Cassandra
La nuit tombe sur la ville. Je ne trouve pas le sommeil.
Ezra est dans le salon, et moi, je tourne en rond dans la chambre qu’il m’a laissée.
Il va venir.
Et je ne sais pas ce que je veux.
Être reprise par Adrien signifierait retourner dans une cage. Mais rester ici… c’est plonger dans une guerre entre deux hommes qui ne reculeront devant rien.
Je m’approche de la fenêtre, écartant légèrement le rideau.
Une voiture est garée en bas.
Ils sont déjà là.
Mon souffle se bloque.
Je me retourne précipitamment.
Ezra est déjà debout dans le salon, son téléphone à l’oreille, une arme à la main.
Nos regards se croisent.
L’attaque commence.
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Cassandra
Mon cœur bat trop vite. L’adrénaline monte en moi comme un poison. Chaque seconde s’étire, suspendue entre la panique et l’instinct de survie. J’entends déjà des pas lourds dans l’escalier. Ils sont là.
Ezra verrouille la porte d’un geste sec, son regard tranchant fixé sur moi. Il ne parle pas tout de suite, mais son corps tendu, prêt à riposter, en dit long.
« Reste derrière moi. »
Je hoche la tête sans un mot, mais l’ordre me pèse.
Tout va trop vite.
Un coup sourd résonne contre la porte, puissant. Puis un autre.
« Ezra, ouvre cette putain de porte. »
La voix d’Adrien, glaciale, tranchante comme une lame.
Ezra ne bronche pas, il jette un regard en biais vers moi, puis murmure d’un ton bas, mais autoritaire.
« Va dans la chambre. Ne sors pas, quoi qu’il arrive. »
« Je ne vais pas— »
« Cassandra. Maintenant. »
Son ton ne souffre aucune contestation.
Je devrais obéir.
Je devrais…
Un craquement retentit.
La serrure cède sous un coup de pied brutal.
Je me fige, le souffle coupé.
Ezra lève immédiatement son arme, au moment où la porte vole en éclats.
Tout explose.
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Ezra
Le premier tir part avant même que je puisse réfléchir. Une balle fuse, frôle l’épaule de l’un des hommes d’Adrien. Il plonge sur le côté et riposte sans attendre.
Bordel.
Je me baisse immédiatement derrière le canapé pour me mettre à couvert. Deux autres types entrent à leur tour, armes levées. Derrière eux, Adrien avance calmement, impassible, comme si tout cela n’était qu’un jeu.
« Tu deviens imprudent, Ezra. »
Son ton est presque amusé.
« Je t’ai toujours dit que la patience n’était pas mon fort. »
Sans attendre, je sors de ma cachette et tire de nouveau. L’un des hommes s’écroule, touché. Mais l’autre réagit immédiatement et se jette sur moi avant que je puisse le viser à nouveau.
Il me plaque contre le mur avec une force brutale. Son poing s’écrase dans mes côtes, m’arrachant un grognement de douleur. Je serre les dents, attrape son col et le repousse violemment.
Trop tard.
Adrien est déjà sur moi.
Son poing frappe ma mâchoire avec une précision implacable.
Putain.
J’encaisse, recule d’un pas, puis contre-attaque. Mon poing s’écrase contre sa joue, le faisant tituber. Mais il ne tombe pas.
Il essuie le sang sur sa lèvre du bout du doigt avant de sourire.
« C’est tout ce que tu as ? »
Un bruit derrière nous.
Cassandra.
Je tourne la tête.
Erreur.
Adrien en profite. Son poing s’abat sur mon estomac, coupant net ma respiration.
Je vacille, le souffle arraché.
Avant même que je puisse me redresser, il sort une arme et la pointe directement sur moi.
Merde.
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Cassandra
« Arrête ! »
Ma voix résonne dans la pièce, brisant le chaos ambiant.
Ezra est à genoux, son souffle court, du sang coulant sur son arcade.
Adrien, debout devant lui, garde son arme levée. Il se tourne lentement vers moi, ses yeux brillants d’une lueur dangereuse.
« Rentre dans la chambre, Cassandra. Ce n’est pas ton affaire. »
« C’est exactement mon affaire. »
Ma voix tremble légèrement, mais je tiens bon.
« Je ne partirai pas avec toi. »
Ses yeux se plissent.
« C’est adorable, vraiment. Mais tu ne décides pas. »
Mon regard glisse vers Ezra. Il me fait un signe imperceptible.
Attends.
Sois prête.
Mon cœur tambourine, comme si mon corps comprenait ce qui allait se passer avant mon esprit.
Puis tout va très vite.
Ezra bouge avec une rapidité fulgurante. D’un geste, il frappe le bras d’Adrien. Le coup de feu part, frôlant mon oreille.
Je hurle, recule, manque de tomber.
Ezra et Adrien luttent à nouveau dans un enchaînement brutal.
L’un des hommes d’Adrien se relève et pointe son arme sur Ezra.
Non.
Mon corps bouge avant même que je réfléchisse.
Je ramasse le revolver d’Ezra et le lève, mes mains tremblantes.
« Lâche ton arme. »
Ma voix est faible, mais le type s’arrête, hésite.
Ezra profite de la distraction pour attaquer. Son poing percute violemment l’homme qui lâche son arme sous l’impact.
Il attrape ensuite Adrien par le col et le plaque contre le mur.
« Tu es fini, Morel. »
Adrien rit doucement.
Il n’a pas peur.
« Tu crois ça ? »
Un bruit strident de sirènes retentit dans la rue.
Je me fige.
Ezra aussi.
Adrien sourit.
« Tu ne pensais tout de même pas que je viendrais seul ? »
Des coups violents frappent la porte.
Une voix autoritaire hurle de l’autre côté.
« Police ! Ouvrez immédiatement ! »
Merde.
Ezra me jette un regard.
« Cours. »
« Quoi ?! »
« Sors par la fenêtre. Maintenant. »
« Et toi ? »
« Je vais les retenir. »
Mon ventre se tord d’angoisse.
Mais je sais qu’il a raison.
Si je reste, je suis fichue.
J’hésite une fraction de seconde, mon cœur menaçant d’éclater dans ma poitrine.
Puis je me précipite vers la fenêtre, l’ouvre et grimpe sur l’échelle de secours.
Derrière moi, j’entends la porte s’ouvrir violemment.
Des voix. Des cris.
Je descends aussi vite que possible, mes mains crispées sur le métal froid.
Je touche enfin le sol et me mets à courir.
Encore. Toujours.
Mais cette fois…
Je suis seule.
CASSANDRAIl dort encore.Je l’observe depuis le seuil, les bras croisés, le cœur lourd.Ilan. Dix-huit ans, et déjà le poids d’un empire sur les épaules. Des épaules trop fines, trop tendues pour un fardeau pareil.Ses traits sont tirés, même dans le sommeil. Un sommeil sans paix. Je le vois aux tremblements légers, aux sursauts.Il lutte. Même dans ses rêves.Je m’approche. Ajuste la couverture sur lui. Puis je me redresse, droite, le regard dur.Ils ne me le prendront pas.Pas tant que je suis là.Je suis sa tutrice légale depuis la mort de sa mère. Un choix que beaucoup n’ont jamais compris. Ni Ezra. Ni Mélina. Ni Cédric.Mais moi, je n’ai jamais oublié ce que je lui ai promis. Ce que je lui dois.Et aujourd’hui, ils viennent pour lui.Dans le salon, mon téléphone vibre. Un numéro connu. Je réponds sans mot, seulement un souffle.— Cassandra, dit la voix grave d’Ezra. On n’a plus beaucoup de temps.— Je sais.— Ils vont tenter de te faire sauter. D’attaquer ta légitimité. Ils ont
ILANLe jour s’est levé, sans éclat, sans chaleur.Je me tiens devant la baie vitrée, immobile, les épaules tendues comme une corde prête à rompre. La ville s’étire devant moi, gris acier, cruelle dans son indifférence. Personne ne sait ce qui se joue ici. Ce qu’on veut m’arracher.Je serre la tasse entre mes mains tremblantes, mais le café a refroidi. Comme moi. Comme tout ce qui m'entoure.Ils avancent leurs pions. Je le sens. Je le vois. Même si personne ne parle. Même si les regards se détournent. Quelque chose s'effondre. Et ce quelque chose, c'est moi.— Pourquoi maintenant ? Pourquoi eux ?Ma voix est un murmure, perdu dans la pièce vide.Mon téléphone vibre. Encore. Je n’ai pas envie de lire. Pas envie de voir ce que la presse dit, ce que les actionnaires pensent. Pourtant je déverrouille l’écran.« Crise de gouvernance : un empire sans capitaine ? »Le titre claque comme une gifle.Ils ont commencé. Les rumeurs. Les fuites. La campagne de sape. Ils me veulent faible. Illégiti
Dans l’obscurité feutrée d’un bureau cossu, loin des regards et des espoirs fragiles qui s’accrochent au jour, une réunion clandestine se tient. La lumière tamisée projette sur les murs des ombres dansantes, reflet trouble des intentions cachées qui s’y trament. L’air est chargé de cette atmosphère lourde, presque palpable, où chaque silence pèse comme un serment scellé, où chaque souffle semble calculé, mesuré, destiné à ne rien laisser au hasard.— CÉDRICL’homme au regard froid, impeccablement vêtu, fait claquer son stylo sur la table en acajou massif, un bruit sec qui tranche le silence comme un coup de fouet invisible. Son visage est fermé, lisse comme un masque sculpté dans le marbre, mais ses yeux trahissent une ambition dévorante, une faim insatiable qui ne connaîtra pas de repos tant que son dessein ne sera pas accompli.— L’enfant est notre clérépète-t-il d’une voix basse, mesurée, presque hypnotique, un mantra destiné à convaincre autant qu’à ordonner— Ce patrimoine ne pe
NOAHLe souffle me manque comme si l’air lui-même refusait de circuler, se faisait lourd, presque tangible. Autour de nous, le danger n’est plus une menace lointaine, il s’est incarné, pesant, palpable, prêt à nous écraser sous son poids invisible. Mon cœur tambourine si fort dans ma poitrine que j’ai l’impression qu’il va éclater, que chaque battement résonne dans mes tempes comme un coup de tonnerre sourd. Ils sont là, tout près, plus proches que je ne le croyais, comme une ombre vorace qui rôde à la limite de notre peau, à la frontière de nos âmes.Je tourne la tête vers Ilan son visage juvénile est marqué par une peur brute, celle qu’on ne devrait jamais voir dans les yeux d’un garçon si jeune. Ses yeux cherchent désespérément les miens, comme s’il espérait y trouver un refuge, une force, un espoir qui lui manque. Ses doigts tremblants s’accrochent à ma main un geste à la fois fragile et urgent, un appel silencieux qui me serre le cœur et me fait vaciller. Je voudrais lui promettr
CASSANDRALe silence s’est alourdi, s’est épaissi jusqu’à devenir presque palpable, comme un voile dense et oppressant étouffant chaque respiration, chaque murmure fragile.La lumière qui filtrait à travers les fenêtres semblait soudain hésiter, vaciller, comme si le jour lui-même s’était figé, suspendu à un souffle incertain.Le temps s’était ralenti, prêt à basculer dans un gouffre invisible et insondable.Ilan, blotti contre Noah, serrait ses doigts avec une force désespérée, comme pour s’ancrer à quelque chose de réel au milieu de ce chaos latent.Ses petits doigts se crispèrent sur la main de Noah, cherchant une stabilité, un refuge contre la tempête qui grondait au-delà des murs.Ezra, figé sur le seuil du salon, paraissait figé dans une attente tendue, le regard absent et fuyant, mais tout son corps trahissait une tension extrême, tendu comme un arc prêt à lâcher sa flèche mortelle.Je savais que je devais demeurer solide, immobile, tel un pilier au milieu de la tourmente.Pour
NOAHLe bateau est un assemblage précaire de brindilles, de ficelles fatiguées et de ruban adhésif jauni.Il tient à peine, mais dans le regard d’Ilan, il prend la valeur d’un vaisseau d’expédition, prêt à affronter les plus vastes océans.— Il flotte, déclare-t-il d’une voix tranquille, presque solennelle. Pas longtemps. Mais un peu.Nous sommes tous deux agenouillés au bord de la baignoire, dont l’eau a été tirée à moitié.Autour de nous, les murs conservent les traces d’un autre temps : éclaboussures de peinture séchée, éclats de bleu écaillé sur les carreaux, et sur une étagère brinquebalante, une armée silencieuse de jouets éclopés.Tout respire l’enfance cabossée, l’imagination comme refuge.Je le regarde, lui. Ce petit être au dos droit, à la mâchoire trop fermée pour son âge.Il a la gravité de ceux qui ont vu l’ombre avant la lumière.— Tu l’as construit seul ?Il hoche la tête, sans détourner les yeux de son esquif.— Clara m’a donné les élastiques. Cassandra, les cartons. L