La journée avait été longue, mais Zola ne ressentait pas la fatigue de ses semaines passées au tribunal. C’était un épuisement plus léger, presque agréable. Une tension relâchée. Depuis la fin du procès, elle s’était autorisée quelques jours loin des dossiers. Pas pour fuir. Juste pour respirer. Lorsque Erwan lui avait proposé un dîner, elle n’avait pas hésité. Pas cette fois. L’idée d’un moment suspendu, loin des codes, des lois et des costumes sombres, avait suffi à faire naître un sourire sur son visage. Il avait choisi un petit restaurant en terrasse, perché sur les hauteurs de la ville. Rien d’ostentatoire. Juste de l’authenticité et une vue à couper le souffle. Elle arriva la première. Le soleil déclinait doucement, jetant sur la pierre des immeubles une lumière miel. Les tables en bois clair, les plantes suspendues, les lampions qui s’éveillaient lentement au-dessus d’elle : tout invitait à la douceur. Zola s’installa, passa machinalement une main dans ses cheveux, et lais
Le palais de justice ne dort jamais vraiment. Même quand les couloirs se vident et que les robes noires s’effacent, il reste ce murmure constant, fait de papiers froissés, de pas pressés, de soupirs fatigués. Et au milieu de tout ça, il y a elle. Zola Marten. Vingt-quatre ans. Substitut du procureur. Et invisible. Elle s’est glissée dans la magistrature comme on se glisse dans un costume trop grand. Discrète, appliquée, irréprochable. Elle ne prend pas de place. Elle ne dérange pas. Elle est toujours à l’heure, toujours prête, toujours en retrait. On ne l’interrompt jamais. On ne la complimente jamais non plus. Ce matin-là, elle entre dans le tribunal comme chaque jour : tailleur gris, talons bas, cheveux attachés strictement, regard baissé. Elle tient une pile de dossiers serrée contre elle, comme un bouclier. Elle traverse le hall, croise des avocats qui ne la remarquent pas. Elle le préfère ainsi. Elle rejoint son bureau, déverrouille son ordinateur, s’installe avec
L’audience commence dans une demi-heure.Zola est déjà là, assise au premier rang dans la salle vide, le dossier ouvert sur ses genoux. Elle relit encore, même si elle connaît chaque ligne. Le rapport du commissariat. Les témoignages contradictoires. Les traces d’intervention modifiées.Un vice de procédure pourrait tout faire s’effondrer.Elle respire lentement. Pose les doigts sur la couverture cartonnée. Il ne faut rien laisser paraître.Les bancs commencent à se remplir. Un huissier entre, puis un journaliste au regard fouineur et à l’appareil malicieux. Le juge n’est pas encore là. Zola reste droite, concentrée.Puis, il arrive.Erwan Delcourt.Costume impeccable, attaché-case en cuir, cheveux châtains coiffés avec négligence maîtrisée. Il avance calmement, comme s’il avait tout son temps. Comme s’il avait déjà gagné.Il la voit, incline légèrement la tête en guise de salut. Elle répond d’un regard bref, neutre. Elle ne détourne pas les yeux.Il s’installe, sort quelques feuilles
***Retour au bureau*** L’après-midi est calme. Trop calme pour son esprit agité. Zola est revenue au bureau, le pas rapide, le dossier serré contre elle. Comme si l’ordre des choses, son rythme habituel, allait la recentrer. Elle s’est plongée directement dans la relecture des pièces, a surligné, classé, annoté. Mais rien n’y fait. Une idée s’incruste. Pas une pensée claire. Juste un écho des mots de Mélodie, quelque part en arrière-plan : “Le mec brillant avec la gueule de pub Hugo Boss…” Elle soupire. Elle déteste ce genre de distraction. Elle lutte contre l’irrationnel comme contre une maladie honteuse. Mais son esprit dévie malgré elle. Elle revoit Erwan, ce matin. Pas son discours. Pas ses arguments. Sa manière de s’installer. Sa voix calme. Ce regard trop direct. Et ce compliment lancé dans le couloir, presque détaché, mais qui l’a suivie comme un parfum tenace. Zola repose son stylo. Se frotte les tempes. Ce n’est rien. C’est juste la pression. Un moment de flotteme
Le soleil commence à se coucher, jetant des éclats d’orange sur les rideaux du salon. Zola est dans le taxi, les yeux rivés sur la route, ses pensées tournant en boucle. Erwan Delcourt. Ce prénom, ce visage, ce sourire. Elle essaie de l’effacer de son esprit, mais chaque minute qui passe la rapproche de cette visite chez ses parents. Ils l’attendent. Le taxi s’arrête devant une maison de ville typique, à l’abri des regards. Paul et Agatha, ses parents, sont mariés depuis presque trente ans, mais il y a des jours où Zola se demande si leur union n’est pas une simple façade. Elle sort de la voiture, le cœur déjà un peu plus lourd, comme si le poids du passé commençait à s’abattre sur ses épaules. Elle sonne. Agatha ouvre la porte, son visage souriant et accueillant, mais derrière ses yeux, Zola perçoit cette lueur de perfection qu’elle a toujours remarquée. Une mère douce, mais rigide. Parfaite, mais distante. — Ma chérie, entre donc ! Agatha l’embrasse sur la joue, la serre dans s
La salle d’audience est saturée de tension. Le cas de harcèlement sexuel est sur le point de commencer. C’est un procès très médiatisé, l’accusé étant un homme puissant : le PDG d’une entreprise pétrolière accusé de harceler une jeune secrétaire, Sophie, dans le but de la séduire et de la contraindre à des relations sexuelles, en échange de menaces de licenciement. Une affaire qui a secoué le monde des affaires et qui attire l’attention de la presse. Zola est dans son élément, mais elle sait que ce procès, cette affaire, va marquer un tournant dans sa carrière.Et surtout, c’est ce cas précis qui a conduit le procureur Stanley à l’appeler dans son bureau le matin même. C’est ce même procès qui l’a mise en confrontation directe avec Erwan Delcourt, l’avocat de la défense. Un avocat brillant, mais qui, aujourd’hui, représente un homme qu’elle juge sans hésiter, répugnant. Les accusations portées contre lui sont claires et les preuves semblent abondantes. Mais elle sait que la défense d’
Le tribunal est suspendu pour la journée. Zola quitte la salle d’audience, son esprit encore envahi par le poids du procès. La journée a été longue, éreintante. Les témoignages se sont succédé, les plaidoiries de Zola et d’Erwan se sont entremêlées dans une danse de mots, mais au fond d’elle, elle sait que cette affaire va bien au-delà des simples faits juridiques. C’est un test de ses propres convictions, un combat pour la vérité, mais aussi un défi qu’elle n’avait pas anticipé : ce désir naissant pour Erwan, qui devient de plus en plus difficile à ignorer.Elle traverse les couloirs du tribunal, son regard fixé sur le sol, une vague de frustration et de doutes l’envahissant. Elle se sent prise au piège entre sa mission professionnelle et ses émotions personnelles. La voix d’Erwan, calme et posée, résonne encore dans son esprit. Ses mots, toujours rationalisés, la touchent d’une manière qu’elle refuse de comprendre. Ce qu’il défend, c’est une cause qu’elle ne peut accepter, mais quel
Le téléphone de Zola vibre sur son bureau, brisant le silence lourd de la fin de journée. Elle le prend et regarde l’écran. Erwan. Un léger frisson parcourt son dos. C’est la première fois qu’il l’appelle depuis la fin du procès. Il aurait pu attendre qu’elle le contacte, mais non. Il a fait ce pas. Pourquoi maintenant ? Elle hésite, puis décroche. - Zola, commence Erwan d’une voix calme, mais lointaine, comme s’il mesurait chacun de ses mots. J’ai voulu te parler de la tournure qu’a pris le procès. Ça a dû être difficile pour toi. Zola se laisse tomber dans son fauteuil, le téléphone contre son oreille. L’après-coup du procès est un chaos d’émotions, de frustrations non exprimées. Le fait qu’Erwan prenne l’initiative d’un appel, même s’il s’agit d’un sujet professionnel, la surprend. Elle prend une profonde inspiration, se forçant à garder son calme. - C’est un euphémisme, répond-elle, sa voix plus froide qu’elle ne l’aurait souhaité. Je ne m’attendais pas à ce genre de retournem
La journée avait été longue, mais Zola ne ressentait pas la fatigue de ses semaines passées au tribunal. C’était un épuisement plus léger, presque agréable. Une tension relâchée. Depuis la fin du procès, elle s’était autorisée quelques jours loin des dossiers. Pas pour fuir. Juste pour respirer. Lorsque Erwan lui avait proposé un dîner, elle n’avait pas hésité. Pas cette fois. L’idée d’un moment suspendu, loin des codes, des lois et des costumes sombres, avait suffi à faire naître un sourire sur son visage. Il avait choisi un petit restaurant en terrasse, perché sur les hauteurs de la ville. Rien d’ostentatoire. Juste de l’authenticité et une vue à couper le souffle. Elle arriva la première. Le soleil déclinait doucement, jetant sur la pierre des immeubles une lumière miel. Les tables en bois clair, les plantes suspendues, les lampions qui s’éveillaient lentement au-dessus d’elle : tout invitait à la douceur. Zola s’installa, passa machinalement une main dans ses cheveux, et lais
La salle d’audience est pleine à craquer. L’atmosphère est tendue, suspendue à la moindre respiration. Tous les regards sont tournés vers le juge qui s’apprête à lire le verdict. Sophie, assise à côté de Zola, serre les mains sur ses genoux. Elle ne tremble pas, mais son visage est figé, les lèvres pincées, le regard perdu dans le vide. Zola, elle, est droite, concentrée. Son cœur bat plus vite qu’à l’ordinaire, mais elle garde un visage impassible. Elle a tout donné. Les éléments, les plaidoiries, les témoignages… Elle y a cru, même quand la vérité semblait s’effriter entre ses doigts. Le juge relève légèrement la voix : - Après délibération, le tribunal déclare Madame Sophie coupable de diffamation à l’encontre de son patron Monsieur Armand De Villardin PDG de Gaz and Petrolium Holding …. Elle écope de deux mois de prison avec sursis ( ce qui signifie qu’elle n’ira pas en cellule ), une amende de un million et des excuses publiques pour laver l’image de son ancien employeur.
Le samedi matin, Zola émerge lentement du sommeil. La nuit a été à la fois pesante et réparatrice, lui offrant un répit bienvenu avant la reprise des audiences prévues pour mardi. Elle se sent libre de profiter de ce week-end sans obligations. Soudain, son téléphone vibre sur la table de chevet. En le consultant, elle remarque que c’est Erwan qui l’appelle. Surprise qu’il la contacte si tôt, surtout après leur longue conversation de la veille, elle hésite un instant avant de décrocher. - Bonjour, Erwan. Tout va bien ? demande Zola, sa voix encore empreinte de sommeil. - Salut, Zola. Je voulais te proposer une sortie aujourd’hui. Il y a une foire aux plantes rares au jardin botanique. Ça te dirait de m’accompagner ? suggère Erwan, son ton enthousiaste. Zola réfléchit un moment. Une visite au jardin botanique pourrait être une excellente occasion de s’évader de la routine quotidienne. - Pourquoi pas ? Ça semble intéressant. À quelle heure part-on ? répond-elle finalement, un sour
Zola se tient devant son miroir, une main appuyée contre le lavabo. Elle observe son reflet, les traits tendus, les yeux légèrement cernés. La journée a été longue, mais la conversation avec Erwan hante encore ses pensées. Elle n’arrive pas à effacer la voix douce qu’il avait, ni la tendresse qui s’y cachait, et pourtant, elle essaie de se convaincre que ce n’était qu’une simple conversation professionnelle. Rien de plus.Elle jette un coup d’œil à son téléphone posé sur le comptoir. Aucun message, aucun appel. Elle se demande si elle aurait dû être plus claire avec lui lors de leur échange. Elle n’aime pas les ambiguïtés. Pourtant, elle ne peut s’empêcher de se demander si ce n’était pas un geste d’invitation, un signe plus subtil de la part d’Erwan.Zola ferme les yeux, se rendant compte qu’elle se perd dans des réflexions qui n’ont pas lieu d’être. Ce qu’elle ressent pour lui est… complicated, pour ne pas dire dérangeant. Elle sait qu’elle doit se concentrer sur ce qui compte vraim
Le téléphone de Zola vibre sur son bureau, brisant le silence lourd de la fin de journée. Elle le prend et regarde l’écran. Erwan. Un léger frisson parcourt son dos. C’est la première fois qu’il l’appelle depuis la fin du procès. Il aurait pu attendre qu’elle le contacte, mais non. Il a fait ce pas. Pourquoi maintenant ? Elle hésite, puis décroche. - Zola, commence Erwan d’une voix calme, mais lointaine, comme s’il mesurait chacun de ses mots. J’ai voulu te parler de la tournure qu’a pris le procès. Ça a dû être difficile pour toi. Zola se laisse tomber dans son fauteuil, le téléphone contre son oreille. L’après-coup du procès est un chaos d’émotions, de frustrations non exprimées. Le fait qu’Erwan prenne l’initiative d’un appel, même s’il s’agit d’un sujet professionnel, la surprend. Elle prend une profonde inspiration, se forçant à garder son calme. - C’est un euphémisme, répond-elle, sa voix plus froide qu’elle ne l’aurait souhaité. Je ne m’attendais pas à ce genre de retournem
Le tribunal est suspendu pour la journée. Zola quitte la salle d’audience, son esprit encore envahi par le poids du procès. La journée a été longue, éreintante. Les témoignages se sont succédé, les plaidoiries de Zola et d’Erwan se sont entremêlées dans une danse de mots, mais au fond d’elle, elle sait que cette affaire va bien au-delà des simples faits juridiques. C’est un test de ses propres convictions, un combat pour la vérité, mais aussi un défi qu’elle n’avait pas anticipé : ce désir naissant pour Erwan, qui devient de plus en plus difficile à ignorer.Elle traverse les couloirs du tribunal, son regard fixé sur le sol, une vague de frustration et de doutes l’envahissant. Elle se sent prise au piège entre sa mission professionnelle et ses émotions personnelles. La voix d’Erwan, calme et posée, résonne encore dans son esprit. Ses mots, toujours rationalisés, la touchent d’une manière qu’elle refuse de comprendre. Ce qu’il défend, c’est une cause qu’elle ne peut accepter, mais quel
La salle d’audience est saturée de tension. Le cas de harcèlement sexuel est sur le point de commencer. C’est un procès très médiatisé, l’accusé étant un homme puissant : le PDG d’une entreprise pétrolière accusé de harceler une jeune secrétaire, Sophie, dans le but de la séduire et de la contraindre à des relations sexuelles, en échange de menaces de licenciement. Une affaire qui a secoué le monde des affaires et qui attire l’attention de la presse. Zola est dans son élément, mais elle sait que ce procès, cette affaire, va marquer un tournant dans sa carrière.Et surtout, c’est ce cas précis qui a conduit le procureur Stanley à l’appeler dans son bureau le matin même. C’est ce même procès qui l’a mise en confrontation directe avec Erwan Delcourt, l’avocat de la défense. Un avocat brillant, mais qui, aujourd’hui, représente un homme qu’elle juge sans hésiter, répugnant. Les accusations portées contre lui sont claires et les preuves semblent abondantes. Mais elle sait que la défense d’
Le soleil commence à se coucher, jetant des éclats d’orange sur les rideaux du salon. Zola est dans le taxi, les yeux rivés sur la route, ses pensées tournant en boucle. Erwan Delcourt. Ce prénom, ce visage, ce sourire. Elle essaie de l’effacer de son esprit, mais chaque minute qui passe la rapproche de cette visite chez ses parents. Ils l’attendent. Le taxi s’arrête devant une maison de ville typique, à l’abri des regards. Paul et Agatha, ses parents, sont mariés depuis presque trente ans, mais il y a des jours où Zola se demande si leur union n’est pas une simple façade. Elle sort de la voiture, le cœur déjà un peu plus lourd, comme si le poids du passé commençait à s’abattre sur ses épaules. Elle sonne. Agatha ouvre la porte, son visage souriant et accueillant, mais derrière ses yeux, Zola perçoit cette lueur de perfection qu’elle a toujours remarquée. Une mère douce, mais rigide. Parfaite, mais distante. — Ma chérie, entre donc ! Agatha l’embrasse sur la joue, la serre dans s
***Retour au bureau*** L’après-midi est calme. Trop calme pour son esprit agité. Zola est revenue au bureau, le pas rapide, le dossier serré contre elle. Comme si l’ordre des choses, son rythme habituel, allait la recentrer. Elle s’est plongée directement dans la relecture des pièces, a surligné, classé, annoté. Mais rien n’y fait. Une idée s’incruste. Pas une pensée claire. Juste un écho des mots de Mélodie, quelque part en arrière-plan : “Le mec brillant avec la gueule de pub Hugo Boss…” Elle soupire. Elle déteste ce genre de distraction. Elle lutte contre l’irrationnel comme contre une maladie honteuse. Mais son esprit dévie malgré elle. Elle revoit Erwan, ce matin. Pas son discours. Pas ses arguments. Sa manière de s’installer. Sa voix calme. Ce regard trop direct. Et ce compliment lancé dans le couloir, presque détaché, mais qui l’a suivie comme un parfum tenace. Zola repose son stylo. Se frotte les tempes. Ce n’est rien. C’est juste la pression. Un moment de flotteme