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Chapitre 4

Author: Inès Y
« Le projet de jumeau numérique qu'Industrie Solénautique développe actuellement, c'est moi qui l'ai proposé. »

La voix douce de Léa, portée par le vent, est parvenue à ses oreilles, faisant vibrer son cœur.

Alex comprenait très bien l'importance du projet de jumeau numérique et savait que c'était pour ce projet que le vieux monsieur Thomas avait décidé de confier Industrie Solénautique à Lucien.

Il a froncé légèrement les sourcils, prêt à parler, mais il a entendu Léa ajouter quelques mots.

« Alex, tu es mon aîné à l'université, il te suffirait de te renseigner un peu pour savoir que mon domaine de recherche à l'époque concernait les jumeaux numériques. »

« À l'époque, mon professeur Gérard Beaufour avait lu mon mémoire et m'avait invitée à poursuivre mes études en master et à rejoindre son groupe de recherche pour approfondir mes travaux. Mais… »

Elle était folle d'avoir abandonné une brillante carrière pour un homme.

Léa a fait une pause et a ravalé ses mots.

Elle a seulement entendu un petit rire moqueur : « Tu regrettes ? »

Léa a été légèrement surprise et a souri avec amertume, « Oui. »

Si elle avait su ce qui allait se passer, comment aurait-elle pu se marier avec Lucien sans rien considérer ?

Elle croyait entrer dans le palais du bonheur, mais elle avait en fait foulé l'enfer glacé, presque broyée, et même en racontant cela, elle ressentait de la honte.

« M. Beaufour n'enseigne plus à l'école ; tu ne peux plus revenir en arrière même si tu le regrettes. »

À ces mots, Léa a regardé Alex, surprise, « Tu sais ce qu'il devient ? »

« Oui. »

Alex a regardé Léa, ses yeux reflétant la lueur sombre du coucher de soleil, une ambiguïté s'y mêlant étrangement.

« Je suis aussi son élève. »

« Oh… »

Léa a compris avec retard qu'à l'époque M. Beaufour parlait toujours d'Alex comme de son élève brillant, il n'était donc pas surprenant qu'ils soient restés en contact toutes ces années.

« Parle-moi d'abord de ta proposition. »

Alex a ramené la conversation sur le sujet principal.

Léa a pris une profonde inspiration : « Je te parle de cela pour te demander : l'Industrie Solénautique est le fleuron centenaire de la famille des Thomas, voudrais-tu vraiment la voir tomber entre les mains d'un incompétent ? »

« J'ai un moyen d'empêcher Lucien d'hériter de l'entreprise. À ce moment-là, l'Industrie Solénautique serait sans dirigeant, et tu pourrais te proposer pour prendre la relève. Avec tes compétences, tu serais sans aucun doute le meilleur héritier, et papi ne refusera pas. »

« L'Industrie Solénautique serait à toi, mais j'ai une seule condition : quoi qu'il arrive, tu devras préserver les affaires entre les familles Thomas et Bernard. »

Léa a rassemblé son courage et a dit tout d'un souffle, fixant calmement Alex.

Seul Dieu savait que son cœur battait la chamade à ce moment précis.

Quoi qu'il en soit, Alex faisait partie de la famille des Thomas, et en mettant l'Industrie Solénautique sur la table de négociation si ouvertement, elle risquait d'être trahie à tout moment.

Mais… elle n'avait pas d'autre choix que de parier.

Elle pariait qu'Alex, abandonné après sa paralysie, nourrissait une rancune envers la famille des Thomas.

Elle pariait qu'Alex avait de grandes ambitions, et que seule son acceptation du marché lui permettrait de divorcer l'esprit tranquille et de protéger la famille des Bernard d'un sort funeste semblable à celui de la famille des Dubois.

Le dernier rayon de soleil s'est couché à l'horizon, plongeant les environs dans l'obscurité.

À ce moment, Lucien criait au loin : « Léa, Alex, que faites-vous là-bas ? Il est l'heure de dîner ! »

Léa a répondu précipitamment : « J'arrive tout de suite ! »

Puis, elle a entendu Alex demander doucement :

« Tu as bien réfléchi ? Je suis handicapé, et tu mises sur moi… tu n'as pas peur de tout perdre ? »

Sans réfléchir, Léa a répondu précipitamment : « Je n'ai pas peur, je crois que tu ne me feras pas échouer. »

« Léa ! »

Lucien l'appelait à nouveau d'une voix pressante.

Léa a froncé les sourcils, craignant de se trahir, et a avancé pour partir la première.

À son insu, Alex, regardant son dos s'éloigner, a calmement sorti son téléphone et passé un appel.

« N'avais-tu pas dit que le projet manquait de talents ? D'ici quelque temps, je vais te faire une surprise. »

De son côté, Léa est allée près de Lucien.

« Tu n'es pas allée aux toilettes ? Pourquoi étais-tu avec Alex tout à l'heure ? » a demandé Lucien avec une pointe de mécontentement.

Léa savait qu'il n'aimait pas Alex.

« Je me suis soudain souvenue de quelques événements universitaires, alors j'ai parlé avec lui quelques instants. »

Léa a jeté un coup d'œil à Lucien, « Pourquoi n'étais-tu pas dans le salon avec Mlle Laurent ? Tu n'avais pas peur qu'elle se sente gênée en tant qu'invitée ? »

« Elle s'entend bien avec ma mère, moi je suis plutôt l'intrus, elle… »

À mi-phrase, Lucien a réalisé que quelque chose clochait. Il a esquissé un sourire gêné, a passé son bras autour des épaules de Léa et a dit : « Je voulais juste voir ma femme, alors je suis venu te chercher. »

Léa l'a ignoré, trouvant le mot « femme » un peu irritant.

Pour avoir ce titre, elle avait perdu tant de choses. Maintenant, pour tout récupérer, elle ne savait pas combien elle devrait payer.

Rien qu'à y penser, sa rancune s'est intensifiée.

Puis, ils sont retournés au salon et, au moment où le serveur annonçait que le dîner était prêt, ils ont suivi le reste de la famille des Thomas vers la salle à manger.

La table ronde, habituellement trop calme, était aujourd'hui bien animée, et l'atmosphère harmonieuse donnait l'impression qu'ils formaient vraiment une famille unie.

Mais, sous cette apparente harmonie, des courants sombres bouillonnaient, chacun le savait.

« Le fils de mon grand frère est vraiment impressionnant ! Dans quelques jours, il héritera de l'entreprise ! »

« À mon avis, parmi vous tous, Alex ressemble le plus à votre père. Si ce n'était pas pour cet accident, un cadet n'aurait jamais eu cette chance… »

« Tout cela, c'est du passé ! Maintenant, c'est le monde des jeunes ! Nous devons tous accepter notre vieillissement ! »

« … »

Derrière les rires et les conversations, les luttes ouvertes et secrètes des membres de la famille des Thomas se révélaient.

Pendant ces cinq années de mariage, Léa avait vu ce genre de scènes à chaque dîner de Noël.

Mais aujourd'hui, une personne supplémentaire était restée silencieuse à ses côtés.

Alex, tout comme elle, n'a pas parlé pendant tout le dîner et s'est contenté de manger.

Le tumulte autour de lui contrastait avec son aura naturellement froide et distante.

Après l'avoir observé, Léa s'est demandé en secret si la question d'Alex montrait qu'il était tenté par la transaction.

À la fin du dîner, chacun s'est dispersé.

Hélène a tenu la main d'Élise avec regret et a dit : « Tu es trop occupée, je ne sais pas quand je te reverrai. »

Élise a souri docilement, « Si vous voulez me voir, dites-le à Lucien et il pourra m'amener. »

« D'accord, mais c'est une promesse que tu m'as faite ! »

Elles ont encore discuté un peu.

Léa s'était ennuyée et venait de vouloir se retourner quand Hélène a crié d'un ton mécontent : « Tu vas partir sans même dire au revoir ? »

« Si j'interromps vos bavardages, est-ce que vous allez m'accuser d'être trop curieuse ? »

Léa a répondu lentement : « Maman, nous partons maintenant. »

« Tu es vraiment impolie… »

« Madame, ne vous fâchez pas. »

Élise a froncé les sourcils et a dit avec gêne : « Peut-être que Mlle Bernard se fâche parce que je suis venue dans la famille des Thomas. J'y ai réfléchi, et comme elle l'a dit, je suis vraiment une étrangère… »

« Ne t'imagine rien ! C'est elle qui est mesquine et incapable de tolérer les autres ! »

Hélène a jeté un regard furieux sur le dos de Léa, « Plus tard, je trouverai l'occasion de bien la remettre à sa place ! »

Hélène n'avait pas l'intention de parler ainsi à l'insu de Léa.

Alors, sa voix était si forte que chaque mot est parvenu aux oreilles de Léa.

Léa a trouvé cela risible et a pensé qu'Hélène allait attendre en vain.

Lucien, lui, avait entendu les paroles de sa mère, il a froncé les sourcils en regardant Léa faire semblant de rien et s'est demandé si elle était vraiment jalouse.

Une fois dans la voiture, Léa a attaché sa ceinture par habitude.

Elle a aperçu, sans y faire attention, un tube de rouge à lèvres coincé dans l'interstice du siège passager…

Inutile de deviner : c'était sûrement un geste volontaire d'Élise.
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