LOGINLiamLe sommeil la tient enfin. Un sommeil profond, sans le frémissement des cauchemars qui, je le sais, hantent ses nuits. Son souffle est calme, régulier contre mon cou. Son poids sur mon bras s’est alourdi, abandonné. La voir ainsi, apaisée, après l’ouragan de vérités que nous avons lâché… C’est un spectacle plus bouleversant que tous ses combats.Je ne dors pas. Je regarde les ombres du plafond, portant le poids de sa confiance nouvelle comme une couronne d’épines. Désolé. Le mot résonne encore dans mes os. Il n’était pas assez. Il sera toujours trop petit pour contenir l’océan de contradictions où nous nageons.Ma main, qui dessinait des spirales sur son dos, s’immobilise. Je crains de la réveiller. De briser cette trêve fragile. Elle bouge un peu, un soupir s’échappant de ses lèvres entrouvertes, et se blottit plus fort contre moi. Comme si, même endormie, elle cherchait l’ancrage.C’est insupportable.C’est vital.---Son réveil est lent. Une émergence paisible, à des années-lu
LéaIl ne m’emmène pas vers le lit. Il m’arrête au milieu du salon, dans la pénombre à peine trouée par la lumière du couloir. Sa main, qui enveloppait la mienne, se fait plus ferme, non pour me contraindre, mais pour m’ancrer. Je suis face à lui, mon dos contre le mur froid, son corps formant une barrière entre moi et le reste du monde. Je lève les yeux vers son visage, cherchant la lassitude, la froideur, le triomphe. Je ne trouve rien de cela.Son regard est sombre, mais d’une obscurité différente. Une tempête intérieure s’y joue, silencieuse, violente. La ligne de sa mâchoire est tendue. Il respire profondément, comme un homme sur le point de plonger dans des eaux glaciales.— Léa.Mon nom, dans sa bouche, n’est pas un ordre. C’est un poids. Une pierre tombale.Je me raidis, préparant mes défenses, aiguisant le tranchant de ma colère restante. Je vais lui cracher son nom aussi, avec mépris. Lui dire que ses jeux psychologiques ne m’intéressent plus.Les mots me meurent sur les lèv
LéaLa force me quitte. Je m’affaisse sur une chaise, les mains vides, le chiffon humide tombé à mes pieds. La rage se mue en une nausée vertigineuse. Je ne suis pas en colère contre lui d’être parti. Je suis en colère contre moi de l’avoir laissé marquer mon âme à ce point. De lui avoir donné ce pouvoir. Le pouvoir de me définir. Le pouvoir de me rendre à ce point… dévastée par son simple départ.Le soir tombe. L’obscurité vient lentement, effaçant les angles de la pièce, noyant les couleurs. Je n’allume pas la lumière. Je reste assise dans le noir, à guetter.Non pas son retour. Je ne guette plus ça.Je guette l’extinction de l’espoir. Le moment où « à ce soir » deviendra définitivement un mensonge. Car c’est seulement quand cet espoir sera mort que je pourrai peut-être commencer à haïr assez fort pour survivre. Que je pourrai transformer cette colère en une armure permanente.La clé tourne dans la serrure.Le son est net, étrangement banal, dans le silence absolu que j’ai laissé s’
LéaLa colère ne monte pas. Elle tombe. Comme une dalle de béton, lourde, définitive, au centre de ma poitrine, écrasant le soulagement fragile du matin. Elle n’est pas chaude. Elle est froide. Glaciale.Il est parti.Pas une absence temporaire. Une disparition. L’appartement est un sanctuaire vidé de son dieu, et je ne suis que la prêtresse abandonnée devant un autel souillé. Le lit froid, l’oreiller intact de mon côté, la note laconique… Ce n’était pas un au revoir. C’était un constat d’absence. « À ce soir » ? Une formule. Une politesse. Une manière de fermer la porte sans claquer.Je tourne en rond. Le café, maintenant, a le goût de la cendre. La note, lissée sur la table, est une insulte. Je la prends, non plus avec des doigts tremblants, mais avec une précision mécanique. Je la déchire. Une fois. Deux fois. Je réduis ses mots arrogants, son « N » présomptueux, en une petite pile de confetti parfaits. L’acte est dérisoire. Ça ne soulage rien. La colère est trop dense, trop solide
LéaLa conscience me revient par vagues, lentes et lourdes. Je ne suis pas réveillée par un bruit, mais par une absence. L'espace du lit à côté de moi est vide, froid. Je garde les yeux fermés, retenant un souffle, écoutant le silence de l'appartement. Il est parti. L'air ne porte plus son odeur, seulement le parfum rance de nos corps et de la nuit passée.Je me redresse. Une douleur sourde, presque douce, palpite au crein de mes hanches. Un rappel physique. Mes draps sont froissés, la trace de sa tête sur l'oreiller encore marquée. Je pose la main à cet endroit. Rien. Froid.Ma première pensée est un soulagement si aigu qu'il en est coupant. Un espace à moi. De l'air. La possibilité de penser sans que son regard ne pèse sur mes pensées, sans que ses mots ne déforment les miennes.Je me lève. Mes jambes tremblent. Devant le miroir de la salle de bain, je me regarde. Les marques sur ma peau sont moins vives au petit jour, des bleus naissants, des rougeurs fatiguées. Mais ce n'est pas c
Léa Son poids sur moi est une ancre qui me retient au fond d'un océan de sensations confuses. Chaque parcelle de ma peau vibre encore, comme électrisée par la violence de notre étreinte. L'air est saturé de notre odeur mêlée - son parfum boisécorps chaud, mon parfum à moi écrasé sous le sien, et cette senteur musquée, animale, qui monte de nos corps en sueur.Il se retire enfin, avec une lenteur qui semble calculée. Le vide qu'il laisse est immédiat, physique. Un froid cruel me saisit là où, moments auparavant, sa chaleur m'envahissait. Je sens son sperme couler le long de mes cuisses, trace humide et honteuse sur ma peau. Je ferme les yeux, mais l'obscurité derrière mes paupières ne m'offre aucun répit. Je le vois encore - ses yeux noirs brillant d'une possession triomphante, la courbe cruelle de sa bouche quand il a ordonné que je jouisse.— Regarde-moi.Sa voix est basse, mais elle résonne dans le silence comme un coup de feu. Un ordre, pas une invitation. Je rouvre les yeux, malg







