LUCIANO
Le matin n’a pas encore levé son rideau que je suis déjà debout. J’ai passé la nuit à relire les logs, analyser les lignes de code, chercher dans les moindres recoins de notre architecture la trace de son passage. Je veux comprendre. Je veux sentir ce qu’elle a ressenti quand elle s’est frayé un chemin dans ma forteresse. Je veux entrer dans sa tête. Et puis l’écraser.
Mateo entre, silencieux, avec une tablette et un regard qui n’ose pas me croiser.
— Elle a utilisé un réseau fantôme basé à Bucarest. Un relais abandonné depuis trois ans. Elle a tout effacé derrière elle. On aurait rien vu si elle n’avait pas déclenché l’alarme.
Je serre la mâchoire. Bucarest. Elle est mobile. Intelligente. Sûrement seule. Ce genre de profil ne travaille pas pour un autre. Elle est trop précise, trop rapide. Elle a choisi Cendres. Ce n’est pas une commande. C’est personnel.
Je hoche lentement la tête.
— Et la cellule Nox ?
— En place. Deux agents en Europe de l’Est. Trois autres prêts à bouger. Ils attendent tes ordres.
Je réfléchis.
Pas de sang tout de suite. Pas encore. La peur est plus utile que la douleur. La peur fait parler, fait bouger. Et je veux qu’elle bouge. Je veux qu’elle sente la morsure de ma présence dans son dos. Qu’elle entende mon nom dans les soupirs de ses cauchemars.
— Envoyez-leur la dernière image de son profil numérique. Pas pour l’identifier. Pour la traquer.
Mateo s’incline. Il sait ce que ça veut dire. Elle devient la cible prioritaire.
Et moi, je deviens son ombre.
SASHA
Je dors dans un train de nuit, enroulée dans un manteau qui n’est pas à moi, avec un sac vide et un cœur plein de bruit. Les gares se succèdent, anonymes, grises, aussi fatiguées que moi.
Je change encore de SIM. Trois, aujourd’hui. Chaque appel est crypté, chaque message auto-détruit. Mais je sais que ça ne suffira pas.
J’ai réveillé un monstre.
Et dans un coin de mon esprit, une voix douce me chuchote : Tu l’as cherché.
Je ne fuis pas. Pas vraiment. J’observe. Je remonte ses réseaux. Ses mouvements. Je construis un profil. Luciano Moretti. Quarantaine silencieuse. Héritier d’un empire bâti sur la guerre et la peur. Discret. Intraçable. Jusqu’à cette nuit. Jusqu’à moi.
Il n’a pas encore bougé en public. Pas une photo récente. Pas de fuite. Mais son nom fait trembler les couloirs du darkweb. Il est mentionné à demi-mot dans des archives classées, dans des échanges cryptés. Toujours entre deux disparitions.
Je devrais me terrer. Me faire oublier. Mais je fais l’inverse.
Je l’attire.
Je laisse des miettes. Des codes. Des fragments de mes passages. Comme un jeu. Comme une provocation.
Parce qu’une partie de moi veut le voir.
Parce qu’une partie de moi veut qu’il me voie.
LUCIANO
Elle joue.
Je reconnais la signature. La finesse du leurre. La petite ligne de code oubliée exprès. Elle veut qu’on la trouve. Elle ne cherche pas à disparaître. Elle nous défie.
Bien.
C’est une erreur.
Dans une pièce verrouillée, je regarde l’écran s’allumer. Un signal. Roumanie. Puis Serbie. Puis effacé.
Mais je suis plus rapide.
— Elle se dirige vers l’Italie, dis-je calmement.
Mateo fronce les sourcils.
— Comment tu sais ?
— Elle est comme moi.
Un pion se déplace sur mon échiquier.
Je vais l’enfermer dans une partie dont elle ignore les règles.
SASHA
Je suis à Naples quand tout bascule.
Je m’étais arrêtée juste une heure. Juste pour respirer, pour manger quelque chose qui ne vient pas d’un distributeur rouillé. Mon ordinateur est allumé, isolé dans une chambre louée à la dernière minute. J’ai pris toutes les précautions. J’ai même changé de visage. Une perruque. Des lentilles. Du maquillage.
Mais il suffit d’un battement de cœur.
Un seul.
Pour que tout se fissure.
Le courant saute.
Silence.
Plus un bruit. Juste mon souffle. Et ce froid. Ce vertige.
Puis la vibration.
Un téléphone. Jetable. Un numéro que je n’ai jamais donné.
Je décroche.
Et sa voix traverse le vide comme un frisson sous la peau :
— Tu respires encore. C’est bien. Mais pas pour longtemps.
Je reste muette. Mon cœur cogne.
Il ajoute, lentement :
— J’aime quand on me provoque. Ça me rend… créatif.
Et il raccroche.
Je reste figée.
Il m’a trouvée.
Pas physiquement. Pas encore.
Mais il m’a reconnue.
Et dans ce jeu, ce n’est pas celui qui court qui est en danger.
C’est celui qui ralentit.
Je n’ai plus le droit de ralentir.
LUCIANO
Je n’ai pas menti.
Je suis créatif.
Et elle vient d’activer la dernière phase.
Il ne s’agit plus d’un projet compromis. Il s’agit d’elle.
De cette voix que je veux entendre trembler.
De cette audace que je veux briser.
Pas pour Cendres.
Pas pour l’empire.
Mais pour moi.
Parce qu’il y a dans ses silences… quelque chose que je ne peux pas ignorer.
Et dans ses failles, un parfum que je veux posséder.
LUCIANOL’avion touche le sol, ramenant notre petit monde à la réalité, mais je sens encore l’écho du paradis dans mes veines. Sasha est à mes côtés, sa main dans la mienne, son regard brillant de cette lumière qui ne nous a jamais quittés, même au milieu de la ville, du bruit et des obligations. Je serre doucement ses doigts, et chaque frôlement, chaque contact me rappelle la tendresse de nos nuits, l’urgence de nos baisers, la complicité de chaque moment volé à la lune de miel.— Bienvenue à la maison… murmuré-je, et elle sourit, ce sourire calme et espiègle qui me fait chavirer malgré le quotidien.Depuis notre mariage, tout a changé dans ma vie familiale : mon père, qui n’a jamais vraiment accepté mes choix amoureux, nous a laissés tranquilles. Il a respecté notre union, renonçant à ses critiques et ses exigences. Cette paix, inattendue mais précieuse, nous offre un luxe rare : celui de vivre notre amour sans contraintes, de savourer chaque instant à deux, dans la sécurité de notr
LUCIANOLe soleil se lève doucement sur notre suite, teignant l’océan de nuances dorées et roses. Je me réveille en sentant Sasha blottie contre moi, sa tête sur mon épaule, son souffle chaud caressant ma peau. Je reste un instant immobile, savourant la paix de ce matin, la légèreté qui nous entoure après des jours d’extase et de rires, et je caresse doucement ses cheveux, effleurant son visage endormi.— Réveille-toi, murmuré-je doucement, il y a un nouveau jour à découvrir…Elle ouvre lentement les yeux, un sourire fatigué et heureux se dessinant sur ses lèvres, et je fonds dans la douceur de ce simple instant, dans la complicité qui nous lie au-delà de tout désir, au-delà de toute passion brûlante.SASHAJe m’étire contre lui, mes doigts traçant des arabesques sur sa peau, et je sens la chaleur de son corps m’inonder. Chaque regard, chaque geste est une caresse silencieuse, une promesse que nous avons déjà gravée dans nos cœurs : ici, dans ce paradis, rien n’a d’importance sauf nou
LUCIANOLe matin se lève sur notre suite, filtré par les rideaux légers qui dansent au rythme du vent. Je me réveille en sentant Sasha contre moi, ses bras glissant autour de mon torse, ses cheveux éparpillés sur mon épaule. Chaque respiration qu’elle prend, chaque battement de son cœur, résonne contre le mien et m’enflamme de désir avant même que nous ayons ouvert les yeux.— Bonjour… murmuré-je, la voix rauque de sommeil et de besoin, — prête pour un nouveau jour de paradis ?Elle sourit, un sourire encore humide de sommeil, et ses lèvres se posent sur les miennes dans un baiser doux mais insistant. Ses mains parcourent mes épaules, ma nuque, et je sens mon corps réagir, brûlant déjà d’envie. Je glisse mes doigts dans son dos, nos corps s’enlacent, et le monde extérieur disparaît dans un souffle.SASHAJe sens sa chaleur, la puissance de ses bras qui m’entourent, le battement rapide de son cœur contre le mien. Mon corps se presse contre le sien, chaque baiser éveillant mes sens, cha
LUCIANOL’avion s’éloigne doucement de la ville où nous avons scellé nos promesses. Devant nous, l’océan s’étend à perte de vue, bleu intense, parsemé d’îles émeraude et de plages de sable blanc qui semblent attendre nos pas. J’ai Sasha à mes côtés, ses doigts dans les miens, nos mains entrelacées comme si nous pouvions déjà sentir que ce voyage sera notre sanctuaire, notre univers suspendu.— Regarde… murmuré-je, le souffle chaud contre son oreille, — tout ça, c’est à nous pour les prochains jours.Elle sourit, un sourire qui en dit plus que tous les mots, un mélange de désir, de complicité et d’émerveillement. Ses yeux brillent d’une lumière que je n’ai jamais vue ailleurs, et je sens mon cœur se serrer de bonheur et d’envie.SASHANous descendons de l’avion et l’air chaud et salé de l’océan nous enveloppe immédiatement. Je sens la brise sur ma peau nue sous la robe légère que j’ai choisie pour le voyage, et chaque frisson est un rappel que je ne suis qu’à lui, qu’avec lui, que nous
LUCIANOLa salle du château bruisse de conversations, de rires et de musique, mais pour moi, seule Sasha existe. Chaque éclat de lumière sur sa robe, chaque sourire, chaque mouvement de ses mains me consume d’envie et de désir. Je glisse ma main dans la sienne, et même au milieu de la foule, nos doigts entrelacés créent une bulle où le monde extérieur n’a aucune emprise.— Viens, murmuré-je contre son oreille, le souffle chaud, j’ai une idée pour nous échapper un instant.Elle sourit, ce sourire complice qui me brûle de l’intérieur, et je sens son corps frissonner contre le mien. Nous descendons un escalier discret, évitant les regards curieux, chaque geste chargé d’une anticipation brûlante, chaque frôlement électrisant nos sens.SASHANous arrivons sur une petite terrasse donnant sur les jardins. L’air est tiède, parfumé par les fleurs et le soleil, et je sens son souffle contre ma nuque, sa main serrant la mienne. Je me penche instinctivement vers lui, cherchant déjà la chaleur de
LUCIANOLa lumière du matin éclaire déjà la salle du château choisi pour notre mariage, un mélange de pierre ancienne et de dorures flamboyantes, où chaque détail respire l’élégance et la grandeur. Je suis dans ma chambre, ajustant mon costume, la cravate glissant parfaitement sur mon col, mais mon esprit ne cesse de revenir à elle, à Sasha, à ce sourire qui a traversé toutes nos épreuves.Mon téléphone vibre. C’est elle. Un message simple : Je suis prête, je t’attends.Un frisson me parcourt. Je souris, attrape son bouquet délicat posé près du lit, et je me laisse emporter par l’excitation de ce jour. Tout ce que nous avons construit, chaque combat, chaque nuit d’inquiétude, chaque victoire silencieuse, converge vers cet instant : nous allons unir nos vies devant ceux qui comptent, mais surtout devant nous-mêmes.SASHAJe suis devant le miroir, le voile glissant doucement sur mes épaules, la robe parfaite épousant mes courbes comme une seconde peau, chaque détail choisi pour symbolis