Il a effacé notre amour de ses propres mains pour elle

Le premier amour de Mathis, Élise, elle est revenue du Nord.

Ce jour-là, il m'a tendu distraitement un verre d'eau infusée à l'herbe douce, puis il m'a dit :

« Elle est empoisonnée à l'argent jusqu'aux os. Il ne lui reste plus que 21 jours. »

« Elle veut que je sois avec elle jusqu'à la fin. »

Il a dit cela d'un ton calme, comme s'il parlait simplement de la météo. On n'entendait aucune émotion.

J'ai froncé les sourcils :

« Dans ce genre de moment… elle devrait demander de l'aide aux anciens de la meute, non ? Pourquoi toi ? »

Élise était son premier amour. C'était aussi sa petite demi-sœur.

Il m'a déjà dit qu'ils avaient pris des chemins différents, mais qu'ils restaient malgré tout une forme de « famille », sans lien de sang.

Avant, j'étais souvent jalouse d'elle.

Mathis et moi, nous étions des compagnons véritables. Dès notre rencontre, nous l'avons su. Et ce jour-là, il ne restait plus que deux semaines avant la cérémonie du marquage que j'attendais depuis si longtemps.

Mathis a baissé les yeux, évitant mon regard.

« Son père est mort dans une avalanche pendant une chasse, il y a quelques mois. Sa mère l'a abandonnée quand elle avait quatre ans. »

« Aujourd'hui, elle est seule. »

« Donc tu… tu as eu pitié d'elle ? »

J'ai perçu une émotion qu'il ne réussissait pas à dissimuler.

« Ce n'est qu'un soupir, rien de plus, » a-t-il répondu en haussant les épaules. Il a fait semblant d'être détendu, a tendu la main pour effleurer le bout de mon nez, et il a changé de sujet :

« Tu es nerveuse ? La cérémonie du marquage approche. »

« Pff. » J'ai levé les yeux au ciel. « Elle n'a même pas encore eu lieu. »

« Elle arrive très vite, » a-t-il dit avec un léger sourire.

Puis il m'a regardée plus sérieusement :

« Tu es ma seule épouse, ma compagne, l'unique de toute ma vie. »

Mathis était toujours resté calme et discret. Il n'a jamais dit de belles paroles inutiles.

Même quand la Déesse de la Lune nous a réunis, il s'est contenté d'être là pour moi, en silence, me soutenant sans rien dire.

Il n'avait jamais fait de promesses à la légère.

Mais cette fois, il a parlé d'éternité.

Je me suis blottie dans ses bras, j'ai sorti la photo prévue pour la cérémonie, et je lui ai demandé en souriant de m'aider à choisir l'image d'accueil.

Il m'a serrée plus fort.

« Choisis celle que tu veux. Je dois passer au centre de soins de la meute pour quelques dossiers. »

Mathis est parti se changer.

Il avait toujours été soigné. Même pour aller acheter des fruits au marché, il s'habillait toujours bien, et rien que ça, ça me faisait battre le cœur.

Mais tout à l'heure, en partant, sa cape était mal ajustée, le bas de son pantalon mal rentré, et ses chaussettes… semblaient dépareillées.

J'ai pincé les lèvres, sans rien dire.

Une fois dehors, j'ai appelé un véhicule et je l'ai suivi de loin.

Je l'ai vu passer devant le centre de soins de la meute… sans même y entrer.

Il est allé directement à l'infirmerie au pied de la montagne du Nord.

C'était là qu'on plaçait les loups gravement empoisonnés à l'argent pour observation.

Je ne l'ai pas suivi plus loin.

Il est probablement allé voir sa chère petite demi-sœur.