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Author: C-D
last update Last Updated: 2025-10-14 08:02:52

L’air tiède de la ville me caressait le visage tandis que je conduisais, la tête pleine de mille pensées. Les façades claires, les arbres alignés, les rires au détour des rues… tout semblait respirer la douceur. Une nouvelle vie commençait ici, je le sentais. Pourtant, derrière mon sourire flottait une inquiétude : il me fallait trouver du travail au plus vite. Rien qu’y penser serrait mon ventre. Allais-je y parvenir ? J’ai chassé cette idée d’un mouvement de tête. Pas aujourd’hui. Aujourd’hui, je voulais respirer, goûter à la légèreté.

En passant devant le petit café au coin de la place, une odeur de grains torréfiés me tira de mes pensées. Parfait, un moment pour moi. Mais à peine avais-je ralenti qu’une voiture surgit et me coupa la route pour se glisser dans la place que je visais. Mon pied heurta la pédale de frein dans un sursaut. L’audace !

Un homme en descendit, d’un calme insolent. Grand, les cheveux d’un noir profond, vêtu d’un jean et d’une chemise entrouverte, il traversa le trottoir sans même un regard pour moi. Ni excuse, ni geste. Rien. Mon agacement monta d’un cran. Très bien, pensais-je, s’il veut jouer à ça, il va apprendre à ses dépens la signification du mot « politesse ».

Je garai ma voiture tout contre la sienne, si près qu’il ne pourrait ouvrir sa portière sans bouger la mienne. Voilà qui allait lui donner une petite leçon d’humilité. Je souris, amusée d’avance.

À l’intérieur du café, je choisis une table près de la fenêtre, d’où je pouvais surveiller ma future victime. L’ambiance était douce, les conversations feutrées, l’odeur du café apaisante. J’appelai le serveur, commandai de quoi calmer ma faim, puis me laissai aller à observer. Où se cachait-il ?

Soudain, une voix tonna :

— Tu es aveugle ou quoi ? Regarde ce que tu viens de faire !

Je sursautai, mon regard chercha l’origine de ce vacarme. C’était lui. Il houspillait le serveur, furieux qu’un peu d’eau ait éclaboussé sa chemise. Le pauvre garçon s’excusait, tremblant. L’arrogance du client me hérissa. Comment pouvait-on se comporter ainsi ? Il méritait vraiment d’être remis à sa place.

Quelques minutes plus tard, alors que je terminais mon repas, je vis mon impoli sortir son téléphone et s’éloigner vers la porte. Mon esprit s’illumina d’une idée malicieuse. J’attendis le moment parfait, me levai, fis mine de passer et le heurtais volontairement. Il trébucha contre le serveur qui, par malchance, portait un plateau chargé de café. Tout se renversa. Parfait.

— Désolé ! bredouilla le serveur.

— Non, c’est ma faute, répondit l’homme, étonnamment plus calme.

Je profitai de l’occasion pour battre en retraite, étouffant un rire derrière ma main. Mais avant que je n’aie pu regagner ma place, nos regards se croisèrent. Ses yeux sombres me fixèrent, emplis d’une colère brûlante. Je tournai vivement la tête et fis mine de ne rien voir. Tant pis. Il le méritait.

Un appel de mon oncle m’interrompit. Il m’annonça qu’il dînait avec ses collègues et que je n’avais pas besoin de lui rapporter à manger. Après quelques mots légers, je raccrochai. L’heure de régler l’addition était venue. Mais alors que j’appelais le serveur, je vis le bel arrogant sortir des toilettes. Vite, je me cachai derrière le plateau d’un serveur avant qu’il ne me remarque. Il s’assit plus loin, et je pus payer tranquillement.

Je décidai d’attendre qu’il sorte. Il serait dommage de gâcher le spectacle qui s’annonçait.

Quelques minutes plus tard, je le vis sur le parking, rouge de colère, appelant à l’aide comme si le monde entier devait se mobiliser pour sa voiture prisonnière. « À qui est cette voiture ? Bougez-la immédiatement ! » criait-il. J’avais bien du mal à contenir mon fou rire.

Je sortis lentement, feignant de chercher mes clés dans mon sac. En m’apercevant, il s’approcha à grands pas.

— C’est ta voiture ? lança-t-il, le ton sec.

Je levai à peine les yeux.

— Hé ! Je te parle ! C’est ta voiture, oui ou non ?

Je finis par répondre, d’un ton calme :

— Oui.

— Alors bouge-la tout de suite !

— J’essaie, répondis-je faussement distraite. Mes clés doivent être tombées dans mon sac.

Son impatience était presque palpable.

— Dépêche-toi, j’ai pas toute la journée !

— Tu n’aurais pas dû me couper la route tout à l’heure, dis-je tranquillement. C’est le prix de ton impolitesse.

Il fronça les sourcils, surpris.

— Pardon ?

— Tu te souviens du serveur sur qui tu as crié ? Je voulais simplement te montrer la différence entre une éclaboussure d’eau et une tasse de café.

Son visage se crispa.

— C’était toi… murmura-t-il, incrédule.

Je sortis enfin mes clés, les fit tinter volontairement.

— Tu veux que je déplace la voiture ? D’accord. Mais commence par présenter tes excuses.

Il resta un instant sans voix, partagé entre la rage et la honte. Ses yeux me lançaient des éclairs. Et moi, le cœur léger, j’esquissai un sourire victorieux.

Cette journée, pensais-je en démarrant, promettait décidément d’être bien plus amusante que prévu.

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