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Chapitre 7

Author: Harmonie Vaganay
Devant son sourire qu'il croyait retrouver, les préoccupations se sont dissipées instantanément du visage de Gaëtan.

« Sois tranquille Tiphaine, mon cœur n'appartient qu'à toi. Je te présente mes excuses pour mes paroles et actes de l'autre jour... Formule un vœu, n'importe lequel, je l'exaucerai. Juste, ne me garde plus rancune. » Il s'est rapproché, effleurant son nez du sien. Sa voix était si tremblante qu'elle semblait prête à se briser.

Autrefois, Tiphaine succombait toujours à ce jeu, son cœur fondant inexorablement. Mais aujourd'hui, l'homme devant elle lui a paru étranger, et son propre cœur n'était plus qu'un lac gelé, d'une tranquillité morte.

Captant la supplication muette au fond de son regard, elle a senti naître en elle une envie soudaine de se venger. Un sourire ironique aux lèvres, elle a osé articuler : « Alors si tu n'épousais pas Jeannine ? »

À ces mots, le sourire de Gaëtan s'est figé net. Ses lèvres ont tressailli avant de parvenir à former une courbe contrainte.

« Tiphaine, cesse ces enfantillages. »

Il a tendu la main pour effleurer sa joue, mais la femme a détourné le visage.

« Je ne la considère que comme une amie. Tu es jalouse à ce point ? Choisis autre chose. Je te promets d'exaucer tout autre vœu. »

Tiphaine a ri, plus amère encore.

Elle le savait. Dès qu'il s'agissait de Jeannine, ses serments solennels se révélaient fragiles comme du papier, se déchirant à la moindre épreuve.

« Je plaisantais », a-t-elle dit, son sourire s'évanouissant, « Fais ce bon te semble. Inutile de m'en informer. »

La voyant lâcher prise sur le sujet Jeannine, Gaëtan a souri, soulagé, et a caressé ses cheveux.

« Je savais que tu serais compréhensive. Je dois retourner à mes affaires. Repose-toi bien. »

Il est parti, ses pas s'évanouissant peu à peu dans le corridor.

Le dernier semblant de masque est tombé du visage de Tiphaine.

Elle comprenait enfin. Si cet homme l'avait tant choyée ces derniers jours, ce n'était ni par remords ni par amour. Il redoutait seulement qu'elle ne fasse des scandales, ne vienne entraver le conte de fées qu'il vivait avec son autre.

Un ricanement froid lui a échappé. Elle a glissé la main sous son oreiller, en est sorti son téléphone, et a composé le numéro d'Odile : « Odile, mon contrat de divorce est-il prêt ? »

Un silence s'est installé au bout du fil, si long que Tiphaine a cru que la ligne était coupée, avant que la voix étranglée d'Odile ne se fasse entendre : « Tiphaine... toi et Gaëtan, vous n'êtes pas mariés. L'acte de mariage que tu m'as montré est un faux... »

Tiphaine s'est figée intégralement, seul un bourdonnement sourd heurtant sa conscience.

Incrédule, elle a serré son téléphone jusqu'à blanchir ses jointures, la voix tremblante : « Qu'est-ce... que tu dis ? »

« Désolée... » La voix d'Odile s'est faite prudente, mesurée, « Mais j'ai fait vérifier. Tu es célibataire. Gaëtan est divorcé. Son ex-femme est Jeannine. Ils ont officialisé leur divorce il y a deux mois. Quant à ton acte de mariage... c'est une contrefaçon bas de gamme. Vous n'avez jamais été légalement mariés. »

La voix d'Odile s'est brisée. Ce mariage qui avait ébloui la ville entière, envié par tant de gens… Qui aurait imaginé une vérité aussi cruelle ? Que cette union était mensongère depuis le début ?

D'une main tremblante, Tiphaine a ouvert les preuves que Odile lui avait envoyées.

La lumière blafarde de l'écran s'est reflétée sur son visage, tout aussi livide.

Ligne après ligne, les mots glacés telles des aiguilles empoisonnées l'ont transpercée, lui brûlant les yeux.

Son cœur, brisé tant de fois, qu'elle avait rassemblé à la force de sa volonté, venait de recevoir un coup ultime. Il a volé en éclats, réduit en poussière...

Alors, dans cette histoire, c'était elle l'intruse ? Dix ans de sa vie avaient-ils été bâtis sur un mensonge ?

Dix ans. De dix-sept à vingt-sept ans, elle avait gaspillé sa plus belle décennie sur cet homme. Et au final ? Elle n'était rien pour lui !

Quelle cruelle ironie.

La douleur aiguë de sa jambe et l'étau à sa poitrine ont submergé Tiphaine. Elle n'a pas pu maintenir plus longtemps son calme apparent. Des sanglots désespérés, déchirants, ont explosé. Des pleurs si déchirants que les autres patients dans la chambre en ont eu les larmes aux yeux.

Finalement, luttant contre la douleur, elle s'est levée. Submergée par une haine noire, elle a attrapé ses béquilles et s'est ruée, boitillant, vers le cabinet de consultation de Gaëtan.

Lorsque ce dernier l'a vue, son visage s'est illuminé d'abord de surprise. Mais une fois qu'il avait repéré ses jambes tremblantes et sa pâleur, ses sourcils se sont froncés. Il s'est avancé immédiatement vers elle : « Qu'est-ce que tu fais là ? Ta jambe ne te fait plus mal ? »

Il a tendu la main pour la soutenir, mais Tiphaine l'a repoussé violemment.

Elle lui a mis directement sous les yeux les preuves sur son téléphone, son regard empreint d'une tristesse absolue : « Gaëtan, je regrette tellement de t'avoir jamais rencontré. »

L'homme, perplexe, a pâli brutalement en découvrant le contenu de l'écran.

Il s'est emparé précipitamment du téléphone, faisant défiler frénétiquement les informations avec ses doigts, de plus en plus vite. Lorsqu'il s'est arrêté finalement sur les messages où Tiphaine disait à Odile « je veux divorcer », son visage était devenu sombre, menaçant.

« Tu veux divorcer ? » a-t-il relevé brusquement la tête, la panique dans ses yeux remplacée par une froideur calculatrice, « Tu veux me quitter ? »

Tiphaine a reniflé, laissant ses larmes de haine couler le long de ses joues, mais maintenant son regard dans le sien.

« Oui ! Tu es terrifiant. Je veux TE quitter ! »

Elle a repris son téléphone et, tremblante, a composé le numéro de Fernand. Mais avant que l'appel ne soit connecté, Gaëtan lui a arraché des mains et l'a projeté violemment au sol.

Avec un « Crac », l'appareil a volé en éclats.

Tiphaine a levé les yeux, horrifiée, pour plonger dans le regard injecté de sang de l'homme. Toute trace de la douceur habituelle avait disparu de son visage, ne laissant place qu'à une possessivité démente et une froideur calculatrice.

« Vraiment ? Mais je ne te laisserai jamais partir. »

Tiphaine a frissonné de tout son être, mais a serré les dents et a tourné les talons pour partir. Elle n'avait fait que deux pas lorsqu'une douleur aiguë et soudaine lui a transpercé la nuque. Puis elle était engloutie par un noir absolu, perdant complètement conscience…

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