All Chapters of LA FAVORITE DU ROI : Chapter 71 - Chapter 80

LUCIANLa voir s'éloigner, cette ondulation moqueuse de ses hanches, ce dos nu offert à l'ombre et à la lune, est la goutte qui fait déborder le vase. La raison, cette faible lueur, s'éteint d'un coup. Il ne reste que le feu. Le feu qu'elle a allumé de ses propres mains, avec le sourire froid d'une stratège qui sait qu'elle a gagné.Elle croit contrôler le jeu. Elle croit que son calme est une forteresse. Elle va découvrir que c'est une prison. Ma prison.Je la suis. Mes pas sont silencieux, ceux d'un prédateur qui connaît son territoire. Elle ne se retourne pas. Elle descend un escalier de service, menant aux cuisines désertes, comme elle l'a si bien suggéré. Elle joue son rôle jusqu'au bout, l'appât qui se promène, sûre de son immunité.Elle a tort.Le couloir est étroit, sombre, seulement éclairé par la lueur d'une torche mourante au loin. Les murs de pierre suintent le froid et le secret. L'endroit parfait.Je la rattrape en trois enjambées. Ma main se referme sur son bras, non pa

LUCIANLes rumeres sont des serpents. Elles glissent sous les portes, s’enroulent autour des colonnes, chuchotent à l’oreille des courtisans avant même que l’aube n’ait déchiré le ciel. On me regarde différemment ce matin. Non plus avec la crainte respectueuse due au roi, mais avec une curiosité avide, malsaine. Ils ont entendu. Ils savent.Ils savent que je l’ai prise dans un couloir, comme un soldat pillant un butin. Ils chuchotent qu’elle était à moitié nue, qu’elle s’est débattue, ou qu’elle s’est offerte, les versions divergent, mais le fond reste le même : le Roi a perdu tout contrôle pour elle. La nouvelle me précède dans la grande salle, plus efficace qu’un héraut. Je la vois dans les sourires en coin, les regards fuyants. Je suis devenu un spectacle. Son spectacle.Et elle… elle est repartie. Avec son drap en guise de robe, fuyant à l’aube comme une voleuse. Elle a regagné sa forteresse de silence, laissant derrière elle l’odeur de sa peau sur mes draps et le goût de sa soumi

SÉLIALa sortie de la Grande Salle est une marche triomphale et solitaire. Chaque pas sur les dalles polies résonne comme un défi. Je sens dans mon dos le poids du regard de Lucian, un poignard de glace planté entre mes omoplates. Les courtisans s'écartent sur mon passage, leurs murmures un mélange de réprobation et de crainte nouvellement née. J'ai dansé avec le lion et j'en sors indemne, laissant ses griffes accrochées à l'orgueil de sa cour.Mes nouveaux appartements me paraissent soudain moins une cage qu'un champ de bataille personnel. Les bougies sont allumées, projetant des ombres mouvantes sur les tapisseries qui racontent des histoires de chasses et de guerres anciennes. Des histoires d'hommes. Je défais moi-même les épingles de ma robe pourpre, laissant le lourd tissu glisser à mes pieds dans un souffle de soie. Aucune servante n'est venue m'attendre. Un message, sans doute. Je reste en simple jupon, la peau encore frémissante du contact imposé de Lucian, de la musique, des

Selia Son regard balaie la table, les mets intact dans mon assiette, les visages faussement innocents de Calandra et Lyria.— Nous échangions simplement des… histoires de cour, Votre Majesté, dit Lyria avec une courbette parfaite.Lucian s’approche, pose une main sur le dossier de ma chaise. Le contact est à la fois protecteur et possessif.—Des histoires ? J’espère qu’elles étaient divertissantes. Sélia a besoin de distractions plus… édifiantes.Son regard se pose sur Calandra.—Calandra. Tu m’as souvent réclamé le domaine de Clairval. Il est à toi. Tu partiras demain pour l’administrer.Calandra blêmit. Clairval est une terre lointaine, isolée. C’est un exil.—Majesté, je…—C’est un ordre.Puis il se tourne vers Lyria.—Lyria. Tes conseils en diplomatie nous manquent à la frontière Nord. Les tribus barbares sont agitées. Tu partiras à l’aube comme mon émissaire sans délai .Lyria ne bronche pas, mais une lueur de haine pure traverse son regard avant de s’éteindre. Une mission péril

SÉLIALe retour dans mes appartements est un cortège silencieux. Lucian marche à mes côtés, sa main toujours serrée autour de la mienne comme un carcan de chair et d’os. La tension qui émane de lui est presque palpable, un mélange de triomphe sauvage et de quelque chose de plus sombre, de plus vorace. Les gardes que nous croisons s’écartent, baissant les yeux non par respect, mais par crainte instinctive. L’air même que nous respirons semble chargé d’ozone, annonciateur d’un orage.La lourde porte de chêne se referme derrière nous, isolant le monde. Le craquement de la serrure est le son le plus définitif que j’aie jamais entendu.Il se retourne alors.Et le masque du roi, si parfaitement composé dans la salle du trône, se fissure, se désagrège, laissant place à l’homme dévoré. Son regard n’est plus celui du souverain qui couronne un artiste. C’est celui du fauve qui a flairé le sang.— Personne, commence-t-il, la voix rauque, basse, striée d’un tremblement qu’il ne cherche plus à cac