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Chapitre 7 — Là où les masques vacillent

Author: L'invincible
last update Huling Na-update: 2025-07-20 00:04:34

KIERNAN

L’air est lourd, saturé d’humidité, de poussière, et d’une odeur âcre qui semble imprégner chaque recoin de ce vieux bâtiment. L’aile Est s’étire, interminable, dans une lumière jaunâtre vacillante, où le silence pèse plus que n’importe quel cri.

Je m’appuie contre le mur froid, le dos en contact avec la pierre rugueuse, inspirant lentement pour calmer le tremblement qui s’empare de moi. Je guette. J’attends. Je sais que quelqu’un va arriver : Léo.

Cette silhouette énigmatique que je ne cesse d’observer, dont je n’arrive pas à percer le silence ni à déchirer le masque. Les autres le voient comme un gamin comme les autres, un adolescent à la marge. Mais moi, je sais qu’il y a plus. Sous cette armure de silence et de douleur, une tempête prête à tout emporter.

La porte s’ouvre en grinçant doucement. Il apparaît, mince et frêle, avançant avec précaution, chaque pas mesuré comme un défi lancé à la peur qui le serre.

Son regard évite le mien, ou plutôt tente d’éviter. Mais je lis dans ses yeux cette rage sourde, ce chaos qu’elle refuse de laisser éclater.

Je ne brise pas ce silence fragile.

— Léo, je murmure, voix basse, presque un souffle. Tu peux me parler.

Il s’immobilise, suspendu un instant dans cet espace invisible entre nous, puis secoue la tête, doucement.

— Je ne veux pas.

Mais il avance quand même, chaque pas un combat contre la peur.

Je recule un peu, lui laissant de la place.

— Tu sais que je ne suis pas comme les autres. Je ne te veux pas de mal.

Son regard m’examine, méfiant, presque défiant. Pourtant, une fissure fragile s’ouvre.

— Pourquoi tu fais ça, Kieran ? Pourquoi tu restes ? Pourquoi tu m’aides ?

Je baisse la tête, gêné. La vérité me brûle la gorge, mais je sais qu’elle a le droit de la connaître.

— Parce que je sais ce que c’est d’être invisible. De porter un masque qui étouffe, qui t’empêche de respirer.

Il inspire profondément, un souffle volé à la tempête qui gronde en elle.

— Aujourd’hui, j’ai failli crever.

Sa voix tremble, un fil fragile dans l’obscurité.

— T’es vivant.

Il me fixe droit dans les yeux, défiant ce que je dis.

— Mais à quel prix ? Je sais plus qui je suis.

Je tends la main, prudemment, sans promesses, juste une lueur d’espoir.

— T’es toujours toi, Léo. Sous ce masque. Sous la douleur.

Un éclat fragile traverse ses yeux.

— Parfois, c’est trop lourd.

Je serre les dents, incapable de lui offrir plus que ça. Elle doit porter ce poids seule.

Un bruit sourd, un claquement sec.

Je tourne la tête.

Marko.

L’homme dont le regard ne se ferme jamais.

Cette ombre qui guette, qui manipule, qui détruit.

Je sens son poids même de loin, cette obsession maladive de refermer la faille, sa fixation sur Léo.

Je me tourne vers lui.

— Ils ne te feront pas tomber. Pas tant que je serai là.

Il hoche la tête, mais je vois bien la peur qui s’accroche dans ses yeux.

Je serre le poing, le cœur battant.

Ce n’est pas fini.

Un coup sec résonne derrière moi.

— Kieran.

La voix est glaciale, ferme.

Je me retourne et aperçois Anton, un homme de l’administration au regard dur et lèvres pincées.

— Marko veut voir Léo au bureau. Immédiatement.

Mon estomac se noue. Je jette un regard à Léo, qui reste immobile, suspendue à ce que je vais dire.

Personne ne sait. Personne ne doit savoir.

Pas encore.

Je hoche la tête.

— Je vais le chercher.

Je me penche vers lui , voix basse, presque urgente.

— Marko veut que tu viennes au bureau. Il a quelque chose pour toi. Tu dois lui montrer que tu es fiable. Qu’on peut compter sur toi.

Il vacille, hésite un instant, puis finit par hocher la tête, un signe à peine visible.

Dans le bureau, l’air est glacial, la tension palpable.

Marko est là, debout, imposant. Son regard ne lâche pas Léo, qui reste droite, tendue.

— Léo, dit-il d’une voix ferme, presque dure. On t’a confié une tâche importante. Tu vas commencer à travailler à l’armurerie.

Il marque une pause, son regard scrutant chaque réaction.

— C’est un travail pour un adolescent responsable. Pas pour un enfant. Tu comprends ce que ça veut dire ?

Léo reste silencieuse, les poings serrés.

— Je veux que tu sois discrète, efficace. Les armes sont précieuses, dangereuses. On ne peut pas se permettre d’avoir un maillon faible.

Il se tourne vers moi.

— Kieran, surveille-le . Assure-toi qu’il comprenne bien ce qu’on attend.

Je hoche la tête, sentant le poids de cette responsabilité.

MARKO

Dans l’ombre, je souris froidement.

Le masque de Léo vacille. Le piège se referme doucement.

Ils vont jouer leur rôle. Léo devra marcher sur une lame de rasoir, entre peur et survie.

Et moi, je serai là, prêt à frapper au moindre faux pas.

KIERNAN

Je regarde Léo.

— Tu n’es pas seul.

Il me fixe, les yeux embués.

— Je ferai tout pour que ça marche. Pour que tu survives.

Je tends encore la main.

Un geste simple, mais sincère.

Un signe : je suis là. Pas pour te sauver. Juste pour te tenir la main quand le monde voudra te broyer.

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