Malédiction De La Pleine Lune

Mon histoire commence avec un garçon. J'habite en face de chez lui depuis ma naissance. Liam, un grand gaillard d'au moins deux mètres, a des cheveux châtains courts et des yeux verts éblouissants comme on n'en voit nulle part ailleurs. Il est destiné à devenir l'Alpha de la meute, mais avant de comprendre tout cela, je savais seulement qu'il était mon meilleur ami.

C'était avec lui que j'allais au ruisseau derrière sa maison, pour sauter dans les flaques boueuses et attraper des crapauds. Il me défendait quand on m'embêtait et soignait mes genoux écorchés quand je tombais.

Mes pensées me ramènent à l'époque où nous étions amis. « Liam ! Ils arrivent ! », je crie par-dessus le ruisseau, où il combat des monstres imaginaires. Liam accourt vers moi et saute par-dessus une petite crevasse dans le ruisseau, tandis que je glisse et dévale une pente boueuse en faisant semblant de tomber. Liam m'agrippe les bras et me relève, tout en se jetant devant moi pour affronter les monstres qui approchent. « Ne t'inquiète pas, Abélia. Je ne laisserai jamais personne te faire du mal », me dit-il en me regardant dans les yeux, avant de se retourner vers les monstres. Il perd son bâton durant le combat et me regarde avec inquiétude. « Sauve-toi ! », crie-t-il. Je le regarde avec peur. Non pas pour moi, mais pour lui. Je cours dans les bois, trouve un autre bâton et reviens vers lui.

« Liam ! » Je crie en lui lançant le bâton quand il se retourne. Il m'adresse son sourire triomphant et se retourne pour vaincre le reste des monstres. Il pose son bâton, essoufflé, et s'approche de moi. « On a réussi, Abélia. On les a tous tués », je lui souris tandis qu'il me serre contre lui.

« Liam ! Abélia ! », nous appelle sa mère depuis la maison. On se regarde en riant et on se dirige vers l'intérieur pour le déjeuner. Sa mère ne va pas être ravie de nous voir couverts de boue.

Nous étions des enfants insouciants et heureux. Tout a changé quand Liam a eu douze ans : le moment était venu pour lui de commencer sa formation d'Alpha. Nos parents nous ont parlé séparément. Ma mère m'a expliqué que nous vivions au sein d'une meute de loups, mais que nous étions humains. Chaque fois que j'essayais de lui demander pourquoi nous, les seuls humains, vivions ici, elle cherchait toujours à esquiver la question.

Je ne pouvais plus ignorer ce fait cruel. Lorsque tous mes amis découvraient leurs loups, ce n'était pas mon cas. Ils pouvaient sentir la différence entre eux et moi. Désormais, Mia est ma seule amie. Elle est la seule à être restée à mes côtés, malgré les brimades et les coups. Perdre tout le monde a été difficile, mais il ne me reste que deux ans des études à finir avant de partir.

J'espère que ma mère viendra avec moi, mais vu qu'elle est restée ici pendant toutes ces années, je doute qu'elle veuille partir. Malgré la rupture entre Liam et moi, ma mère et la sienne restent inséparables. Elles disent que tout s'arrangera avec l'âge, mais moi, je les trouve folles.

Luna Julie, la mère de Liam, me traite comme sa propre fille, malgré tout ce qui s'est passé. Je ne vais plus chez eux aussi souvent, seulement une fois par an pour mon anniversaire, où elle m'invite à dîner pour fêter ça.

Voir Liam me rappelle tout ce que j'ai perdu, donc je décline généralement toute autre invitation. De toute façon, Liam ne vient jamais à mon dîner d'anniversaire, donc ça va. Mais Julie ne manque jamais de me rappeler que l'Alpha Jacob et elle tiennent à moi.

Si on dit qu'être un humain au sein d'une meute de loups est regrettable, ce serait un euphémisme. Dès que Clara et ses sbires, Olivette et Kylie, l'ont découvert, ça a été la fin pour moi. J'ai subi de nombreuses blessures, directement ou indirectement, de la part de ces diablesses. C'est ainsi que Mia et moi les appelons. Mia en a aussi fait les frais, puisqu'elle a choisi de rester mon amie. Pourtant, elle garde cette capacité extraordinaire à parler et à être gentille avec tout le monde, sauf avec les diablesses. J'ai essayé de la laisser partir, mais elle refuse en disant que nous sommes dans la même galère. Elle a été ma bouée de sauvetage, avec ma mère.

Ma mère a été tout pour moi depuis ma naissance. Mon père n'a jamais fait partie de ma famille : encore un sujet que ma mère garde pour elle. Franchement, après seize ans sans même recevoir une carte d'anniversaire de sa part, je m'en fiche complètement. Il ne se soucie manifestement pas de moi, donc je ne vois pas pourquoi je dois me soucier de lui.

Je sors de la douche en vitesse et expédie ma routine matinale, car je suis en retard ce matin. Une fois prête, en haut court noir et en jean, je me précipite dehors et me fige net.

Je vois Liam sortir de chez lui pour monter dans sa voiture. Malgré tout, personne ne peut nier à quel point il est séduisant, à couper le souffle. Il est bien plus charmant que le garçon que je connaissais autrefois. En plus d'avoir grandi, il s'est étoffé. Ses muscles tendent son t-shirt, défiant quiconque de venir se battre. Il commence vraiment à incarner son futur statut d'Alpha.

Je le regarde monter dans sa voiture, apparemment sans le moindre souci. Sa vie est toute tracée. Il deviendra l'Alpha de cette meute quand son père passera la main. Il a une magnifique petite amie, c'est Clara, donc je ne peux pas dire qu'elle soit la petite amie parfaite. Selon elle, ils seront compagnons et vivront heureux pour toujours, avec tous les amis qu'ils voudront. Tout le monde veut être ami avec l'Alpha. Mais cela s'accompagne aussi d'amis d'office.

Wilfrid sera son futur Bêta, César son futur Delta, et Dimitri son futur Gamma, ou devrais-je dire le futur Gamma de Clara ? Ils étaient tous amis avant leurs douze ans, et leur lien n'a fait que se renforcer quand tout le monde a commencé à découvrir son loup.