#Donna
Les jours suivants, je suis en état de transe, hantée par l'ampleur de ma décision. Comme toujours, quand je me sens perdue, je me tourne vers Léna. On se donne rendez-vous dans un café près de son travail, et je m'effondre sur ma chaise.
- Ça va ? demande-t-elle, visiblement inquiète.
- Pas vraiment...
- Qu'est-ce qui se passe ?
À quoi bon mentir ? Elle est la seule à tout savoir sur moi, la seule en dehors de Madame Goodway à connaître mes secrets. Alors, je lui raconte tout.
- Ahhhh, qu'elle m'énerve, celle-là ! s'exclame-t-elle en frappant la table du poing.
Je souris faiblement.
- Tu n'es pas la seule... Mais je n'ai pas vraiment le choix.
- Peut-être, mais je déteste le chantage.
- Moi aussi.
Elle croise les bras, son regard acéré fouillant le mien.
- Et quand elle te donnera son adresse ? Tu iras le voir ? Tu y as réfléchi ?
Je soupire.
- Pas vraiment... Je ne sais même pas si je pourrais supporter de le voir. Je ne suis pas sûre d'être prête.
- C'est normal, quatre ans, c'est long. Écoute, si c'est trop dur pour toi, laisse-moi gérer. Je m'occupe de lui, je l'élimine, et on n'en parle plus.
J'éclate de rire. C'est complètement tordue... mais je sais qu'elle en serait capable.
- Non, laisse tomber. C'est mon problème. Je ne veux pas que tu sois mêlée à ça.
- Je le suis déjà, Donna. Tout ce qui te touche me concerne, et tu le sais très bien. Je pourrais mourir pour toi.
Je serre sa main, reconnaissante.
- Moi aussi.
Elle me sourit doucement et caresse ma main, un geste réconfortant qui apaise le tumulte en moi.
- Bon, et sinon ? Quoi de neuf ?
- Pas grand-chose... soupire-t-elle.
- Toujours pas de copain ?
Elle lève les yeux au ciel.
- Plutôt mourir. Tu sais bien que j'ai les hommes en horreur.
- Un jour, il faudra pourtant te caser.
- Le jour où tu retomberas amoureuse.
Mon cœur se serre. Elle a touché là où ça fait mal.
- Dans ce cas, ce n'est pas prêt d'arriver.
- Alors on est d'accord.
Un silence s'installe, lourd de sous-entendus. Puis, elle change de sujet.
- Pourquoi tu continues ce boulot pourri ? Tu as assez d'argent. Fais quelque chose qui te passionne, Donna.
- J'y pense... bientôt.
Elle fronce les sourcils.
- Ce client... Tu as dit qu'il n'était pas net. Et s'il te faisait du mal ?
- Léna, arrête de trop réfléchir, s'il te plaît. Un problème à la fois.
- Pff... j'en ai marre de tout ça.
"Moi aussi..." Mais ce n'est pas encore le moment de lâcher prise.
On continue de discuter de sujets plus légers jusqu'à ce qu'elle retourne travailler. Je prends ensuite la direction du Black Harbour. Une fois sur place, je me dirige sans hésiter vers le bureau de Katrine.
- Madame Goodway est occupée, veuillez patienter, m'indique sa secrétaire.
J'acquiesce et m'installe sur un canapé.
Une demi-heure plus tard, la porte s'ouvre enfin. Une jeune femme en sort, me fixe un instant avant de sourire mystérieusement et de s'éloigner.
Bizarre.
Je hausse les épaules et mets ça de côté. Ce n'est pas mon problème. Je me lève et entre dans le bureau de Katrine.
- Bonsoir, Madame Goodway.
- Donna, qu'est-ce qui t'amène ?
Je m'avance, m'asseyant en face d'elle.
- J'ai réfléchi à votre proposition.
Un sourire satisfait éclaire son visage.
- Et... ?
- J'accepte.
Elle hoche la tête et décroche immédiatement son téléphone, échange quelques mots brefs avant de reporter son attention sur moi.
- Tu as fait le bon choix. Ce n'est qu'un an, ça passera plus vite que tu ne le crois.
Je souris amèrement.
- J'espère juste que vous tiendrez parole. Je veux son adresse, ainsi que toutes les informations que vous avez sur lui.
- Évidemment, tu les auras. Mais avant, tu dois signer le contrat. C'est la moindre des choses.
J'allais répondre quand des coups résonnent à la porte. Un homme entre.
- Monsieur Skylar, approchez.
Zayden, une des sentinelles du Black Harbour, s'avance d'un pas assuré.
- Vous avez demandé à me voir, madame ?
- Oui. Je veux que tu sois la sentinelle attitrée de Mademoiselle Gold pour son prochain contrat.
Un éclair de surprise traverse son regard, mais il reste impassible, aussi froid et impénétrable qu'une statue.
- Bien, Madame. Quand commence-t-elle ?
- Après-demain.
Elle lui tend un dossier.
- Lis ces informations avant.
- À vos ordres.
Je reste silencieuse tout au long de l'échange. Lorsqu'il quitte la pièce, Katrine se tourne à nouveau vers moi.
- Donna, ma petite, j'ai toujours été fière de toi. Tu ne m'as jamais déçue. J'espère que cette mission ne fera pas exception.
Je ne réponds pas.
- Très bien, signe ici et c'est réglé.
Sans un mot, je prends le stylo et appose ma signature sur le contrat.
- Félicitations, tu es désormais l'épouse de Monsieur James. Tu sais ce qu'il te reste à faire.
Je me lève, récupère mon sac et quitte son bureau.
Je marche droit vers l'ascenseur et appuie sur le bouton. Les portes s'ouvrent, je m'apprête à entrer, mais une main bloque les battants.
Je lève les yeux.
Zayden.
Nos regards se croisent. Quelque chose brille dans le sien, une lueur indéchiffrable, entre colère et trouble.
- Il faut qu'on parle.
Sa voix est brute, tranchante.
Je le fixe, impassible, attendant la suite.
Je pénètre quelques instants après dans sa chambre, le cœur en vrac. L'odeur me frappe en premier celle du désinfectant, des médicaments, de la mort suspendue.Il est là. Étendu. Inerte.Le même décor depuis des mois. Les draps tirés avec une précision clinique. Les machines qui rythment chaque seconde. Les fils qui s'enfoncent dans sa peau comme des chaînes. Mon père. Ou ce qu'il en reste.Depuis son coma, il n'a pas ouvert les yeux une seule fois. Pas une parole. Pas un signe. Juste ce souffle artificiel, ce battement régulier sur les moniteurs.Mais aujourd'hui, tout est différent.Le bip de la machine cardiaque est plus instable. Les chiffres à l'écran dansent, incertains. Et le médecin n'a pas eu besoin d'user de mots pour que je comprenne. La fin est proche.Je m'approche, le regard fixé sur ce visage qui a longtemps imposé le respect, la peur, la loyauté. Jadis, il n'avait pas besoin de parler pour se faire obéir. Un seul regard suffisait.Aujourd'hui, ses yeux sont clos.- Tu
Nos souffles s’apaisent peu à peu. Je reste en elle, encore un instant, à savourer la chaleur de son corps, le frisson qui me parcourt chaque fois que ses doigts effleurent ma peau. Elle ferme les yeux, son visage détendu, presque paisible. Je la regarde, fasciné. Comment une femme peut-elle incarner à la fois la douceur d’un ange et la sauvagerie d’un démon ?Je me retire lentement, l’attirant contre moi, nos corps nus entremêlés sous les draps défaits. Elle repose sa tête sur mon torse, ses cheveux humides collés à ma peau. Mon cœur cogne toujours fort, comme si je venais de frôler l’abîme. Mais ce n’était pas une simple baise. C’était autre chose.— Tu regrettes ? demande-t-elle dans un souffle.— Si je regrettais, je ne serais pas encore là.Elle esquisse un sourire contre mon torse, puis un silence s’installe. Apaisant. Mais pas pour longtemps.Elle relève doucement la tête, plante ses yeux dans les miens. Et ce regard… putain. Il rallume tout. Ce feu incontrôlable, ce besoin vis
Quelques minutes plus tard, alors que je tente de retrouver mon calme dans mon bureau, un toc discret se fait entendre à la porte.- Entre, dis-je sans détourner les yeux de la fenêtre.Angel pénètre dans la pièce, son regard grave. Pas besoin de mots inutiles, je sais qu'il n'est pas là juste pour me saluer.- Boss, je sais que tu voulais tout savoir sur elle, dit-il en s'approchant mais je n'ai rien trouvé de compromettant.Je me retourne lentement, mes yeux accrochés aux siens. Il dépose une tablette sur la table basse et l'allume. Un fichier s'ouvre.__ Elle s'appelle Donna Gold, citoyenne américaine. Dossiers académiques propres, aucun casier judiciaire, pas de famille proche répertoriée. Pas d'amants connus, pas de dettes, pas d'antécédents médicaux, pas même une foutue allergie. On dirait un fantôme.Je le fixe, tendu.- Tout le monde a un passé, Angel. Tout le monde.__ Effectivement Boss, c'est comme si elle a été créée de toute pièce.Impossible.- Elle m'a parlé de cet homm
Elle reste figée dans ma prise, son regard rivé au mien, brûlant d’insolence. Elle ne cille pas. Elle ne recule pas.— Lâche-moi, murmure-t-elle d’un ton bas, presque doux, mais qui n’a rien de tendre. On dirait un ordre déguisé en supplication.Je ne bouge pas. Pas tout de suite. Mon pouce glisse contre l’intérieur de son poignet, là où sa peau est fine, vulnérable. Elle frissonne. L’espace d’une seconde, je crois la tenir, la dominer. Mais ses yeux me ramènent à la réalité : c’est moi qu’elle tient, sans même me toucher.Je relâche sa main. Lentement.— Tu as une sacrée façon de tester les limites, toi.Elle ne répond pas, elle se contente de se lever. Pieds nus sur le sol froid, elle se dirige vers la salle de bains. Sa chemise de nuit épouse ses courbes comme une provocation silencieuse. Je la suis du regard, tendu, prêt à bondir.Mais elle ne ferme pas la porte.— Tu comptes me mater aussi pendant que je pisse ? ironise-t-elle en croisant mon regard dans le miroir.Je souris. Fro
— Et moi, je suppose que j’aime qu’on me laisse tranquille, dis-je d’un ton plus incisif. Dites-le à votre boss.Il n’esquisse pas un mouvement. Pas une seule expression. Il se contente de me regarder, de m’observer comme une ombre, de m’accompagner dans le silence.Je le traverse et retourne dans ma chambre. J'en ai suffisamment vu pour le moment.---En soirée#AlaricAprès ma brève rencontre avec "ma nouvelle femme", je suis allé en mission. Des négociations avec un chef de clan un peu trop ambitieux qui se sont terminées pas comme je l'espérais. Je suis conscient que mon territoire est très convoité, mais jamais je ne laisserai quiconque s'en accaparer. Mon père a lutté pour garder le contrôle et faire fructifier ses affaires. Le minimum, c'est de faire de même ou d’aller au-delà.Dès mon retour, Angel me fait le rapport de nos activités. Je l'écoute discrètement, car je suis éreinté, puis il me passe une information qui éveille ma curiosité soudainement.__ Votre épouse a demandé
Quelques minutes plus tard, une fois mes émotions maîtrisées, j’envoie un message à Zayden pour lui transmettre les instructions. Pour l’instant, je contrôle la situation, il n’a pas à s’en inquiéter. Ensuite, je me débarrasse lentement de mes vêtements, chaque geste mesuré, presque cérémoniel. Peut-être qu’un bain atténuera encore un peu l’incendie qui couve sous ma peau.Je glisse sous la douche. L’eau ruisselle sur mon corps, chaude, enveloppante. Je ferme les yeux, me laisse engloutir par le silence et le martèlement régulier du jet. Mon esprit dérive, s’égare. Le temps s'étire, me perd. Ce n’est que lorsque le froid s’insinue contre ma peau que je coupe l’eau, tire une serviette et l’enroule autour de moi.Je me mets ensuite à ranger mes affaires. Je ne possède que peu de choses. Juste l’essentiel. Inutile d’en faire plus : ces vêtements ne me serviront plus une fois le contrat terminé.Mon cher époux, en revanche, aura tout le loisir de veiller sur moi. Un sourire cruel s’étire