SANAA
Je n’avais pas prévu de sortir ce soir.
Après cette journée pesante à la formation, j’aurais dû regagner ma chambre et sombrer dans le silence.
Mais il y avait ce feu au creux de mes reins, cette tension sourde qui refusait de s’éteindre.
J’avais besoin de bouger, de respirer, de me sentir vivante, ne serait-ce qu’un instant.
Je choisis un club discret, loin du tumulte touristique, un lieu où les corps parlent plus fort que les mots.
Les lumières sont tamisées, caressant la peau, la musique vibre dans la poitrine, syncopée, hypnotique.
Je pousse la porte, m’efface dans la pénombre, cherchant un repère, un signe.
La fumée flotte, les silhouettes s’entrelacent, s’effleurent, se défient.
Je me fonds dans la foule, volontairement perdue, prête à me perdre.
Puis je le vois au bar, seul, un verre devant lui comme un trône solitaire.
Son costume gris anthracite est froissé, son col ouvert dévoile une peau promise à mes caresses.
Et ce regard.
Noir, profond, qui m’épluche sans un mot, qui me défait en silence.
Nos yeux se croisent.
Un frisson glacé me traverse, descendant le long de ma colonne vertébrale.
Je n’hésite pas. Mes pas le portent vers lui, calmes, déterminés.
— Je ne pensais pas te revoir ici, dis-je, ma voix tremblante trahissant mon trouble.
Il sourit, ce sourire qui déride son visage sérieux et fait naître la promesse du danger.
— La nuit est pleine de surprises. Les meilleures arrivent sans prévenir.
Il se penche vers moi, son souffle chaud caresse mon oreille, ses lèvres effleurent presque ma peau.
— Tu es venue danser ? murmure-t-il.
Je hoche la tête, incapable de lui adresser un mot plus fort.
— Alors, danse avec moi.
Il m’entraîne vers la piste, où la lumière joue avec les ombres, où la musique nous enveloppe, nous emporte.
Nos corps se frôlent, s’apprivoisent, se cherchent.
Il est près de moi, son souffle mêlé au mien, ses mains douces et fermes glissent lentement le long de mes hanches.
Je sens le désir brûlant s’éveiller en moi, une tension palpable qui fait vibrer chaque fibre de mon corps.
Je me laisse aller au rythme, oubliant les règles, les codes, les peurs.
Il me guide, me domine sans imposer, me provoque sans forcer.
Chaque regard qu’il pose sur moi est un défi silencieux, une invitation au jeu.
Je réponds par un sourire, par une caresse légère sur son bras, par un frôlement de mes doigts sur sa nuque.
La chaleur monte.
Nos souffles s’accélèrent.
Je sens ses mains qui glissent un peu plus haut, effleurant mes épaules, caressant mon cou.
Il murmure contre mon oreille :
— Tu sais que tu ne pourras plus reculer.
Je frissonne, ma peau s’enflamme sous ses doigts.
Je ferme les yeux, perdue dans cette tempête douce et sauvage.
La musique s’intensifie, nos corps s’enlacent, s’échauffent, s’abandonnent à cette danse sensuelle où chaque geste est une promesse, chaque souffle une déclaration.
Je sens qu’il est prêt à tout emporter, que je suis prête à tout lâcher.
Mais pour l’instant, il n’y a que la musique, la nuit, et cette attirance magnétique qui nous consume lentement.
La musique pulse encore dans mes veines, une vibration sourde qui s’accorde à chaque battement de mon cœur.
Ses mains, fermes et sûres, me collent contre lui, comme s’il voulait m’absorber, me dérober à ce monde figé.
Il ne se contente plus de me toucher, il réclame chaque parcelle de ma peau, chaque soupir que je ne peux retenir.
Il attrape ma nuque, m’attire, et ses lèvres dévorent les miennes avec une urgence sauvage, un feu primitif que je croyais enfoui pour toujours.
Je réponds sans retenue, mes doigts emmêlés dans ses cheveux, tirant, suppliant presque qu’il ne cesse jamais.
Son corps presse le mien, brûlant, puissant.
La chaleur qu’il dégage me consume, m’enveloppe, me fait vaciller entre raison et folie.
Sa mâchoire se serre, ses dents effleurent ma lèvre inférieure dans un jeu de domination tendre et cruel.
— Lâche-toi, murmure-t-il, rauque, presque animal.
Je sens sa langue glisser, insister, jusqu’à ce que je n’aie plus d’autre choix que de me rendre à cette tempête qui m’emporte.
Chaque baiser est une promesse de chaos, une invitation à me perdre, à abandonner mes chaînes invisibles.
Il glisse ses mains sous ma robe, explore mes hanches, descend plus bas, effleurant la peau nue avec une délicatesse féroce.
Mon souffle s’accélère, ma peau s’embrase sous ses caresses, chaque effleurement allumant un incendie secret.
Sans un mot, il me soulève, mon corps se plie, mes jambes encerclent sa taille, et il m’emmène vers l’ascenseur.
L’espace exigu amplifie chaque sensation, chaque frisson qui court le long de ma colonne vertébrale.
Ses mains courent sur mon dos, griffent doucement, un signal qu’il est là, qu’il ne me laissera pas fuir cette nuit.
Je me surprends à vouloir qu’il me retienne, à chercher sa force contre la mienne.
Arrivés à la chambre, il referme la porte derrière nous, le cliquetis résonne comme un coup de tonnerre dans ce silence lourd de promesses.
Il me plaque contre le mur, son souffle chaud embrase mon cou, ses mains se perdent dans mes cheveux, dans mes reins.
— Tu es à moi ce soir, souffle-t-il.
Je me cambre, abandonnée à cette sensation sauvage, à cette faim inextinguible.
Sa bouche descend, dévore mon cou, mordille la peau tendre, m’arracheraient des gémissements que je retiens de justesse.
CamilleIl est si proche que j’ai l’impression que chaque battement de son cœur résonne contre ma poitrine, que chaque souffle qu’il laisse échapper vient s’écraser sur ma peau comme une caresse brûlante.L’air est dense, presque épais, saturé de cette tension qui gonfle entre nous depuis des nuits, et j’ai le sentiment étrange que la pièce a rétréci, que tout l’hôpital se réduit à cet espace minuscule où il n’y a plus ni patients ni protocoles, juste lui et moi, et cette urgence qui nous consume lentement.Ses mains quittent ma taille avec une lenteur calculée, comme s’il voulait imprimer la chaleur de ses paumes sur ma peau, avant de descendre le long de mes hanches, suivant une trajectoire lente, presque hypnotique. Ses doigts glissent, s’attardent, dessinent des lignes invisibles qui me font frissonner et me donnent l’impression qu’il me lit comme on explore un territoire interdit. Chaque geste est précis, sûr, mais derrière cette maîtrise parfaite je sens quelque chose qui vibre,
CamilleSes mains ne me quittent plus.Elles tracent sur moi des lignes invisibles, comme s’il cartographiait chaque parcelle de ma peau pour s’en souvenir plus tard, dans le noir, quand je ne serai plus là.Ses doigts sont chauds, fermes, d’une lenteur calculée qui me rend presque folle. Je sens mes muscles se tendre à chaque passage, puis céder, comme s’il dénouait un à un tous les points où je garde encore un semblant de résistance.Son souffle chaud descend le long de ma clavicule et s’attarde, brûlant, dans le creux de mon cou. C’est un frisson liquide qui coule en moi, partant de ma gorge pour se répandre plus bas, bien plus bas.Il remonte à mon oreille, et ses lèvres frôlent mon lobe à peine, juste assez pour que ma respiration se brise. Sa voix, basse, grave, se glisse directement dans ma poitrine.— Tu es venue pour ça… avoue-le.Je pourrais mentir. Me détourner. Lui dire que non.Mais mes mains l’ont déjà trahi. Elles se sont faufilées sous sa chemise, ont rencontré cette c
CamilleJe croyais avoir dompté cette fièvre, ce trouble qui me prenait chaque fois que je croisais son regard. Je me disais que ce n’était qu’un effet secondaire de la fatigue, une réaction chimique alimentée par les longues nuits de garde et le manque de sommeil. Une illusion passagère.Mais je me trompais.Cette brûlure est toujours là, tapie sous ma peau. Et ce soir, elle pulse plus fort.Parce que c’est lui. Encore.Le couloir est presque vide, étouffé sous la lumière pâle des néons qui grésillent par intermittence, comme si même l’électricité hésitait à troubler le silence. Mes chaussures glissent doucement sur le carrelage, le frottement discret résonne dans mes oreilles. Chaque pas que je fais me rapproche de la porte du bloc 7. Je ne sais pas pourquoi je viens ici. Ou plutôt, je le sais trop bien.Je le sens avant même de le voir.Cette façon qu’a l’air de se tendre, ce changement imperceptible dans l’atmosphère… il est là.Je franchis l’embrasure, et il relève la tête. Ses y
CamilleLa nuit s’étire, lourde et dense, comme un drap humide que l’on peine à tirer. Les couloirs sont presque vides, les lumières blafardes se reflètent sur le carrelage luisant, et je sens, à chaque pas, la fatigue se glisser dans mes chevilles, dans mes épaules, jusque dans ma nuque. Pourtant, je ne parviens pas à penser à autre chose qu’à lui. Ses yeux gris qui, encore, traversent ma mémoire comme une lame douce, ses mains qu’il a relevées pour retrousser ses manches, le mouvement précis, presque sensuel, qui m’a paru durer plus longtemps qu’il ne l’a vraiment fait.Je termine un pansement dans la chambre 214 quand une voix basse, derrière moi, vient briser le silence :— Vous travaillez trop vite…Je me retourne d’un geste et il est là. Le docteur Morel. Appuyé contre l’encadrement de la porte, les bras croisés, le regard fixé sur moi avec cette intensité qui m’avait déjà frappée dans le couloir. Sa présence emplit la pièce comme une chaleur qui n’a rien à voir avec le chauffag
CamilleL’hôpital, la nuit, a une odeur différente. Moins âcre, moins saturée par le désinfectant qu’en journée, comme si les murs eux-mêmes retenaient leur souffle. Les couloirs semblent plus longs, les plafonds plus hauts, et chaque ombre s’étire sur le carrelage comme pour remplir le vide. Les sons sont rares, étouffés, presque discrets : le roulement lointain d’un chariot que je devine plus que je ne vois, le bip régulier d’un moniteur qui pulse quelque part derrière une porte close, le soupir discret d’un ascenseur qui s’ouvre au bout du couloir. Même mes propres pas paraissent plus mesurés, absorbés par cette atmosphère en suspens. J’aime cet entre-deux, cette impression que le temps ralentit juste pour ceux qui savent écouter. C’est mon territoire.Je marche, le dossier serré contre ma poitrine comme un ancrage, quand une silhouette attire mon regard, au détour d’une chambre. Lui. Le docteur Morel. Il sort lentement, refermant la porte derrière lui avec un geste sûr, presque ab
SANAALe matin me tombe dessus comme une lame glacée, brutale et implacable.Je n’ai rien vu venir. Pas cette lumière grise qui filtre à travers les rideaux tirés, pas ce poids sourd qui pèse sur ma poitrine.Mes paupières s’ouvrent lentement, comme si chaque seconde m’arrachait un morceau d’âme. L’air est lourd, presque suffocant, chargé de silence et d’absences.Mes muscles protestent, douloureux, brûlés par chaque mouvement que j’ose faire. Ma peau porte encore les marques brûlantes de la nuit passée : rougeurs profondes, empreintes fugaces, morsures douces-amères qui palpitent sous mes doigts tremblants.Je reste allongée, immobile, comme si bouger allait tout effacer. Mais rien ne s’efface jamais.L’odeur âcre de leurs corps mêlée à la mienne flotte autour de moi, insidieuse, invincible.Leurs voix graves, leurs respirations rauques, le choc des peaux, tout résonne encore dans mes oreilles comme un écho obsédant.Je suis encore prise au piège, possédée par ce souvenir, écartelée