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Il était 8 heures quand Brigitte sortit lentement de la salle de bain. Sa tête tournait. Son ventre aussi. Elle se sentait faible, vidée, comme chaque matin depuis trois ans… Depuis ce mariage. Depuis Julien.
Elle ajusta doucement son tailleur beige, son préféré, celui que Julien lui avait offert six mois après leur union. À l’époque, il souriait encore. Ou du moins, il faisait semblant. Maintenant, même les sourires semblaient lui coûter trop cher.
Elle passa rapidement une main sur son visage, y appliqua une fine couche de fond de teint pour camoufler la fatigue. Dans le miroir, ses yeux brillaient d’une tristesse silencieuse. Elle était belle, Brigitte. Belle et brisée.
Julien était en voyage d’affaires depuis deux semaines. Il n’avait presque pas appelé. Juste quelques messages secs. Et pourtant, Brigitte attendait avec impatience son retour. Cette fois, elle avait quelque chose à lui dire. Quelque chose d’important. Quelque chose qui, elle l’espérait encore, changerait tout : elle était enceinte.
Un mois déjà. Et elle n’avait rien dit. Pas même à sa meilleure amie. Elle voulait lui dire à lui, d’abord. Peut-être qu’enfin… il serait heureux. Peut-être que cet enfant rallumerait quelque chose dans son cœur. Un espoir. Un regard.
Mais en attendant, elle devait tenir. Supporter encore. Sa belle-mère, Adèle, était arrivée la veille, sans prévenir. Comme d’habitude. Et comme d’habitude, elle s’était installée dans le salon comme si la maison lui appartenait. Elle n’aimait pas Brigitte. Elle ne l’avait jamais aimée.
Brigitte descendit lentement les escaliers. Un haut-le-cœur la saisit, brutal. Elle s’arrêta net, se retint à la rampe. Non, pas maintenant. Pas devant elle.
Mais à peine avait-elle franchi le seuil du salon que la nausée reprit de plus belle. Son estomac se contracta. Elle courut vers la salle d’eau à côté et vomit bruyamment.
Adèle, assise confortablement sur le canapé, se leva d’un bond. Elle comprit aussitôt.
— Brigitte... c’est depuis quand ? demanda-t-elle, la voix dure, les sourcils froncés.
Brigitte s’essuya la bouche, hésita, tenta de garder la face. Son cœur battait fort, sa gorge était sèche.
— Quoi, maman ? demanda-t-elle faiblement.
— Je parle de cette grossesse-là ! Tu es enceinte depuis quand ?!
Brigitte baissa les yeux.
— Mais… maman, c’est juste une nausée, j’ai mangé trop vite ce matin. Je… je ne suis pas enceinte.
— Tu me prends pour une idiote, hein ?! hurla Adèle.
Elle s’approcha brusquement, leva la main et sans crier gare, claqua Brigitte violemment sur la joue. Le bruit sec résonna dans la pièce, suivi d’un silence lourd.
Brigitte recula, les yeux remplis de larmes.
— Tu crois que je ne vois pas clair ? Tu crois que je ne reconnais pas les signes d’une grossesse ?! Espèce d’ingrate ! Qui t’a donné la permission de salir le nom de mon fils avec un ventre plein, hein ?!
Brigitte voulut parler, mais Adèle ne lui en laissa pas le temps. Elle la saisit par le bras, la secoua brutalement.
— Pourquoi tu as accepté de tomber enceinte, hein ?! Tu crois que Julien a besoin d’un enfant avec une femme comme toi ?! Tu crois que c’est pour ça qu’il t’a épousée ?!
— Maman, arrêtez, je vous en prie… sanglota Brigitte.
— Tais-toi ! Une femme sans dignité ! Tu es stérile pendant trois ans et c’est maintenant, maintenant qu’il part en voyage, que tu tombes enceinte ? Tu veux le piéger, c’est ça ?!
Brigitte tomba à genoux, les mains tremblantes. Son cœur battait à tout rompre. Elle voulait hurler, se défendre, dire que ce n’était pas un piège, que c’était un miracle. Qu’elle l’aimait, ce bébé. Qu’elle l’avait attendu. Mais rien ne sortit.
Adèle la regarda de haut, le souffle court, la poitrine soulevée par la colère.
— Tu vas avorter. Tu entends ? Il ne veut pas de ça. Il m’a tout dit. S’il t’a épousée, c’est pas pour faire des enfants avec toi. Alors tu vas te débarrasser de cette saleté. Et vite.
Brigitte releva les yeux vers elle. C'était la première fois qu'elle la regardait ainsi. Pas avec peur, mais avec une lueur de révolte, timide mais réelle.
Elle posa sa main sur son ventre, tremblante, et murmura doucement :
— C’est mon enfant, maman. Le mien.
Adèle la fusilla du regard.
— On verra si tu fais encore la fière quand Julien rentrera. Lui-même va te faire passer l’envie de jouer à la mère.
Elle tourna les talons et quitta la pièce, laissant Brigitte seule, écroulée au sol, les larmes inondant son visage. Elle posa les deux mains sur son ventre, et dans un souffle, brisé mais sincère, dit :
— Je te protégerai… coûte que coûte.
Brigitte, encore tremblante après la confrontation avec son père, décida d’aller voir sa mère avant de rentrer chez Alicia.Elle voulait s’assurer que sa mère allait bien… et cacher sa douleur derrière un sourire.Chez sa mèreNoëlla était dans le jardin, arrosant ses fleurs.Quand elle aperçut Brigitte, son visage s’illumina.— Ma fille, tu es venue me voir ?— Oui maman, répondit Brigitte en forçant un sourire. Je voulais juste te saluer.Noëlla la regarda attentivement.— Tu as l’air fatiguée… tu es sûre que tout va bien ?Brigitte sentit son cœur se serrer. Elle aurait voulu tout lui dire.Tout.Mais elle pensait à la santé fragile de sa mère, au stress, au risque d’un AVC comme elle le craignait toujours.Alors elle mentit doucement.— Oui maman… je vais bien. Juste un peu de travail.Noëlla lui prit la main avec tendresse.— Tu es forte, Brigitte. Je suis fière de toi.Cette phrase faillit la faire éclater en larmes.Elle serra la main de sa mère, sourit une dernière fois, puis
Le lendemain matin, Brigitte se réveilla chez Alicia, le visage encore marqué par les larmes.Elle savait qu’elle ne pouvait plus fuir.Elle devait parler à son père.Alicia lui posa une main sur l’épaule.— Tu peux le faire, Brigitte. Tu dois dire la vérité. Il doit savoir ce que Julien et Clarisse t’ont fait.Brigitte inspira profondément.— Oui… je dois le dire. Même si je sais déjà comment il va réagir…Elle se rendit dans la grande maison familiale. Le jardin était silencieux, presque étouffant.Son père était assis dans le salon, lisant son journal.Il leva les yeux, surpris.— Brigitte ? Pourquoi tu viens à cette heure-là ?Brigitte sentit sa gorge se serrer.— Papa… j’ai quelque chose de grave à te dire.Il posa son journal, soupira comme s’il s’attendait déjà à quelque chose de décevant.— Je t’écoute. Vas-y, parle.Brigitte rassembla tout son courage.— Julien… m’a mise à la porte hier soir.Son père ne réagit pas.Elle poursuivit, la voix brisée :— Et j’ai découvert des ph
Le taxi s’arrêta devant un immeuble tranquille à Cocody. Il était un peu plus de 23h30. Brigitte descendit lentement, les yeux rougis, ses valises à la main. La nuit n’avait jamais été aussi silencieuse… ni aussi lourde.À peine eut-elle sonné que la porte s’ouvrit. Alicia, en pyjama, les cheveux attachés, se précipita vers elle et la serra immédiatement dans ses bras.— Brigitte… mon Dieu… tu trembles !Brigitte s’effondra dans ses bras, sans un mot. Les larmes coulaient à nouveau, chaudes, sans fin.— C’est fini. Il m’a mise dehors. Comme une chienne… devant sa mère.Alicia resserra l’étreinte.— Tu es chez toi ici. Viens. Pose ça. Et viens t’asseoir.Elles entrèrent. Le salon d’Alicia respirait la chaleur d’un foyer : lumière tamisée, coussins moelleux, thé chaud sur la table basse. Brigitte s’affala dans le canapé. Alicia lui tendit une tasse.— Camomille. Tu vas en avoir besoin.Brigitte la remercia d’un regard. Après une gorgée, elle posa la tasse.— Je suis fatiguée, Alicia… fa
La pendule du salon affichait 21h00 lorsque la porte d’entrée s’ouvrit dans un claquement sec. Julien entra, une valise à la main, l’air froid, les traits tirés, la mâchoire serrée. Il salua brièvement :— Bonsoir, maman.Adèle, toujours sur le canapé, releva les yeux, satisfaite.— Bonsoir mon fils. Elle est montée depuis qu’elle est rentrée. Rien ne sort d’elle. Mais elle sait que tu es là.Julien acquiesça sans répondre. Il monta directement les escaliers, ses pas résonnant lourdement sur les marches. Arrivé devant la chambre, il essaya d’ouvrir la porte. Verrouillée.Il tapa une fois. Fort.— Brigitte. Ouvre la porte.Silence.Il sortit son téléphone, laissa sonner. Une, deux… cinq sonneries. Enfin, elle décrocha.— Ouvre cette porte. Maintenant.Sa voix était glaciale.Brigitte, toujours assise au bord du lit, le téléphone à l’oreille, hésita. Elle tremblait. Elle savait que derrière cette porte se trouvait l’homme qu’elle aimait… et qui ne l’avait jamais aimée.Cinq minutes s’éc
Le choc des véritésAprès les coups et l’humiliation du matin, Brigitte monta lentement les escaliers. Chaque marche était un effort. Elle sentait encore la brûlure sur sa joue, mais ce n’était rien comparé à la douleur dans son cœur.Arrivée dans sa chambre, elle referma la porte à clé. Comme une barrière fragile entre elle et ce monde qui la blessait. Elle se changea mécaniquement, optant pour une robe en soie bleu nuit. Elle prit son sac, son ordinateur, et descendit sans un mot.Elle croisa sa belle-mère dans le couloir. Adèle ne la regarda même pas. Elle fixait la télé, son téléphone à la main. Brigitte força un sourire.— Bonne journée, maman.Pas de réponse.Brigitte soupira. Elle monta dans sa voiture, démarra, et prit la route du travail. L’air de la climatisation caressait doucement son visage, mais son esprit était ailleurs. Son bébé. Julien. L’annonce. Tout cela la rendait fébrile, mais elle voulait rester forte. Elle devait tenir, au moins jusqu’à ce que Julien rentre. Il
Il était 8 heures quand Brigitte sortit lentement de la salle de bain. Sa tête tournait. Son ventre aussi. Elle se sentait faible, vidée, comme chaque matin depuis trois ans… Depuis ce mariage. Depuis Julien.Elle ajusta doucement son tailleur beige, son préféré, celui que Julien lui avait offert six mois après leur union. À l’époque, il souriait encore. Ou du moins, il faisait semblant. Maintenant, même les sourires semblaient lui coûter trop cher.Elle passa rapidement une main sur son visage, y appliqua une fine couche de fond de teint pour camoufler la fatigue. Dans le miroir, ses yeux brillaient d’une tristesse silencieuse. Elle était belle, Brigitte. Belle et brisée.Julien était en voyage d’affaires depuis deux semaines. Il n’avait presque pas appelé. Juste quelques messages secs. Et pourtant, Brigitte attendait avec impatience son retour. Cette fois, elle avait quelque chose à lui dire. Quelque chose d’important. Quelque chose qui, elle l’espérait encore, changerait tout : ell







