MasukLe réveil ne fut pas brutal cette fois. Il fut cotonneux, blanc et chimique.J'émergeai d'un sommeil sans rêves, tirée vers la surface par le bip régulier d'un moniteur cardiaque. J'ouvris les yeux. Le plafond n'était pas la roche brute de la grotte, ni le métal du bunker. C'était le plâtre immaculé de l'aile médicale privée.Je voulus me redresser, mais mon corps refusa d'obéir. Je me sentais lourde, comme si mes os avaient été remplacés par du plomb. Mon bras droit était bandé de l'épaule jusqu'au bout des doigts, immobilisé dans une attelle en polymère.« Doucement, » dit une voix grave.Kael.Il était assis dans un fauteuil près de la fenêtre, un dossier numérique sur les genoux. Il le posa immédiatement et s'approcha du lit.Il avait l'air épuisé, mais d'une épuisement sain. Pas de cernes noirs, pas de veines pulsantes. Juste la fatigue d'un homme qui a veillé trois nuits d'affilée.« Combien de temps ? » demandai-je. Ma voix était un murmure ér
Je ne vis pas ma mort. Je vis le Blanc.Une blancheur absolue, silencieuse, qui effaça le froid, la douleur, et la peur. Pendant une seconde qui dura une éternité, je n'étais plus Anya, ni Sorcier, ni Reine. J'étais une particule de lumière en suspension dans le souffle d'une supernova.Puis, la gravité se rappela de moi.Le monde revint avec la brutalité d'un accident de voiture. Le son déchira mes tympans – un grondement titanesque qui semblait venir du centre de la Terre. L'air brûlant me calcina les poumons.Je fus projetée en arrière, poupée de chiffon dans un ouragan de magie pure. Je sentis mes os craquer, ma peau se déchirer, avant de percuter quelque chose de dur.Le noir revint.« ...nya ! »Une voix. Lointaine. Déformée par un acouphène suraigu.« Anya ! Réponds-moi ! »J'ouvris un œil. C'était difficile. Mes paupières étaient collées par quelque chose de visqueux. Du sang ? De la neige fondue ?Je toussai, et une poussière âcre, au goût d'ozone et de cendres, sortit de ma
La Zone Morte ne portait pas ce nom à cause de l'absence de vie, mais à cause de l'absence de règles.C'était une cicatrice géographique de cinquante kilomètres de large, stigmate d'une guerre magique oubliée. Ici, la gravité était une suggestion, pas une loi. La neige ne tombait pas toujours vers le bas ; parfois, elle flottait en spirales, ou remontait vers les nuages gris plombés.« Pas de magie active sauf en cas de contact visuel, » ordonna Vargas à voix basse. Sa voix était étouffée par le brouillard dense qui nous enveloppait. « Si vous allumez une aura ici, vous allez briller comme un phare. Les Échos vont vous tomber dessus. »Nous avancions en file indienne. Vargas en tête, scrutant le sol avec des lunettes thermiques modifiées. Sila derrière lui, tissant un voile d'ombre constant qui nous rendait presque invisibles à l'œil nu. Jax suivait, ses mains dans les poches, jouant nerveusement avec son briquet zippo. Et moi, je fermais la marche, luttant con
Je quittai la Forteresse non pas par la grande porte, mais par les canalisations d'évacuation des eaux pluviales. Une Reine qui rampe dans la boue pour sauver son royaume. L'image était d'une ironie mordante, mais je n'avais plus d'ego. Je n'avais qu'une mission.Dehors, la tempête de neige s'était intensifiée, transformant le monde en un vortex blanc et aveuglant. C'était parfait. Les satellites du Réseau, aveuglés par les interférences magnétiques de la tempête, ne verraient pas ma signature thermique s'éloigner vers l'Est.J'avais rendez-vous à l'Avant-Poste 9.C'était un bar clandestin construit dans la carcasse d'un avion cargo écrasé il y a cinquante ans dans la toundra. Un lieu "Neutre". Un endroit où les bannis du Réseau, les vampires sans clan et les sorciers renégats venaient boire pour oublier qu'ils n'avaient pas d'avenir.J'entrai.La chaleur était suffocante, chargée d'odeurs de tabac bon marché, de sueur de lycan et d'alcool frelaté. Le brouhaha des conversations s'étei
Je ne sais pas combien de temps je suis restée devant la porte ouverte du Coffre vide. Dix minutes ? Une heure ?Le temps n'avait plus de prise. Seul le froid comptait. Ce froid insidieux qui montait du sol métallique pour s'enrouler autour de mes chevilles, me rappelant que le cœur énergétique de la Forteresse – le Cristal Noir – avait disparu.Elias avait gagné. Il avait l'arme absolue. Et il avait brisé le couple royal sans tirer un seul coup de feu.Je finis par bouger. Mes jambes étaient lourdes, mes articulations raides. Je remontai vers la surface, non pas comme une Reine, mais comme une ombre fuyant la lumière.Je ne retournai pas à notre chambre. Je ne pouvais pas affronter le lit vide, les draps encore froissés par son corps, l'odeur de son café du matin qui flotterait encore dans l'air comme un reproche fantôme.Je me dirigeai vers l'infirmerie.Martha était là, allongée sur un lit blanc, reliée à un moniteur cardiaque. Zander était à son
2h55 du matin.Le réveil numérique projetait ses chiffres rouges dans l'obscurité de la chambre, un compte à rebours silencieux vers ma damnation.Kael dormait sur le dos, un bras jeté sur ses yeux pour se protéger d'un rayon de lune imaginaire. Il respirait avec cette confiance absolue des êtres qui se savent en sécurité.Je me tenais au bord du lit, habillée de noir, mes mains tremblant tellement que je dus les serrer l'une contre l'autre pour les calmer.Je devais récupérer la Clé.Pas une clé physique. Le sceau du Niveau -5 était biométrique et magique. Il répondait à deux signatures : la mienne (Sorcier Suprême) et la sienne (Alpha). Pour ouvrir la porte sans déclencher l'alarme générale qui réveillerait la Forteresse, j'avais besoin de son empreinte aurique.Je m'approchai de lui. Mon cœur battait si fort que j'avais peur qu'il l'entende.Je tendis la main vers son poignet, là où son pouls battait, là où son aura affleurait sous la peau. Je sortis un petit cristal de transfert –







