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Author: Segnora
last update Last Updated: 2025-05-08 21:22:38

Isabela se tenait devant son miroir, ses mains encore tremblantes de l'appel avec Me Santos. Le poids de la décision pesait sur ses épaules. Ce voyage à Palawan, vers une famille qu’elle ne connaissait pas, vers un passé dissimulé dans les ombres, semblait être à la fois un appel et une fuite. Mais elle n’avait pas d'autre choix. Elle n’était pas du genre à se détourner devant un mystère, surtout quand il s’agissait de sa propre histoire.

Dans son bureau, elle ferma son ordinateur portable d’un geste ferme et éteignit les lumières. Les dossiers qu’elle avait laissés étaient éparpillés sur son bureau, mais l’urgent pouvait attendre. Elle confia ses tâches à Clara, sa collègue la plus compétente, lui expliquant brièvement la situation sans entrer dans les détails. Clara, habituellement calme et pragmatique, lui lança un regard interrogatif.

— "Tu pars en vacances, ou c’est un autre genre de voyage ?"

Isabela hésita un instant, sourit brièvement, puis répondit d’un ton plus léger qu’elle ne le ressentait vraiment.

— "Un genre de voyage, oui... Peut-être une quête. Mais, je reviendrai."

Clara haussait les sourcils, mais se contenta de hocher la tête. Elle savait que quand Isabela prenait une décision, il n’y avait pas grand-chose à faire pour l’en dissuader.

Une fois sortie du cabinet, Isabela rentra chez elle, ses pensées en proie à des turbulences contradictoires. Son appartement, d'ordinaire ordonné, paraissait presque vide sous l’effet du vide intérieur qu’elle ressentait. Chaque objet semblait dénué de sens comparé à ce qu'elle allait découvrir à Palawan.

Le soir, dans le calme de son salon, elle commença à préparer ses affaires pour le voyage. Elle ouvrit la valise d’un coup sec et commença à y glisser les vêtements indispensables. Mais avant tout, elle s’attarda sur les souvenirs retrouvés dans son bureau quelques heures plus tôt. La photo de la plage, jaunie par le temps, la fit frissonner lorsqu’elle la prit en main. La silhouette floue de sa mère, sur une plage qu’elle ne reconnaissait pas, semblait la regarder comme une apparition.

Elle plaça délicatement cette photo, suivie du collier d’or qui lui avait été offert par sa mère, dans la valise. Ce collier, symbole d’un autre temps, d’une autre vie. Elle ajouta enfin la carte postale cryptique qu’elle avait trouvée dans les affaires de sa mère, les mots inscrits à l’intérieur à peine visibles, mais chargés de sens. Elle n’avait jamais compris cette carte, mais elle sentait qu’elle était essentielle pour comprendre le mystère qui se dissimulait derrière la famille Alcaraz.

Alors qu’elle rangeait son dernier vêtement, un frisson la traversa. Ce voyage n’était pas seulement une quête de vérité, c’était aussi un saut dans l’inconnu. Elle se demanda si elle était prête à découvrir la vérité sur sa mère, et sur elle-même. Un secret, aussi lourd soit-il, ne se révélerait pas sans encombres.

Elle referma la valise, la fixant un moment. Chaque mouvement, chaque décision la menait inexorablement vers Palawan. Mais dans le fond d’elle-même, une petite voix persistait : Est-ce que je suis prête à découvrir ce que mes parents m’ont caché tout ce temps ? La pensée de fouiller dans son propre passé la perturbait. Que trouverait-elle là-bas, au cœur des Alcaraz ?

Elle se redressa, se dirigea vers la fenêtre et regarda la ville de Makati s’étendre sous ses yeux. Le bruit constant des voitures, les lumières clignotantes, tout cela semblait si lointain. À Palawan, il n’y aurait que silence et secrets.

Une fois encore, elle se posa la question : Fuir ou chercher la vérité ? Mais cette fois, elle le savait : elle n’était plus en mesure de reculer.

— "Je vais à Palawan," dit-elle à voix haute, une résolution dans la voix.

Le taxi roulait à travers les rues animées de Manille, mais à mesure qu’elle s’éloignait du cœur de la ville, Isabela avait l’impression que tout lui échappait. La lumière du matin baignait les gratte-ciel en verre, créant des éclats de lumière qui semblaient se dissiper dans la brume légère de la circulation matinale. Les bruits de la ville se faisaient de plus en plus lointains, comme une mélodie que l’on finit par oublier.

Isabela regarda le paysage défiler, ses pensées tourbillonnant dans sa tête. Elle repensait à sa mère, à ses années d’enfance marquées par l’absence et le silence. Elle se souvenait des rares moments où sa mère parlait d’elle, comme un écho flou dans le temps. Mais il y avait toujours ce voile, ce mystère qu’aucune réponse n’avait jamais levé. 

Elle se rappelait les petites touches d’amour et les sourires sincères que sa mère lui offrait, mais aussi des secrets que cette dernière avait toujours refusé de partager, des histoires jamais racontées. Et puis, il y avait sa tante Rosa. Toujours présente, toujours là pour elle, mais elle aussi avait ses propres silences. Rosa avait pris soin d’elle après la mort de sa mère, mais elle n’avait jamais été capable de répondre à ses questions. La vérité semblait s’être éteinte dans l’ombre de ces silences. Pourquoi sa mère était-elle partie si brusquement vers Palawan ? Qu’est-ce qui s’était réellement passé à cette époque ?

La ville de Manille se dissipait peu à peu derrière elle. Elle savait que ce voyage n’était pas simplement une affaire de famille. Non, il y avait bien plus que ça. Ce voyage pourrait bien être le début d’une nouvelle vie, ou la fin de tout ce qu’elle avait connu jusqu’ici. Les Alcaraz, le nom évoqué dans cette lettre du notaire, semblaient être la clé qui ouvrirait la porte de ce passé enfoui, mais elle ne pouvait s’empêcher de se demander : qu’est-ce qui m’attend vraiment là-bas ?

Son cœur battait un peu plus vite à cette pensée. Elle avait toujours été celle qui posait les questions, celle qui cherchait des réponses, mais cette fois, elle savait qu’elle allait peut-être devoir accepter que certaines vérités seraient trop lourdes à porter. Elle se pencha légèrement contre la vitre du taxi, son regard perdu dans les rues qui défilaient. Elle se demanda si elle aurait le courage de faire face à ce qui l’attendait à Palawan.

Le chauffeur, un homme d’âge moyen avec une cicatrice discrète sur la joue, lui lança un regard dans le rétroviseur.

— "Vous allez à l’aéroport, mademoiselle ?"

Isabela hocha la tête sans dire un mot, ses pensées toujours lointaines. Elle se demanda une nouvelle fois si ce voyage serait un tournant dans sa vie. Et si ce que je découvre là-bas changeait tout ? Le doute la rongeait. Mais au fond, une petite voix lui murmurait que, quoi qu'il en soit, elle ne pourrait jamais revenir en arrière. Ce voyage, ces découvertes, allaient déterminer son futur.

Alors que le taxi s’approchait de l’aéroport, les sons de la ville se fondaient peu à peu dans un silence plus grand. Elle était sur le point de quitter Manille, mais plus encore, elle était sur le point de quitter tout ce qu’elle avait connu jusque-là.

Elle savait, au fond d’elle, que ce voyage ne marquerait pas simplement le début de sa recherche, mais une nouvelle réalité, un monde qui se dévoilerait à elle avec des révélations qui, à la fois, la libéreraient et la confronteraient à son propre passé.

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