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Regarde-Moi (Tome 1)
Regarde-Moi (Tome 1)
Author: lerougeecrit

Prologue

Author: lerougeecrit
last update Huling Na-update: 2025-06-09 03:45:25

Un silence lourd, épais, presque visqueux, comme la caresse étouffante d’un amant absent, collé aux murs de pierre, suintant des boiseries sombres qui avaient tant de fois résonné de leurs échos. Il s’infiltrait dans les tapis anciens, dont les fibres gardaient encore l’empreinte fugace de ses pas. L’air lui-même semblait engourdi, saturé de ce vide qui hurlait son absence. On aurait dit que la maison retenait son souffle, ses pierres palpitaient encore du souvenir d’une passion si brûlante qu’elle refusait de s’éteindre.

Il avait retrouvé sa gravité d’antan, cette austérité minérale qui, un temps, avait cédé sous la lumière dorée de ses rires cristallins, sous le cliquetis vivant de ses talons effleurant le parquet comme une danseuse distraite. Elle avait fissuré la solennité du lieu, y avait insufflé une sensualité diffuse, presque insolente, pareille à l’odeur entêtante de son parfum qui s’attardait sur les draps. Le manoir avait vibré sous ses pas légers, soupiré sous ses gémissements étouffés, tremblé au rythme des feuilles froissées de ses croquis, griffonnés à la hâte entre deux étreintes.

Et maintenant ? Il n’y avait plus rien.

Juste le vide.

Juste lui.

Il était là, figé dans la pénombre, affaissé dans son fauteuil de cuir usé, les coutures fatiguées par tant de nuits de veille, de souvenirs brûlants. Son regard, voilé, était perdu dans l’ambre trouble de son verre, un whisky qui reflétait le chaos de son âme. Il buvait comme on s’anesthésie, comme on avale l’oubli à petites gorgées mécaniques, espérant noyer la douleur. Mais le whisky ne brûlait plus. Il n’avait plus cette morsure vive qui autrefois lui rappelait qu’il était vivant, qu’il était capable de désirer. Il glissait dans sa gorge comme de l’eau tiède, sans mémoire, sans morsure. Sans elle.

Un tressaillement sec secoua son corps. Sa mâchoire se crispa, son poing se referma si fort que ses jointures pâlirent, comme si elles cherchaient à retenir ce qui lui échappait.

La colère montait, lente, sourde, une lave amère qui rongeait tout sur son passage, le dévorant de l’intérieur. Il avait merdé. Et pas qu’un peu. Il l’avait laissée partir. Sans un mot. Comme un lâche. Sans la retenir, sans crier, sans supplier, sans oser tendre la main pour effleurer une dernière fois sa peau. Elle s’était éloignée, son dos nu s’effaçant dans la lumière froide d’un matin d’hiver, la peau perlant encore de la moiteur de leurs ébats fiévreux, ses hanches dérobées dans l’étoffe soyeuse d’un peignoir à peine noué, qui cachait si mal les courbes qu’il avait tant aimées. Elle avait laissé derrière elle un lit encore tiède, froissé de plaisir, un soupçon de parfum enivrant entre les draps, et ce goût d’inachevé qui colle au palais comme une faute impardonnable.

Maintenant, il était seul.

Désespérément, tragiquement seul.

Quand ? Quand tout avait-il basculé ?

Était-ce cette nuit-là, ce mot trop dur, jeté dans le feu d’un regard mal éteint ? Ce silence maladroit qu’il n’avait pas su combler, alors qu’elle attendait une parole, un geste qui aurait tout changé ? Ou bien était-ce bien avant... Bien avant les soupirs partagés sur la moquette moelleuse de son bureau, avant les caresses pressées dans l’ombre complice des rideaux tirés, avant la première fois où leurs mains s’étaient frôlées, hésitantes, et qu’il avait senti, dans le creux de sa paume, la promesse d’un incendie dévastateur ?

Sans elle, le manoir lui semblait immense. Vide. Dévitalisé. Chaque pièce réclamait sa silhouette gracieuse. Chaque porte close attendait qu’elle la pousse du bout des doigts, avec cette légèreté qui lui était propre. Chaque silence était devenu un cri – son prénom, hurlé dans le néant, sans réponse. Il ferma les yeux, et elle était là. Nue. Alanguie sur le tapis épais devant la cheminée, le feu dansant éclairant les courbes sensuelles de son corps comme un sculpteur fiévreux révélant son œuvre. Un sourire paresseux flottait sur ses lèvres entrouvertes, invitant au baiser. Ses cheveux défaits, déployés comme une offrande sauvage, formaient une auréole de chaos autour d’elle, un désordre qu’il adorait. Elle était belle. Trop belle. Si belle qu’il en avait eu peur, peur de ne pas être à la hauteur de tant de splendeur.

Et il s’était tu.

Il l’avait aimée avec violence, avec cette maladresse propre à ceux qui ont trop longtemps contenu leur faim, leur désir. Il l’avait aimée sans mots, sans futur, sans filet, se jetant à corps perdu dans la passion. Et lorsqu’il avait fallu parler, construire, avouer l’ampleur de ses sentiments, il avait reculé, les mots au bord des lèvres, noyés dans l’orgueil qui le rongeait.

Il avait été lâche.

Et elle, elle était partie.

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