Vittoria
Je le guide à travers ce couloir étroit, où chaque pas résonne comme un glas. L’air est lourd, presque visqueux, chargé d’un silence si pesant qu’il en devient palpable. Les murs de pierre suintent l’humidité froide, rappelant l’enfermement, l’inéluctable chute.
Adrian avance, raide comme un ressort prêt à se briser. Sa mâchoire se crispe, ses mains serrent et desserrent nerveusement. Je perçois son souffle court, haché, celui d’un homme qui sent la cage se refermer.
Nous arrivons devant une porte massive, énorme, barrière tangible entre lui et ce qu’il refuse de voir. Ma main se pose sur le bois, glacée, chaque mot que je prononce est un coup porté à son cœur :
— Tu pensais pouvoir la protéger.
Je recule, laissant le silence s’abattre entre nous, lourd et cruel comme une sentence.
La porte s’ouvre lentement, dévoilant une pièce où la lumière crue éclaire tout, impitoyable. L’air y est saturé d’une tension électrique, chaque respiration semble un poids supplémentaire.
Adrian
Je franchis ce seuil avec la sensation que mon cœur va exploser.
Et là, elle est là. Sa silhouette étendue, vulnérable, sur ce canapé de velours sombre. Nue , entourée de trois hommes aux gestes sûrs, dominateurs.
Leurs mains effleurent, caressent, explorent sa peau avec une froideur mécanique, un contrôle précis. Ils s’emparent d’elle avec une possession silencieuse, sans hâte, sans laisser de place au doute.
Je perçois ses gémissements bas, rauques, vibrants qui s’échappent de ses lèvres entrouvertes, mêlés à un rire clair et provocant, qui semble se jouer de ma présence, me narguer.
Ses yeux mi-clos brillent d’un éclat brûlant, une flamme trouble qui me transperce et me détruit à la fois.
Les corps s’enlacent dans une chorégraphie lente et sensuelle, une danse muette d’avidité et de domination.
L’un des hommes dépose un baiser brûlant sur son cou, sa langue dessinant une traînée incandescente qui fait frissonner sa peau.
Un autre glisse ses doigts fermes dans ses cheveux, tirant lentement sa tête en arrière, exposant sa gorge avec un mélange d’autorité et de douceur calculée.
Le troisième parcourt ses hanches, les tenant fermement, la pressant contre lui avec une force contrôlée.
Une boule de rage, de douleur et de trahison me serre la poitrine, m’étouffe. Un goût amer, métallique, remonte dans ma gorge et me brûle.
Je serre les poings au point de faire blanchir mes jointures, incapable de détourner le regard, même si chaque seconde me transperce comme un poignard.
— Qu’est-ce que… ? Ma voix tremble, brisée par l’incrédulité et la douleur.
Je voudrais hurler, tout casser, faire disparaître cette vision atroce. Mais je reste là, immobile, prisonnier d’un cauchemar éveillé.
Vittoria
Je m’approche d’Adrian, posant ma main glacée sur son épaule tendue. Je sens son corps trembler, nerveux, fragile sous cette pression invisible.
— Regarde bien, Adrian.
Je me penche à son oreille, ma voix est un murmure tranchant :
— Ils prennent soin d’elle. Je veille à ce qu’elle connaisse la vraie nature du pouvoir… la mienne.
Je plonge mon regard dans le sien, cherchant la dévastation, la colère, la peur qui lutte pour ne pas éclater.
Ce jeu est cruel, oui. Mais c’est le seul moyen qu’il reste pour lui montrer qu’il ne contrôle plus rien.
Adrian
Je détourne les yeux un instant, mes mains agrippant le bord du canapé comme pour me retenir de sombrer.
Je sens la chaleur des corps mêlés, le contact implacable des mains sur la peau de celle que j’aime ou du moins, celle que j’ai cru aimer.
Elle ne me regarde pas. Elle ne me voit plus. Elle ne m’appartient plus.
Je fixe cette scène infernale, impuissant.
Leurs baisers sur son cou sont profonds, possessifs, s’entrelacent avec ses soupirs des sons rauques, étouffés, saturés de désir.
Ses doigts serrent les coussins, trahissant un plaisir intense, douloureux, oscillant entre abandon et défi.
Sa bouche s’entrouvre, laissant échapper un murmure, une plainte suspendue entre la douleur et l’extase.
Les mains glissent sur elle, s’immisçant dans ses cheveux, effleurant le creux de ses reins, caressant la peau sensible de ses cuisses avec une délicatesse calculée.
La pièce semble vibrer sous le poids de ces gémissements sourds, parfois étouffés, parfois plus clairs, enroulés dans un souffle haletant et chargé.
Une brûlure sourde s’empare de mon ventre, un cocktail dévastateur de rage, de honte et de douleur lancinante.
— Tu es folle, Vittoria. Comment peux-tu faire ça ? hurlais-je, la voix étranglée, brisée , je te jure que je vais te le faire regretter .
Elle ne répond pas. Son silence est plus cruel que n’importe quelle insulte.
Je serre les dents, luttant pour ne pas laisser ce feu m’engloutir.
Vittoria
Je souris, un sourire froid, dur, presque satisfait.
— Regretter ? Non, Adrian. Ce n’est pas moi qui regretterai.
Je m’avance dans la pièce, indomptable, une tempête prête à tout ravager sur son passage.
— C’est toi qui vas apprendre ce que signifie la perte, la domination, l’humiliation.
Je me tourne vers elle, observant sa posture altérée, presque triomphante, un dernier avertissement silencieux.
— Ta fiancée est ici. Mais elle ne t’appartient plus.
Je sens le corps d’Adrian se tendre, chaque muscle prêt à exploser sous la pression qui monte.
— Ce n’est que le début, murmurai-je, glaciale et inébranlable.
Adrian
La rage m’envahit, sourde, sauvage, dévorante, prête à déchirer tout ce qui se trouve sur son passage.
Je veux hurler, détruire, me réveiller de ce cauchemar sans fin.
Mais cette colère est aussi une plaie béante, une brûlure qui ne guérit pas, qui ronge en silence.
Je détourne les yeux, incapable d’accepter cette humiliation imposée, cette trahison orchestrée par celle que je hais.
Je sais, au plus profond de moi, que cette guerre ne fait que commencer.
Et que rien ne sera plus jamais comme avant.
VITTORIAJe laisse mes doigts glisser sur le pied de mon verre, comme si je caressais une promesse. La lumière tamisée du restaurant enveloppe les tables d’une chaleur feutrée, mais à notre table, l’air vibre d’électricité contenue. Le serveur s’éloigne, discret, mais je sais qu’il a vu, qu’il a compris. Tout le monde comprend.Je dépose ma main sur la sienne. Un effleurement d’abord, presque innocent, comme si j’avais simplement besoin d’appui. Mais je prolonge. Mes doigts enveloppent les siens, mes ongles tracent de légers cercles sur sa peau tendue. Il ne retire pas sa main. Il ne peut pas. Ses yeux brûlent pourtant de colère contenue, de refus muet.Je souris, douce et victorieuse. — Tu vois, Adrian, tout paraît si naturel, quand on cesse de lutter.Je serre un peu plus, et j’entends les conversations autour de nous s’interrompre un instant. L’atmosphère change, imperceptiblement, mais je le sens : les regards se tournent, certains subtilement, d’autres avec une curiosité à peine
VITTORIAJe sens le regard d’Adrian brûler contre ma peau alors que je détourne le mien avec légèreté. Les murmures et les flashes continuent de crépiter autour de nous, mais je ne les remarque plus. Tout ce qui compte, c’est le moment que je vais lui imposer, le jeu que je contrôle.— Allons déjeuner, murmuré-je à voix basse, juste pour lui, mais suffisant pour que le monde entende notre complicité apparente.Ses yeux se plissent, mélange de colère et d’incrédulité, mais il ne proteste pas. Pas encore. Je sais que sa fierté hurle, que sa stratégie mentale s’active, mais il ne peut rien contre moi ici. Pas après ce baiser, pas après ce parvis transformé en scène.Je l’entraîne par le bras, léger contact qui en dit long, jusqu’à ma voiture. Les passants reculent instinctivement, fascinés et effrayés par la démonstration silencieuse. Chaque talon frappant le trottoir est un rappel que je dicte le rythme. Adrian garde la tête haute, mais je devine le tremblement contenu dans ses poings.
ADRIANLe palais de justice est une ruche disciplinée : robes noires qui se croisent, dossiers sous le bras, pas mesurés, visages fermés. Ici, chaque mot pèse, chaque geste est scruté. C’est mon domaine, mon dernier rempart, le théâtre où je contrôle tout, où chaque seconde est codée et chaque erreur sanctionnée.Je viens de sortir d’une audience. La lumière crue du soleil m’aveugle un instant. Les flashes des journalistes éclatent déjà au bas des marches, impatients, affamés. Je prends une inspiration pour m’armer d’indifférence, mais mon corps refuse. Mon cœur s’accélère avant même que je ne la voie….. Vittoria.Elle se tient là, comme si le parvis entier était son trône. Tailleur sombre parfaitement coupé, lunettes noires, lèvres écarlates. Derrière elle, ses gardes dessinent un arc de cercle menaçant, statues de pierre vivantes. Le tumulte de la ville s’arrête net. Les voitures freinent, les passants figent leurs gestes. Même le vent semble hésiter avant de bouger.Mon souffle se
VITTORIALa grille s’ouvre dans un grincement feutré, à peine audible, mais je sais que derrière le portail, une dizaine d’yeux me suivent déjà. Les gardes se tiennent droits, silhouettes noires découpées dans la lueur des projecteurs. Leurs oreillettes brillent comme des cicatrices métalliques. Ils ne parlent pas. Ils ne sourient pas. Ils sont là pour une seule chose : protéger mon empire.La voiture s’avance dans l’allée bordée de cyprès. Chaque arbre semble se pencher en signe de révérence. Quand je descends enfin, les talons frappent les pavés comme les coups d’un marteau de juge. Ma sentence est tombée ce soir : Adrian est à moi.Un garde ouvre la porte d’entrée de la villa. Pas un mot, pas un regard. Ils savent. Ils sentent que je reviens victorieuse.À l’intérieur, la demeure respire le luxe glacé : marbre poli, tapisseries sombres, lustres de cristal. Tout est silence, sauf le bruissement de ma robe. J’ai bâti ce lieu comme une forteresse : les vitres sont blindées, les caméra
ADRIANUn bruit de chaise fend le silence et me tire du sommeil. Mes yeux s’ouvrent d’un coup, happés par la lumière crue de la lampe de chevet. La chambre paraît étrangère, découpée en zones trop nettes. Vittoria est là, assise dans le fauteuil, jambes croisées, une tasse fumante posée sur la table basse. Son calme me glace. Elle ne semble pas une intruse : elle semble avoir toujours eu droit de cité ici.— Qu’est-ce que tu fais ici ? Ma voix est sèche, alourdie par la fatigue.Elle sourit, ce sourire qui n’éclaire jamais rien.— Je suis venue passer la nuit avec mon fiancé.Je me redresse, le cœur martelant mes tempes.— Ton fiancé ? Tu parles de qui ?— De toi, Adrian. Toi. Et dans quelques jours, dans un restaurant de la place, tu me demanderas en mariage devant témoins.Le souffle se bloque dans ma gorge. Mes yeux cherchent machinalement mon téléphone sur la table de nuit. Vide. Elle suit mon geste d’un léger mouvement de tête, presque amusée.— Inutile. Tu ne l’auras pas. Et qua
ADRIANMon téléphone vibre encore dans ma main quand la réunion se disperse. Les visages autour de la table restent tendus, chacun portant la fatigue d’un animal qui sait qu’on le chassera s’il chancelle. Marco soupire, comme s’il venait d’entendre une cloche qu’il n’a pas su faire taire. Clara range ses notes avec une précision rageuse. Alessandro, lui, a les yeux qui brillent : la chasse a commencé et il adore la chasse.Je relis la capture. Le message est simple, vulgaire par sa clarté : elle a des copies. Elle menace d’envoyer ce qu’il faut au procureur de la République. La formulation est un défi et une promesse. C’est moins un chantage qu’un jeu d’échecs où l’adversaire m’impose un tempo que je dois casser.Sofia me rejoint presque immédiatement, sans cérémonie. Elle entre comme on pousse une porte dans un chantier : poussière, détermination, nerveuse mais nette.— Tu as fait le bon mouvement, dit-elle, sans détour. Mais tu as bougé sur le terrain qu’elle préfère. Elle aime la s