JadeQuand je le rejoins dans l’entrée, il est déjà prêt, évidemment. Parfait, comme toujours. Costume noir, chemise bleu nuit, montre fine, regard d’acier. Il dégage une force tranquille, ce genre de présence qui réorganise la pièce sans effort.— Tu veux que je te dépose ? propose-t-il en m’ouvrant la porte.— Tu es sûr que ça ne te dérange pas ?Il fait mine d’être outré.— Déranger ? Emmener ma femme au travail dans une chemise qui me rend fou ? Non. C’est même dangereux, mais c’est le genre de risque que j’aime.Ma femme.Le mot glisse en moi comme une promesse silencieuse. Je n’ose pas relever, mais il laisse une chaleur étrange au creux du ventre.La voiture nous attend. Sobre, noire, élégante. Le chauffeur descend, salue Caleb avec un respect contenu, presque militaire. Caleb répond d’un simple mouvement de tête, naturel. Comme s’il était né dans cette posture d’autorité.Je m’installe à ses côtés, un peu fébrile. Il pose sa main sur ma cuisse. Son pouce trace des cercles lent
JadeIl m’a prise par la main sans un mot, juste ce regard tranquille, presque joueur, celui qu’il a quand quelque chose mijote dans sa tête.Ses doigts sont restés accrochés aux miens alors qu’on traversait le couloir en silence. Le bois craquait doucement sous nos pas, la lumière du matin filtrait par les stores, dessinant sur les murs des lignes dorées. Il y avait quelque chose d’étrangement solennel dans la manière dont il avançait, sans se presser, mais avec détermination.Quand il s’est arrêté devant une porte que je n’avais encore jamais franchie, il a simplement dit :— Viens. Je veux te montrer quelque chose.Il a tourné la poignée, doucement, comme s’il ouvrait quelque chose de précieux, et m’a laissé passer en premier.Je suis restée figée sur le seuil.La pièce était vaste, lumineuse, aménagée avec goût mais ce n’était pas ça qui m’a coupé le souffle.C’était… l’évidence silencieuse de ce que je voyais.Une penderie ouverte, sur la droite. Remplie.Et pas seulement de ses
JadeJe sens Caleb tout contre moi, chaque battement de son cœur résonnant doucement contre ma poitrine.Son corps chaud se presse contre le mien, comme un ancrage silencieux, une présence qui chasse les doutes et apaise les tourments.Sous mes doigts, la peau de son dos est douce, chaude, vibrante de vie, un territoire familier que je découvre chaque matin avec la même fascination, la même envie de retenir cet instant.Ses bras s’enroulent lentement autour de moi, fermes mais sans jamais serrer, me tenant juste assez pour que je ne veuille plus bouger, pour que je sois à la fois protégée et libre.Je sens son souffle chaud qui effleure ma nuque, glisse le long de ma peau, caresse mes cheveux d’une douceur presque douloureuse tant elle est intense.Je ferme les yeux, laissant chaque sensation s’épanouir, chaque frisson m’envahir.La texture de sa peau contre la mienne, le rythme apaisant de sa respiration, le léger battement de ses lèvres sur mon oreille, qui s’étire en un murmure ina
JadeJe suis restée là.Allongée, offerte, encore palpitante, les draps collés à ma peau nue, mon souffle en lambeaux, les paupières à demi closes, comme si les battements de mon cœur, erratiques, étaient les seuls témoins que je sois encore vivante.Le silence autour de moi est cotonneux, chargé.Il n’y a plus de montre, plus d’heure, plus de monde extérieur.Seulement ce lit défait, ce corps qui n’est plus tout à fait le mien, et Caleb derrière moi, couché, si proche, que je sens encore la trace de ses doigts sur mes hanches, le poids de ses reins contre mes cuisses, la chaleur de sa bouche là où il m’a marquée, doucement, lentement, terriblement.Ses doigts effleurent à peine ma peau, comme pour vérifier que je suis réelle, que je suis encore là. Peut-être aussi pour dire : je ne regrette rien.Mais moi… je tremble mais pas de peur. D’excès.Je suis consumée.Par lui, par ce qu’il a réveillé, ce qu’il a fait naître, ce qu’il a arraché sans violence, ce qu’il a planté au creux de mo
JadeJe ne me rappelle pas avoir respiré normalement depuis que je suis entrée.Tout est trop : trop beau, trop calculé, trop parfait. Et pourtant, je suis là, droite, les épaules raides, les mains moites, le cœur qui cogne comme s’il essayait de briser mes côtes, et lui, face à moi, impassible en apparence, mais chaque ligne de son visage, chaque infime tension dans ses doigts trahit une forme de fébrilité contenue.Il me sert du vin, et le liquide rubis coule lentement dans le verre, comme une promesse, une provocation, une morsure lente, je le remercie à demi-voix, mes yeux ne quittent pas les siens, et pourtant je n’arrive pas à comprendre ce qui se joue vraiment ici, ce qu’il attend de moi, ou ce que je suis en train de lui offrir, sans un mot, sans condition.— Tu es tendue, murmure-t-il.— Tu m’invites dans un piège parfumé au vin et aux chandelles, Caleb, qu’est-ce que tu attends de moi exactement ?Il sourit, doucement, presque tendrement, mais ce sourire-là est un mensonge é
JadeJe n’ai pas dormi.Ou si peu que chaque vibration de mon téléphone, chaque souvenir de son regard derrière l’écran, m’a tenue éveillée comme un fil électrique sous tension. Quand je ferme les yeux, je revois Caleb, cette chemise entrouverte, ce ton presque rauque qui s’était infiltré dans mes pensées comme une brûlure douce et cruelle. Je me tourne, je me retourne, incapable d’apaiser ce tumulte. Et puis il y a ce rendez-vous avec les ressources humaines ce matin.Quand mon réveil sonne, j’ai déjà les yeux ouverts depuis des heures. Sous la douche, je laisse l’eau chaude couler sur ma peau, comme pour effacer l’écho de sa voix. Mais rien n’y fait. Plus j’essaie d’éteindre cette sensation, plus elle grandit, diffuse, obsédante.Je choisis une tenue sobre une blouse blanche, un pantalon noir parfaitement ajusté mais je me surprends à ajouter un rouge à lèvres discret. Un détail. Et je me déteste presque pour ça. Pour qui je fais ça ? Pour moi ? Ou pour lui, si jamais je le croise ?