Alayna
Le néon grésille au-dessus de nous, jetant sur la scène une lumière sale, blafarde. J’ai encore du mal à reprendre mon souffle. Pas à cause de la course. Ni même du baiser. Mais à cause de ce qu’il a déclenché en moi.
Un vertige. Une faille.
Il est là, tout près, mais ne dit rien. Il me fixe, comme s’il attendait que je comprenne.
Mais je ne comprends pas. Pas encore.
Je sens seulement mon cœur battre trop vite. Et mes jambes faiblir.
Je glisse le long du mur, les bras serrés contre moi, honteuse de cette chaleur entre mes cuisses, de ce feu qu’il a allumé d’un simple mot, d’un simple regard.
— Qu’est-ce que tu veux ? je souffle, sans le regarder.
Kael
Elle fuit déjà. Pas avec son corps cette fois. Mais avec son esprit.
Je reconnais cette défense. Ce réflexe. Ce besoin de comprendre, d’expliquer.
Mais il n’y a rien à expliquer. Rien de logique dans ce qui nous attire l’un vers l’autre.
Je m’accroupis devant elle. Je prends son menton entre mes doigts. Je la force à me regarder.
— Ce que je veux ?
Je souris. Lentement. Dangereusement.
— Je veux que tu arrêtes de mentir. À toi. À moi.
Ses yeux brillent. Pas de larmes. De rage. De peur.
Et d’autre chose.
Alayna
Je le frappe.
Un réflexe , une claque violente et sèche.
Il ne bronche pas. Ne recule pas. Son regard s’enflamme, mais d’un feu froid.
— Tu crois que tu peux me posséder ?
Je me lève, bancale mais fière. Je veux le repousser. Vraiment.
Mais il est déjà là. Devant moi. Immobile. Comme une montagne.
Kael
— Je ne veux pas te posséder, Alayna. Je veux que tu te livres.
Je marque une pause.
— Tu crois que c’est différent ? Que l’un est plus noble que l’autre ?
Je ris doucement. Pas pour me moquer. Pour lui faire peur.
Et elle comprend. Que je suis sincère. Et que c’est pire.
Je tends la main. Elle ne la prend pas. Mais elle ne s’éloigne pas non plus.
— Je t’ai observée. Trop longtemps.
Ma voix se fait plus basse.
— Tu vis comme si tu n’avais plus rien à perdre. Moi, je veux te prouver que tu te trompes.
Alayna
Je recule. Une seule fois.
Puis j’avance.
Je pose mes doigts sur sa poitrine. Je sens son cœur. Lent. Puissant.
Il me regarde toujours. Et moi, je l’affronte.
— Tu veux me sauver ?
Il fronce à peine les sourcils.
— Non. Je veux te briser proprement.
Kael
Et elle ne fuit pas.
Elle comprend enfin. Ou peut-être qu’elle a toujours su.
Je passe mes bras autour d’elle. Lentement. Comme une étreinte mortelle.
Et elle y entre. Volontairement.
— Viens avec moi, Alayna. Pas pour une nuit. Pour tout perdre.
Alayna
Je le suis.
Pas parce que je suis faible.
Mais parce que j’ai trop attendu.
Qu’il vienne. Qu’il me détruise. Qu’il fasse ce que personne d’autre n’a jamais osé.
Nous quittons l’entrepôt. Dehors, la pluie est devenue fine, presque douce.
Mais moi, je suis déjà trempée.
Par lui.
Il m’emmène sans un mot. Comme un pacte silencieux.
Un immeuble. Une porte. Un ascenseur qui grince.
Je le sens m’observer. Même de profil. Il me scrute comme une énigme.
Il sait que je suis sur le fil.
Et il va le trancher.
Kael
Je la fais entrer.
Un loft. Brut. Béton, verre, acier.
Pas un lieu d’accueil. Un repaire.
Elle marche lentement, regarde autour d’elle.
Mais je sais qu’elle ne cherche pas la sortie.
Elle cherche des réponses.
Elle n’en aura pas.
Je la plaque contre la porte dès qu’elle se ferme. Je la dévore du regard.
Je veux tout. Son cri. Sa chute. Son abandon.
Mais pas encore. Pas tout de suite.
Je veux que ce soit elle qui me supplie.
— Tu es prête ?
Elle ne répond pas. Elle m’embrasse.
Alayna
Je l’embrasse. Pas parce que je suis prête.
Mais parce que je ne peux plus faire semblant.
Il me soulève à nouveau. Me porte jusqu’au canapé. Me déshabille lentement.
Pas comme un amant. Comme un conquérant.
Chaque vêtement qui tombe, c’est une part de moi qu’il réclame.
Et je la lui donne. Sans négocier.
Quand il est nu, c’est moi qui frissonne.
De désir. De peur.
D’un mélange dangereux.
Il entre en moi sans prévenir. Brutal. Parfaitement ajusté.
Et je me brise.
Mais je souris.
Parce que j’attendais ce moment.
Parce que je suis enfin vivante.
Kael
Elle gémit mon nom.
Pas en supplique. En offrande.
Je la prends, encore et encore. Jusqu’à ce qu’elle oublie qui elle était.
Jusqu’à ce qu’elle n’appartienne plus qu’à moi.
Et quand elle s’endort, nue dans mes bras, je murmure :
— Tu n’es plus seule, Alayna. Tu es à moi, maintenant.
Et tu ne pourras plus jamais fuir.
AlaynaLe parfum du café emplit encore la cuisine lorsque des pas résonnent derrière moi. Kael apparaît dans l’encadrement de la porte, les cheveux encore ébouriffés, le visage détendu par le sommeil mais illuminé d’un sourire chaleureux. Ses yeux rencontrent les miens et, pour un instant, tout le reste disparaît.— Bonjour, dit-il d’une voix encore grave de sommeil.Je me lève légèrement sur la pointe des pieds, dépose le couteau sur le plan de travail et lui offre un sourire.— Bonjour… Dormi comme un roi ?Il hoche la tête, les épaules se détendant un peu plus, et vient déposer un baiser furtif sur ma joue. Je sens le contrecoup de cette proximité, un mélange d’habitude et de désir, et je me rends compte que le petit-déjeuner va devenir bien plus qu’un simple repas.Isolde, toujours en peignoir ivoire, me jette un regard qui semble dire : « Observe, apprends », tout en plaçant un plateau supplémentaire sur la table. Elle ne commente pas, mais je devine qu’elle apprécie ces moments
AlaynaLa lumière du matin s’étire comme un voile d’or sur la chambre. Elle glisse entre les rideaux à demi fermés, caresse la commode, accroche les verres d’eau restés sur la table de nuit. Je m’éveille lentement, enveloppée d’une chaleur familière, et la respiration régulière de Kael me parvient comme une rumeur apaisante. Son bras repose sur ma taille, lourd et protecteur.Je ferme les yeux un instant. Les souvenirs de la nuit reviennent en fragments : des éclats de rire étouffés, la moiteur de sa peau, nos cœurs battant à l’unisson. Une langueur douce m’envahit, une certitude d’avoir trouvé un abri, ne serait-ce que pour quelques heures. J’effleure sa joue du bout des doigts. Il sourit dans son sommeil, un sourire presque enfantin qui me serre le cœur.Le parfum du café, lointain mais précis, me tire doucement du lit. Je dépose un baiser discret sur son épaule, glisse hors des draps encore chauds et me faufile hors de la chambre. Dans le couloir, la maison respire déjà, planchers
AlaynaJe me réveille dans la pénombre encore tiède de la chambre, enveloppée par son corps chaud contre le mien. L’air est doux, parfumé d’ambre et de sueur mêlés, chargé de l’odeur de nos corps mêlés dans la nuit. La lumière filtrée par les rideaux teinte nos peaux de reflets dorés. Chaque souffle que je prends est encore lourd, chaque mouvement me rappelle les traces brûlantes de notre union.Ses doigts glissent sur ma taille, effleurent mes flancs, explorent avec une lenteur presque cruelle. Je frissonne malgré moi, un frisson qui court le long de ma colonne vertébrale et jusque dans mes reins. Ses caresses sont plus que du désir, elles sont une affirmation silencieuse : il est là, présent, vulnérable à sa manière, mais toujours maître de sa faim.Je ferme les yeux et me laisse guider, laissant mon corps répondre à ses gestes, mais mon esprit reste attentif, calculateur. Chaque soupir que je laisse échapper est une petite victoire, chaque mouvement de mes hanches un signe que je p
AlaynaLe silence est presque assourdissant après la tempête. Pas un bruit, sinon nos souffles heurtés, la plainte discrète des draps froissés sous nos corps encore emmêlés. Sa chaleur m’écrase, me brûle, me rassure malgré moi. Ma peau est maculée de sueur, perlée d’éclats de fièvre, et marquée de ses doigts, de ses dents, de son emprise. Mais je reste immobile.Je sens ses tremblements légers. Pas assez pour que lui-même s’en rende compte. Juste une secousse, presque imperceptible, qui trahit un état qu’il déteste : la faiblesse.Je passe ma main dans ses cheveux sombres, encore humides, collés par la sueur. Il ferme les yeux, son front appuyé contre mon épaule, et ce geste intime me donne l’impression d’avoir gagné une bataille invisible. Lui, le maître des ombres, réduit à chercher refuge dans ma chair.Je me garde bien de sourire. Mais à l’intérieur, chaque battement de son cœur que je compte est une victoire.KaelJe hais cette sensation. Mon souffle est saccadé, incontrôlable, c
AlaynaIsolde avait raison. Ne combats pas toujours. Laisse-le croire qu’il te dévore, et glisse ton venin au moment exact.Alors je me lève, doucement, comme une proie qui choisit de se livrer au prédateur. Mes doigts effleurent la soie de ma robe, la font glisser sur mes épaules. Le tissu tombe, révélant ma peau nue à la lueur tremblante des chandelles. Je ne détourne pas le regard. Je veux qu’il voie, qu’il sente que c’est moi qui décide de l’instant.KaelDieu… Elle ose. Elle me provoque, elle joue avec un feu dont elle ne mesure pas l’ampleur. La voir ainsi, offerte, me met au bord de la folie. Mon souffle se bloque, puis se fait rauque, animal.Je franchis la distance en un battement de cœur. Mes mains saisissent ses hanches, mes doigts s’enfoncent dans sa chair tendre. Elle étouffe un gémissement quand je la plaque contre le mur froid. J’ai besoin de sentir son corps contre le mien, de la posséder, de m’assurer qu’elle est bien là, à moi, à cet instant.Ses lèvres s’entrouvrent
AlaynaLe couloir semble interminable, étouffé par le silence. Je marche lentement, comme si chaque pas me ramenait un peu plus à ma solitude. Derrière moi, la voix d’Isolde persiste, fil invisible qui s’enroule autour de ma mémoire. Observer. Lire. Attendre. Ses mots me poursuivent, coulent dans mes veines comme un poison dont je ne veux déjà plus me défaire.Lorsque j’atteins mes appartements, deux gardes s’écartent en silence pour me laisser entrer. La porte se referme, et aussitôt le monde extérieur disparaît. La chambre m’accueille dans une pénombre apaisante, rythmée par le souffle discret d’une lampe suspendue. Mais ce qui attire mes yeux, c’est la salle attenante, d’où s’élève une vapeur légère.Une servante est passée par là. Elle a préparé ce qui ressemble moins à un bain qu’à un sanctuaire.Je m’avance, mes pieds nus frôlant les dalles fraîches. L’alcôve s’ouvre sur une salle de bains ultramoderne, disproportionnée pour une simple captive. Des murs de marbre clair miroitent