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ELISE
Je le hais de tout mon corps.
Mais ce n’est plus la haine rationnelle, glacée, professionnelle. C’est une haine qui couve, qui vibre, qui s’insinue sous ma peau. Elle brûle comme une fièvre, me rend nerveuse, irritable… et honteusement excitée.
Il n’a rien pour me plaire , rien.
Et pourtant.
Chaque jour, je le cherche du regard. Chaque jour, je m’habille en me demandant si cette jupe est trop courte. Et chaque jour, je m’en veux.
Et aujourd’hui encore, il arrive avec son air insolent, sa carrure de guerrier et son regard de prédateur.
— Faudra que vous descendiez de vos talons un jour, princesse.
Je sens son souffle dans ma nuque. Son épaule frôle la mienne, sa main s’attarde peut-être un peu trop près.
Il veut que je réagisse.
Et je réagis.
— Ce plan n’est pas respecté, Marcus, dis-je, la voix sèche. Si vous ne suivez pas mes directives, ce chantier va droit dans le mur.
Il lève un sourcil. S’avance.
Ses yeux me traversent , me sondent , son mètre pend à sa main comme une provocation. Ses manches sont retroussées, dévoilant ses bras marqués de poussière et de veines. Des bras de travailleur , d’homme , d’animal.
Et je déteste à quel point je les regarde trop longtemps.
Il s’approche jusqu’à ce que je sente la chaleur de sa peau, cette odeur brute bois brut, ciment sec, sueur propre. Je serre les jambes sans même m’en rendre compte.
— Tu as besoin de te détendre, Élise.
Un frisson me traverse de part en part.
Je soutiens son regard.
Mais il sait.
Il sait que je suis déjà en train de me consumer de l’intérieur.
MARCUS
Elle est sur le fil.
Et je suis prêt à le trancher.
Elle a cette façon de me regarder comme si elle était au-dessus, comme si elle contrôlait tout. Mais sous cette carapace lisse, je vois les failles , les frissons , les micro-réactions de son corps quand je suis trop près.
Elle me désire.
Et ça me rend fou.
Ce soir, le chantier est à nous. Les autres sont partis, ne laissant derrière eux que le silence, le bois brut, et la tension qui nous colle à la peau.
Je la trouve penchée sur une table, concentrée. La lumière rasante du soir souligne ses courbes, la cambrure de ses reins, la ligne de sa nuque.
Elle est magnifique , indécente. Et elle ne le sait que trop bien.
Je m’approche doucement. Je la sens se raidir, comme un animal qui sent le danger.
— Je t’énerve à ce point-là ?
Pas un mot. Juste un regard.
Elle se retourne lentement.
Et me gifle.
J’entends le claquement dans mes oreilles. Ma peau brûle.
Je souris.
Et je l’embrasse.
ELISE
Je n’ai même pas le temps de reculer.
Sa bouche s’écrase sur la mienne, possessive, brutale. Sa langue force l’entrée, réclame, exige. Et moi… je cède. Je l’agrippe, férocement. Sa chemise craque sous mes doigts. Je veux le sentir. Contre moi. En moi.
Il me soulève, sans effort. Mes jambes s’enroulent autour de ses hanches. Je sens la rigidité de son sexe dur contre mon entrejambe.
Je suis déjà trempée.
Il me plaque contre le mur. Je laisse échapper un gémissement. Sa main s’enfonce entre mes cuisses. Il écarte ma culotte d’un geste sec, impatient.
— Tu crois encore que tu diriges ? murmure-t-il contre ma gorge.
Je veux le gifler encore.
Je veux qu’il me dévore.
Ses doigts glissent en moi. Je me cambre, mes ongles s’enfoncent dans ses épaules. Il bouge, lentement, puis plus vite, comme s’il voulait me punir d’avoir résisté si longtemps.
Et je craque.
Je jouis avec violence, en crispant les cuisses autour de ses doigts , incapable de retenir mes cris.
Mais il ne s’arrête pas.
MARCUS
Elle est à moi maintenant.
Ses gémissements sont comme un feu dans mes reins. Je veux la faire jouir encore. Et encore. Jusqu’à ce qu’elle oublie son nom. Son titre. Sa foutue maîtrise.
Je la dépose sur la table, sans douceur. Elle y tombe à genoux, haletante, offerte.
Je baisse mon jean, juste assez. Je déchire sa culotte du bout des dents. Elle ne dit rien. Elle attend. Tremblante et mouillée.
Je la prends d’un seul coup.
Elle crie.
Et je rugis.
Ses mains s’agrippent au bord de la table. Son dos se cambre. Elle me serre comme si elle voulait m’aspirer. Je vais profond. Je cogne. Encore. Et encore.
Chaque coup de rein est une guerre.
Elle gémit mon prénom. Elle l’implore. Elle le maudit.
Je la gifle légèrement sur la fesse. Elle sursaute. Et gémit plus fort.
Je glisse une main sur son sein, sous sa chemise. Son téton est dur. Je le pince. Elle se contracte autour de moi.
Je sens l’orgasme revenir en elle.
Je vais plus vite.
Plus fort.
Plus cru.
Elle explose dans un cri, le corps entier secoué. Et moi, je me tends contre elle. Je grogne. Je me libère en elle, profondément, entièrement.
Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de pensée.
Plus de chantier.
Plus de guerre.
Juste nous.
Brûlants , essoufflés , brisés.
ELISE
Je reste là , immobile , essoufflée.
Il s’écarte lentement. Je sens sa chaleur quitter mes reins. L’air frais me fait frissonner.
Je me redresse. Ma jupe est froissée. Mes jambes tremblent.
Je ne peux pas le regarder , pas encore.
Mais je sens ses yeux sur moi.
Il me contemple comme s’il avait vu quelque chose de rare. D’indomptable.
Et moi, je ne le hais plus.
Je le veux.
Encore.
AiméeLa nuit est tombée, épaisse, lourde d'humidité. Aucun de nous n'ose allumer la lumière. Nous sommes assis par terre, adossés au canapé, une bouteille de vin cheap entre nous. Nous avons bu. Trop. Pour noyer le silence. Pour anesthésier la peur.Soudain, des bruits dehors. Des voix. Des rires gras. Des ombres se dessinent derrière le store baissé. Puis un premier caillou frappe la vitre. Clac.Je me fige. Justin dresse la tête, les sens en alerte.— Qu'est-ce que c'est ?Un deuxième caillou. Clac. Plus fort.— Des voyous, chuchoté-je. Ça arrive parfois dans le quartier.Mais je sais que ce n'est pas ça. Je le sens viscéralement.Une voix gueule, slurrée par l'alcool ou la haine.— Pédophile ! Sort de là ! On sait que t'es là !Le sang se glace dans mes veines. Justin se lève d'un bond, le visage blême.— Ils sont pour moi.— Non, reste ici. N'ouvre pas.— SALOPARD ! VIOLEUR D'ENFANT ! hurle une autre voix.Le mot est un coup de couteau. Viol. Ils ne savent rien. Ils répètent ce q
AiméeLe silence après la tempête est pire que la tempête elle-même. Le soleil tape sur les vitres, transformant le studio en fournaise. L'odeur du sexe et de la sueur flotte dans l'air, un parfum âcre de survie. Nous restons allongés, immobiles, deux corps nuls sur des draps froissés. L'adrénaline est retombée, laissant place à la nausée.Son téléphone vibre à nouveau. Une danse macabre sur la table de nuit. Il ne bouge pas. Moi non plus. Nous savons ce que c'est. Des journalistes. D'anciens collègues. Claire. Toujours Claire.— Il faut que tu répondes, finis-je par dire, ma voix rauque.— Pour dire quoi ? « Désolé d'avoir détruit nos vies, mais la chatte de ta fille-enfant était trop tentante » ?Les mots, crus, vulgaires, tombent comme des coups. Je me redresse sur un coude, le regardant. Son visage est tourné vers le plafond, ses yeux sont deux fentes sombres.— Ne dis pas ça.— Pourquoi ? C'est la vérité, non ? C'est ce que tout le monde pense. Ce que ton père pense. Ce que Clair
AiméeLe jour se lève, implacable. La lumière crue de l'aube inonde le studio, révélant la poussière sur les étagères, la tasse sale, la réalité sordide de notre nouvelle vie. Justin dort encore. Moi, je suis éveillée depuis des heures, les yeux grands ouverts, fixant le plafond tandis que les paroles de mon père et les cris de Claire tournent en boucle dans ma tête.Tu n'es plus ma fille.J'espère que tu iras en enfer.Je me lève, les membres lourds. Le parquet est froid sous mes pieds nus. Je me verse un verre d'eau, mais ma gorge est si serrée que j'ai du mal à avaler. Je me regarde dans le reflet de la fenêtre : une fille pâle, les cheveux en désordre, les yeux cernés. L'enfant gâtée qui a brûlé sa maison.Un bruit derrière moi. Justin s'est assis sur le lit. Ses épaules sont voûtées, son regard est vide, perdu.— Tu as dormi ? je demande.Il secoue la tête lentement.— Non. Pas vraiment.Le silence retombe, épais, gêné. Quelque chose a changé. La tension qui nous unit n'est plus
AiméeLa pluie ne cesse pas. Elle transforme la ville en un lavis gris, estompant les contours des bâtiments, noyant les couleurs. Nous marchons sans but, ses doigts entrelacés aux miens comme une corde de sauvetage. L’eau traverse mes vêtements, colle mes cheveux à mon front, mais je ne ressens plus le froid. Je suis engourdie. Anesthésiée par la fracture qui vient de se produire.Je ne suis plus ta fille.Les mots de mon père tournent en boucle dans ma tête, une scie qui déchire tout sur son passage. Ce n’était pas censé se passer comme ça. De la colère, oui. Des cris, des insultes. Mais pas cette rupture. Pas cette sentence définitive.Justin marche à mes côtés, silencieux. Son costume gris est trempé, il ressemble à un homme qui a perdu son armure. Je sens les regards des passants pressés nous effleurer, curieux, indifférents. Deux noyés dans un océan de normalité.— On ne peut pas rester comme ça, finit-il par dire, sa voix rauque à cause du froid ou des larmes qu’il a refoulées.
AiméeLe lundi arrive, porté par un ciel bas et gris. Il pleut , une pluie fine et tenace qui colle aux vitres et noie les bruits de la ville. Je suis assise dans le salon de mon père, les mains serrées sur mes genoux. Justin est à mes côtés, raide, les mâchoires crispées. Il a mis son costume gris, celui qui lui donne un air sérieux, respectable. Mais je vois la sueur perler à sa tempe.Mon père entre. Il sourit en me voyant, puis son regard tombe sur Justin. Son sourire se fige.— Justin ? Qu’est-ce qui se passe ? Tu devais être à ton bureau à cette heure.Justin se lève. Je me lève aussi. Mon cœur bat si fort que j’ai l’impression qu’il va briser mes côtes.— Pierre… il faut qu’on te parle.La voix de Justin est étranglée. Mon père fronce les sourcils. Il déteste les drames. Les scènes. Les surprises.— Assieds-toi, papa, dis-je.Il s’assied, lentement, sans nous quitter des yeux. Je reste debout. Je sens le regard de Justin sur moi, un mélange de terreur et de détermination. C’est
AiméeLe baiser se dissout, mais son goût persiste, un mélange de thé noir et de résolution amère. Sa promesse résonne encore dans l’air immobile de la pièce. Lundi. Ce n’est qu’un mot, deux syllabes, mais il porte le poids d’un monde qui va s’écrouler.— Tu as peur ? ma voix est un souffle, à peine plus bruyante que le frottement de nos vêtements.Ses mains glissent le long de mon dos, s’arrêtent sur mes hanches, m’ancrant à lui, à ce moment.— J’ai une trouille bleue avoue-t-il, son front contre le mien. Mais j’ai encore plus peur de continuer à vivre ce mensonge. De te perdre parce que je n’ai pas eu le courage de faire ce qui est juste.Juste. Le mot est glissant. Est-ce juste de briser une femme nommée Claire, qui aime le jardinage et range les chemises par couleur ? Est-ce juste de nous vouloir, lui et moi, au milieu de ces décombres ? Je n’ai plus de réponse. Seulement la certitude viscérale que je ne peux plus reculer.— Reste avec moi ce soir , je murmure. Juste pour dormir.







