LOGINIls marchèrent vite, pendant longtemps, traversant la plaine déserte sous la lumière de la lune. Khary était épuisée, et hantée par la peur de ce qui pourrait arriver si elle se faisait attraper. Elle finit par s'endormir à moitié sur le dos du grand loup noir.
Eneli était également épuisée, mais elle ne se plaignait pas, continuant à marcher avec une détermination farouche.
Finalement, après ce qui leur sembla être une éternité, ils arrivèrent à une plage, devinant, dans la nuit qui s'éclairait déjà, le vaste océan. Il les arrêta et dit : "Nous devons nous reposer ici. On va attendre que mon contact arrive."
Khary et Eneli acquiescèrent, et les trois compagnons se laissèrent tomber sur le sol sablonneux, épuisés. Ils se reposèrent pendant plusieurs minutes, laissant l'enfant dormir pour récupérer, veillant à tour de rôle à ce que personne ne les surprenne.
Lorsqu'ils se réveillèrent, le soleil s'élevait déjà dans le ciel. Il les regarda et dit : " Partons, il est déjà là."
Khary et Eneli acquiescèrent, et les trois compagnons se mirent en route, suivant la route de la baie vers l'ouest. Elles aperçurent un petit bateau fait en bois de parasolier, dans lequel était assis un individu à la peau sombre vêtu de djellaba bleu clair.
"Montez ! Vite !"
Ils embarquent rapidement avec la petite et le type en bleu s'éloigna de la berge, à l'aide de ses pagaies...
Il pagaya longtemps, et vite. Ils parcoururent des dizaines et des dizaines de kilomètres.
Ils accostèrent à une île très, très éloignée de l'archipel. Elle était cachée par d'épais brouillards, et n'était donc pas facile à trouver.
Ce qui montrait la compétence de haut niveau des deux individus qui accompagnaient Khary et Eneli.
C'était l'île des Corbeaux, et c'était une ville-refuge, un endroit où les gens, des immigrés clandestins, et parfois des criminels en fuite, venaient pour se cacher. Personne ne posait de question ici à un réfugié, et aucun contingent militaire n'avait le droit d'entrer dans la ville, et encore moins d'arrêter quelqu'un, quelque soit son espèce, sa race, ou même la raison de sa fuite. Il y avait un Alpha à la tête de ce que tout le monde connaissait sous le nom de la "Meute Noire". Et il veillait à tout : une armée régulière de loups noirs entraînés, qui assurait la sécurité dans la ville, un système d'intégration socioprofessionnel pour les fugitifs, un cercle d'anciens disposant d'un pouvoir judiciaire et religieux, un système commercial et agricole fonctionnel... tous rendant des comptes à l'Alpha de la meute Noire, le vrai dirigeant.
Le loup noir les emmena à une petite maison qui se trouvait entre le centre et la périphérie de la ville.
Elle était en murs de vieux marbre blanc cassé. Elle avait deux pièces percées d'une petite aération chacune. La première faisait office de séjour, un tapis bleu cobalt rustique au sol, avec au milieu un petit guéridon noir un peu vieillot et quelques coussins brodés de fils dorés jetés autour dudit meuble. La deuxième pièce avait une couchette de deux places, recouverte de draps d'un verdâtre douteux. L'air sentait la poussière et le renfermé. et ils s'y installèrent pour se reposer.
Khary se jeta sur les coussins. Elle était épuisée, mais elle était également soulagée. Elle savait qu'elle était en sécurité avec lui et Eneli,et qu'ils allaient faire tout leur possible pour la protéger. Coûte que coûte.
Mais malgré la sécurité de leur nouvelle cachette, Khary ne pouvait pas s'empêcher de se sentir triste. Elle pensait à ses parents, qui avaient été assassinés par Indé et ses complices. Elle pensait à sa meute qui avait été envahie par des renégats...
Depuis sa plus tendre enfance, ses parents lui avaient inculqué le sens des responsabilités, son devoir en tant que princesse, mais surtout en tant que futur Alpha. Ses compagnons de meute ne méritaient pas d'être dirigés par n'importe quel tyran inconnu sortant de nulle part. Elle savait qu'ils étaient honnêtes, forts, et de réputation hospitaliers... elle voulait faire tout ce qu'elle pouvait pour les protéger. Elle savait qu'elle devait faire quelque chose pour, un jour, récupérer ses droits, mais elle ne savait pas quoi. Elle était juste un petit louveteau, après tout. Elle ne savait même pas encore se transformer. Son père lui avait dit que l'âge importait peu, pour un Lycan, qu'ils étaient différents des autres loups, que son pouvoir de Lycan s'eveillerait au moment de sa transformation, mais tout cela la rendait plus frustrée. Qu'est-ce qu'elle pouvait faire à son âge, avec sa fragilité, sa vulnérabilité, contre les forces de Indé ?
Si seulement ses parents étaient vivants !...
Le loup noir se retira dans la chambre. Un beau jeune homme au teint métissée et aux cheveux noirs de jais en sortit, vêtu d'un ensemble sombres. Il la regarda et vit les larmes couler de ses yeux. Il s'approcha d'elle et dit : "Ne t'inquiète pas, petite. Nous allons faire tout notre possible pour récupérer ton royaume. Nous ne te laisserons pas tomber."
Khary le regarda. Il était jeune, très beau. Et elle savait qu'il n'était pas un soldat cruel comme les renégats, car il avait vu l'épuisement de sa nourrice et l'avait soulagée en portant l'enfant sur son dos puissant pendant leur fuite. Il était très fort,
Elle ne savait pas si cet homme disait la vérité. Mais... s'il devenait son ami, il ferait peut-être tout son possible pour l'aider.
Khary essuya ses beaux petits yeux et le regarda.
" Qui es-tu ?" demanda posément la fillette.
Un court silence.
" Appelle-moi Raïhm."
" Cela ne nous dit pas qui vous êtes", s'approcha ferme Eneli, qui était aussi redevenue humaine et vêtue d'un grand pagne fleuri trouvé dans un coffre quelque part, avait terminé d'inspecter la petite maison.
" Ni comment vous vous êtes retrouvé au palais de Zanzibar pour nous sauver la vie."
" Un ami commun m'a mandaté pour déjouer le coup d'état qui se préparait, mais malheureusement les complotistes ont vite avancé leur plan. Je suis arrivé trop tard. "
" D'où venez-vous ?"
Un autre silence.
" Wade. "
Eneli hoqueta. Elle se souvenait, à présent.
" Vous êtes le prince héritier alpha Ab-Raïhm, de la Meute de Wade !?..."
L'homme mystérieux acquiesça avec réticence.
Khary ouvrit grand les yeux, se rappelant les cours de son précepteur au palais.
Wade était une grande et riche île, située à plus de deux cents kilomètres à l'ouest de l'archipel. Contrairement à Zanzibar, désertique, Wade était une île de forêt dense, au climat tempéré.
Comme toutes les meutes de loups existantes, leur meute était dirigée par une lignée séculaire de Lycans puissants. Donc, le prince qui venait de leur sauver la vie était un Lycan, comme Khary.
Et son père, l'Alpha Ab-Shalom était réputé belliqueux, surtout sur le plan économique.
Leur meute était un concurrent direct de Zanzibar, se disputant les routes commerciales maritimes de l'océan Indien.
" Mais, vous êtes en rivalité avec notre meute... Pourquoi nous aider ?..." Chuchota Eneli avec étonnement. Et plus de déférence.
" Mon père est en rivalité avec Zanzibar...pas moi !" Déclara le prince Lycan.
" Je ne compte pas voir les relations inter-meutes de la même façon que ma famille. Nos deux meutes gagneraient plus à s'entendre qu'à se quereller comme elles le font depuis des générations !"
Le silence envahi par les profondes réflexions de chacun d'eux.
"Veux-tu nous aider, prince Raïhm ?" Demanda soudain Khary.
" Oui, et je le ferai. Je te le promets, petite Lycane." Répondit-il sans hésiter.
Khary et Eneli se regardèrent. La petite acquiesça, le coeur plus léger.
Mais malgré la promesse de Raïhm, Khary ne pouvait pas s'empêcher de se sentir inquiète. Elle savait que la route pour récupérer ses droits serait longue et difficile, et qu'il y aurait des obstacles à surmonter.
Mais elle était prête à faire face à ces obstacles, et à se battre pour récupérer son royaume. Elle était la princesse - non la futur reine Lycane de la meute de Zanzibar, après tout, et elle ne se laisserait pas faire...
Khary les regarda avec gratitude. Elle savait qu'elle ne pouvait pas faire cela seule, et elle était heureuse d'avoir des amis comme Raïhm et Eneli qui étaient prêts à l'aider.
Elle pensa à son père, Koffi, et à sa mère, la Luna Akua. Ils avaient été assassinés par Indé et ses complices, et elle voulait faire justice pour eux.
Khary se sentit une colère monter en elle. Elle était prête à faire tout ce qu'il fallait pour atteindre son objectif.
Raïhm et Eneli la regardèrent et virent la détermination dans ses yeux.
" Calme ta colère, petite Lycane. Le jour viendra pour rendre justice à ta famille et à ta meute."
Il s'accroupit :
" Mais en attendant, cache-toi. Personne ne doit te voir, ni même soupçonner que tu es encore vivante. "
« Mais enfin , qu’est‑ce qu t’es arrivé ? » s’écria Fanta en voyant son fils entrer, la voix tremblante d’inquiétude et de surprise, alors que la porte principale de leur belle et grande maison à deux étages se refermait dans un grincement sourd. La nuit était déjà bien avancée, et les lanternes à huile projetaient des ombres dansantes sur les murs de terre cuite rose du salon. Au centre de la pièce, Tano se tenait debout, le pelage noir encore légèrement hérissé par le froid de la brise marine qui s’était glissée à l’intérieur. Son œil droit, à moitié caché par une fine pellicule de sang séché, était déjà en train de cicatriser, le contour rougeâtre prenant une teinte plus pâle sous la lueur vacillante. Tano s’avança d’un pas, les griffes légèrement sorties, non pas en signe d’agression mais d’une protection instinctive. Le vieux Tindiko, étendu de tout son long sur la longue chaise de détente en bois de chêne massif, qui se trouvait près de la cheminée, ouvrit un œil paresse
"Tu n'en feras rien ! Tu m'entends ?"Alors Raïhm repris le dessus. Il se transforma en humain les secondes suivantes, suscitant la contrariété de son Lycan."Si le loup de Tano t'a dit des faits dérangeants, cela n'en reste pas moins la stricte vérité ! Alors, fais avec... et fiche lui la paix !" gronda le prince dans son subconscient. Il se souvint des enseignements des Instructeurs Deltas, ces loups à l'esprit brillant qui lui avaient parlé de la gestion du stress, de la nécessité de trouver l’équilibre entre le pouvoir et la sérénité - avec sa Luna à ses côtés.Mince.Pas déjà.Il n'était pas prêt.Alors Raïhm bloqua la communication avec Blade, voulant réfléchir sans être perturbé par l'agitation de son Lycan. Certains lui avaient parlé de la méditation, de la respiration profonde, de la marche dans la nature, de la musique des cours d’eau. Mais il n’avait jamais vraiment prêté attention, trop occupé à devenir fort, à s'occuper de la meute.Il entra et referma derrière lui,
"...Comment oses-tu ?..." Là ce n'était plus Rahim qui s'adressa à Tano, mais c'était plutôt le Lycan Blade qui s'adressa directement à son loup subordonné Cisco. Le futur Bêta sentit venir l'explosion, mais il campa résolument sur ses pattes puissantes. "Je te le dis pour ton propre bien ! Tu es très nerveux, et cela depuis plusieurs mois - même les membres influents de notre meute avaient remarqué cette tension chez toi avant même ton départ de l'île de Kilwa. Et ça a empiré depuis..." Le prince Alpha était contrarié. Très contrarié. "Je ne peux pas prendre n'importe quelle femelle à ce stade de ma vie ! Pas une qui n'est pas mon âme sœur ! Ma compagne doit être mon âme sœur... et tu le sais très bien, crétin !" Quel toupet... Non mais... quel culot ! « Mon prince, » d’une voix qui portait à la fois la fierté de son rang et une pointe d’insolence, « je ne peux m’empêcher de remarquer que ton célibat commence à peser sur la meute. » Il fit un pas en avant, les oreil
Raïhm, le prince Alpha, s’appuya contre la balustrade de fer forgé, les griffes légèrement enfoncées dans le métal froid, tandis que Tano, le fils du Bêta Tindiko, se tenait à ses côtés, les oreilles dressées, le regard perdu dans le panorama qui s’étendait à leurs pieds. « Tano, » commença Raïhm d’une voix qui portait le poids du devoir, « je veux un rapport complet de l’opinion publique de la meute. » Il tourna la tête, les yeux perçant l’obscurité comme s’il pouvait y lire les pensées de chaque loup qui habitait les ruelles rosées. « Je ne veux plus de suppositions, je veux des faits, des chiffres, des voix... » Tano resta silencieux un instant, le souffle se mêlant au bruissement des feuilles de citronnier qui bordaient le balcon. Il ferma les yeux, comme pour rassembler les fragments d’une enquête qui l’avait occupé depuis son retour sur l’île, une semaine avant le retour du prince. Quand il rouvrit les yeux, ils brillaient d’une lueur d’analyse, mais aussi d’une pointe de
Tano, le fils du Bêta Tindiko, était un loup au pelage noir comme l’ébène, mais dont les yeux brillaient d’un éclat marron clair qui trahissait à la fois la jeunesse et une détermination déjà bien ancrée. Il avait passé les derniers jours à se familiariser à nouveau avec la cour royale, à s’entraîner dans les couloirs sombres du palais, à escalader les hautes tours des forteresses de Kilwa, à se faufiler entre les statues de marbre et les drapeaux de soie rouge qui flottaient au vent comme des langues de feu. Ce soir, il avait un objectif : rejoindre le prince Raïhm, son futur Alpha, qui l’attendait sur le balcon de ses appartements, le regard perdu dans la nuit qui enveloppait la capitale.Le vent sifflait entre les hautes colonnes du palais, soulevant des tourbillons de poussière rouge qui scintillaient sous la lueur des torches. Tano s’accroupit sur le rebord de la fenêtre, ses griffes s’enfonçant légèrement dans la pierre froide. Il prit une profonde inspiration, sentit l’odeur d
— Père, commença Raïhm, la voix basse mais ferme, je suis revenu, non pas pour réclamer le trône, mais pour rappeler à la meute les valeurs qui nous ont été enseignées. L’avidité ne doit pas être notre héritage. L'accusation à peine voilée fit voler en éclats les bonnes intentions et la maîtrise de l'Alpha. — Ah !... s’exclama Ab‑Shalom, le ton tranchant comme une lame. Tu oses me parler de valeurs, toi qui as disparu pendant plus de deux ans ! Où étais‑tu, hein ? Tu as laissé la meute se débattre, à se noyer dans ses propres problèmes, pendant que tu te pavanais je ne sais où, vêtu comme un clochard ! Regarde-toi ! Pas étonnant que personne ne t'ait reconnu à ton arrivée sur l'île... Il désignait la cape de cuir noir à capuchon que Raïhm portait depuis la Meute noire. Un peu poussiéreuse, certes, mais pas du tout clocharde. — Père, répliqua Raïhm, les yeux flamboyants, je n’ai pas « pavané ». Je suis parti rattraper tes conneries... parce que chaque décision que tu prenais était







