LOGINJulienCinq jours. Cinq jours sans un signe, après cette nuit au bar où je l'ai vue se consumer. Ma propre stratégie se retourne contre moi. L'attente, que je croyais être mon arme, devient mon supplice. Son silence est un vacuum, un mépris bien plus efficace que toutes les provocations.Mon bureau, autrefois mon royaume, ma forteresse de verre et d'acier, est devenu une cage. Parfois je suis son stagiaire et parfois le PDG d'une multinationale .Les chiffres sur les écrans dansent, dépourvus de sens. Les réunions ne sont qu'un bruit de fond à l'obsession unique qui ronge mes pensées. Où est-elle ? Que fait-elle ? A-t-elle déjà trouvé un autre pour éteindre l'incendie que j'ai allumé ?L'orgueil me dit qu'elle pliera. Qu'elle reviendra. Mais une voix plus sombre, une que je reconnais à peine, chuchote qu'elle est différente. Qu'elle est capable de la même froideur calculatrice que moi.Et puis, l'invitation arrive.Pas un SMS suppliant, pas un appel nocturne. Une enveloppe en papier é
CamilleTrois jours. Soixante-douze heures peuplées de fantômes. Le monde a perdu ses couleurs, ses saveurs. Les conversations ne sont plus que du bruit, la nourriture, du carton. Je fonctionne en pilote automatique, mon corps effectuant des tâches que mon esprit a désertées. Mon esprit est ailleurs. Il est resté scellé dans l'habitacle de cette voiture, dans le noir huileux de cette nuit, sous le poids de ses mains et de son regard.Mon téléphone est un objet de torture. Je le scrute, le caresse, le déteste. Chaque vibration, chaque notification anodine fait mon cœur se serrer, puis s'écraser dans un mélange de déception et de soulagement. Pourquoi ne m'a-t-il pas contactée ? Est-ce le dédain de celui qui a conquis et qui passe à autre chose ? Ou le calcul de celui qui sait que l'attente est une lame plus tranchante que l'assaut ?La marque à mon cou pâlit. Je la traque dans le miroir, matin et soir, avec une angoisse grandissante. Sa disparition serait une trahison, l'effacement de
JulienLe jour se lève, gris et implacable, derrière les baies vitrées de mon loft. Il ne lave rien. Il salit. Cette lumière crue et sans pitié souille la sacralité de la nuit. L'air est immobile, lourd du silence qui a suivi son départ. Un silence que je croyais victorieux et qui n'est que le vide après l'explosion.Je marche dans les pièces, nu-pieds sur le béton froid. Mon corps est un fil tendu à craquer, chaque muscle un souvenir de sa présence. Je passe la main sur le cuir du canapé, là où je l'ai jetée, où elle s'est offerte avec cette fureur si proche de la haine. Je cherche une trace, une empreinte de chaleur, un parfum résiduel. Rien. Seule la mémoire, une pellicule brûlante qui se rejoue en boucle derrière mes paupières.— Tu me tiens.Ses mots. Un souffle à peine audible, chargé de défaite et de triomphe. Un aveu qui était une déclaration de guerre. Elle a cru capituler. Elle ne comprend pas qu'en se rendant, elle a pris le contrôle. Elle s'est glissée sous ma peau, dans l
JulienLa voiture fend la nuit huileuse, un cocon d'acier et de verre où le seul bruit est le ronronnement feutré du moteur et le souffle rauque que je retiens au fond de ma gorge. À mes côtés, elle est un spectre silencieux, son front contre la vitre froide, son reflet pâle traversé par les réverbères qui défilent comme des âmes en peine. Je garde une main négligente sur le volant, l'autre, lourde de possession, sur sa cuisse. La soie fine de sa robe est un mensonge sous ma paume ; je sens le muscle frémir, la chaleur de sa peau traverser l'étoffe. Une possession tranquille, animale. Elle ne sursaute pas. Juste un frisson, une onde sismique qui part de son corps et vient mourir contre le mien, et le tissu se tend imperceptiblement sous mes doigts.— Tu veux que je te dépose où ?Ma voix est un gravier rauque, plus grave, plus éraillée que je ne le voudrais. Elle trahit l'adrénaline qui coule encore dans mes veines, le goût de fer de la conquête.Elle tourne la tête avec une lenteur d
JulienLe son qu’elle a étouffé contre mon cou résonne encore dans mes os. C’est l’écho d’une victoire que je n’avais pas anticipée, la preuve que je l’avais brisée, mais que c’était pour la reconstruire en quelque chose de plus vrai, de plus sauvage. La sentir s’effondrer contre moi, vulnérable et vibrante, est une puissance plus enivrante que n’importe quel pouvoir.Je la serre plus fort, un grognement sourd au fond de ma gorge. Mes mains parcourent son dos, sentant les derniers frissons de son orgasme se dissiper sous ses vertèbres.— Regarde-moi, Camille, j’exige, la voix rauque, empreinte d’une autorité que la passion n’a fait qu’aiguiser.Elle soulève un visage marqué par l’abandon, ses yeux noyés, la bouche légèrement tuméfiée par mes baisers. Je plonge mon regard dans le sien, sans permission, et j’y vois les décombres fumants de sa défense. C’est le plus beau spectacle de ma vie.— Tu vois ? murmuré-je en traçant la ligne de sa mâchoire avec mon pouce. Tu vois ce que tu es qu
CamilleSon baiser n’est pas une question, c’est une revendication. Une réponse définitive à tous les regards volés, à tous les frémissements étouffés. Quand ses lèvres rencontrent les miennes, un silence assourdissant envahit mon crâne, annihilant les derniers murmures de la raison.Je succombe.Non pas avec la résignation de la défaite, mais avec la fureur de la libération. Mes bras, qui s’étaient tenus croisés en rempart, se dénouent et s’enroulent autour de son cou, l’attirant plus près, abolissant le dernier millimètre qui nous séparait. Un son rauque, presque un grognement, s’échappe de sa gorge, et la main qui était sur ma tempe s’enfonce dans mon chignon, libérant mes cheveux dans un bruissement de soie.Le monde se réduit à cette sensation. À la pression habile et insistante de sa bouche, à la saveur de café et de pure audace qui est la sienne. C’est un assaut, et je rends chaque coup, mordillant sa lèvre inférieure, goûtant le sel sur sa peau. Mes doigts s’enfoncent dans ses







