il aura un spectre. Il veut l’obéissance ? Je vais la lui offrir, si pure, si parfaite, qu’elle en deviendra insupportable.Je me dirige vers la fenêtre, écartant lourdement la tenture de velours. Dehors, la cour est un fourmillement d’ombres et de lumières, indifférente aux drames qui se jouent derrière les murs de pierre. Mon reflet dans la vitre me renvoie l’image d’une inconnue : les yeux trop brillants, la bouche encore gonflée, les cheveux dé

LUCIANLe goût de la colère est un poison sur ma langue. Elle est partout. Même ici, dans les appartements de Lyria, où l'air est saturé de parfums lourds et doucereux, je ne respire que l'odeur du défi de Selia. Ce parfum de glace et de défi.— Mon seigneur ? Vous semblez distant.La voix de Lyria, un chant fluide et calculé, me tire de ma torpeur. Elle est étendue sur les coussins, offerte, ses cheveux d'or dénoués comme je les aime. Ou comme je devrais les aimer. Son regard, de ces yeux verts si souvent comparés à des émeraudes, cherche le mien avec une inquiétude professionnelle. Elle sait jouer son rôle, la douce consolatrice.Je lui caresse la joue, un geste machinal. Sa peau est douce, trop douce. Elle n'a pas cette tension, cette froideur vivante qui rend le contact de Selia aussi électrique.— Ce ne sont que des soucis de gouvernance, ma belle.Le mensonge est facile. Trop facile. Lyria sourit, se blottissant contre moi, sa main traçant des cercles lents sur ma poitrine. Elle

SELIALa froideur est une armure. Le silence, une épée. Mais certains ennemis ne se rendent qu'à la folie. Je dois donc lui en offrir un aperçu. Le lui glisser dans l'âme, doucement, jusqu'à ce qu'il en perde le goût de tout le reste.Je choisis une robe de la couleur de l'aube, d'un gris si pâle qu'il est presque blanc. Le tissu est un voile de brume, une vapeur. Il flotte autour de mes jambes lorsque je marche. Il se colle à mes hanches, à ma taille, lorsque je bouge. Les manches sont absentes, les bretelles fragiles comme des fils de la Vierge. Le dos est nu, presque entièrement. Je le sais sans même me regarder. Je sens l'air frais du château caresser ma peau, un rappel constant de ma propre vulnérabilité calculée.Je ne me coiffe pas. Je laisse mes cheveux blonds, cette malédiction solaire, cascader en désordre sur mes épaules nues. Une bête échappée de sa cage. Une nymphe sortie des bois. Tout sauf la reine de pierre qu'il a voulu façonner.Je sors de ma chambre. La porte, répar