LOGINLa pendule du salon affichait 21h00 lorsque la porte d’entrée s’ouvrit dans un claquement sec. Julien entra, une valise à la main, l’air froid, les traits tirés, la mâchoire serrée. Il salua brièvement :
— Bonsoir, maman.
Adèle, toujours sur le canapé, releva les yeux, satisfaite.
— Bonsoir mon fils. Elle est montée depuis qu’elle est rentrée. Rien ne sort d’elle. Mais elle sait que tu es là.
Julien acquiesça sans répondre. Il monta directement les escaliers, ses pas résonnant lourdement sur les marches. Arrivé devant la chambre, il essaya d’ouvrir la porte. Verrouillée.
Il tapa une fois. Fort.
— Brigitte. Ouvre la porte.
Silence.
Il sortit son téléphone, laissa sonner. Une, deux… cinq sonneries. Enfin, elle décrocha.
— Ouvre cette porte. Maintenant.
Sa voix était glaciale.
Brigitte, toujours assise au bord du lit, le téléphone à l’oreille, hésita. Elle tremblait. Elle savait que derrière cette porte se trouvait l’homme qu’elle aimait… et qui ne l’avait jamais aimée.
Cinq minutes s’écoulèrent.
Enfin, elle se leva lentement, marcha jusqu’à la porte. Sa main tremblante tourna la clé. Elle ouvrit.
Elle n’eut même pas le temps de prononcer un mot.
Julien la gifla avec une telle force qu’elle chancela et se cogna contre le mur.
— Tu te fous de moi ?! hurla-t-il. Comment tu as osé tomber enceinte ?!
Brigitte, la main sur sa joue rouge et en feu, tenta de reprendre son souffle.
— Julien… je voulais t’en parler… c’est une bénédiction, pas un piège…
— Tais-toi ! rugit-il. Tu crois que je suis stupide ? Tu crois que je ne vois pas clair dans ton jeu ? Tu crois que je veux un enfant avec toi ? Tu sais très bien pourquoi je t’ai épousée, Brigitte. Et ce n’était pas pour fonder une famille.
Ses mots étaient des couteaux. Brigitte sentit son cœur se déchirer.
— Mais je t’aime, Julien… Je t’aime depuis le premier jour. Je pensais que ce bébé pourrait… nous rapprocher.
Julien éclata d’un rire sec, cruel.
— Tu m’aimes ? Et moi je t’ai jamais aimée ! J’ai fait semblant, pour ton nom, pour ton père, pour tout ce que je pouvais gagner. Et toi, tu me remercies en tombant enceinte ? Tu me salis.
Brigitte sentit ses jambes faiblir.
— Ce n’est pas une salissure. C’est notre enfant…
— Ton erreur ! cracha-t-il. Tu veux que je t’explique ce que je vais faire ?
Sans prévenir, il entra dans la chambre, ouvrit l’armoire, tira les tiroirs. Il attrapa des vêtements au hasard, les jeta dans les valises de Brigitte. Sa rage était incontrôlable.
— Tu sors de chez moi. Maintenant. Tu veux jouer à la femme indépendante ? Parfait. Dégage.
— Julien, il est 22h… je… je vais aller où ? supplia-t-elle, les larmes ruisselant sur ses joues.
— Ce n’est plus mon problème. Tu voulais une vie seule ? Tu l’as.
Il descendit les escaliers à toute vitesse, ouvrit la porte d’entrée, traîna les valises dehors, les balança sur le trottoir comme des ordures.
— Bonne nuit, Brigitte. Et surtout… bon courage avec ton "miracle".
Il rentra, claqua la porte derrière lui.
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Brigitte resta figée quelques secondes sur le seuil. Les valises à ses pieds, l'air de la nuit lui glaçait la peau autant que le vide dans son cœur. Tout était sombre. Elle regarda autour d’elle. Personne. Pas une âme dans la rue.
Elle s’assit sur sa valise. Elle sanglotait. Perdue. Trahie. Jetée.
— Où est-ce que je vais aller maintenant… ? murmura-t-elle.
Elle prit son téléphone, hésita. Puis ouvrit ses contacts.
Alicia.
Son amie de toujours. La seule qui avait toujours été là.
Elle appela.
— Allô ? Alicia… c’est moi. Brigitte.
— Brigitte ? Tu pleures ? Qu’est-ce qui se passe ?
— Je… je peux venir chez toi ? Il m’a mise dehors.
Un court silence. Puis la voix chaleureuse et inquiète d’Alicia :
— Mais bien sûr ! Tu es où là ? Je viens te chercher.
— Non, je vais prendre un taxi. J’ai besoin d’être seule quelques minutes.
— D’accord. Je t’attends. La porte est grande ouverte, ma sœur. Tu n’es pas seule.
Brigitte raccrocha. Elle appela un taxi, monta à bord dix minutes plus tard. Le chauffeur jeta un coup d’œil à ses valises, puis à son visage gonflé de larmes. Il ne posa aucune question.
Durant le trajet, elle posa la main sur son ventre.
— Je te protégerai… Je te le jure, mon bébé.
Brigitte, encore tremblante après la confrontation avec son père, décida d’aller voir sa mère avant de rentrer chez Alicia.Elle voulait s’assurer que sa mère allait bien… et cacher sa douleur derrière un sourire.Chez sa mèreNoëlla était dans le jardin, arrosant ses fleurs.Quand elle aperçut Brigitte, son visage s’illumina.— Ma fille, tu es venue me voir ?— Oui maman, répondit Brigitte en forçant un sourire. Je voulais juste te saluer.Noëlla la regarda attentivement.— Tu as l’air fatiguée… tu es sûre que tout va bien ?Brigitte sentit son cœur se serrer. Elle aurait voulu tout lui dire.Tout.Mais elle pensait à la santé fragile de sa mère, au stress, au risque d’un AVC comme elle le craignait toujours.Alors elle mentit doucement.— Oui maman… je vais bien. Juste un peu de travail.Noëlla lui prit la main avec tendresse.— Tu es forte, Brigitte. Je suis fière de toi.Cette phrase faillit la faire éclater en larmes.Elle serra la main de sa mère, sourit une dernière fois, puis
Le lendemain matin, Brigitte se réveilla chez Alicia, le visage encore marqué par les larmes.Elle savait qu’elle ne pouvait plus fuir.Elle devait parler à son père.Alicia lui posa une main sur l’épaule.— Tu peux le faire, Brigitte. Tu dois dire la vérité. Il doit savoir ce que Julien et Clarisse t’ont fait.Brigitte inspira profondément.— Oui… je dois le dire. Même si je sais déjà comment il va réagir…Elle se rendit dans la grande maison familiale. Le jardin était silencieux, presque étouffant.Son père était assis dans le salon, lisant son journal.Il leva les yeux, surpris.— Brigitte ? Pourquoi tu viens à cette heure-là ?Brigitte sentit sa gorge se serrer.— Papa… j’ai quelque chose de grave à te dire.Il posa son journal, soupira comme s’il s’attendait déjà à quelque chose de décevant.— Je t’écoute. Vas-y, parle.Brigitte rassembla tout son courage.— Julien… m’a mise à la porte hier soir.Son père ne réagit pas.Elle poursuivit, la voix brisée :— Et j’ai découvert des ph
Le taxi s’arrêta devant un immeuble tranquille à Cocody. Il était un peu plus de 23h30. Brigitte descendit lentement, les yeux rougis, ses valises à la main. La nuit n’avait jamais été aussi silencieuse… ni aussi lourde.À peine eut-elle sonné que la porte s’ouvrit. Alicia, en pyjama, les cheveux attachés, se précipita vers elle et la serra immédiatement dans ses bras.— Brigitte… mon Dieu… tu trembles !Brigitte s’effondra dans ses bras, sans un mot. Les larmes coulaient à nouveau, chaudes, sans fin.— C’est fini. Il m’a mise dehors. Comme une chienne… devant sa mère.Alicia resserra l’étreinte.— Tu es chez toi ici. Viens. Pose ça. Et viens t’asseoir.Elles entrèrent. Le salon d’Alicia respirait la chaleur d’un foyer : lumière tamisée, coussins moelleux, thé chaud sur la table basse. Brigitte s’affala dans le canapé. Alicia lui tendit une tasse.— Camomille. Tu vas en avoir besoin.Brigitte la remercia d’un regard. Après une gorgée, elle posa la tasse.— Je suis fatiguée, Alicia… fa
La pendule du salon affichait 21h00 lorsque la porte d’entrée s’ouvrit dans un claquement sec. Julien entra, une valise à la main, l’air froid, les traits tirés, la mâchoire serrée. Il salua brièvement :— Bonsoir, maman.Adèle, toujours sur le canapé, releva les yeux, satisfaite.— Bonsoir mon fils. Elle est montée depuis qu’elle est rentrée. Rien ne sort d’elle. Mais elle sait que tu es là.Julien acquiesça sans répondre. Il monta directement les escaliers, ses pas résonnant lourdement sur les marches. Arrivé devant la chambre, il essaya d’ouvrir la porte. Verrouillée.Il tapa une fois. Fort.— Brigitte. Ouvre la porte.Silence.Il sortit son téléphone, laissa sonner. Une, deux… cinq sonneries. Enfin, elle décrocha.— Ouvre cette porte. Maintenant.Sa voix était glaciale.Brigitte, toujours assise au bord du lit, le téléphone à l’oreille, hésita. Elle tremblait. Elle savait que derrière cette porte se trouvait l’homme qu’elle aimait… et qui ne l’avait jamais aimée.Cinq minutes s’éc
Le choc des véritésAprès les coups et l’humiliation du matin, Brigitte monta lentement les escaliers. Chaque marche était un effort. Elle sentait encore la brûlure sur sa joue, mais ce n’était rien comparé à la douleur dans son cœur.Arrivée dans sa chambre, elle referma la porte à clé. Comme une barrière fragile entre elle et ce monde qui la blessait. Elle se changea mécaniquement, optant pour une robe en soie bleu nuit. Elle prit son sac, son ordinateur, et descendit sans un mot.Elle croisa sa belle-mère dans le couloir. Adèle ne la regarda même pas. Elle fixait la télé, son téléphone à la main. Brigitte força un sourire.— Bonne journée, maman.Pas de réponse.Brigitte soupira. Elle monta dans sa voiture, démarra, et prit la route du travail. L’air de la climatisation caressait doucement son visage, mais son esprit était ailleurs. Son bébé. Julien. L’annonce. Tout cela la rendait fébrile, mais elle voulait rester forte. Elle devait tenir, au moins jusqu’à ce que Julien rentre. Il
Il était 8 heures quand Brigitte sortit lentement de la salle de bain. Sa tête tournait. Son ventre aussi. Elle se sentait faible, vidée, comme chaque matin depuis trois ans… Depuis ce mariage. Depuis Julien.Elle ajusta doucement son tailleur beige, son préféré, celui que Julien lui avait offert six mois après leur union. À l’époque, il souriait encore. Ou du moins, il faisait semblant. Maintenant, même les sourires semblaient lui coûter trop cher.Elle passa rapidement une main sur son visage, y appliqua une fine couche de fond de teint pour camoufler la fatigue. Dans le miroir, ses yeux brillaient d’une tristesse silencieuse. Elle était belle, Brigitte. Belle et brisée.Julien était en voyage d’affaires depuis deux semaines. Il n’avait presque pas appelé. Juste quelques messages secs. Et pourtant, Brigitte attendait avec impatience son retour. Cette fois, elle avait quelque chose à lui dire. Quelque chose d’important. Quelque chose qui, elle l’espérait encore, changerait tout : ell







